Willems-Fonds. INTÉRIEUR. La question scolaire. Le vote obligatoire. Le clergé et la démocratie. Le Congrès libéral. Ypres a fait au carnaval de joyeuses funérail les et s'est payé une soirée de Mi-Carême fort animée, grâce au Bal organisé au profit du Denier des Ecoles Laïques. C'est sans doute tout ce que demandaient les organisateurs animer la ville d'un peu de gaité et en faire profiter une bonne œuvre. Nous apprenons de bonne source que la section Yproise du Willems-Fonds donnera son dernier Concert, suivi de Bal, le Dimanche 8 Avril, 7 heures du soir. Cotte fête aura lieu au local du Saumon, rue du Séminaire. La voilà donc nettement posée, et les promes ses faites l'épiscopat par M. Woeste et son clan de fanatiques vont bientôt recevoir leur réalisa tion. La proposition, tant de fois annoncée par le leader de la droite, tant de fois sollicitée par lui d'un ministère trop peu fervent son gre, vient enfin d'être déposée. Sans crier gare, en pleine discussion électorale, devant un parlement dont les jours sont comptés et dont la compé tence est strictement limitée des objets d or dre purement administratif, M. Woeste a déposé le projet de loi suivant Le deuxième alinéa de l'article 3 de la loi du 20 Septembre 1884 est ainsi modifie Le conseil communal, après avoir entendu le bureau de bienfaisance, dresse chaque année la liste des enfants pauvres admis recevoir l'instruction gratuite dans les ecoles communa les, dans les écoles adoptées ou dans les écoles réunissant les conditions de l'adoption et sou mises l'inspection. Il détermine la rétribution par eleve due de ce chef aux instituteurs de ces ecoles. L'article qu'il s'agit de remplacer porte en substance que la commune doit donner l'ins truction gratuite dans une école communale ou dans une ecole adoptée aux enfants indigents qui ne fréquenteraient pas une école privée non inspectée. Celte dernière phrase veut dire, d'après les déclarations de M. Jacobs, ministre de l'Inté- rieuren 1884, que la commune n'a pas de dé penses faire pour leselèvesqui trouvent asile dans les établissements prives. En d'autres termes, les contribuables ne doi vent payer que le budget des écoles communa les ou des écoles adoptées, assimilées aux ecoles officielles. Des écoles adoptées, émargeant au budget public, il y en a aujourd'hui dans la moitié des communes du pays et le refus des administra tions communales d'appeler le prêtre dans les établissements officiels en a fait instaurer Bruxelles, Anvers et Verviers. Et bien, cela ne satisfait pas encore M. Woeste et sa dévotieuse coterie il s'agit au- jourd hui d'appeler au partage du budget toutes les écoles généralement quelconques, même non adoptées, la seule condition qu'elles con sentent subir, pour la forme, la visite d'un inspecteur officiel. Ce dont nous sommes menacés, c'est donc en réalité de l'adoption forcée, par toutes les com munes, de toutes les écoles congréganistes. C'est le système de Ilarlez, si inconsidéré ment patronné, un instant, par la rédaction de la Réforme, la profonde et vitupérante stupé faction du pays libéral. La proposition de M. Woeste n'est pas neuve, elle a ete presentee une première fois la Chambre, le 26 Août 1884, au cours de la dis cussion de la loi scolaire, par MM. Thonissen et Melot. M. le ministre Jacobs la combattait comme excessive et de nature bouleverser toute féconomie de la loi, et ia Chambre la repoussa par 96 voix contre 21 et 11 absten tions. Parmi ceux qui, avec le Gouvernement et toute la gauche, volèrent non, nous trouvons, en même temps que tous les chefs de la droite, MM. De L.antsheere, De Baerne, deMérode. de Burlet, le ministre de la Justice d'alors M. WOESTE. On voit que, depuis dix ans, grâce aux divi sions qui ont frappé d'impuissance le parti libé ral, le cléricalisme a fait du chemin. Voilà qu'on veut nous imposer un régime scolaire que l'auteur de la loi de malheur trou vait excessif, et que M. Woeste jugeait mau vais. Le cléricalisme veut arriver la dislocation complète de notre enseignement public. Ce qui nous reste encore de notre organisa tion scolaire est en danger. La consécration of ficielle des congrégations enseignantes, désor mais elevees au rang d institutions nationales est dans l'air. Libéraux ayons l'œil ouvert et veillons au grain. Si nous restons désunis et indifférents devant ce péril social, renonçons former encore un parti politique. L'heure est mal choisie pour grossir les griefs et les nuances qui nous empêchent de marcher la main dans la main.' Il faut courir sus l'en nemi, et sans tarder. Voilà ce que disent le bon sens et le patrio tisme. Quand finira-t-on par les écouter? On écrit de Bruxelles, la Meuse L'on annonce que la sanction de l'obliga tion du vote consistera dans de légères amen