Journal de FAlIiance libérale d'Ypres et de F Arrondissement
BATAILLE DE CÛURTRAI
Dimanche, 5 Octobre 1901.
61e année. N° 41
l union' PAIT la force.
Paraissant le Dimanche.
La Capucinière belge.
A.
Les effets
de l'ajournement.
Vires acqcirit ecndo.
PRIX DE L'ABONNEMENT:
pour la ville Par an AL francs.
pr la province Par an 4 fr. 50
On s'abonne au bureau du journal, rue de Dixmude, 53, 4 près. Les an
nonces, les faits divers et les réclames sont reçus pour l'arrondissement d'Ypres,
les deux Flandres, le restant de la Belgique et de l'Etranger, au bureau du
journal Le Progrès ON TRAITE A FORFAIT
ANNONCES
Annonces 15 centimes la ligne.
Réclames 25
Annonces judiciaires 1 fr. la ligne.
Ils pullulent décidément, les moi
nes et nonnettes d'importation. A Bru
xelles même, les religieux français en
combrent nos rues, et la statistique
de l'invasioD noire sera certes intéres
sante, lorsque, dans quelques mois, il
sera possible de la dresser.
En attendant, si nous établissions
celle des congrégations religieuses qui
florissant déjà sur notre sol Les chif
fres publiés de-ci de-là diffèrent énor
mément, et ces divergences suffiraient
justifier le travail auquel nous nous
sommes livré.
Ouvrons une publication en grande
faveur dans le monde clérical, 1' "An
nuaire complet du clergé belge et Ré
pertoire des établissements religieux
Les treize pages consacrées, dans l'é
dition de 1901, aux communautés reli
gieuses d'hommes leur attribuent 292
établissements en Belgique les soi
xante-cinq pages consacrées aux com
munautés religieuses de femmes, 1,950.
Ce sont, en effet, très peu de chose
près, les chiffres non encore vérifiés
d'ailleurs qu'ont recueillis les agents
du recensement décennal, le 31 Décem
bre 1900.
Or, d'après les recensements géné
raux précédents,il y avait en Belgique:
En 1846 137 maisons conventuelles
occupées par des religieux (1,472 Bel
ges et 579 étrangers) et 642 occupées
par des religieuses (9,043 Belges et 874
étrangères)
En 1856 145 maisons occupées par
des religieux (1,799 Belges et 584 étran-
gersj et 848 occupées par des religieu
ses (10,953 Belges et 1,289 étrangères);
En 1866 178 maisons occupées par
des religieux (2,298 Belges et 693 étran
gers) et 1,144 occupées par des religieu
ses (13.412 Belges et 1,793 étrangères);
En 1880 213 maisons occupées par
des religieux (3,042 Belges et 1,078
étrangers! et 1,346 occupées par des re-
9) Feuilleton du Progrès.
LA SIGNIFICATION HISTORIQUE
de la
(11 Juillet 1302)
par G. DES MAREZ.
Extrait de la Revue de Belgique.
(Suite
Si l'écho du triomphe de Courtrai retentit
de la mer du Nord jusqu'au-delà des Alpes,
l'intérieur du comté, l'enthousiasme démo
cratique fut son comble Le peuple délirait.
A Gaud, dès que l'issue de la journée fut
connue, c'est-à-dire dans la matinée du 12
Juillet, les artisans se précipitent dans la
rue. La bannière aux armes de Dampierre
est arborée et le lis traîné dans la boue.
Jamais, dit Van Velthem, on n'entendit
pareilles sonneries de cloches et de clairon.
Les Clauwaerts prirent le dessus... Les pa
triciens n'osaient plus leur résister, cause
de la victoire qui venaient d'être remportée,
et certains d'entre eux, ajoute le Minorité,
embrassèrent par terreur le parti du comte
de Flandre.
