La justice cléricale. Pleurs et Fleurs. La Guigne. Et si le Journal ou M. Uveins ne nous croit pas, nous lui offrons de publier la liste des ca- pacitaires décapités par nos maîtres on en verra de belles outre la suppression des offi ciers. La livraison de Juillet 1888 de la catholique Hevue Générale contenait un article de M. VVoeste, qui est la fois le chef de la droite et son mauvais génie. Cet article, écrit sous l irapression des deux batailles électorales des 12 et 19 Juin, conviait le parti clérical accentuer sa politique réac tionnaire et couronner ses tristes exploits législatifs par une réforme électorale. Nous avons recherché ce passage, et ne pou vons résister au désir de le reproduire On dira Mais voilà précisément le dan- ger les catholiques sont trop forts ils sui- vront une ligne de conduite extrêmeI Ceux qui raisonnent ainsi traitent le parti conser- vateur comme s'il représentait des passions ou des intérêts exclusifs. Il personnifie au contraire une cause et des principes; la cause et les principes sont connus ils ont pour objet le maintien scrupuleux de nos institu- lions et des libertés publiques. Dans les ap- plications dontees principes sont susceptibles, les conservateurs n'oublient jamais que le pays ne leur appartient pas tout entieret quil est dès lors aussi rationnel qu'équitable de faire la part des préoccupations et des préférences de leurs adversaires c'est assez dire qu'ils ne se laisseront pas réduire l'in- action, mais que leur politique, poutètre ferme, n'en sera pas moins prudente et mo rt dèrèe. Pas d intolérance; pas de représailles justice pour tous mais aussi satisfactions nouvelles données l'esprit conservateur dans l'ordre social et dans l'ordre politique extension des droits des citoyens revision de nos lois électorales dans leurs dispositions les plus critiquables. Voilà ce que sera cette politique. Lecteurs, avez-vous bien lu, bien pesé cha que mot L'opinion publique s'occupait assez peu, au mois de Juillet 1888, de la coquinerie électo rale méditée par les cléricaux. Elle n'en con naissait pas, comme aujourdhui, les odieux détails. Mais M. VVoeste, qui déjà la machinait et en poursuivait l'élaboration dans les conci liabules secrets de la droite, cherchait la présenter et l annonçait au public comme une oeuvre de modération et de justice. Pas de représailles justice pour tous extension des droits des citoyens politique prudente et sagement conservatrice. Voilà ce que l'homme néfaste, dans sa perfide hypo crisie, promettait au nom de son parti. On croit rêver, en comparant ces insidieuses promesses leur triste et révoltante réalisation. Jamais le triste aphorisme de Machiavel, que la parole a été donnée l'homme pour dégui ser sa pensée, n'a reçu application plus cynique et plus scandaleuse. Electeurs capacitaires de droit. Vous qui constituez en grande majorité la fiartie éclairée du pays et qui marchez 'avant-garde de la nation Belge dans son évolution vers le progrès et la liberté. Brillante légion de travailleurs, qui croyez trouver dans votre intelligence, dans vos capa cités, dans votre expérience, des titres 1 élec toral autrement respectables que ceux que confère l'impôt. Ministres, anciens ministres, mandataires du corps électoral, académiciens, ingénieurs, professeurs, anciens officiers et sous-officiers de larmée, lauréats des concours, contre maîtres et portons, principaux artisans de la gloire et de la richesse du pays, c'est au nom de la justice,entendez-vous,"que l'on vous ravit la qualité de citoyen en vous enlevant le droit de vote C'est au nom de la justice, entendez-vous, sans représailles, pour faire cesser le règne de l'intolérance, que l'on vous assimile aux condamnés de Cour d assises et aux tenanciers de maisons malfamées Vous êtes pauvres, et le trésor public ne vous compte pas parmi ses débiteurs directs Marchez de pair avec tous les incapables et tous les indignes Ne faut-il pas donner de nouvelles satis- factions l'esprit conservateur dans l'ordre social et dans l'ordre politique Eh quoi vous n'êtes pas inscrits au rôle des contributions et vous voudriez compter comme citoyen Quelle inconcevable prétention Arrière, Belges de contrebande, et place aux citoyens seuls dignes de ce nom, ceux qui possèdent, ne fût-ce qu'un pouce de terrain Pour ceux-là, M. Woeste est plein de solli citude. II réclame l'extension de leurs droits. En Juillet 1888, nous ne savions pas encore ce que cela voulait dire, nous ne le savons que trop aujourd hui. N'était i 1 pas honteux de voir que nos bra ves paysans, si doux, si obéissants aux ordres du clergé, ces brebis si dociles, si pénétrées des besoins et des aspirations du pays, étaient tenus éloignés des urnes électorales Le pays tout entier en souffrait, il fallait guérir cette plaie et réparer celte criante injus tice. Ne sont-ce pas des citoyens, de vrais ci toyens, ceux-là Et l'on a écrit dans le projet de loi que tous les propriétaires, quel que soit le cens qu'ils paient, seront électeurs. L'iniquité sera donc réparée. De vrais hommes d ordre vont naître la vie publique. Quant aux anciens ministres, ces ramollis quant