IX0 97. Dimanche,
4 Décembre 1892.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
AVIS IMPORTANT.
Les bonis de M. Beernaert.
Un homme vertueux.
A LA CHAMBRE.
La taxe des journaux.
6 FRANCS PAR AN.
Ypees, le 3 Décembre 1892.
M. Beernaert réalise tous les ans des bonis,
chacun sait cela.
Mais ce que l'on ne sais pas assez, ce que l'on
ne saurait assez dire, c'est que, tandis qu'au
moyen de mille trucs il obtient ce résultat au
budget ordinaire, notre dette s'accroît dans des
proportions effrayantes.
M. Beernaert trouve plus malin, au lieu de
recourir honnêtement, loyalement l'impôt, de
faire semblant d'opérer des dégrèvements et de
payer ses prodigalités en recourant l'emprunt.
De cette façon, le peuple, qui n'est guère au
courant de ces ficelles, s'imagine quil paye
moins. C'est une grosse erreur, sans compter
qu une telle gestion crée une situation financière
absolument mensongère et prépare de graves
difficultés au pays.
En matière de finances, il faut de la loyauté.
M. Beernaert préfère la ruse.
Nous avons déjà signalé ce fait que le budget
de la dette publique pour l'exercice 1893 indi
quait une augmentation de 3,631,218 francs.
Un membre de la section centrale a demandé
au gouvernement de faire connaître les princi
pales causes de celte augmentation.
Le gouvernement a répondu
Cette augmentation représente
1° A concurrence de 882.600 francs, l'annuité
portée pour la première foisau budget de la dette
publique, du chef de la reprise par l'Etat de ré
seaux téléphoniques et qui constitue en réalité
une dépense de capital
2° A concurrence de 2,852,933 francs, les
chargesd'intérêtet d'amortissementdes capitaux
émis ou émettre en 1892, savoir
A) 88,104,300 francs en dette 3 p. c.négociés
en vertu des arrêtés royaux des 22 Décembre
1891, 29 Février et 18 Juillet 1892, pris en exé
cution des lois du 19 Août 1889 et du 27 Mai 1890,
contenant respectivement le budget des recettes
et des dépenses extraordinaires pour les exerci
ces 1889 et 1890
B) 908,000 francs en dette 3 et demi p. c., 28
®erie, émis en vertu de l'art 1er, 2°, de la loi du
*1 Août 1891 et destinés couvrir les dépenses
ue construction de certaines lignes de chemins
de fer. 6
Soit ensemble, 3,735,533 francs, dont il y a lieu
ue déduire 104,285 francs provenant de la dimi
nution du taux de l'intérêt des cautionnements.
Somme égale 3,631,248 francs.
résulte do ces chiffres officiels que, pour
ionVrir 'es dépensés extraordinaires de 1889 et
°90, M Beernaert a emprunté 88,104,300 fr.
En faul-il plus pour démontrer que les bonis
dont lui et les siens font tant état constituent un
leurre, une duperie?
Il s'agit de M. le baron de Goninck, sénateur
de Dixmude, qui est en train de devenir l'hom
me le plus terriblement vertueux des deux hé
misphères.
Ce législateur redoutable veut réformer l'hu
manité coups de lois et de règlements. On
connaît sa bruyante campagne contre le jeu
voici maintenant qu'après tant d'autres, il va
s'efforcer d'en finir avec le duel.
Et il n'y va pas de main morte, l'excellent
baron. Il se prépare déposer un projet assi
milant le duel aux crimes de droit commun.
Un Bichelieu en veston, quoi l
M. Deconinck appartient, on le voit, la ca
tégorie de ces réformateurs naïfs et jobards qui
s'imaginent qu'il suffit d'insérer quelques mots
dans le code pour avoir raison des vices de l'hu
manité.
Ces gens-là nient l'évidence même il n'y a
pas discuter avec eux, et ce serait folie que
d'essayer de les convaincre. Toutes les lois ont
été impuissantes contre le jeu cela est hors de
conteste n'importe ils en fabriqueront d'au
tres qui n'auront comme les premières d autre
résultat que de faire éclore des tripots partout.
