Le capital. La capucinière Belge. \o 12. Jeudi, 57e ANNÉE 11 Février 1897. 6 FRANCS PAR AN. JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE* On traite forfait. Ypres, le 10 Février 1897. Par ce temps de démocratie l'extrême, une des accusations le plus couramment lancées contre notre régime de liberté industrielle et commerciale consiste lui reprocher d'avoir )our but et pour résultat l'accaparement de la ôrtune publique par quelques spéculateurs îeureux, au détriment de la masse laborieuse. Ce thème prête de faciles déclamations, auxquelles les oreilles complaisantes ne man quent pas. Bien des gens, en effet, sont assez portés se figurer que la fortune mobilière, dont ressort est devenu si prodigieux, est l'apanage de quel ques privilégiés. Cette illusion, car c'en est une, n'est-elle pas pour beaucoup dans l'antagonisme des classes et dans le succès, relatif et éphémère, des doc trines socialistes Injustes et contredites par les faits sont les préventions que ces doctrines exploitent. Un statisticien français, M. Neymarck, vient d'en fournir une nouvelle preuve dans un ex cellent opuscule, publié sous ce titre Le mouvement des valeurs mobiliaires. Évaluant 80 milliards la fortune mobiltaire de la France, M. Neymarck s'est proposé de re chercher la répartition de ce capital entre les mains de ses compatriotes. Or, le résultat de son étude est que ces 80 milliards se partagent entre environ cinq millions de titulaires, ce qui donne pour chacun, en moyenne, un capital de 12,000 fr., et 360 380 fr. de revenu. Sans doute, ce n'est là qu'une moyenne thé orique. et, de même qu'il y a nombre de ces titulaires dont le capital et le revenu sont fort inférieurs aux chiffres ci-dessus déduits, de môme il en est beaucoup dont la fortune mobi lière dépasse la moyenne générale. Mais il n'en est pas moins vrai qu'il y a en France cinq mil lions de capitalistes, grands et petits, soit un sixième de la population totale, femmes et en fants compris. La parabole du petit nombre des élus ne trouve donc pas ici d'application. D'autres exemples de M. Neymarck ne sont pas moins intéressants. C'est ainsi qu'il nous montre les 182,500 actions de la banque de France partagées entre 280,000 actionnaires, les 340,000 actions du crédit foncier réparties entre 40,000 délenteurs. Quant au capital des compagnies de chemins de fer, s'élevant au total 20 milliards, il ap partient douze cent mille actionnaires et obligataires: cela met la moyenne pour cha cun 17,000 francs environ. En somme, on peut dire que loin de tendre se concentrer de plus en plus en quelques mains, la fortune mobiliaire se répand et se démocratise chaque jour davantage par suite de la hausse des taux des salaires et de la baisse de l'intérêt, qui entraîne 1 amoindrissement du capital et le met la portée du plus grand nombre. Ce dernier phénomène éclate également avec évidence. C'est ainsi qu'en 1870 il n'y avait que 16,000 actionnaires en possession du capital de la Banque de France il y en a près du double aujourd'hui. La conclusion tirer de tout ceci, c'est que, s'il existe une classe de capitalistes, elle ne for me pas une caste fermee, et qu ses membres déjà nombreux s'en ajoutent sans cesse de nou veaux. Le capital se démocratise de plus en plus. C'est ce que ne voit pas le socialisme et qui l'empêchera de triompher. En 1849, il y avait en Belgique 774 couvents, comptant 2051 moines et 9917 nonneltes. En 1886, il y en avait 1292, avec une popu lation totale de dix-huit mille cinq cent qua rante-deux religieux des deux sexes. En 1890, le nombre des couvents atteint 1672, avec vingt et un mille cinq cent nonanle- six encloilrés. Enfin, en 1896, la Belgique en est arrivée posséder 2079 couvents, avec 26193 reli gieux 1 La fortune de ces établissements de main morte peut être evaluee trois milliards. Où allons-nous et qu'allons-nous devenir, si ce vaste ulcère clérical, s'etendant chaque jour, doit continuer de nous ronger Le fractionnement des partis. La Belgique, depuis 1830, a eu, pendant une soixantaine d'annees, un vocabulaire politique d'une simplicité extrême. On y était libéral ou clérical. Les deux expressions ne comportaient pas de nuances, sauf vers 1835 ou 1836, l'époque où Lamennais essayait de ramenerleCatholicis- me au Christianisme et où, sous l'influence de ce puissant esprit, le clergé belge se montrait hostile aux Jesuiles. Celte hostilité n'a pas été de longue durée. Les Jésuites sont devenus maîtres du terrain et le clergé séculier a rongé son frein en si lence. De leur côté, les libéraux ont eu quelques personnalités républicaines dont l'influence sur la politique du parti a été nulle. Quant aux socialistes, on ne les trouvait ni d'un côté ni de l'autre. Que les temps sont changés Au lieu de deux partis qui naguère se dispu taient le pouvoir et se partageaient peu près également un corps électoral restreint, nous en avons aujourd'hui une demi-douzaine, sans compter les subdivisions, qui aspirent se partager le pouvoir. Enumérons Les vieux cléricaux, Les démocrates-chrétiens, Les vieux libéraux, Les radicaux, Les socialistes, Les anarchistes. Voilà notre vocabulaire politique singulière ment amplifié, aussi ne peut-on se figurer le trouble qui en résulte dans les discussions aux quelles se livre la presse. Les cléricaux et renseignement. Chaque fois que la presse libérale signale une suppression d'école, les journaux catholiques ripostent en signalant les adoptions, et ils con cluent en disant qu'en réalité le nombre d'éco les augmente au lieu de diminuer. Il est permis de faire la bête mais il y a cependant une limite tout... Les écoles que M Schollaert adopte exis taient avant l'adoption, il n'y a donc aucun gain. Mais chaque suppression représente bien une école en moins. Un élève des petits-frères n'oserait même pas contester ce simple calcul I [Gazette) La discussion du projet de loi concernant la réorganisation de la garde civique aura-t-elle lieu au cours de cette session En recevant la circulaire du comte d Oultre- mont, commandant la garde civique de Brux elles, plusieurs commandants de la légion se sont posés la question. En effet, il n'est tenu aucun compte, dans ce document, du projet soumis aux Chambres et les exercices généraux sont annoncés pour le mois de Mai. Daulre part, la section centrale a examiné la loi Schollaert comme si elle devait être dis cutée, c'est-à-dire très sérieusement, modifiant môme le projet dans ses parties essentielles. Il est vrai qu'elle avait fait subir aussi un examen, non moins grave, au projet des unions professionnelles et tout le monde sait qu'il ne sera pas discuté celte année. Bref, l'on se demande encore si le Roi ne va pas être joué et dupe par le ministère, ce qui est probable. Il a promis au souverain, comme compensation l'abandon du service person nel, la réorganisation de la milice citoyenne. Ce n'est pas la première fois qu'il manque rait sa promesse. LE PROGRÈS TIRES ACyCIKIT Kt.VDO. ABONNEMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00 Idem. Pour le restant du pays7-00 tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue de Dixmude, 81. INSERTIONS Annonces la ligne ordinaire fr. 0-10 Réclames la ligne, fr. 0-25 Insertions Judiciaires la ligne, un franc. 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Le Progrès (1841-1914) | 1897 | | pagina 1