Chronique locale. Un coup d'œil général. Les écoles. L'ère d'égalité, d'indépendance et de tolérance. Encore l'Entrée du Gouverneur. Faut-il le dire, et quand nous aurons dit com bien froide, glacée et significative a été l'entrée officielle du Gouverneur en notre bonne ville libérale d'Ypres, aurons-nous dit autre chose Sue ce que tout le monde avait prévu et qui evait inévitablement se produire Appeler au milieu d'une population, foncièrement libérale, Ïirofondémeut attachée ses institutions libéra- es, fière de son passé libéral, sincèrement dé vouée son drapeau libéral et prête tous les sacrifices, un nomme qui a été l'instrument principal de sa déchéance, toute momentanée qu'elle soit, est-ce un acte ,de bon sens ou une aberration qui n'a pu germer que dans les cer veaux d'ambitieux égarés par le délire du pou voir On le prévoyait et tout disait que cette fête, montée si grand renfort d'orcnestre, devait aboutir ce qu'elle a été, un immense fiasco. Et maintenant que les faits ont parlé, com prend-on enfin ce que c'est que la moralité pu blique sent-on enfin ce que c'est que de s'atta quer la conscience publique et de violenter le sentiment intime de ceux au milieu desquels on n'a pu s'implanter que par la ruse, la fraude et la violence Nous avions eu l'entrée de M. Surmont cela disait tout et devait ouvrir les yeux de ceux que l'illusion pouvait encore tromper. La leçon n'a pas suffi, ou si elle a ouvert les yeux, c'est un tort et un manque absolu de clairvoyance, d'es pérer un retour ou une diversion quelconque la popularité, dans une exhibition plus ou moins décorative d'un gouverneur. La plaie était trop saignante, et M. Ruzette, qui a tant contribué la produire, au lieu de la panser et d'aider la cicatriser, ne pouvait que l'approfondir et la rendre plus douloureuse. C'est ce qui est arrivé. Et encore une fois, tout cela était clair et prévu. Il n'y a que les illuminés de l'Hôtel-de- Ville pour se tromper si grotesquement derrière le bandeau qui couvre leurs yeux. Ils l'ont donc appelé, leur sauveur. Le sauveur est venu, et le sauveur s'est trouvé au milieu de l'indiftérence générale, étonné de tant de froi deur et meurtri d'une si sévère et éloquente ré ception. Ils l'avaient donc trompé. Ils lui avaient donc promis une réception tout casser Tous aveu gles, et ceux qui croyaient pouvoir électriser les âmes glacées et celui qui escomptait les acco lades, les fleurs, les sourires et les acclamations frénétiques. Rien par ci, un œil scrutateur, par là, un promeneur indifférent. On se promène aussi bien là où il y a quelque chose ou un sem blant de quelque chose que là où il n'y a rien un peu plus loin, quelque loustic, des enfants, des femmes, du peuple, un peu partout sur le passage, rien que pour voir des fenêtres gar nies de quelques curieux venus là pour assister au défilé ou la revue du cortège qu'on annonce d'une signification peu flatteuse, des gardes ci viques raides comme leur fusil, et le tout dans cette note, cela fait-il une entrée triomphale Organise-t-on une fête 18° sous zéro Or, on était 18° sous zéro et cette tempéra ture, les Yprois ne s'amusent pas. Cependant que n'avait-on pas fait pour élever le thermomètre Mais on a beau tripatouiller le thermomètre, il ne peut que suivre l'atmos phère ambiante comme le dragon du beffroi ne peut tourner que sous l'influence du vent. Quelle différence entre cette entrée et celle de M. Heyvaert Ici, tout était la joie c'étaient des vivat et des acclamations sur toute la ligne M. Heyvaert étouffait sous les bouquets de fleurs qui inondaient sa voiture il" n'avait pa» assez île mainè pour répondre aux. saluta- dons qu'oui lui lançait de toutes parts.: c'était une bioùvenue expaftéivej&ajBourdii&Mite'. et spontanée un triomphe complet,-, malgré' les boUdeivrs et les