Conseil communal d'Ypres.
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Séance du 12 Octobre 1889.
Sont présents: MM. Bossaert, de Stuers,
Brunfaut, Beaucourt, Gravet, Gaimant, Ver-
meulen, Poupart, Verschaeve, Yan Daele et
Colaert.
lia séance est ouverte 5 heures.
La parole est accordée M. Vermeulen.
L'honorable Conseiller s'exprime comme suit:
J'ai demandé la parole pour présenter un pro
jet d'adresse la Cnambre, protestant contre le
projet de loi déposé, qui a pour objet la suppres
sion des capacitaires de droit et demandant la
revision de l'art. 47 de la Constitution.
Je prévois que, comme précédemment pour
éviter de devoir prendre une décision, on soulè
vera l'incompétence sous prétexte que la ques
tion est d'intérêt général et non communal. C'est
pourquoi je veux tout d'abord établir que la
question est d'intérêt communal et tombe par
faitement dans nos attributions.
11 est hors de conteste que la ville d'Ypres a
un intérêt matériel direct ce que le plus grand
nombre possible de ses administrés capables prési
de au choix des administrateurs de ses deniers.
Il est hors de conteste que la ville d'Ypres a
un intérêt moral immense ne pas laisser priver de
leurs droits politiquescent quarante-huit de ses conci
toyens des plus aptes et des plus dignes. Cette priva
tion, dans l'état actuel de nos lois et de nos
moeurs est un outrage et une peine infligés seule
ment aux indignes, aux assassins, aux banque
routiers et aux tenanciers de maisons de dé
bauche.
Il est indiscutable que pour les habitants
d'Ypres il est d'un intérêt capital que l'on ne
mutile point le corps électoral pour assurer la
domination du clergé. Il est certain que le projet
de loi vise la conquête des Administrations com
munales des villes pour permettre au clergé de
les dominer comme c'est déjà le cas pour la plu
part des villages où toute liberté, toute initiati
ve individuelle, tout contrôle sérieux a disparu.
Que d'ailleurs ce droit pour le Conseil com
munal d'Ypres, de s'occuper et de délibérer en
cette matière, est prouvé par le fait que chaque
jour dans toutes les villes du pays et, les plus
petites et les plus grandes, les Conseils Commu
naux exercent ce droit.
Je veux prouver que non seulement nous
avons le droit de délibérer mais que nous en
avons le devoir. Qu'en effet, les Conseillers com
munaux eux-mêmes capacitaires de droit et élus
aussi bien par les capacitaires de droit que par
les autres électeurs, ont un devoir sacré de pro
tester contre l'attentat projeté. Quand on a
sollicité les suffrages des électeurs et promis de
toutes les façons imaginables de défendre leurs
intérêts, il est malhonnête de manquer sa
parole.
Mais il y a plus la part laissée au travail
dans notre régime électoral est trop restreinte.
Témoin les événements graves et déplorables de
ces dernières années. Le projet supprime la fai
ble part laissée l'élite de nos travailleurs.
Pour nos classes laborieuses, tant éprouvées par
les transformations des conditions économiques
de la société, le spectacle de ces tripotages inces
sants, de ces manipulations intéressées, sans
cesse renouvelées de la loi électorale, en dehors
d'eux et contre eux, est dangereux et immoral.
Il importe que, une fois pour toutes, cela cesse
et que l'électorat soit assuré d'une façon stable,
au-dessus de toute entreprise hostile, tout
Belge capable de l'exercer avec discernement et
avec dignité. C'est mû par ce sentiment profond
du devoir qui nous lie envers ces 148 dignes con
citoyens, capacitaires de droit non censitaires,
qui ont contribué nous élire et dont on veut
ravir les droits, que nous devons protester et
demander la revision de l'art 47 pour y inscrire
l'adjonction de la capacité du cens tel que le
comporte le pacte de paix que viennent de con
clure nos amis de Bruxelles.
Notre honorable collègue M. Vermeulen m'a
informé de la proposition qu'il comptait faire,
me priant de la porter l'ordre du jour de la
séance.
J'ai cru devoir répondra que je m'abstiendrais
d'en saisir le Conseil.
Les raisons qui m'ont déterminé demeurent
encore debout après les développements de M.
Vermeulen qui ne m'a pas convaincu.