des. Le vote obligatoire n'est pas une innovation dans notre pays, mais l'infraction ce principe était loin d être traitée naguère avec tant d'in dulgence. Il est même intéressant de remémo rer ce propos l'importance qu'on attachait la présence de l'électeur au scrutin et la sévé rité qu'on montrait au cas de manœuvres do- leuses en matière électorale. C'est l'occasion de fraudes électorales criantes survenues Louvain lors de l'élection des bourgmestres, chefs doyens et autres personnes composant le magistrat que le Conseil de Brabant chargea l'un de ses membres, Goswin de Wynants, de préparer un projet de loi sur les fraudes élec torales. Ce projet fut adopté et devint loi de l'Etat le 17 Décembre 1696. On n'y allait pas de main morte L'édit rétablit pour les élus comme pour les électeurs l'obligation du serment qu'ils n'ont rien donné, ni reçu, ni promis. Le serment devait être prêté sans aucune restriction mentale [sonder eenige restrictie mentael). 11 défendait toute partie de vin et de mangeailles en vue des élections, soit avant, soit après. Et sous quelles peines! De ne pouvoir remplir désormais aucun mandat, de la perte des emplois que l'on occupait et du droit de vote et d'éligibilité. Il faut croire que l'Université de Louvain se distinguait en matières de fraudes, car elle é$t spécialement visée. Tout délinquant en possession d'une chaire, d'une présidence de Collège, d'un bénéfice académique quelconque, dit la loi, le perdra et l'Aima Mater est informée que ses privilèges particuliers de juridiction ne mettront pas ses enfants l'abri de la vindicte publique. Toute personne qui quitte le local avant d'avoir donne son vole est frappee d'une amen de de cent florins. L'on avait tellement peur de la pression administrative qu'on rendait inhabile voter et inéligible quiconque était au service de la ville, depuis le notaire jusqu'au dernier des employés. Il est vraisemblable que l'absent aux élec tions futures en sera quitte pour 5 ou 10 francs d'amende. C'est !e cas de dire Autre temps, autres mœurs. Le clergé (voir le mandement de l'évêque de Liège) veut faire du socialisme clérical, pour mieux venir bout du socialisme anticlérical et réussir atteler le peuple son char. Pourquoi, puisqu'il veut sacrifier la manie collectiviste, ne comraence-l-il pas par s'appli quer lui-même les réformes dont il s'en va prêchant la nécessité L'Eglise a, elle aussi, ses ouvriers pauvres les petits vicaires, les humbles desservants des hameaux. D'autre part, elle a aussi ses patrons riches les curés des cures bien dotees et les doyens des gras doyennés elle a aussi ses opulents aris tocrates les chanoines, évéques, archevêques et prélats de tout genre qui, méprisant la vul gaire robe noire, s'affublent de pourpre et de violet, se font traiter de Messeigncurs et d Emi- nences, et vivent dans une opulence fastueuse et princière. Allons, Messieurs, un bon mouvement si vous voulez être démocrates, brisez donc toutes cette organisation aristocratique qui greffe le luxe de quelques uns sur le prolétariat ecclési astique des autres. M. X. Neujean vient d'envoyer aux présidents des associations libérales du pays, au nom du comité de la Fédération, une lettre où ils les prie de bien vouloir se rendre Bruxelles, Vendredi prochain, 9 Mars, midi et demi, au local de la Ligue libérale, rue Jules Van Praet, 6, afin d'aviser avec le comité de la Fé dération libérale aux mesures d'organisation du congrès. A cette lettre est joint le texte de I' Avant-projet de programme du comité de la Fédération des Associations libérales. I. Maintien et extension de l'enseignement public, tous les degrés, sous la direction ex clusive de l'autorité civile relus do toute sub vention de l'Etat aux écoles libres d'enseigne ment primaire. Neutralité de l'enseignement public. Et comme mesure d'application a. Révision de la loi de 1894 sur l'enseigne ment primaire b. Instruction primaire obligatoire -, II. Application aussi complète que possible, dans les lois et dans l'administration, du princi pe constitutionnel de la séparation des Eglises et de l'Etat, et comme mesures d'application: b. Suppression des honneurs rendus au clergé d'après le décret de messidor an XII d. Revision de la législation sur le temporel des cultes c. Rétablissement des écoles gardiennes et d'adultes, extension des écoles ménagères, in dustrielles, professionnelles et agricoles. a. Suppression des privilèges accordés aux ministres des cultes en matière de milice c. Respect des lois prescrivant la sécularisa tion des cimetières e. Suppression de l'obligation incombant aux communes et aux provinces de combler le défi cit des fabriques d'églises

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Le Progrès (1841-1914) | 1894 | | pagina 2