A Ypres, les métiers courent aux armes,
massacrent les patriciens. Mais l'élément
aristocratique résiste vaillamment et se
maintientau pouvoir. Il ne succombera qu'en
1325, et encore sa défaite ne sera-t-elle que
passagère, car en 1329 déjà il ressaisira les
rênes du gouvernement de la cité.
Comme on s'était battu Courtrai pour
la réalisation d un idéal socialetéconomique,
les vainqueurs se préoccupèrent avant tout
ligieuses (17,996 Belges et 3,246 étran
gères)
En 1890 218 maisons occupées par
des religieux (3,422 Belges et 1,353
étrangers) et 1,425 occupées par des re
ligieuses (21,163 Belges et 4,160 étran
gères).
C'est-à-dire que, en chiffres ronds
La Belgique ayait, en 1846, 780 éta
blissements congréganistes, avec une
population de 12,000 religieux des
deux sexes, dont 1,450 nés l'étran
ger.
Elle en a aujourd'hui ou plutôt
elle en avait avant l'invasion des con
grégations françaises environ 2,240,
avec 38.000 religieux et religieuses,
dont 7,000 étrangers.
Le nombre des couvents a TRIPLÉ,
celui des religieux et religieuses égale
ment et, parmi ceux-ci, le nombre
des étrangers a QUINTUPLÉ
Nous ne pouvons, ici, que grouper
les chiffres. On en trouvera le détail
dans 1' Exposé de la situation du
royaume pour la période 1841-1850»,
pages 228-248 les Recensements de
la population de 1856, pages 231-
256 de 1866, pages 522-549 de 1880,
pages 980-982 de 1890, tome II, pages
448-451 1' Annuaire statistique do
1895, page 187.
Ce sont là toutes publications OFFI
CIELLES, et les chiffres ci-dessus ne
peuvent être contestés.
On ne saurait, malheureusement,
évaluer avec la même précision les ri
chesses des couvents. Nos associa
tions politiques ont, du moins, essayé
mainte fois d'en obtenir une estimation
approximative. Les calculs les plus ré
cents ont été communiqués au Congrès
de la Libre-Pensée qui s'est tenu
Louvain cette année, et nous les re
trouvons dans une très intéressante
brochure que vient de publier la Fé
dération nationale des sociétés de li
bres-penseurs
de la solution de la question sociale. A
Bruges, du haut de la bretèque,on proclame
une série de réformes populaires et le règne
du peuple commence. Dès le lr Août, on
défend d'augmenter le cens foncier payé par
las artisans censitaires on proclame la
liberté absolue pour tout individu de s'occu
per de commerce et d'industrie, et l'on sta
tue qu'à l'avenir les négociants de Bruges
seront exempts du droit de tonlieu par tout
le comté. Le 21 Octobre 1303, afin de con
server les richesses dans le pays, on défend
de transporter l'argent hors du comté ou de
fondre les monnaies coursables, et l'on vise
manifestementpar là la classe des patriciens,
qui voulaient en quelque sorte exercer une
dernière vengeance sur le peuple en lui en
levant les capitaux nécessaires au travail.
Ënfiii, on édicté des règlements favorables
aux tisserands et aux foulons, ou leur ac
corde le droit d'association et celui d'insti
tuer une caisse commune, et, comme cou
ronnement tout cet édifice de réformes
démocratiques, les Brugeois obtiennent le
4 Novembre 1304, une Constitution basée
sur le principe de la plus large liberté Les
six premiers articles garantissent l'individu
contre toute arrestation arbitraire, tandis
que d'autres proclament l'inviolabilité du
domicile.
Mais la question sociale pour être provi
soirement tranchée Bruges ne l'est pas
ailleurs. A Gand, les patriciens reviennent
la charge avec des chances de succès
Ypres, jamais ils ne sont domptés, et puis,
en dehors des villes, il reste le plat pays, où
un conflit social s'est aussi lentement pré
paré. Partout donc où la question sociale
reste debout, partout la lutte se prolonge.
