18. Jeudi,
5 Mars 1896
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
AVIS.
Leur majorité.
Les scandales politiques.
L'enquête Matines.
56e ANNÉE.
6 FRANCS PAU AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
On traite forfait.
Le Comité de l'Association libérale d'Yprea
invite ses amis politiques qui auraient reçu no
tification de leur radiation des listes pour le
Conseil de Prud'hommes, de se présenter SANS
RETARD, munis des dites pièces, an Bureau
de l'Association, rue du Séminaire.
Les réclamations, après avoir été présentées
au Collège des Bourgmestre et Echevins, doi
vent, le cas échéant, être adressées la Cour
d'Appel avant lajin du mois prochain.
Les cléricaux aiment faire étalage de la
colossale majorité que les hasards électoraux
leur ont procurée au parlement. Ils en parlent
avec enthousiasme, et se croient en droit de
tout oser.
Le suffrage universel est avec nous, s'é-
crient-ils. Et en apparence, c'est vrai.
Nous sera-t-il permis de leur demander, ce
pendant, si le suffrage universel a jamais récla
mé la jolie loi électorale communale dont on
nous a dotés.
Ou s'il a demandé d'être surchargé de 26
millions de francs d'impôts nouveaux.
Oj s'il a exprimé le désir de voir ajourner
aux calendes grecques la suppression de
l'odieux remplacement. militaire.
Ou s'il s'est prononcé en faveur de l'encléri-
calisatio'n complète du pays.
Le suffrage universel était avide de réformes
économiques qu'on s'obstine lui refuser.
Il ignorait que le Gouvernement tenterait un
jour de rendre obligatoire l'enseignement du
catéchisme, il ignorait que l'or du budget irait
enrichir les caisses des couvents.
Si on lui avait dit tout cela, ce pauvre suf
frage universel mutilé et abusé, peut-être eût-
il parle autrement.
Mais il convient d'examiner de près ce que
vaut cette immense majorité cléricale.
On peut dire qu'elle n'est que le produit frau
duleux de circonstances indépendantes de la
volonté vraie des électeurs.
1:11e n'est qu'une majorité de hasard
Il faut bien reconnaître, disait naguère
Paul Janson au Sénat, que le Gouvernement
n'est pas issu d'un premier tour de scrutin
acclamant, avec la puissance du suffrage uni-
versel, la politique que nous combattons.
Ce gouvernement, en effet, est sorti d'un ou
de plusieurs ballottages.
Or, qu'est-ce qu'une majorité sortie d'un scru
tin de ballottage M. Schollaert lui-même a
da gné nous l'apprendre, dans l'exposé des mo
tifs de la loi électorale communale
Aujourd'hui, y est-il dit, que le vote est
obligatoire, et que tous les électeurs sont te-
nus de se prononcer au premier tour de scru-
tin entre les candidats, en nombre limite, qui
s offrent leur choix, le ballottage nest plus
guere qu'une invitation aux coalitions...
L'aveu n'est-il pas precieux
On se souvient qu'en Octobre 1894, le pre
mier scrutin navait guère repondu aux espé
rances cléricales. Libéraux et socialistes purent
un instant caresser lespoirde 1 emporter.
Mais alors il se forma Bruxelles, Tournai,
Ath, Waremme, une honteuse coalition,
la coalition de la peur.
Et cest de celte coalition qu est sortie la ma
jorité cléricale.
Qu'on ajoute cela la scandaleuse répartition
de nos arrondissements et qu'on nous dise, en
âme et conscience, si les cléricaux ont le droit
de prétendre qu'ils représentent la volonté de
la majorité du pays.
Leur majorité est factice, en opposition avec
les sentiments vrais de nos populations. Elle
trouve son origine dans une pratique déloyale
et absolument adultérée de notre régime repré
sentatif.
La Dépulaiion permanente de la Flandre
Occidentale, qui avait valide les élections clé
ricales d'ïpres, vient d'annuler les élections
libérales d Ostende.
Celait prévu.
Le déni de justice flagrant, perpétuel, fait
désormais partie des moyens de Gouvernement.