La question soulevée par l'honorable Conseil
ler est, quoi qu'il en prétende, une question d'in
térêt général.
Or, les Conseils Communaux, la loi le dit,
n'ont qualité pour régler que ce qui est d'inté
rêt communal, et ne peuvent délibérer sur d'au
tres objets que pour autant qu'ils en soient
régulièrement saisis par l'autorité supérieure.
A diverses reprises, nous avons vu certains
corps délibérants, notre Conseil Provincial en-
tr'autres, agiter des questions qui n'étaient pas
de leur ressort ou émettre des vœux en faveur
de tel ou de tel projet de loi. Eh bien! nous les
avons blâmés. Et avec raison, croyons-nous....
Qu'est-ce qu'un Conseil Provincial avait voir,
par exemple, dans la question du rétablissement
de nos relations diplomatiques avec le St. Siège?
C'était affaire de la législature et du gouverne
ment. Non la sienne. Il y avait là une confu
sion évidente d'attributions dans laquelle, pour
notre part, nous n'avons pas voulu verser notre
tour. Il faut que chacun sache rester sa place,
dans sa sphère, et les Conseils Communaux ne
sont pas des parlements au petit pied. Voyez-
vous ces Conseils se mettre en mouvement et dé
libérer chaque fois qu'un projet de loi sera en
vue car il n'y a pas quasi de loi qui, d'une fa
çon ou d'autre, sous un rapport ou sous un autre,
ne puisse être considérée comme touchant, de
près ou de loin, l'intérêt communal.
On objecte l'exemple d'autres Conseils. Jus
qu'ici, ces exemples sont rares. Il n'y a, ma
connaissance, que Bruxelles, Liège et un village,
Comptich, je crois, qui se soient occupés de la
question soulevée. Encore le Conseil de Liège
n'a-t-il jusqu'ici, pris aucune décision.
Mais en supposant que tous les Conseils Com
munaux du pays se mettent délibérer au sujet
du projet de M. Devolder,les uns pour le blâmer,
les autres pour l'approuver, qu'arrivera-t-il?
C'est que les résolutions dans le dernier sens se
ront bien plus nombreuses que les autres, étant
donné qu'il y a, dans le pays, plus de Conseils
Communaux cléricaux que libéraux.
Est-ceàdire, Messieurs,qu'ilne faille rien faire?
Non pas
Pas un de nous ici présents, part, j'imagine,
l'honorable M. Colaert, qui ne se formalisera
pas de l'exception, pas un, dis-je, qui ne songe
protester.
Nous protesterons, car il y a, dans un intérêt
évident de parti, menace d'atteinte ce qu'on
doit considérer comme étant un droit acquis.
Mais, cette protestation, nous la formulerons
ailleurs et en une autre qualité.
Nous protesterons comme citoyens et comme
libéraux, et cela doit suffire.
Pour conclure,jo ne voterai pas, pour ma part,
l'adresse soumise par M. Vermeulen, notre dé
libération d'autant moins que, côté de la
Srotestation contre le projet attentatoire la loi
e 1883, il y a l'émission d'un vœu en faveur de
la revision, hier encore très discutée, de l'art. 47
delà Constitution, revision dont je ne suis pas
partisan, pas plus aujourd'hui qu!hier.
Et maintenant, Messieurs, passons au vote.
M. Vermeulen, en plaidant la compétence du
Conseil, a invoqué l'exemple donné par la ville
de Bruxelles. Mais cela ne prouve absolument
rien.
Je l'ai dit, je m'attendais voir invoquer l'in
compétence. C'est d'ailleurs un usage constant
au tribunal, propos de tout, de recourir ce
moyen, quand on redoute de prendre une déci
sion ou d'avoir un jugement défavorable.
Je m'étonne qu'on ose parler encore d'incom-
étence en présence de ce qui se passe ailleurs,
ans d'autres villes.
D'ailleurs en saisissant la Chambre de notre
protestation et de notre demande de revision,
nous saisissons le pays, l'opinion publique qui
est souveraine, que l'on ne trompe point long
temps et qui est toujours compétente. Si là
Chambre passe outre, le pays la cnassera.
Je demande de donner lecture de mon projet
d'adresse.
