IX0 18. Dimanche,
50e ANNÉE.
2 Mars 1890.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Chemin de fer.
Désorganisation
de l'enseignement.
Aumônerie militaire.
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
YPRES-FURNES.
FURNES-YPRES.
La loi du 20 Septembre 1884 a eu pour but
de désorganiser l'enseignement primaire com
munal. La dispense accordée certaines com
munes, de l'obligation de maintenir toute école
primaire communale a été l'un des moyens
auxquels on a eu recours pour arriver au ré
sultat que l'on avait en vue.
Ce qui a été fait dans cette voie est vraiment
inouï. Il y a aujourd'hui 250 communes, habi
tées par 352,853 personnes, qui n'ont plus
aucune école primaire communale. Et ce ne
sont pas là de petites communes.
76 ont de 1000 2000 habitants.
33 2000 3000
11 3000 4000
7 4000 5000
3 5000 6000
Wyngene a plus de 8000 habitants.
On prétend, il est vrai, que les écoles suppri
mées étaient désertes. Cet argument n'est pas
sérieux.
Il faudrait pour qu'il eut de la valeur, prou
ver que les populations étaient hostiles ces
écoles. Cette preuve on ne la fournira pas.
Les écoles communales auraient été fréquen
tées comme elles l'ont été sous le régime de la
loi de 1842, si on n'avait pas continué, contre
l'enseignement officiel, la guerre commencée
après la mise en vigueur de la loi du 1r Juillet
1879.
Ce que nous avançons est établi par le fait
suivant qui se produit fréquemment
Une commune possède une école primaire
communale et une école primaire adoptée la
première de ces écoles n'est fréquentée que
par quelques élèves, la seconde est suivie par
un grand nombre d'enfants. L'instituteur de
l'école communale meurt il est remplacé par
l'instituteur de l'école adoptée immédiatement
tous les enfants de lecole adoptée passent
l'école communale. Les parents ne sont donc pas
hostiles ces écoles. Des que le clergé ne me
nace plus les pères de famille de la damnation
éternelle, dès qu'on ne menace plus les parents
de porter atteinte leurs intérêts matériels, les
écoles communales se remplissent comme par
enchantement.
Donc, si les écoles communales supprimées
étaient peu fréquentées, c'est qu'on avait vio
lenté la liberté des parents si celte liberté
a été enchaînée, c'est qu'il fallait se débarrasser
des instituteurs restés fidèles leur serment
pour les remplacer par ceux qui n'avaient pas
rougi de passer l'ennemi.
Ce qu'on a fait en vue de produire le vide
dans les écoles communales et de se débarras
ser des instituteurs est réellement incroyable.
Là où la pression morale n'exerçait pas le
résultat désiré, là où on ne pouvait pas léser
matériellement les parents, on a eu recours
d'autres moyens on a accordé des prix aux
élèves des ecoles adoptées, les enfants des éco
les communales n'ont rien ou presque rien
reçu, les rétributions scolaires ont été fixées
un taux plus élevé dans les écoles commu
nales que dans les écoles adoptées, on a reçu
gratuitement dans ces écoles les enfants aux
quels la commune refusait l'instruction gra
tuite dans les établissements communaux. Des
conseillers communaux cléricaux ont décidé de
ne pas porter l'enseignement de la religion au
programme scolaire, afin de permettre au clergé
de continuer tonner contre les écoles officiel
les. D'autre part on traquait les instituteurs.
On a puni, révoqué injustement beaucoup
d'entre eux. C'est le rapport triennal sur l'en
seignement primaire qui nous l'apprend.
Au §112 p. CXXI, on trouve que les députa-
lions permanentes ont refusé d'approuver 10
suspensions avec privation de traitement pro
noncées contre des membres du personnel en
seignant, 6 mises en disponibilité par mesure
d'ordre, 19 révocations; que le gouvernement
a annulé 2 mise? en disponibilité par mesure
d'ordre et 10 révocations. Voilà donc en trois
ans 47 punitions des plus graves prononcées
arbitrairement par les conseils communaux.
En présence de procédés aussi blâmables, on
peut se faire une idée des humiliations et des
tracasseries auxquelles les anciens instituteurs
communaux sont soumis. On peut également
se rendre compte du peu d'empressement que
beaucoup de communes rurales apportent
l'accomplissement de leurs devoirs en matière
d'enseignement. Le rapport triennal fournit des
renseignements très intéressants ce sujet.
Nous y lisons
Dans un grand nombre d'écoles il faudrait
également remplacer ou compléter l'ameu-
blemenl ou l'outillage didactique.
En effet, le tableau inséré aux Annexes.
pages 214 et 215, en indique 793 qui n'ont
pas le matériel indispensable pour l'enseigne-
ment de la géographie 1142 qui ne possè-
dent pas une seule collection de tableaux
pour l'enseignement intuitif, et 270 où l'on
ne dispose pas même d'une série complète
de poids et mesures. Les administrations
communales reconnaissent pour la plupart
la nécessité d'améliorer cet état de choses,
mais elles n ont ordinairement pas assez de
ressources pour compléter l'outillage scolaire
sans d'importants subsides de l'Etat et de la
province. Une charge qui leur incombait
directement mais laquelle plusieurs sont
parvenues se soustraire, est celle de la
dépense faire annuellement pour le menu
entretien des salles d'école et du mobilier.
A cause de l'insuffisance ou de absence des
crédits relatifs cet objet, le badigeonnage
et le nettoyage des classes ne se font pas
régulièrement.
Le gouvernement tolère cette situation, il
laisse faire. Rien d'étonnant alors de constater
le résultat auquel on a abouti.
L'aumônerie militaire belge a été rétablie
par le vote du budget de la guerre de 1889, qui
allouait un crédit spécial pour ce service
l'organisation en a été réglée par un arrêté
royal du 13 Septembre de la même année.
Cet arrêté porte, entre autres mesures, que
les aumôniers et desservants militaires sont
désignés par les évêques qu'ils touchent un
traitement déterminer qu'ils ont libre accès
partout où il y aura des militaires ils sont
assimilés enfin aux officiers subalternes. En
d'autres termes, ils ont la liberté de faire ce qui
leur plaît, et les officiers supérieurs n'ont au
cun moyen de réfréner leur intervention, même
si elle devenait excessive.
Le rétablissement de ce service répondait-il
une nécessité? Evidemment, non. (tomme
l'a dit M. Bara dans son discours du 7 Février,
il n'y a eu aucune pétition adressée la Cham
bre ce sujet, et cependant nous savons si les
cléricaux en sont prodigues. La vérité est qu'on
a obéi, comme toujours, aux ordres de l'epis-
copat.
Nous ne ferons pas l'historique de la ques
tion nous dirons seulement qu'en France,
chaque fois qu'on a rétabli l'aumônerie, on a dû
la supprimer peu de temps après, par suite des
abus des aumôniers ou en raison de leurs exi
gences sans cesse croissantes.
Il n'est point difficile de prévoir ce que sera
l'aumônerie belge. Le clergé y fera de la politi
que outrance, comme il en fait dans la vie
civile. Ses moyens de propagande seront con
sidérables il donnera des conférences, des
instructions dans les chambrées; il interviendra
dans le choix des livres de la bibliothèque il
répandra volonté des brochures, etc. Tous ces
moyens d'action sont puissants et, comme ils
sont continuels, leurs résultats peuvent être
sans limite.
Les aumôniers feront évidemment le triage
des bons et des mauvais soldats, non au sens
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Ypres, le lr Mars 1890.
Flandre libérale).