Lamoraleuniverselle Journal de FAlliance libérale d'Ypres et de l'Arrondissement BATAILLE DE COURTRAI Dimanche, 25 Août 1901 61e année. 54. Paraissant le MHmanche. PRIX DE L'ABONNEMENT poor la ville Par an 4 francs. pr la province Par an 4 fr. 50 Listes Électorales. La rancune du prêtre et le servilisme politique. La rancune du prêtre», voilà une expression proverbiale, qui, dans sa concision, reveleceque la persistance de la haine offre de plus opiniâtre. On a pu en constater un specimen frappant, dans les derniers débats de notre Chambre des Représentants. Qui ne se rappelle les persécutions atroces subies jadis par les instituteurs restes fideles au serment qu ils avaient prêté ((observer les lois du peuple belge. 11 semblerait que les années qui se sont ecoulees depuis, eussent dû releguer dans (oubli les inimitiés soulevées de part et d'autre, bit pour tant quel saisissant spectacle ne ve nons-nous pas dassister? Une occasion unique se présentait pour taire renaître le calme dans les esprits, il suffisait de passer (éponge sur le passé et de procéder une entente transactionnelle entre les par tisans de l'enseignement confession nel ou libre et ceux de l'enseignement officiel ou neutre. Or, celui-ci est en train d être ef frontément et cyniquement sacrifié celui-là, comme pour justifier ce mol d'un savant français La Belgique est le seul pays au monde où le gou vernement conspire contre l'enseigne ment de l'Etat. La façon dont, il y a peu de jours, a été reglee la loi des pensions est le plus audacieux coup de parti qui ait jamais été frappe dans notre malheu reux pays. xNi le cinquantième, ni le» trois quarts, ni la rétroactivité seule ment jusqu'au T Janvierde la présente année, n ont pu trouver grâce devant la majorité catholique, ce qui ne l'a pas empêche de deverser abondam ment ses faveurs sur les parjures et les déserteurs que l'on sait. Et quand il s'est agi de reviser les pensions militaires et même les pen sions ecclésiastiques, d'améliorer les traitements de la magistrature et mê me ceux.du clergé, tout cela a passe, la Chambre, comme une lettre la puste.Mais des qu il s estagi de laisser tomber également la manne gouver nementale parmi les plus indispensa bles et les plus intéressants des fonctionnaires, il n y a eu quun mou vement pour faire crier haro contre ces peles, ces galeux, assez oses de rappeler que tous les Belges sont égaux devant la loi Et, a propos de la propagande en treprise auprès de tous les membres de la Chambre, libéraux et catholi ques, pour faire entendre le langage de la raison et de la justice, helas le principal organe des éducateurs du pays, vient de taire cet aveu décou rageant: «Le projet Maenhoul ne pas sera pas, si, tout en ayant (adhésion de droite et de gauche, le gouverne ment est contre, au moment du vote, tous les membres de la majorité, même ceux qui auraient donne une déclaration écrite,se rangeront autour du gouvernement, au nom de la dis cipline du parti. Quand ces lignes paraîtront, ces tristes prévisions ne se seront que trop réaiisees. 0! rancune du prêtre» voilà bien de tes coups Tu es le roc contre le quel viennent se briser les efforts genereux des grands cœurs,aux prises avec les âmes serviles, formées par (éducation cléricale O. "V A suivre. L UNION FAIT LA FORCE. Vires acqcirit eindo. Du 1er Juillet au 31 Août, les admi nistrations communales doivent procé der la revision des listes électorales. Ces listes serviront aux élections qui auront lieu en 1902. Nous prions instamment les libéraux de veiller leur inscription et celle de leurs amis sur les dites listes, et ce avec le nombre de voix auquel ils ont droit. On peut s'adresser pour tous rensei gnements au secrétariat de VAssociation Libérale, rue du Séminaire, Ypres. 2) Feuilleton du Progrès. LA SIGNIFICATION HISTORIQUE de la (11 Juillet 1302) par G. DES MAREZ. Extrait de la Revue de Belgique. (Suite On conçoit que le patricien,jaloux de l'autorité dont il étail revêtu, ne se sentait guère disposé en faire un abandon facile. Il défendit ses privilèges avec énergie quand il les vit menacés, et si son rôle s'était borné cette simple défense, ce n'eût été qu'un demi-mal, et il eût pu peut-être conjurer la violence du péril. Mais i'orgueil s'était em paré des patriciens. Au lieu d'aplanir les difficultés par un opportunisme .bien com pris, ils se montrèrent au contraire intran sigeants et s'efforcèrent même d'accroître cette autorité que le peuple venait «le mettre