Nos finances. La politique cléricale. Les ouvriers. Les amis de l'Agriculture. A quand une petite représentation publique Ypres de ces deux comédiens Depuis 1884, date del'avènement descléricaux, nos impôts ont augmenté dans de fortes propor tions, toujours, naturellement, au détriment du pauvre que les droits de consommation attei gnent chaque jour de plus en plus durement. Bon an mal an, le ministère clérical a disposé chaque année de 60 millions de plus que le mi nistère libéral qui l'a précédé soit pour 12 an nées, SEPT CENT VINGT MILLIONS. Un joli denier. Et cela malgré la mise charge des communes ou des provinces de certaines dépenses qui autre fois incombaient l'Etat. Ce n'était pas encore assez. 11 y a huit jours, les Chambres votaient vingt millions d'impôts nouveaux, sans examen. Et malgré l'augmentation des impôts, nos clé ricaux ont trouvé moyen d'augmenter la dette jmblicjue, en douze ans, de CINQ CENT MIL- Oh les administrateurs modèles Un père de famille qui en ferait autant, en proportion, dans son ménage serait bientôt mis sous conseil judiciaire. On n'a qu'une ressource contre un ministère aussi ruineux le renvoyer. Dans tout le pays, il y a un grand mouvement contre le ministère. A Namur, les candidats cléricaux sont assurés de la défaite. Il est visible, lorsqu'on lit ce qu'ils disent, qu'ils n'espèrent plus dans l'issue de la lutte. A Anvers, où les cléricaux croyaient pouvoir dormir sur leurs deux oreilles, le réveil du libé ralisme s'accentue de jour en jour, et nos amis ont les plus grandes chances de l'emporter. Un associé d'une des plus puissantes firmes de distillerie anversoise,un conservateur catholique bon teint, a répondu des choses très intéressan tes un de nos confrères qui le questionnait. Il faut noter, pour apprécier toute l'impor tance do ces paroles, que les distillateurs ne per dront rien la nouvelle loi sur les alcools. Toute la perte sera pour les cabaretiers et les consommateurs. Il semble, a dit ce distillateur catholique, que M. de Smet de Naeyer soit fatigué du pou voir et veuille passer un autre les rênes du char de l'Etat. La dernière loi sur les alcools est absurde. Elle ameutera contre les représentants mee- tinguistes (catholiques) quantité de leurs amis. On parait d'ailleurs s'en apercevoir. M. de Smet de Naeyer n'est pas fatigué du pouvoir. La loi sur les alcools est tout simplement la résultantede la politique suivie par lescléricaux. M. de Smet de Naeyer avait besoin d'argent. 11 a été démontré satiété que les dépenses se sont considérablement accrues alors que le bien- être général a beaucoup diminué. La nouvelle loi scolaire, qui a été faite pour doter les écoles catholiques, exigeait plusieurs millions. Le gouvernement a trouvé qu'il était tout simple de les demander aux impôts de consom mation, d'en charger le peuple et la petite bour geoisie. Les catholiques qui Bont déroutés par le mé contentement qui éclate partout, expliquent la dernière loi augmentantles droits sur Tes alcools, en disant que M. de Smet de Naeyer semble fa tigué du pouvoir. Mais les esprits sensés disent que c'est le résul tat de la politique cléricale. De cette politique cléricale, on n'en veut plus. Partouton s'apprête voter avecenthousiasme contre les candidats catholiques, contre les can didats du gouvernement. Il y a un siècle, dans toute lEurope, les ouvriers étaient des parias. La bourgeoisie libérale du XVIIIe siècle, le Tiers Etat, a fait une révolution pour donner au peuple les Droits de Ihommo, légalité ci vile et la liberté de conscience. Il y a cinquante ans, en Belgique, l'ouvrier payait son pain 0.20 c. de plus qu aujourd'hui. Les denrées essentielles son alimentation étaient frappées la frontière et l'intérieur de taxes énormes. Le parti libéral est venu. Il les a dégrevées et a doté le pays d'un ré gime de liberté commerciale. Il a aboli l'échelle mobile des céréales, les barrières et les octrois. Il y a trente ans, en Belgique, les ouvriers qui se coalisaient commettaient un délit, et on les envoyait en prison. Le parti libéral est venu et il a donné aux ouvriers le droit de coalition pour la défense de leurs intérêts professionnels. 