Le triomphe des prolétaires urbains
Courtrai eut son contrecoup dans les eam-
La valeur des propriétés
appartenant aux con
grégations religieuses,
calculée en prenant
pour base le revenu ca
dastral de ces proprié
tés, s'élève fr. 612,517,000
La valeur des propriétés
(bâtiments et terres) ap
partenant des congré-
gâtions et louées des
particuliers peut être
estimée 117,411,000
Le matériel, le mobilier
et les objets d'art des
couvents représentent
la somme de 305,418,000
Total fr. 1,035,346,000
Il faudrait, pour, inventorier la for
tune complète des congrégations reli
gieuses, pouvoir ajouter ce chiffre
780 établis
sements.
Etablissements congréganistes: A. en 1846.
B. en 1901.
\en1846^dges'
étrangers
len 1901 \helges
—10550
-1450
51000
[étrangers7000
Nombre
de
reli
gieux
énorme de plus de UN MILLIARD la
valeur des terres, des prairies, des
bois, des usines, des manufactures, des
magasins, des hôtels, etc., que les reli
gieux possèdent PAR PERSONNES
INTERPOSÉES Pasquin.
{Petit Bleu du Vendredi, 27 Sep
tembre 1901).
'"v-'^AAAA/V\/VV'~~-r - -
pagnes. Pour soulever le paysan,il ne fallait
pas dépenser grande éloquence. La misère
du campagnard était un argument concret
qu'il suffisait d'invoquer pour exalter sa
grossière imagination. Comme l'artisan des
villes, le paysan se sentait malheureux. Il
cultivait en moyenne un lopin de terre de 1
hectare 10 ares (1), dont il devait vivre lui
et sa famille, et s'il avait pu garder au
moins le produit intégral de son labeur, il
aurait pu peut-être répondre ses besoins.
Mais de trois côtés la fois, on guettait une
part de la récolte le seigneur foncier ré
clamait son cens, le fisc l'impôt, l'Église la
dîme.
Le grain de la révolte, que semaient les
Brugeois, ne pouvait tomber en terrain plus
fertile. Il germa aussitôt. Nicolas Zannekin,
Lambert Bonin, Jean Siger, Jacques de
Bergues et divers autres sont élus capitaines
et se mettent la tête des hommes robustes
du Franc et du pays de Furnes. Les révoltés
vont se venger de tous ceux qui les ont op
primés. Les châteaux sont pillés et brûlés,
les nobles massacrés. La fureur du paysan
ne connaît bientôt plus de limites. Il arrête
le riche et lui tient ce discours communard
Tu plus diligis dominos quam communi-
tates de quibus vivis. Toi tu aimes
il) H. Pirenne vient de publier dans les mémoires in-8* de
la Commission royale d'histoire. l'Inventaire des biens des
Flamands morts a la bataille de Cassel. sous le titre de
Le soulèvement delà Flandre maritime- Bruxelles 1900
Ce precieux texte.qui renseigne la fortune dechaque'com-
battant paroisse par paroisse, nous a permis de dresser
ia statistique suivante - Dans la chàtellenie de Furnes,
sur ''"i11 possédaient de 1 5 mesures
0 ^.îâa7^lre h. 44 a 2 h. 30 ou i h. 10 ares en moyenne
24s, de s a 40 mesures ou 3 h. 30 ares en moyenne - 92
de 10 a 15 mesures ou 5 h. 50 ares en moyen ne 55 de 15 a
2ii mesures ou h. "0 ares en moyenne; 16 de 20 i 45
mesures ou 9 h. 90 ares - 9, de 25 30 ou 12 h. ares
»'aeî!a?? 0U,1o A de 35 a 40 ou 16 h. 6S ares
j1 ou 80 ar?? de '5 50 ou 21 hectares-
enfli., deux revoit»» cultivaient 28 h. 40 ares 43 c.. et un
autre 48 h. 40 ares x>c. Ainsi.60 p. c. environ nedétenaieut
3"!erre J,u.ne contenance moyenne de 1 h. 10 ares.