brusquement en question. Loin donc de vouloir apaiser le conflit naissant, les patriciens se permettent les plus grands abus. Ils se réservent l'impor tation exclusive des laines, de sorte que, maîtres de la matière première, ils tiennent en même temps dans une étroite dépendance les trois plus grands métiers qui s'occupent de la fabrication des drap#: les tisserands, les foulons et les tondeurs. Ils édifient une fortune scandaleuse aux dépens du trésor On s'abonne au bureau du journal, rue de Dixmude, 53, Ypres. Les an nonces, les faits divers et les réclames sont reçus pour l'arrondissement d'Ypres, les deux Flandres, le restant de la Belgique et de l'Etranger, au bureau du journal Le Progrès ON TRAITE A FORFAIT. public, et chargés de répartir l'impôt, ils s'exemptent personnellement, couvrent de leur protection leurs parents et leurs amis, e.t laissent retomber sur le'peuple tout le poids de l'impôt public. Investis du droit de rendre la justice, les patriciens étalent une partialité révoltante. Aussi, écoutez Jean Boendaele, qui fut se crétaire d'échevinage, et qui s'écrie dans un mouvement d'indignation Celui qui fait un pas pour acheter l'échevinage, achète l'enfer. Sur dix échevins, un seul tient équi- tablement la balance. L'amitié, l'envie, ca deaux, parents, lui font chaque heure trahir la justice. Et plus loin, il ajoute t De quelque éclat que soit entouré le siège échevinal, mieux vaut garder les moutons que de s'y asseoir. A tant d'injustice, il ne restait plus qu'à joindre l'insulte et la cruauté Juges et parties la fois, les patriciens décident que dans certains cas. il leur sera permis de souffleter un artisan. Ils se livrent sans honte au rapt et au viol, et lorsque la comtesse Marguerite, désireuse de refréner de tels excès, porte enfin une ordonnance condamnant une amende de 60 sous et un bannissement de trois anscelui qui oulève une fille bourgeoise, le scribe gantois, .qui consigne la loi dans le registre de la ville, écrit en marge ce triste commentaire La loi ne frappe nullement celui qui enlève la fille d'un pauvre, même lorsqu'il se refuse l'épouser et n'en a voulu faire que sa maîtresse. Dans la discussion qui a eu lieu la Chambre, lé mois dernier, au sujet de l'instruction publique, divers orateurs de la droite se sont efforcés de démon trer que l'enseignement de la morale est inséparable de celui de la religion, et que la première ne peut même pas s'enseigner sans l'autre. Le nom de Frère-Urban est intervenu plus d'une fois dans ce débat, mais personne n'a rappelé ia vraie manière de voir de ce grand homme d'Etat. Voici, sans équi voque possible, comment il s'exprima sur ce sujet la Chambre, le 27 Mai 1879 Quant enseigner la morale sépa rée du dogme,c'est cequi me semble en vérité des plus facile. Je me suppose un instituteur. Mes enfants, dis-je, mes élèves, vos parents appartiennent des religions différentes, les uns sont catho liques, les autres sont juifs, les autres sont protestants. Suivez les conseils de vqg parenl» et des ministres de vos cul tes respectifs pour tout ce qui regarde vos religions. Je ne m'en occupe pas. Je vais vous entretenir de la morale elle est la même pour vous tous, quoi que placée sous la sanction de dogmes religieux différents. Et je leur montre rai quotidiennement des applications de cette morale identique. Il y aura cela de grands avanta ges, c'est de prouver que l'on peut s'ai mer et s'estimer les uns et les autres, pourvu que l'on pratique les vertus so ciales, la morale chrétienne, si vous voulez, qui ne se distingue pas des au tres que l'on doit, non sé haïr, mais se tendre la main, quoique l'on appar tienne des cultes différents. On ne pouvait mieux définir le rôle de l'école publique, subsidiée l'aide On peut deviner aisément quelle devait être la résultante finale de cette crise qui troublait si fortemeut la vie sociale partir du xiii* siècle. On courait au devant d'une conflagration générale. Tout le monde était mécontent la petite bourgeoisie, le prolétariat et même le bas clergé représenté surtout par les moines des ordres mendiants. La moyenne bourgeoisie, composée de petits patrons, travaillant pour leur compte personnel,sedemandaitpourquoi elle n'avait aucun droit l'administration de la cité alors qu'elle avait tous les impôts payer, pour quoi pour elle, cette médiocrité forcée, ren due d'autant plusodieusequ'on la lui imposait avec insolence. Cette moyenne bourgeoisie était mécontente, elle maugréait