L'aventure de l'Ai
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Chemin de fer.
La loi de honte.
Les grèves.
i\° 42. Dimanche,
51e ANNÉE.
24 Mai 1891
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
YPRES-FURNES.
FURNES-YPRES.
Yprea, le 23 Mai 1891.
La revision n'est donc plus aujourd'hui qu'une
question de temps, mais il reste encore bien
de formalités parlementaires accomplir avant
que celle-ci ne soit un fait définitivement
accompli. La Gazette les énumère brièvement
comme suit
1° Réunion nouveau de la section centrale
pour entendre et approuver, s'il y a lieu, le rap
port de M. de Smet de Naeyer
2° Mise l'ordre du jour de la proposition de
revision et fixation du tour de la discussion
FEUILLETON.
3° La discussion la Chambre
4° Après le vote par la Chambre, renvoi de la
proposition au Sénat
5° Renvoi par le Sénat de la proposition
l'examen d'une commission, probablement une
commission spéciale
6° Discussion de la proposition par cette com
mission et nomination d'un rapporteur
7° Rédaction et approbation du rapport
8° Mise l'ordre du jour du Sénat et fixation
du jour de la discussion
9° Discussion au Sénat
10° La sanction royale
11° Dissolution des Chambres et convocation
du corps électoral dans les quarante jours
12° Réunion des Chambres dans les deux
mois
13° Discussion générale la Chambre des re
présentants. Renvoi des projets et des proposi
tions de réforme aux sections et des sections
une section centrale
14° Examen des projets et des propositions en
section centrale. Nomination d'un rapporteur et
rapport
15° Discussion la Chambre du projet adopté
par la section centrale
16° Renvoi au Sénat, qui nomme une commis
sion d'examen. Rapport
17° Discussion au Sénat
18° Enfin, pour finir, la sanction royale.
Nous lisons dans la Revue pédagogique belge
Un arrêté royal du 4 avril 1891 dispense la
commune de Bisseghem d'établir une école
primaire communale.
Cet arrêté porte 250 le nombre des corn-
munes belges n'ayant plus que des écoles dio
césaines.
Dans deux cent cinquante communes au
jourd'hui, il n'y a plus, par arrêté royal, même
un semblant d'enseignement public ni école
d'adultes, ni école gardienne, ni école pri
maire.
L'élection législative nécessitée par la mort
de M. Delaet a eu lieu mercredi Anvers. Il y
avait 1,782 votants. M. Louis Van den Broeck,
candidat clérical, a été élu par 1,683 voix.
Le Moniteur publie la loi ouvrant un crédit
extraordinaire de 4 millions de francs au mini
stère de la guerre pour la construction des ou
vrages de fortification de la Meuse.
Dans le bassin de Charleroi.
Vendredi 22.
La grève peut être dès maintenant considérée
comme entièrement terminée.
Les ouvriers reprennent le travail en masse.
Jeudi 10 heures une grande manifestation s'est
déroulée dans les rues de Charleroi.
Dès le matin les quartiers ouvriers étaient pa-
voisés et les détonations des campes retentis
saient.
Tout cela cause de la décision votée par la
section centrale.
Les illusions sont cependant encore bien nom
breuses parmi les travailleurs qui croient que
tous leurs vœux ont reçu entière satisfaction.
LE PROGRÈS
VIRES ACQUIRIT EONDO.
ABONNEMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00.
Idem. Pour le restant du pays7-00
tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue au Beurre, 20.
INSERTIONS Annonces: la ligne ordinaire fr. 0-10 Réclames: la ligne, fr. 0-25
Insertions Judiciaires la ligne un franc.
Les annonces sont reçues Pour l'arrondissement d'Ypres aux bureaux du Progrès Pour
le restant de la Belgique et de l'Etranger I'Agence Rossel, 44, rue de la Madeleine,
et 2, :ue de l'Enseignement, Bruxelles.
Heures de départ partir du 1 Octobre
(Z'Ypres pour
Popennghe, 6-50 9-09 10-00 12-07 3-00
4-00 6-42 9-05 9-58.
Poperinglie-Hazebrouck, 6-50 9-09 12-07 4-00
6-42.
Houthem, 5-30 8-20 11-16 5-20.
Comines, 5-30 - 8-20 - 9-58 11-16 2-43 - 5-20
Comines-Armentières, 5-30 11-16—2-54—5-20—8-55
Roulers, 6-15— 7-45 -10-40— 12-20 2-45 -4-10
6-42.
Langemarck-Ostende, 4-30 (Cortemarck) 7-18 - 9-57
-12-17 3-56—6-21.
Courtrai, 5-30 8-20 9-58 11-16 2-43 5-20
(Dép. de Comines Courtrai 7-45.)
Courtrai-Bruxelles, 5-30 9-5811-162-43 5-20.
Courtrai-Gand, 5-30 8-20 11-16 2-43 5-20.
5-00 7-34 10-20 1-00 4-00 6-25.
5.O6 7-40 10-26 1-06 4-06 6-30.
o
A la fin d'un banquet entre camarades, l'un de nous
conta l'histoire suivante peu près en ces termes
I.
