JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
AVIS IMPORTANT.
Chambres législatives.
La conférence monétaire.
L'affaire du Panama.
La pêche au
hareng.
i\° 95. Dimanche,
52e ANNÉE.
27 Novembre 1892,
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
LEPiioenÈs sera envoyé gratuitement jusqu'au
iremier Janvier prochain, aux personnes qui s'abon
deront, pour une année, dater de cette époque.
Ypres, le 26 Novembre 1892.
Après une bonne petite séance la papa,
lans laquelle on a discuté et voté, au milieu de
inattention la plus générale, le budget des
ion valeurs et celui de la gendarmerie, la
chambre que l'Europe nous envie a constaté
|u'elle était épouvantablemenl fatiguée et que
e moment élait venu pour elle de prendre un
epos salutaire et réparateur.
Quelques représentants libérâtres se sont
>ermis de protester. Mais on va nous traiter
le fainéants 1 s'est écrié M. d'Andrimont. Un
lutre membre de la gauche, M. Dufrane, n'a
>as eu honte de s'écrier Nous ne deman
dons qu'à travailler. M. Bara enfin n'a pas
rougi de venir la rescousse et d'engager la
Chambre ne pas donner au pays l'exemple
d'une scandaleuse oisiveté.
La majorité noire a fait bonne justice de ces
ninoritards sans pudeur. Elle a décidé qu'elle
iuspendrait le cours de ses travaux et
jlle s'est ajournée jusqu'à convocation ultc—
'ieure.
Le récent interview d'un actionnaire de la
Compagnie du Haut Congo, montrait combien
a paix entre les Sociétés et l'Etat était précaire,
in dépit de la sourdine mise la polémique
les journaux. Cette paix ne lardera pas de nou
veau être rompue si le Hoi-souverain n'ac-
iueille pas les revendications et réclamations
les Compagnies, qui vont être formulées dans
in mémoire destiné lui être remis bientôt,
-e décret sur le caoutchouc, accepté tout d a-
jord avec une philosophie plus apparente que
'celle, aura donc sa riposte.
Voilà où les rclations-en sont arrivées entre
Etat et les Sociétés congolaises on voit qu'el-
es sontdénuées de cordialité, la réflexion ayant
nvite les compagnies poursuivre la querelle.
Hais elle se continuera, paraît-il, en dehors de
la presse, les parties en cause ayant reconnu
lu'en saccusant mutuellement en public d un
as de petites vilenies, elles finiraient par ruiner
œuvre congolaise. Parbleu
L'Exposition de Bruxelles aura grand'peine
sortir de la théorie pour entrer dans la pra
tique. L'abandon du clou, du fameux clou, du
chemin de fer électrique, lui a porté un coup
terrible. De plus, les initiateurs sont assez mal
secondés par les Bruxellois qui, jusqu'ici, n'ont
accepte le projet Bordiau-Lemonnier qu'avec
IJne certaine indifférence. En présence de cette
situation assez douteuse, les capitalistes qui
avaient souscrit le million nécessaire la vie de
l'entreprise hésitent. On hésiterait moins...
Peut-être reprendront-ils courage, ou d'autres
accompliront-ils la tâche qu'ils s'étaient donnée.
Un prochain avenir nous le dira Mais actuelle
ment les nouvelles sont pessimistes.
Les Anversois se réjouiront en constatant
l'impuissance de la capitale, impuissance due
diverses causes, parmi lesquelles l'insuccès du
Grand Concours tient une place importante.
Les Bruxellois ressemblent aux Français après
Sedan ils n'osent plus livrer bataille.
La conférence monétaire a tenu hier sa deu
xième séance au Palais des Académies, sous la
présidence de M. Montefiore-Levi.
Dans cette séance, les délégués des Etats-Unis
ont déposé leurs propositions, elles sont ainsi
conçues
1° Le rétablissement et le maintien d'un rap
port fixe de valeur entre l'or et l'argent, et l'em
ploi constant des deux métaux comme monnaie
métallique d'un plein pouvoir libératoire, se
raient féconds en résultats bienfaisants pour les
nations du monde.
2° Les résultats peuvent être atteints par l'a
bolition des restrictions légales qui entravent
actuellement la frappe de l'argent comme mon
naie ayant pleine force libératoire et le rétablis
sement, au moyen d'une entente internationale,
d'un rapport de valeur entre les deux métaux,
comme antérieurement 1873 et sur la base qui
serait fixée parla conférence.
3° Les points essentiels de cet arrangement
international devraient être
a) La frappe sans restriction de l'or et de l'ar
gent en monnaie d'un plein pouvoir libératoire
b) La fixation du rapport de valeurs entre les
deux métaux, comme monnaie métallique
M de Rothschild, délégué anglais, a déposé
également une proposition, mais il n'en a pas
été donné lecture. Il a été entendu qu'elle figu
rerait en tête de l'ordre du jour de la prochaine
séance, fixée Lundi.