A Ypres, où les cléricaux n'ont triomphe qu'à
une majorité de deux cents voix, il y avait eu
des actes de pression nombreux et avérés. Les
administrateurs des hospices avaient parcouru
les divers asiles de vieiliards placés sous leur
direction en recommandant ces pensionnaires
de vo.er clericalement sous peine d'être taxés
d'ingrats ils avaient organisé, pour s'assurer
des votes ainsi arrachés par I intimidation, un
système de surveillance étroite et rigoureuse
tous les vieillards avaient ete conduits au scru
tin sous bonne escorte et comme des prison
niers astreints une besogne pénitentiaire.
Cela est acquis, démontre, avoué par les chefs
mêmes du cléricalisme Yprois. Et cependant,
sans même qu'il fût question d'enquête, 1 élec
tion d'Ypres a été validée.
A Ostende, les libéraux ont triomphé une
majorité de six cents voix. Il a été articulé par
le parti clérical une demi-douzaine de faits
abusifs, dont l'influence électorale s'est limitée
une vingtaine de suffrages. Immédiatement,
la Dépulaiion permanente de la Flandre Occi
dentale a annulé I élection.
Le Gouvernement a approuvé l'inique valida
tion des élections d'Ypres il approuvera l'ini
que annulation des élections d'Ostende.
Que devient dans tout cela le pouvoir modé
rateur, l'équitable et suprême juridiction de la
Royauté Ne semble-t-il pas, vraiment, que le
Roi des Belges se soit jamais desintéressé des
scandales politiques de son pays, pour n'avoir
plus d'yeux que pour ses possessions d'Outre-
Mer?
L'eleclion d'Alosl, la scandaleuse et inoublia
ble élection d'Alost. eût dû solliciter son inter
vention. On catholique, un abbé, a dénoncé
celte élection contaminée par les fraudes les
plus évidentes, par la corruption la plus ehon-
tèe, parla pression la plus savamment organi
sée. Il suffisait de vingt cinq voix pour faire
arriver au conseil communal une minorité de
libéraux.
Eh bien, malgré cette majorité minuscule,
malgré l'évidence de la fraude étalée au grand
jour, malgré les poursuites intentées par le par
quet contre une vingtaine de corrupteurs mis
en prévention, le Gouvernement s'est incliné
devant l'incroyable arrêté de la Dépulation
permanente.
Il n y a plus, en Belgique, de justice admi
nistrative pour les libéraux.
Quand on lit les documents relatifs l'en
quête électorale ordonnée Malines, on se de
mande comment la Dépulation permanente
pourrait invalider des élections où les libéraux
font emporté plus de 700 voix de majorité.
On a été jusqu'à imaginer comme griefs des
tournées de sept verres de bière offerts dans
des cabarets par des libéraux. M. Coremans,
dans un accès de franchise, a déclaré la
Chambre que de tejles articulations étaient
dérisoires et que en invoquant de tels faits, on
pourrait annuler toutes les élections qui ont
eu lieu en Belgique.
L'Association libérale de Malines a publié au
sujet de l'enquête un exposé complet où elle
cite en toutes lettres les accusateurs et établit,
avec pièces l'appui, que la plupart sont des
mendiants et des colporteurs assistés par le Cer
cle catholique. Il en est même un, nommé G...,
qui a été condamné pour attentat la pudeur.
Comment peut-on s'arrêter au témoignage d'un
repris de justice? Enfin, on trouve également
dans la bande, des agents de police, dont l'un
est connu dans tout Malines comme, un menteur
fieffé Deux honorables citoyens, MM. Geys et
Van der VVyden, avec lesquels il affirmait avoir
causé, ont déclare avec indignation, dans une
lettre rendue publique, qu'ils ne font seule
ment pas vu.
Plusieurs accusateurs ont été convaincus de
fausseté dans les confrontations qui ont eu lieu.
Un certain Lauwers avait accusé l'agent Huy-
gelen de lui avoir raconte qu il avait reçu des
libéraux 5 fran.s et une bouteille de Champa
gne. Etaient présents [entretien, avait ajouté
Lauwers, deux instituteurs, MM. Van Camp et
Van Cauwenberg. Ceux-ci ont démontré pé
remptoirement que le fait était faux. En parti
culier, M. Van Camp était couché au moment
où il aurait soi-disant entendu la déclaration de
LE PROGRÈS
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Ypres, le 4 Mars 1896.