11 y a trente ans, en Belgique, quand un pro cès s'engageait entre un ouvrier et son patron, le patron était cru sur parole, et sa parole fai sait loi. Le parti libéral est venu et il a donné aux ouvriers l'égalité devant la justice. Il y a trente ans, en Belgique, l'ouvrier de vait porter avec lui son livret, qui le mettait la merci du maître. Le parti libéral est venu et il a aboli le livret obligatoire I Voilà ce que n'oublieront jamais les ouvriers intelligents et honnêtes. Les cléricaux allaient sauver l'agriculture. Qu'ont-ils fait Ils ont créé un nouveau ministère, créé de nombreuses places d inspecteurs, organise quel ques conférences et volé des lois protectionnis tes au profit des gros éleveurs de bétail et des grands propriétaires. Et c'est tout. On leur demandait la réduction de l'impôt foncier, une nouvelle révision cadastrale, une loi sur lassurance du bétail, une meilleure organisation du crédit agricole. Tout cela reste inaccompli. Un sénateur catholique de Gand a pu dire, en une heure de cruelle sincérité a Le Gouvernement ne nous écoute pas nous prêchons dans le désert. Qnand le parti libéral a, en 1884, quitté le pouvoir, il avait Supprimé les octrois, et fait ainsi dispa raître près de cinq millions de taxes nuisibles aux paysans. Supprimé les barrières, et affranchi d'un im pôt vexaloire la circulation des produits de l'a griculture Conçu l idée des chemins de fer vicinaux et jeté les bases de leur organisation Créé et répandu travers le pays un en seignement digne de ce nom, destiné éclairer les cultivateurs sur leurs véritables intérêts et sur les moyens de combattre la crise dont ils souffrent. Ce qu'ils ont fait, ils demandent l'achever. Leur œuvre est interrompue ils la repren dront quand le pays agricole ouvrira enfin les yeux la lumière et reconnaîtra ses véritables, ses seuls amis. Pour s'en convaincre, il suffit de jeter les yeux sur le programme de réformes rurales acclamé par le dernier Congrès libéral Programme de réformes agricoles Il réclame L'extension des comices agricoles L'extension des Conseils de conciliation aux différentes branches de l'agriculture La réduction et la réforme des droits de mu tation, d'enregistrement, de transcription et de timbre La revision du contrat de bail la réduction du privilège du bailleur dans le but de faciliter et d'étendre le crédit agricole Des dispositions légales assurant au fermier sortant une équitable indemnité raison de la plus-value qu'il a donnée aux terres Des dispositions destinées assurer une plus longue durée aux baux dans l'intérêt d'une congé préalable pour les bonne culture L'obligation du baux sans écrit Des mesures hygiéniques pour prévenir les maladies épidémiques du bétail L'assurance du bétail et des produits de l'a griculture sous la surveillance des autorités publiques La revision de la loi sur la chasse dans le sens d'une protection plus efficace des intérêts des cultivateurs L'application plus rigoureuse des lois sur la falsification des denrées et des engrais L'abaissement au minimum possible des prix de transport de toutes les matières destinées l'agriculture L'amélioration de la police et de l'hygiène publique dans les campagnes Une revision cadastrale et la réduction de l'impôt foncier. La rémunération des miliciens. Les pauvres diables qu'on condamne la caserne vont donc recevoir un supplément de gratification. On leur payait dix francs par mois on va leur en servir trente, dont quinze francs dé penser de suite, et quinze francs destinés s'agglomérer en un pécule qui sera payé l'ex piration du temps de service. C'est une méprisante aumône jetée la face du peuple. D'autant plus méprisante et plus odieuse que c'est le peuple, en somme, par l'établissement du nouvel impôt de vingt millions sur l'alcool, qui va la payer. La rémunération des miliciens, loin de ré soudre la question militaire, ne fait qu'aggra ver le péril que recèle la situation actuelle. L'iniquité de nos lois de conscription se trou ve accentuée et exacerbée. Le pauvre seul demeure tenu de verser son sang pour son pays le riche continue d'échap per ce devoir civique dont nul ne devrait être exempt Là est la révoltante injustice dont tous les esprits droits demandent le redresse ment. Pauvres et riches ont prester la même dette envers la patrie. Les pauvres seuls restent for cés de l'acquitter, et, pour leur faire prendre celle iniquité en patience, on leur paie un pourboire, comme des hommes de peine dont on veut récompenser l'active docilité. Eh bien, cela est tout simplement insultant pour ceux que leur situation de fortune prive des facilités du remplacement. On les traite en mercenaires, non pas en citoyens qui accom plissent un pénible devoir, mais en corvéables qu'on veut empêcher de trop murmurer. Le Gouvernement, qui est sans dignité de vant ses gros électeurs deux et trois voix, méconnaît scandaleusement la dignité du peuple Belge. L'armée, les nécessités de la défense natio nale, l'urgence de modifier un régime qui n'est plus pratiqué chez aucune nation civilisée, sont sacrifiées de viles préoccupations électorales.

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Le Progrès (1841-1914) | 1896 | | pagina 2