AVIS.
L\° 22. Jeudi,
52e ANNÉE
17 Mars 1892.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
La générosité cléricale.
CULTURE MARAICHERE.
Chronique locale.
FÊTE DE BIENFAISANCE.
Inutiles jactances.
La tolérance
chez les catholiques.
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
C'est un thème de polémique cher nos ad
versaires que l'opposition des oeuvres cléricales,
qui ne coûtent rien aux contribuables et qu'ali
mente seule l'inépuisable charité catholique,
l'organisation officielle de l'enseignement et de
la bienfaisance, largement défrayée par l'im
pôt.
Cette thèse, qui n'a jamais été vraie, le de
vient de moins en moins, depuis que le cléri
calisme tout puissant s'est emparé du budget
national.
Si les libéraux n'ont pu rivaliser, sur le ter
rain de l'enseignement libre et de la bienfai
sance privée, avec les cléricaux, c'est qu'ils
n'ont pas leur disposition, comme ces der
niers, les inépuisables ressources du clergé, ni
le trésor des caisses diocésaines, ni l'immense
patrimoine des couvents, sans cesse alimentés
par l'exploitation des superstitions religieuses
et par les plus coupables extorsions.
Quoi d'étonnant que des gens sans famille et
sans besoins, enrichis par 1 abondante contri
bution constamment prélevee sur les simples
et les ignorants, consacrent une bonne partie
de ces ressources a ledification d une série
d'œuvres destinées perpétuer leur influence,
assurer leur domination, attirer vers eux,
de plus en plu», toutes les forces de la nation
Mais l'heure qu'il est, nous n'en sommes
déjà plus là, et la main-mise de l'enseignement
libre et de la bienfaisance clericale sur le bud
get de lElat s'affirme de plus en plus.
11 n'est pas d'ecole professionnelle, pas d'eeole
ménagère organisée par la moindre congréga
tion religieuse, qui ne se voie gratifiée d'un
plantureux subside.
Il n'est pas d'école normale agreée qui ne
soit mise en possession d'un nombre considé
rable de bourses d'études.
Il n'est pas d'hôpital du plat pays qui, grâce
la loi Lejeune sur l'hospitalisation publique,
ne puisse compter sur les allocations des pro
vinces et-des communes.
Le révérend père Woesle a demandé que
toutes les écoles libres fussent directement sub-
sidiées par l'Etat, et sa proposition ne lardera
pas être convertie en loi, si les électeurs n'y
mettent bon ordre.
Il n'y aura bientôt plus de moine, en Belgi
que, qui ne sera pas parvenu se loger dans le
fromage budgétaire
LE PROGRÈS
vires acquirit eundo.
ABONNEMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00.
Idem. Pour le restant du pays7-00.
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et t, rue de l'Enseignement, Bruxelles.
Ypres, le 16 Mars 1892.
FEUILLETON.
(suite).
Parmi les causes de l'état arriéré de notre culture ma
raîchère et de sa faible importance, nous noterons princi
palement l'ignorance des procédés de la culture améliorée
et l'empire exercé par la routine.
Dans notre arrondissement, la culture maraîchère per
fectionnée et la culture des primeurs restent confinés dans
quelques châteaux, là précisément où de riches proprié
taires, soit en vue de leurs convenances personnelles, soit
en véritables amateurs, s'entourent de toutes les condi
tions réclamées par une culture améliorée, accueillent
avec empressement tous les progiès manifestes de la
science horticole et n'hésitent pas payer de gros gages
des jardiniers instruits ayant passé par des écoles d'horti
culture ou par des établissements en renom du pays ou de
l'étranger.
La grande influence de l'enseignement horticole et du
séjour dans les grands établissements où les meilleurs pro
cédés de culture sont appliqués, ne ressort-elle pas déjà
de ce seul fait
Et si nous passons de cette considération générale
l'examen des faits particuliers, la vérité de notre affirma
tion ne s'en dégage que mieux.
La Société des Anciens Pompiers de la ville
d'Ypresorganise, au bénéfice des victimes de la
CATASTROPHE D'ANDERLUES, un concert
dont la date sera fixée ultérieurement.
De même que le poltron éprouve le besoin in
cessant de vanter son courage le traître, celui
de laire valoir sa loyauté le fourbe, celui
d'exalter sa franchise le voleur, celui de pro
clamer sa probité de même les bravi de plume
du Journal d'Ypres sont agités par le prurit con
stant de louer leur droiture et leur honnêteté au
sujet des inoubliables élections du lr Février
1891.
Ah vous avez beau vous démener, chevaliers
du billet de banque beau crier par dessus les
toits que vous êtes d'honnêtes gens c'est peine
perdue Vous auriez plus tôt fait de blanchir
un nègre...
