AVIS IMPORTANT.
Un comble.
A propos d'enseignement.
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88. Jeudi,
57e ANNÉE,
4 Novembre 1897,
0 FRANCS PAR AN.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
On traite forfait.
Le Progrès sera envoyé gra
tuitement jusqu'au premier Jan
vier prochain, aux personnes
qui s'abonneront, pour une an
née, dater de celte époque.
11 existe, sur les confins du Brabant, dans
une enclave qu enserre la province de Lim-
bourg, une petite commune du nom de
Rummen.
Le curé y est le maître absolu.
Un jour, c'était en 1889, le tonsuré
jugea qu'il y avait lieu de remplacer l'école
communale de filles par une ecole de reli
gieuses.
Et aussitôt le conseil communal d'obéir. En
un tour de main, une nonnette fut appelée
remplacer linstitutrice communale, brutale
ment mise en disponibilité pour cause de
suppression d'emploi.
Mais le révérend et ses dociles pantins
avaient trop compté sur l'inerte passivité de
leur victime. L'institutrice révoquée, Madame
Van Hove, ne se laissa pas faire, et, la loi la
main, elle assigna la commune de Rummen en
paiement de l'intégralité de son traitement.
Vous n'avez pas supprimé mon emploi,
disait-elle ses persécuteurs de robe longue et
de robe courte, puisqu'une institutrice avec
guimpe remplit aujourd hui loffice auquel
j etais proposée. Votre mise en disponibilité
n'est donc qu'un acte de pure vexation, ab-
solument illégal et dont il n'y a pas lieu de
tenir compte.
Le Tribunal de Louvain d'abord et la Cour
d'appel de Bruxelles ensuite, donnèrent raison
Madame Van Hove et condamnèrent la com
mune de Rummen lui payer, outre tous les
frais du procès, une somme denviron six mille
francs.
Six mille francs payer, alors qu'on avait
vidé la caisse communale pour satisfaire 1 ap—
pétit des petites sœurs I Que faire? Allait-on
frapper les contribuables de Rummen d un sup
plément d'impôts pour leur faire expier l'illé
galité commise parleur administration imbé
cile? 11 l'eut fallu, en stricte justice et en
loyale administration mais le curé de Rum
men trouva plus commode d'endosser au gou
vernement la responsabilité financière de son
édit de proscription et un arrêté royal du 8
Septembre dernier est venu nous apprendre
que, pour aider la commune de Rummen
exécuter les condamnations que le fanatisme
de son curé lui a fait encourir, il lui est alloué
un subside de quatre mille francs.
C'est n'y pas croire, mais il s'est trouvé un
ministre pour soumettre la signature du Roi
un arrête aussi brutalement malhonnête.
Et voici, pour ceux qui douteraient encore
de 1 invraisemblable réalité de cette interven
tion gouvernementale, cet ukase stupéfiant
LÉOPOLDII, Roi des Belges,
A tous présents et venir, Salut.
Vu l'article 8 de la loi organique de l'instruc
tion primaire, 1884-1895, et notamment le 8e
alinéa de cet article, conçu en ces termes
Aucune dérogation aux règles générales con
cernant la répartition des subsides de l'Etat ne
sera admise qu'à raison de circonstances tout
fait exceptionnelles et en vertu d'un arrêté royal
motivé et inséré au Moniteur.
Vu le règlement général des 12 Décembre
1895 et 28 Octobre 1896, qui a établi les bases de
répartition des dits subsides -,
Considérant que la commune de Rummen
(province de Brabant) doit, en exécution de dé
cisions j udiciaires passées en force de chose j u-
gée, payer la dame Emérence Vanhove-Billen,
institutrice primaire communale en la dite
localité, des arriérés de traitement qui, la date
du 31 Décembre 1896, atteignaient le chiffre de
6,000 francs environ, plus les intérêts et les dé
pens
Considérant que la commune se trouve dans
l'impossibilité absolue d'acquitter cette dette,
si le gouvernement ne lui vient exceptionnelle
ment en aide qu'il y a donc lieu, dans l'espèce,
de faire application de la disposition légale re
produite ci-dessus
Sur la proposition de Notre Ministre de l'inté
rieur et de l'instruction publique,
Nous avons arrêté et arrêtons
Art. lr. Une somme de quatre mille francs
(fr. 4,000), imputer sur article 974 du budget
du dit département, pour l'exercice 1897, est al
louée la commune de Rummen, titre de sub
side extraordinaire de l'Etat, pour le service
ordinaire de l'enseignement primaire, pendant
le même exercice.