L'affaire du Panama et le débat auquel elle a
donné lieu Lundi dernier la Chambre françai
se, continuent faire l'objet des commentaires
de la presse. Les journaux Anglais, qui sont au
septième ciel chaque fois qu'ils peuvent débiner
leurs bons voisins de France, se montrent pour la
plupart, très sévères. Si les accusations de M.
Delahaye sont fondées, dit le Daily News, la
France n'aura pas déplorer que la perte de ses
millions engloutis dans le Panama elle devra
déplorer, avant tout, l'honneur perdu de ses lé
gislateurs elle se dira que se sont eux qui l'ont,
dépouillée. Voilà la véritable portée de l'inter
pellation Delahaye.
Le Journal des Débats ne voit pas la situation
sous d'aussi sombres couleurs cependant il la
trouve particulièrement grave
Les adversaires des institutions républicaines
s'en donnent naturellement cœur-joie. Citons,
titre d'échantillon, l'appréciation du Figaro
La pêche du hareng est en ce moment en
pleine activité dans la mer du Nord elle com
mence vers la fin d'Octobre pour durer jusqu'à
la fin de Novembre. Pendant quarante jours
c'est, en mer, un défilé continu de l'est vers
l'ouest d'immense3 multitudes de harengs na
viguant en largeur variable et d'une profondeur
de plusieurs mètres. Ils nagent si serrés les uns
contre les autres que là où ils passent, le mot
prêté un enfant de Marseille est vrai il y a
plus de poissons que d'eau.
La grande habileté des pêcheurs est de décou
vrir les passages et de se trouver temps pour
établir leurs filets quand la grande masse defile.
Les oiseaux chasseurs de mer, les mouettes, les
cormorans, les courlis sont de précieux indica
teurs pour les pêcheurs, parce qu'ils accompa
gnent les bancs et trouvent une nourriture
abondante en plongeant sur le3 harengs qui
s'aventurent trop la surface.
C'est avec le filet dérivant que les pêcheurs de
la mer du Nord capturent les harengs. Ce genre
de filet forme une véritable barrière suspendue
perpendiculairement dans la mer, s'étendant but
LE PROGRES
vires acouirit eundo.
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et 2, rte de l'Enseignement, Bruxelles.
Ah qu'il est doux de ne rien faire
Quand tout s'agite autour de nous
W993Q89W»
c) L'établissement d'un droit uniforme (s'il y
a lieu d'en établir un)pour la frappe des métaux
faite pour le compte des particuliers.
Il y a des honnêtes gens dans tous les partis el, en dépit
de récume qui apparaît la surface, ils sont la masse
profonde et solide du pays. Peut-être pourraient-ils, s'ils
ne considéraient qu'eux mêmes, rester indifférents ce qui
se passe.
Mais ils regardent au-delà. Ils savent combien il est
difficile, dans les imaginations populaires, de démêler le
vrai du faux, le juste de l'injuste, la légende de la vérité.
Ils savent que des adversaires qui ne reculent devant rien
font usage de toutes les armes, et ce n'est pas sans inquié
tude, ni sans anxiété, qu'ils assistent des événements
dont il est, l'heure où nous sommes, impossible de cal
culer la portée.
Quoi qu'il arrive de l'enquête ordonnée sur le Panama,
el des accusations portées contre un certain nombre de
membres du Parlement, il me semble que l'opinion garde
ra désormais de ces tristes histoires un préjugé en faveur
des candidats riches. Quand un homme viendra solliciter
les suffrages de ses concitoyens, ceux-ci, auront le droit
de lui demander quels sont ses revenus, de vérifier s'il
possède des immeubles au soleil ou des rentes sur le
Grand-Livre. Son aisance sera en définitive une sorte de
garantie pour les électeurs, et il y aura plus de chances
ainsi pour qu'il ne soit pas suspecté de trafiquer de ses
votes.
La démocratie triomphante a introduit dans la direction
des affaires publiques des mœurs et des hommes nouveaux.
Jusqu'ici, il n'apparaît pas qu'ils soient supérieurs, intel
lectuellement, aux hommes des anciennes couches.
Et de plus, leur infériorité comme argent et comme si
tuation les rend, sinon tous capables de vilenies, mais tous
esclaves de leurs origines ef des exigences de ceux qui les
ont faits députés ou n'importe quoi.
Le fait qu'on a choisi le citoyen X entre des centaines,
des milliers d'autres X qui ne valent ni moins ni mieux
que lui, l'oblige ménager toutes les passions des égaux
parmi lesquels est éclosesa grandeur. D'autre part, le peu
de solidité de cette grandeur momentanée rend ce politi
cien d'occasion plus accessible que d'autres des influen
ces qui, sous une forme plus ou moins directe, plus ou
moins matérielle, amollissent sa conscience.
Le jour où ce premier échelon dans la voie de la réfor
me sera franchi, on s'avisera peut-être de regarder de
plus près le Suffrage universel, qui est la grande erreur
de ce siècle. J'ajoute que je crois celte erreur irréparable
cependant, on rencontre de plus en plus souvent des es
prits qu'elle inquiète ou qu'elle révolte.