Comparons, par exemple, sous le rapport de la quantité,
du volume et de la-qualité des produits, la production des
aspergeries telles qu'elles sont établies dans la plupart des
châteaux et celle des aspergeries de nos maraîchers.
La comparaison n'est-elle pas toule en faveur de la cul
ture perfectionnée
Et n'est-ce pas la science horticole qui enseigne que
l'asperge est une plante originaire des plages sablonneuses
delà Méditerranée, et se plaisant dans les dunes alors
que fréquemment, sous l'influence du vent, elle y voit ses
racines entièrement dénudées une plante avide de lumiè
re et de soleil, ne redoutant que l'humidité stagnante qui
seule la fait périr et le froid aux racines qui retarde son
développement au printemps. Or, c'est en tenant compte
de ces indications que dans les établissements où l'on ten
te les systèmes de culture qui semblent les plus rationnels
et les plus conformes aux indications de la science, l'on a
éprouvé l'heureuse influence qu'exerce sur la végétation
de l'asperge la culture en buttes isolées ou en bulles con
tinues rangées simples, et l'emploi d'un terrain léger,
parfaitement drainé, et assaini
Les chefs de culture des châteaux, en appliquant eux-
mêmes ce système de culture qu'ils ont appris connaître
dans les établissements où la culture rationnelle est en
honneur, en ont éprouvé tous les avantages tandisque
nos maraîchers continuent, par ignorance, cultiver l'as
perge dans des terrains froids et mal assainis, en planches
larges et plates, où se pressent, sur deux ou trois rangs,
des plantes avancées une grande profondeur. Quoi d'é-
C'est que toute la ville, témoin irrécusable de
votre indigne conduite, de vos honteux tripo
tages, ne croira jamais vos impudentes affir
mations, vos protestations effrontées
Et quand d'aventure, vous pourriez réussir
tromper quelque idiot des vôtres, plus tête de
linotte encore que le triste et risible sire d'Eeck-
houtte, vouq ne réussirez jamais vous faire
accroire, vous-mêmesque vous n'avez pas fait
œuvre de fourberie et que vous n'êtes pas des
fourbes.
La conscience des coupables, qu'ils le veuil
lent ou non, est toujours là, exerçant au fond
des cœurs, si mauvais qu'ils soient, son action
inéluctable, fatale, providentielle, vengeresse.
Vous savez, hommes parvenus par l'argent et
la corruption, que votre triomphe n'est dû
qu'à ces honteux auxiliaires. Et, défaut de
vos adversaires trahis, volés et vaincus de
vos victimes honteuses, repentantes peut-être,
mais déconsidérées votre propre témoignage
doit s'élever journellement contre vous et vous
crier, avec une force incompressible, l'instar
du remords chez certain personnage d'un des
drames sombres de Shakspeare voua êtes des
corrupteurs
Nous reproduisons pour la plus grande honte
du rédacteur de bas étage du Journal d'Ypres
l'article Cuique suum où il a l'insigne courage
d'approuver la noble conduite de quelques
pointus du parti catholique lors de l'enterre
ment de notre ami M. l'Ingénieur Eug. Leboucq.
Cet article qui transpire la haine implacable
pour tous ceux qui ne pensent pas comme les
dévots, mérite de passer la postérité. Nous
avons toujours nié la tolérance des catholiques,
les événements nous ont toujours donné raison.
Aujourd'hui le Journal d'Ypres lui-même nous
donne raison.
Voici l'article
tonnant dès lors que leurs produits viennent en relard, et
surtout qu'ils viennent mal quoi d'élonnant que la cul
ture ne soit point rémunératrice*?
Un autre exemple des conséquences de l'ignorance.
Il est acquis aujourd'hui que le fumier est un excellent
véhicule du champignon qui, sous le nom de Peienospora
infestant, occasionne la maladie des pommes de terre.
Nos maraîchers n'étant pas au courant des nouvelles acqui
sitions de la science, déposant invariablement leurs tuber
cules de plantation au milieu d'une bonne pelletée de fu
mier, c'est dire que régulièrement ils déposent leurs
fromages dans une cave infestée de souris.
Un autre exemple encore.
On sait qu'au nombre des auxiliaires naturels du jardi
nier on compte les crapauds, grenouilles, taupes, lézards,
lombrics, scarabées dorés les chauves-souris, les oiseaux
insectivores disons même hardiment tous les oiseaux,
car tous sont plus insectivores que granivores et compen
sent largement les menus larcins qu'ils se permettent,
l'occasion, au détriment du maraîcher, les belettes,
putois, hérissons, musaraignes, etc. Voilà autant de pré
cieux auxiliaires de l'agriculture, et voilà cependant aussi
autant de victimes de l'ignorance de nos cultivateurs.
La seconde cause de l'état arriéré de notre culture ma
raîchère c'est l'esprit de routine, cette détestable routine,
l'ennemie jurée du progrès.