L'honorable membre s'étonne de l'attitude
prise par M. Colaert. Il trouve au moins étran
ge que cet honorable préopinant qui, comme
tous ses collègues, représente aussi bien les élec
teurs capacitaires que les autres, ne proteste pas
contre les projets du ministère et ne défende pas
ses mandants
Après autorisation par M. le Président dé~ïà
lecture du projet et de nouvelles observations
entre divers membres, le Conseil décide par neuf
voix contre trois qu'il n'y a pas lieu de délibérer
sur la proposition de M. Vermeulen.
Interpellation.
L'honorable membre espère que, malgré ces
refus, le Collège n'abandonnera pas la question
du laboratoire et qu'il fera de nouvelles démar
ches pour obtenir l'intervention pécuniaire des
pouvoirs publics. Il demande quelles sont, cet
égard, les intentions du Collège.
Assurément, cette affaire a subi un temps
d'arrêt, le Gouvernement ayant fait connaître
que la question de l'intervention pécuniaire de
l'Etat dans les frais d'organisation de labora-
toires communaux, ne pourra être étudiée
qu'après le vote de la loi sur les falsifications
h des denrées alimentaires qui sera prochaine-
ment déposée aux Chambres législatives.
Mais, malgré cette déclaration faite au nom
du gouvernement par M. le Ministre de l'Agri
culture, le Collège n'a pas perdu l'espoir d'arri
ver une solution favorable. Tout récemment
encore il a fait de nouvelles instances auprès de
l'autorité supérieure et insisté pour avoir une
prompte réponse en vue de la formation du pro
chain budget.
Il est pris acte des déclarations de M. le
Président.
Communication.
Avant d'aborder l'ordre du jour, M. le Prési
dent fait connaître au Conseil que les instances
faites par la ville en vue de la reprise par l'Etat
d'une partie de la voirie communale (rue d'El-
verdinghe, place Vandenpeereboom et rue de
l'Anguille) n'ont pas abouti. Les motifs du refus
de l'autorité supérieure sont exposés dans un
rapport de M l'Ingénieur en chef-directeur des
ponts et chaussées de la province dont une copie
est au dossier.
L'Administration allègue que le pavage des
rues dont s'agit est dans un état déplorable et
qu'il faudrait uue dépense de fr. 20,000-00 envi
ron pour le rétablir dans des conditions normales.
L'Administration nie aussi que le roulage se
fasse en grande partie par la rue d'Elverdinghe.
Elle reconnaît que le roulage y est plus actif
que jadis, au temps où la rue d'Elverdinghe
était un cul de sac mais cependant les charre
tiers et voituriers n'ont pas complètement aban
donné la route ordinaire qui emprunte la rue des
Bouchers, la rue du Temple et la rue au Beurre.
Cette communication donne lieu un échange
d'observations entre divers membres au sujet de
l'état de la voirie dans certaines rues de la ville.
Ordre du jour
Passant l'examen des affaires inscrites l'or
dre du jour, M. le Président donne connaissance
au Conseil du procès-verbal de vérification de la
caisse communale dressé le 9 du courant mois
par M. l'Echevin Cornette.
L'encaisse s'élevait fr. 31,196-18.
Le Conseil prend acte de cette communication.
Le Conseil approuve ensuite le procès-yferbal
de l'adjudication publique en date du 29 Août
dernier, du produit des noyers croissant sur la
partie des chemins de ronde intérieur et exté-
M. le Président répond
M. Colaert appuie les observations présentées
par M. le Président quant la compétence du
Conseil. Il s'oppose ce que lecture soit donnée
par M. Vermeulen de son projet de protestation.
Avant de décider s'il y a lieu ou non d'envoyer
la Chambre le projet de protestation dont M.
Vermeulen demande donner lecture nous
avons examiner au préalable, dit-il, s'il y a
lieu pour le Conseil, ae s'occuper de la question
soulevée par cet honorable membre.
M. Vermeulen
M. Gaimant rappelle que le Conseil a inscrit
au budget de la ville pour 1889 un crédit relati
vement élevé pour l'établissement d'un labora
toire industriel et agricole. On avait même
escompté les subsides de l'Etat et de la provin
ce. Ces subsides ont été refusés, paraît-il.
M. le Prêsidenl répond que la qùestion soule
vée par M. Gaimant n'a pas été perdue de vue
par le Collège.