et exigeait la réforme sociale. Les salariés, qui composaient le fond de la population industrielle des villes, étaient bien plus plaindre encore. Ils grouillaient dans les étroites ruelles des villes où lo geaient aux portes de la cité dans de misé rables taudis loués la semaine. Ils vivaient au jour le jour, comme nos prolétaires mo dernes, exposés tous les hasards des fluc tuations économiques. Les laines anglaises cessaient-elles d'affluer dans le pays, les métiers chômaient aussitôt, et des milliers de sans-travail se voyaient condamnés la raeadicité. Fouettés par la misère, ils quit taient par bandes leurs foyers, erraient de ville en ville, et se pressaient l'aube du jour sur les marchés pour y attendre le pa tron qui voudrait bien les engager pour une obole. Cette classe-là, ce prolétariat, était ANNONCES Annonces 15 centimes la ligne. Réclames 25 Annonces judiciaires 1 fr. la ligne. des deniers de tous. La presse cléricale a beau s'insurger, l'école de tous, l'é cole subsidiée par tous ne peut subor donner l'enseignement de la morale une religion déterminée. Ce serait d'ailleurs diminuer la mo rale. Alors que les diverses religions se combattent et s'excommunient mutuel lement, toutes admettent les mêmes principes de morale. C'est la preuve que la morale est antérieure et supé rieure aux religions. Nous disons supérieure parce que la morale ne connaît pas de sectes, pas de partis, et qu'elle n'a pas de politique défendre ou absoudre. Ainsi, comme elle con damne toute violence, elle flétrit des actes dans le genre de la Saint-Barthé lémy, qui n'est pour elle qu'un atroce massacre, et des hommes comme Tor- quemada et le duc d'Albe, dont la cruauté lui fait horreur. Mais adressez- vous la morale basée sur la religion catholique, c'est-à-dire asservie une secte, un parti religieux, et aussitôt vous verrez se déformer la claire notion du respect de la vie humaine. Le pré cepte Tu ne tueras pas auquel la morale universelle n'admet pas de res triction, va changer de caractère et recevoir de dangereux tempéraments. On fera remarquer que les victimes étaient des hérétiques qu'elles ni aient la vraie foi qu'elles repré sentaient un danger au point de vue de l'unité religieuse ou politique et qu'enfin leur mort a pu paraître non seulement nécessaire, mais agréable Dieu. Voilà ce que devient un principe de morale d'une évidence incontestable et d'une portée universelle lorsqu'il est assujéti à-une Eglise particulière et interprété par une secte forcément ex clusive et intolérante. De même les sectaires de la Réforme absoudront Calvin du supplice de Ser- vet et, malgré le précepte Homicide point ne seras représenteront les cruautés commises par les protestants comme de justes représailles. De même encore les sectaires de la Révolution française excuseront ou défendront Robespierre et ainsi du moment que mécontent, lui aussi, il maugréait et de mandait la réforme. D'épais nuages s'amoncelaient ainsi in sensiblement l'horizon de la Flandre, nuages pleins de sang et de deuil. L'orage approchait et s'annonçait terrible. Pour rallier tous ces esprits mécontents etleur donner en quelque sorte la conscience de leur force brutale, il ne restait plus qu'à trouverquelquesmeneurs Ceux-ci surgissent aussitôt. Ce sont des moines appartenant aux ordres mendiants, des Franciscains sur tout. S'ils ne conduisent pas directement le peuple au massacre et l'incendie, ils se chargent de réveiller son entendement poli tique. Mieux que personne, ils comprennent ces aspirations parce qu'ils sont sortis eux- mêmes des rangs populaires. -Ils ont vu de leurs yeux d'enfants la misère assise au foyer paternel, et ils ont laissé bien loin derrière eux, dans les bas-fonds de la souf france, leurs parents et leurs amis, mais ils ne les ont point oubliés. Ils se sont faits moines dans un élan de mysticisme sincère et désintéressé, mais peine ont-ils trouvé accès dans les rangs supérieurs de lasocieté, qu'ils se sout révoltés la vue de legoïsme qui y régnait, et quand ils ont vu de plus près la vie scandaleuse des moines des or dres aristocratiques, tels que les Bénédictins, ils ont senti toute leur foi leur monter au visage, ef eux aussi, ils étaient malheureux, et écoutant la voix du sentiment plutôt que celle de la raison, ils se déclarèrent sans hésiter les défenseurs de la rénovation so ciale et religieuse.

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Le Progrès (1841-1914) | 1901 | | pagina 1