Je n'oublierai jamais la figure aimable et hautaine de
mon grand-père n^eçnel, ,M,Lajjrette d'Atremont, qui
m'a passionnément 3$!^ dan^m'q^ifaoce.
J'étais bien jeune-quand iï est^Yott. J'avais, neuf ans
peine. Mon orgueil est de lui avoir proou^ une de ses*
joies dernières, car .il expira cette épqqttûide l'année où
l'on distribue les prix aux collégiens, et, cet été-là, je
revins au logis chargés de lauriers On les étala sur le
lit du malade, et je garde pétrifiée dans mon cœur l'ex
pression du sourire qjiVut en dette minute l'aïeul vénéré,
un sourire large (ju7 découvrit ses dents intactes et qui
ranima dans ses yeux une flamme puissante. Il avait tou
jours été fier de moi, j'ignore pour quel motif, par espé
rance sans doute, et les frêles couronnes universitaires
que je lui rapportais l'instant où il allait nous quitter,
ces fanfreluches de papier gaufré ont doré son agonie.
Le souvenir de cet homme est profondémént enfoncé
dans la chair de mon être, comme un arbre robuste^ planté
dans une terre épaisse, et souvent, après que les cruautés
de l'existêhce m'ont forcé subir certains contacts vis
queux, je goûte la doucepr de m'endormir en pensée dans
les bras» du vieillard qui m'a bercé jadis, dana-les bras
du grand bourgeois qui avait fière allure, drape dans son
ample redingote aux revers énormes, au large col de
velours.
Si j'ai eu des indulgences presque coupables pour quel
ques personnes qu'il sied de tenir un peu d'estime, je sais
que le grand-père me pardonnera ma faiblesse il s'était,
en effet, toujours montré charitable, mais vers la fin de
sa carrière heureuse, il fut pris d'une pitié ardente pour
les secrètes douleurs humaines, après une aventure qui
lui advint une nuit.
IL
M. Laigrette d'Atremont avait passé la soirée dans une
maison amie, et rentrait chez lui une heure assez tar-
cfive. Il regagnait sa maison sans hâte, pied, comme
■Son ordinaire. Il était resté, un marcheur intrépide, bien
qu'il approchât de la soixantaine.œt les longues promena
des sous des étoiles, au milieu de la1 ville endormie, le
charmaient encore. II. cheminait donc gaiement le long
d'une avenue "bordée de chaque côté d'une double rangée
de marronniers.
On était au printemps. Sur le-trottoir que suivSft^leuL,
les-branches de la double rangée de marronniers se fejoi-
gnaient et s'entrelaçaient en charmille au-dessus têfc
du passant attardé, si bien qu'il avançait dans un coule*
d'ombre, sous une voûte noire que trouaient des flêches*dè
clarté Binaire. Des réverbères clignotaient d^apaee" en*
espace.-
tviljentôt, l'aïeul frôla un individu d'aspeétr misérable qui?
était assis sur un banc.*1 qui semblait dortiïîf.
Dès que mon grand-père eut fait quelques pas, l'indm1
du se leva et marcha derrière lui une certaine distance.
M. Laigrette d'Atremont, sans concevoir encore d'in
quiétude, voulut savoir s'il était suivi. Il traversa la
J ^!C83!^ c
v
chaussée et prit l'autre trottoir. L'homme le rejoignit et
continua l'escorter d'assez loin.
Allons, pensa le vieillard, c'est moi qu'il en a
Grand bien lui fasse Je le mènerai loin
Et, alors, commença une pérégrination pittoresque au
hasard des rues, M. Laigrette d'Atremont fit des détours
sans nombre, toujours escorté de son acolyte qui ne per
dait point sa trace. A l'aide de zigzags ingénieux, il s'en
gagea dans des voies étroites, car il n'éprouvait aucune
frayeur, étant doué d'une énergie extraordinaire, et étant,
par nature, amoureux du danger. Son intentioif était
même, évidemment, de provoquer par ses bravades le
chenapan qui l'accompagnait toujours distance.
Celui-ci demeurait inoffeitsif ilàtlait d'un air sournois
ou triste il ne se décidait pas l'atTàqué.
Si bien qu'arrivé dans un carrefour mal éclairé, l'aïeul
perdit patience il fit volte-face, se dirigea vers sotnad-
versaife, çt lui jeta d'une voix gouailleuse et forte
Mon cher, cette comédje est un pe^ longue. Je suis
fatigué et je cocuslftee fh'endormir. Que me voulez-
vous V
L'homme hésita, puiS répondit
Mes enfants ont faim
III.
fr
Tqet d'abord, mon grand-père eut un sursaut d'étonne-
-îheqf.
-?-Yous moquez-vous de moi dit-Il d'un ton plus s®c.
Il est environ trois heures "du matin. Voilà plus de deux
heures que vaus*vpjïs acharnez me suivre nous sommes
ici au milieu d'un faubourg perdu où mon entêtement vous
a conduit. Est-ce le moment et le lieu de me faire cette
confidence