ASSOCIATION LIBERALE D'YPRES.
SAMEDI 24 JUIN 1893, s 1/2 heures du soir,
au Café de la BOURSE, rue Carton.
i\° 51. Dimanche,
55e ANNÉE.
25 Juin 1895.
6 FRANCS PAR AN.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Nos bons constituants.
Dénonciation calomnieuse.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Ypres, le 24 Juin 1893.
Quels singuliers hommes dEtat que les con
stituants du royaume de Belgique en l'an de
grâce et de sécheresse 1893 1
Il y a pour croire que le soleil a rendu le
cerveau de la plupart d'entre eux aussi aride
que les sables de la Campine.
Les malheureux qui, pour leurs péchés, sont
condamnés lire les Annales parlementaires
et qui n'ont pas eu la sage idee décbapper par
la fuite, ces jours derniers, ces travaux for
cés, auront dû se demander si les sténographes
étaient devenus fous, ou bien s ils avaient eu
noter les travaux oratoires d'un parlement re
cruté dans les Petites-Maisons.
Le fait est qu'à lire ces débats incohérents,
l'archevêque de Malines doit y perdre son
latin.
La séance de Jeudi, surtout, a été le triom
phe de l'incohérence.
Mais le comble du comique, ç'a été la série
de scrutins par lesquels la Chambre a démontré
que, en ce qui concerne le recrutement du
corps électoral sénatorial, elle ne savait pas
plus ce qu'elle devait penser que lorsqu'elle
avait reviser l'article 47.
On se rappellera longtemps, non sans faire
des gorges chaudes sur nos législateurs, le
désarroi qui régna parmi eux pendant la séance
du 18 Avril et pendant les séances qui précé
dèrent cette journée peu glorieuse.
Pendant des semaines, on avait discuté
perte de vue sur tous les systèmes électoraux
connus et inconnus... sauf un, le système qui
triompha en fin de compte, alors que la Cham
bre, terrifiée par les menaces ouvrières et sur
tout par les rumeurs de mécontentement qui
commençaient circuler dans les rangs de la
garde civique bruxelloise, se voyait obligée
d'aboutir.
Il y eut, alors comme aujourd'hui, tout un
chapelet de votes négatifs. Tel système recueil
lait péniblement trente voi^ '.el autre, trente-
deux tel autre encore trente-deux et une
fraction. Tous avortaient pitoyablement.
Alors, quand il fut prouve, clair comme le
jour, que les constituants ne savaient pas où
ils allaient, on leur tendit une perche de
sauvetage, et ils votèrent dare, dare, sans rap
port, sans discussion, un projet dont beaucoup
d'entre eux ne connaissaient pas le texte.
Ils s'étaient dit, peut-être: «Ce projet-ci,
nous ne le connaissons pas. Si nous le connais
sions, nous le repousserions peut-être. Votons-
le donc avant de le connaître.
Toujours I histoire des épinards.
11 est probable que l'on va servir de nouveau
nos honorables un plat de ce légume laxatif.
Avec le même sang-froid cocasse dont ils
avaient déjà fait preuve le 18 Avril, ils ont dé
moli tous les systèmes qui leur avaient été pré
sentés et qu'ils avaient cependant discutés,
cette fois, au milieu d'une tranquillité com
plète.
Tour tour, les constituants de la Chambre
ont mis en pièces le système plural, la repré
sentation des intérêts, le vote deux degrés,
le minimum d'âge de trente-cinq ans. Des ni
hilistes n'auraient pas mieux travaillé le fait
est qu'il ne reste plus rien.
Et pourtant, il faut fabriquer un Sénat I
On le fabriquera comme on pourra Mardi
prochain, et si MM. Beernaert et Fcron con
descendent, comme au 18 Avril, sauver la
situation, ils sont certains d'obtenir un vote
quasi unanime pour leur n'importe quoi.
Ce sera quelque chose, très probablement,
dont personne ne voudra, mais on le votera
tout de même les yeux fermés, par nécessité,
parce qu'on ne peut pas retourner devant le
corps électoral sans avoir voté quelque chose.
Et voilà comment, dans un pays qui se dit
éclairé, on élabore une constitution politique
la fin du xixe siècle
Au commencement du xxe, on fera peut-être
mieux ça se jouera en sept points d'écarté,
entre joueurs tires au sort.
Et cela donnera probablement de meilleurs
résultats l
Depuis que les cléricaux sont au pouvoir, les
employés et fonctionnaires de l'Etat entaches
de libéralisme sont fréquemment l'objet de dé
nonciations aussi anonymes que calomnieuses.
Les exemples ne sont que trop nombreux
et, chose plus grave, on constate que Ion tient
compte en haut lieu de ces lâches délations.
Un honorable et modeste fonctionnaire des
postes, habitant une localitédes Flandres, vient
encore d en faire l'oxperience. Le fonctionnaire
en question ne fait pas de politique; mais il
n'a pas cru devoir faire le sacrifice de ses con
victions personnelles, qui sont libérales.
Des lettres anonymes contenant les accusa
tions les plus graves furent écrites contre lui et
donnèrent lieu une enquête administrative.
Par un hasard doublement heureux, l'enquête
fit éclater la fausseté des accusations, et, bon
heur plus rare encore, découvrir l'auteur des
calomnies. C'était naturellement un clérical fa
natique, porte-cierge dans les processions,
membre actif de toutes les confréries de la
région.
Se voyant découvert, dans des conditions qui
ne permettaient pas de nier, le triste sire essaya
de se tirer d'affaire en offrant une somme d'ar
gent au malheureux fonctionnaire qu'il avait
calomnié. Celui-ci a refusé avec une indigna
tion facile comprendre il a déposé une
plainte entre les mains du procureur du roi et
a intenté uneaction en calomnie au pieux per
sonnage. Le procès se déroulera bientôt devant
les tribunaux.
En attendant, le calomniateur édifie toute la
commune par sa pitié, il ne manque pas une
messe et s agenouille dans tous les confession
naux.
LE PROGRÈS
vires acqcirit ecndo.
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Idem. Pour le restant du pays7-00.
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