aux conseillers communaux et provin ciaux, ces brouillons quant aux anciens ser viteurs du pays, ces polichinelles; quant aux ingénieurs, aux professeurs, aux lauréats des concours, ces incapables quant aux contre maîtres et aux porions, ces instruments serviles dans les mains des patrons, qu'ils s'en aillent. Justice pour tousa dit M. Woeste. i"1 L'année 1889 aura été bien remplie d'inci dents et d'accidents gais et tristes sans compter ceux qui peuvent se produire pendant les quarante-trois jours qu'elle a encore four nir avant de remettre ses pouvoirs son héri tière. Reste savoir si celle-ci acceptera sa succession, sauf sous bénéfice d'inventaire, car, si l'on en excepte le centenaire de 1789, cette splendide man+festa+tOB- de la liberté et du travail, le boni du budget du millésimé qui va nous quitter ne sera pas aussi gros que la liste en est longue elle est remplie, part les cen tenaires et les cinquantenaires, de congrès, d'expositions, de mesures contre l'alcoolisme, de procès scandaleux, déconsidérant le pouvoir. La révolution et la république brésilienne, les grèves, les brochures de toutes les couleurs, dont la gamme va du blanc au noir; et les Adam de malheur, les Pourbaix, les Nieter, la catas trophe d'Anvers une série de réformes socia les mort nées tout y abonde. J'en passe et des meilleures. On nous demandera si notre pessimisme va jusqu'à ne rien trouver de bon ici bas. Pardon j'ai ouvert la nomenclature des méfaits, sinistres et accidents sociaux par un grand fait qui seul suffirait pour immortaliser un siècle, je la ter minerai en exaltant un centenaire bien plus intéressant que toutes les dates célèbres. Celle-ci nous vient de Chine, ce qui est une garantie de bonté. Pardon. Et quelle est- elle, me direz-vous? Une fleur que nous don na, il y a cent ans, l'empire du milieu: le Chrysanthème, le jubilaire, toujours frais et jeune, malgré son âge, qui s'étale dans de brillantes expositions, sous les couleurs frater nelles de toutes les nations, comme un symbole de paix. Et tandis que, se préparant des guerres sanglantes en perfectionnant et en fourbissant des armes meurtrières, on se perdait la recherche du meilleur fusil, la fleur, toujours douce et pacifique, doublait ses pétales et se montrait dans tout son éclat. Il a vraiment de la guigne, dit la Meusece pauvre ministère dont la divine Providence nous a gratifiés l Un beau jour, voilà MM. Beernaertet Devol- der qui veulent se faire passer pour sauveurs de la société Ils s'abouchent avec de miséra bles mouchards pour découvrir les fils d un noir complot qui n'existe que dans leur imagination; et voilà que ces mouchards, pour gagner honnêtement leur argent, organisent eux-mêmes le complot qu'ils doivent dévoiler, font tomber de malheureux ouvriers dans le traquenard et finissent par se faire pincer comme agents pro vocateurs Ces excellents amis du ministère sont aujourd'hui en Cour d'assises Un autre jour, les ministres créent des secré taires volants ce sont de petits jeunes gens bien pensants qui ont accès dans tous les bureaux, dans tous les tiroirs des ministres, et qui sont chargés de surveiller les vieux fonc tionnaires des départements ministériels. On les fait avancer rapidement au mépris de tous les droits d'ancienneté des autres fonction naires on les bombarde inspecteurs, direc teurs, etc., après quelques années de service, et quels services l on les couvre de déco rations de toute espèce et voilà le plus intel ligent, le plus choyé, le plus haut placé et le plus chamarré de ces secrétaires volants ui s'avise de prendre son litre au sérieux, fait isparaître des documents des archives du ministère, les communique des journaux étrangers, trahit le gouvernement et reçoit, paraît-il, de gros pourboires pour ses petits services I H est temps que cela finisse et que la Belgi que se débarrasse, au plus tôt, comme la France, des Wilson, des Limouzin, des cafards et des Cafarels I L'Etoile donne en ces termes une nouvelle sur l'importance de laquelle il est inutile d'insister On a dit et répété, ces jours derniers, que le ouvernement français était prêt renouveler Union latine, qui expire la fin de l'année pro chaine. Cela est vrai, mais il y a un mais là France imposera comme condition le règle ment immédiat de la situation. Cela veut aire que nous devrons rembourser en or nos co- contractants l'excédant de nos écus d'argent, en circulation dans le pays de l'Union. La perte qui en résultera pour nous peut s'éva luer, sans exagération, 40 millions. Ce n'est pa3 là une nouvelle en l'air ou un simple bruit que je vous rapporte sans contrôle. Je puis vous affirmer, sur la foi d'une des plus hautes autorités de Paris, que telles sont les intentions du gouvernement fiançais. La Banque de France ne sait plus que faire des écus belges. Elle en a pour pour deux cents millions. Le triage est fait, et notre argent est là, prêt nous etre rendu contre de For. Je viens de dire ce que nous coûtera cet échange obli gatoire. M. Beernaert avait dit naguère qu il con stituerait une caisse de réserve pour parer

HISTORISCHE KRANTEN

Le Progrès (1841-1914) | 1889 | | pagina 2