Toutes les lois ont été également impuissan
tes contre le duel. Le duel est un préjugé bar
bare, une absurdité, soit mais, dans l'état
actuel de nos mœurs, c'est une absurdité plus
grande encore de s'imaginer que l'on pourra
assimiler le duelliste au chourineur de grand
chemin.
Le Parlement belge a en ce moment assez de
besogne, et de besogne urgente sur la planche,
pour ne pas avoir s'occuper de pareilles bille
vesées.
De Coninck-le-Vertueux n'en déposera pas
moins son projet. On peut y compter. On as
sure d'ailleurs que M. Lejeune, le violoniste de
la justice, est tout dispose encourager l'initia
tive de l'homme d Etatde Dixmude.
L'excellent ministre qui, ce qu'on assure,
signerait sans barguigner, s'il en était le maître,
la mise en liberté de Léon Pellzer, ne verrait
nul inconvénient appuyer un projet qui com-
minerait contre les duellistes les travaux forcés
perpétuité et même la peine de mort.
-
Les propositions du gouvernement vont sui
vre de très près les votes de la commission du
Sénat. Elles reposeront la fois sur l'habitation,
dont le principe sera modifié, et le capacitariat,
donnant en plus l'électoral aux miliciens sortis
de l'armée avec un certificat de bonne conduite
et tous les pères de famille âgés de trente ans
et domiciliés depuis trois ans dans la même
commune.
Ces propositions sont assurées du quorum
nécessaire. Elles créeront de nombreuses caté
gories d'électeurs qui exigeront un gigantesque
travail pour la confection des listes électorales.
Il est désormais certain que la dissolution ne
sera pas prononcée avant un an et demi et que
les élections générales n'auront pas lieu avant
Juin 1894.
Les libéraux modérés, décidés donner leurs
voix aux propositions ministérielles si elles
s'inspirent, comme on en est certain, des pro
positions Dupont et Goblet d'Alviella, demande
ront que Ion n'insère pas dans la Constitution
les conditions générales de l'électoral. De celte
façon, il n'y aura pas de barrière constitution
nelle dans l'avenir l'avènement du suffrage
universel. Mais ils exigeront que les conditions
de l'electorat ne soient modifiées par la loi qu'à
la majorité des deux tiers, afin d'empêcher la
droite d'accentuer la réforme son profit après
deux ou quatre ans d'application. Nous tou
chons donc, après deux années de tergiversa
tions, l'heure psychologique de la revision.
[Séance du 2 Décembre
Aujourd'hui, discussion financière très nour
rie au sujet d un amendement de M. Lemonnier
qui propose de majorer de 100,000 francs le
crédit relatif au traitement du personnel des
douanes.
M. Beernaert a refait un exposé de la situa
tion financière, jonglé avec les millions, les bo
nis, l'ordinaire et l'extraordinaire, pour arriver
celte conclusion qu'il n'avait pas le sou et
que tous ceux qui voudraient proposer des aug
mentations de dépenses ou des diminutions de
recettes devraient en même temps indiquer des
ressources nouvelles.
Ce discours filandreux a permis M. Nys-
sens, le nouveau député de Louvain, de se ré
véler comme un des rasoirs les plus tranchants
de la Chambre.
Il a parlé de toutes sortes de choses qui n'é
taient pas en discussion, de l'impôt sur les ta
bacs, et surtout de l'impôt sur les successions,
qui produirait des millions, s'il était strictement
appliqué.
Une question officieuse de M. t'Kinl de Roo-
denbeke a permis M. Beernaert d'exposer la
situation prospère des sociétés d'habitations
ouvrières auxquelles la Caisse d'épargne fait des
avances d'argent.
A la fin de la séance, M. Dufrane, qui conti
nuera demain, a demandé au ministre d'expli
quer pourquoi, sous prétexte d'égalité devant
l impôt, il avait refusé d'approuver la taxe votée
par le conseil provincial du Hainaut sur les pro
priétés boisées. Au milieu de tout cela, on a un
peu perdu de vue la question des traitements
des douaniers, et la Chambre n'a pas encore
statué sur l'amendement de M. Lemonnier.
La section centrale du projet de loi de MM.
Houzeau et consorts sur la suppression de la
taxe des journaux s'est réunie cet après-midi.
52e ANNÉE.
LE PROGRÈS
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
VIRES ACQUIRIT EDNDO.
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