Art. 2. Notre ministre de l'intérieur et de
l'instruction publique est chargé de l'exécution
du présent arrêté, qui sera inséré au Moniteur.
Donné Bruxelles, le 8 Septembre 1897.
LÉOPOLD.
Par le Roi
le Ministre de l'intérieur,
et de l'instruction publique,
Ainsi donc, c'est entendu. Les illégalités
commises par les communes cléricales au profit
des congrégations religieuses, c'est le gouver
nement qui en paie les frais. Et ces encoura
gements la violation des lois passent sous
forme de subsides l'enseignement primaire.
Sous le beau régime où nous vivons, voilà
quoi l'on fait servir les deniers des contribua
bles. N'est-ce pas littéralement inouï? Alors
que les communes qui, loyalement et conscien
cieusement, remplissent leurs devoirs en ma
tière d'enseignement, se voient répartir des
subsides strictement limités et jamais inva
riables, celles qui partent en guerre contre
l'école officielle et violent audacieusement la
loi pour complaire au clergé sont autorisées
tirer des lettres de change sur le trésor public.
Les administrateurs de la commune de Rum
men ont vu leur conduite fletrie par la Justice.
Cest nous, contribuables du pays entier, qui
payerons lamende.
Voilà comment l'entend M. Schollaert, ce
plat valet des curés, ce triste bigot dont nos
evêques ont fait un ministre leur dévotion.
Dans un fort intéressant article de la Revue
de BelgiqueM. Sluys établit un parallèle en
tre l'état de Instruction primaire Bruxelles
il y a 60 ans et le développement qu'elle y a
a atteint aujourd'hui.
Inutile de dire que les progrès réalisés sont
énormes, sous tous les rapports et que l'ensem
ble des institutions scolaires de la capitale est
digne des plus retentissants éloges.
Il y a cependant une ombre ce tableau Si
les pouvoirs publics ont tout fait pour mettre
l'enseignement primaire la portée de tous, il
s'en faut encore de beaucoup que tous en re
cueillent le bienfait Lignorance n'a pas dés
armé il n'y aura pour la vaincre complète
ment d'autre moyen que (instruction obliga
toire.
C'est ce que M. Sluys établit en ces quelques
lignes, d'une mathématique éloquence
Malgré les efforts constants de ladminislra-
lion communale de Bruxelles il reste encore
dans la capitale du pays un résidu de 12,4
p. c. de jeunes gens illettrés le nombre de
jeunes filles illettrées doit être plus considé-
rable. 11. y a plus de 20 p. c d hommes de
vingt ans qui ne possèdent pas les éléments
fondamentaux de I nstruction primaire. Les
causes de celte situation sont a) letat éco-
nomique d'une notable partie de la classe ou-
vrière insuffisance des salaires, grand
nombre d'enfants dans beaucoup de familles,
etc. 6) l etat moral de trop nombreux pa-
rents qui n'apprécient pas l'instruction, lais-
sent vagabonder leurs enfants ou les exploi-
tent (enfants martyrs) l'alcoolisme très
répandu fait perdre beaucoup de parents le
«sentiment du devoir; c) l'insuffisance de
places dans les écoles publiques et privées a
été pendant de nombreuses années unobsta-
cle la diffusion de l'instruction dans les
couches profondes de la population.
La proportion des enfants qui abandonnent
les études primaires ébauchées vers I âge de
Il ans est encore considérable. Le dernier
rapport annuel signale que sur 1,738 élèves
qui ont quitté les écoles primaires en 1896,
il y en avait 1,262 ou 75 p. c. qui n'avaient
pas terminé leurs études.
Une enquête faite Bruxelles, en 1896,
établit que 3,03-5 enfants de 6 14 ans sur
22,244 ne fréquentent aucune école (1,612 en
apprentissage, 310 aident leurs parents,
1,113 sont en état de vagabondage).
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LE PROGRES
vires acyl'irit fcundo.
ABONNKMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00
Idem. Pour le restant du pays7-00
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insertions Judiciaires la ligne, un franc.
Les annonces sont reçues Pour l'arrondissement d'Ypres aux bureaux du progrès Pour
le restant de la Belgique et de l'Etranger, également aux bureaux du journal LE proores.
Ypees, le 3 Novembre 1897.
f. schollaert.