grinchmix catholiques'qui'y étahùiXP*ur leurs frais. - s Jgt^e 'fols^ie plus petit cri détonait et ceux ient/miB3ion de donner le ton Fenthoù-, ^voyaient réduits au silence, dôfàâtj d'y a pa» jusqu'à ce zélé Mortier auj v s w quel le mayeur, tout honteux de la comédie ratée, ne fit rentrer dans le gosier son allégresse de commande. Et voilà l'entrée que par euphémisme et pour se conformer aux usages, on décore du nom pompeux d'entrée triomphale. Ami lecteur, en voudriez-vous une pareille Aussi, le Gouverneur, on ne l'y prendrait plus. Les distributions de prix se sont accomplies cette année comme les autres, avec cette seule différence c'est que cette fois elles se sont faites sous l'administration cléricale, tandis que jus qu'ici les écoles officielles étaient placées sous l'égide d'une administration libérale, et cette différence n'est pas une quantité négligeable. On se demande même comment la chose est possi ble des ennemis jurés de l'enseignement offi ciel aller faire des risettes cet enseignement, c'est un spectacle qui a intrigué plus d'un et il en est qui sont allés voir. On dit même qu'un de ces curieux, présent la cérémonie, très heureu sement doué de la faculté de seconde vue pro fonde, et qui lit aussi bien dans les livres fermés que dans les livres ouverts, a pu lire dans le cœur de nos nouveaux magistrats, et qu'il a pu clairement constater que, tandis que les figures souriaient et que les mains applaudissaient, il se passait en dedans des mouvements contraires et que plus on battait des mains, plus grandes et plus grimaçantes étaient les contorsions du cœur. Cela n'est pas impossible et on pourrait même, poussant l'investigation plus loin, se de mander comment il en saurait être autrement. De sorte que le voyant, doué de seconde vue, pourrait fort bien avoir vu clair. Quoiqu'il en soit, pour le moment, nous enre gistrons les choses comme elles se sont passées, au vu et au su de tout le monde, et il ne nous répugne pas de dire que, pour la première fois que ces anciens détracteurs de l'enseignement officiel président des distributions de prix, dont ils n'avaient aucune idée exacte, ils se sont proprement tirés d'affaire. Qu'ils continuent aans cette voie, qu'ils s'inspirent de l'exemple de leurs prédécesseurs, et nous en reparlerons plus tard. Une particularité a frappé le public et cela désagréablement. Il était de tradition de con duire les élèves primés du Collège communal, après la distribution des prix, des Halles au Collège, en cortège, musique en tête. Cette fois, il n'en a pas été ainsi, et la distribution finie, chacun s'en est allé de son côté. On a sévèrement qualifié cette modification aux anciennes habi tudes et les commentaires, comme on le pense bien, allaient leur train. Renseignements pris, nous nous plaisons reconnaître qu'il y a eu là une maladresse dont l'autorité administrative n'est pas responsable. Celle-ci a, paraît-il, agi d'après des renseignements erronés. Mais nous nous demandons comment ces renseignements peuvent-ils avoir été donnés On se serait ap- f»uyé sur une prétendue résolution prise par 'ancienne administration libérale. Or, on affir me que jamais aucune résolution de ce genre n'aurait été prise, que, bien loin de là, une pro position de ce genre ayant été mise en avant, elle aurait été écartée sans contestation aucune. Dès lors, quel peut être le but de communica tions qui ne reposent sur rien et qui, dans les circonstances actuelles, devraient être entourées de plus de prudence que jamais? Autre chose. Nous lisons la fin du palma rès du Collège communal, ce paragraphe stupé fiant Dès la rentrée du mois d'Octobre, l'établis sement sera exclusiv l'externat. Qui est celui burmept, est-ce Qnel est" ce. •ieèônmu droit di s'est-il semb. L', Co a isnt soumis au régime de décidé cela? Est-ce M. olaert ou M. Deschacht orité Jusqu'ici nous ne onseil communal seul le dsion. Le Coûseil communal sNoub n'avons.ïiçn vu ,de neurs va-t-ij^se substituer au lonseil ne confpte donc plus y "il seul donnes, désordres rt incontestable du moins il doit l'avoir, comme on dit dans Les saltim banques puisqu'il l'a pris. M. Creus, l'intelligent employé de l'état civil, vient d'être démis de ses fonctions et remplacé par une borne deux pieds. Voilà un honnête et modeste fonctionnaire sur le pavé. Et quelle est la raison de cette inexplicable mesure Parce que la nomination n'a pas été régulari sée C'est ce qu'on dit. Si cela est, qu'on la ré gularise, ce n'est pas plus difficile que ça, mais cela ne saurait jamais être une cause de révo cation. Quelle est donc la cause Au public juger. -»»aa3ta09ono*.i» Les Yprois sont bien désillusionnés, aussi bien les catholiques que les libéraux et les pre miers encore plus que les seconds, car ceux-ci, tout en sachant quoi s'en tenir sur les dispo sitions générales de leurs concitoyens, ne pou vaient répondre de ce que pouvait produire le tintamarre si pompeusement et si bruyamment monté et annoncé par nos faiseurs cléricaux. Enfin la pièce est jouée on est édifié et nos matadors ont dû se convaincre que quand Eras me a dit que le monde est gouverné par la Folie cela n'est pas toujours vrai et surtout Ypres. Prenons toute la fête depuis le commencement jusqu'à la fin, la descente et la réception du Gouverneur la gare, la revue, le cortège, le festival, le cortège aux flambeaux, le banquet, le feu d'artifice, le départ et l'entrain général, et là, la main sur la conscience, qu'on nous dise si tout ce bruit, creux et faux, est en quelque point comparable aux fêtes analogues, qu'avec tant de splendeur, de vie et de joie, les libéraux savaient, sans effort aucun, organiser et mener bonne fin Le Gouverneur descend du train et il y est reçu avec le même cérémonial qu'un Monsieur quelconque qui vient dîner chez un particulier. La garde civique, au lieu d'être sur le quai, en ligne de bataille, est là, au loin, sur la plaine, comme perdue dans le désert. Il est vrai qu'à l'approche du Représentant du Roi, on lui fait présenter les armes, ce qui était de trop, mais quelle raideur, quel froid Faut-il parler de la revue des sociétés et de quelques autorités rurales qui y figuraient, si ce n'est pour relever la poignée de main donnée par M. le Gouverneur au Bourgmestre de Zonnebeke d'abord, l'échevin Gesquiere ensuite Il y te nait donc beaucoup, M. le Gouverneur, serrer la main de ce condamné pour les faits que l'on sait, puisque déjà il avait passé ces aimables et intéressants magistrats, quand, sur un mot soufflé l'oreille par l'un de ses amis, il revint sur ses pas pour réparer cet inexcusable oubli, et les voilà la main dans la main la réhabilitation est faite, Gesquiere est vengé, le Gouverneur a tenu le montrer publiquement. Et la Justice ne serait pas respectée dans ce beau pays de Bel- gique Quel dommage que tous les autres condamnés ne fussent pas là, pour recevoir les mêmes hon neurs Que dire du cortège où brillaient par leur ab sence moult sociétés et où d'autres-qui, comp tant 60 ou 80 membres, n'étaient représentées que par 10 ou 13 des leurs; d'autres par leur cartel porté par la victime désignée par le sort. Et le cortège aux flambeaux, s'étendant sur un espace de trente mètres au moins, la musique des Pompiers, en tête, tenue dans l'ombre, on comprend pourquoi. passons vite an banquet. Beaucoup de monde, dont un tiers, amené là, la côrd'e au cou, comme les bœufs l'abattoir un tiers, là, leur place comme des toutous dans une procession enfin un tiers qui pensait sincèrement que c'est arrivé. ni rf

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Le Progrès (1841-1914) | 1891 | | pagina 2