C était le prolétariat agricole, obligé de travailler la
jouruee dans les grandes fermes. amer a ia
L'accueil que l'on fait dans tous les
partis au projet militaire du gouverne
ment fait prévoir qu'il ne sortira pas
intact des discussions de la Chambre.
On peut rappeler aujourd'hui que s'il
subit quelques modifications heureu
ses, c'est grâce l'oppositiou et l'é
nergique attitude dont elle fit preuve
avant les vacances.
On n'a pas oublié en effet que noB
maîtres, prévoyant peut-être ce qui ar
rive aujourd'hui, prétendaient mordi
cus faire voter le projet par la Cham
bre avant la suspension de la session.
Ils espéraient sans doute que les dé
putés, surmenés par un labeur excessif
et désireux de partir au plus vite eu
vacances, bo seraient bornés un dé
bat hâtif, nullement approfondi, et
que l'opposition n'aurait présenté
qu'une molle résistance, convaincue
d'avance de son inutilité. N'avait-on
pas, en effet, clamé sur tous les tons et
dans tous les journaux cléricaux que la
droite était unanimement d'accord pour
approuver le projet gouvernemental
Ne faisait-on pas tout propos grand
état d'une réunion plénière de la majo
rité dans laquelle le cabinet avait ob
tenu (aux prix de quelles promesse
l'adhésion de ses fidèles son olla podri-
da militaire
Il est certain qu'en août dernier, M.
De Smet était sur le velours et que la
nouvelle loi aurait passé comme une
lettre la poste.
La gauche heureusement n'a pas
laissé faire. Elle a exigé l'ajourne
ment, et si pour obtenir elle a dû faus
ser quelques pupitres et entonner
quelques Marseillaisesce n'est pas
regretter aujourd'hui.
La droite a réfléchi pendant les va
cances, les yeux se sont ouverts et les
tares du projet sont apparues tous.
La belle unanimité d'il y a deux mois
mieux les nobles que le peuple dont tu vis.
Par un raffinement de cruauté, il le fait
mettre mort par un de ses parents qu'il
apostrophe de la sorte Tu occides eum
vel incontinenli morieris. «Tu le
tueras ou tu mourrastoi-mêraesurlechamp.»
Le clergé, comme la noblesse, tremble et
fuit. Il avait rempli ses greniers de la dîme,
extorquée ces crêve-faim, il avait manqué
tout devoir d'humanité par une cupidité
sans nom, et il savait que l'heure de régler
les comptes avait sonné. Le peuple se rue
sur les biens ecclésiastiques, les pille et se
les approprie sous prétexte qu'ils lui ont été
injustement enlevés. Il maltraite les prêtres
et les chasse du pays, et un de ses meneurs,
le capitaine Jacques Peyt, tient ce discours
presque incroyable Je souhaite qu'il n'y
ait plus au monde qu'un seul prêtre et que
celui-là encore soit pendu. Il refuse de
jamais mettre le pied dans une église, et
la tête de ses hommes, il poursuit le clergé
et le bannit du comté après avoir confisqué
ses biens. Il meurt dans un combat Hond-
schoote. Les démocrates le vénèrent comme
un saint et l'enterrent dans la chapelle de
Coudekerke. Mais aussitôt l'évêque de Té-
rouane ordonne d'exhumer le cadavre de cet
impie, de le brûler et de jeter ses cendres
aux quatre vents. Telle était cette révolte
agraire, provoquée au lendemain de la vic
toire de Courtrai, révolte dix fois plus ter
rible que tout ce qu'on avait vu depuis un
siècle l'intérieur de la ville. Cette bour
rasque révolutionnaire dura pendant vingt-
cinq ans. Elle conduisit les paysans °au
champ de Cassel en 1328, mais moins heu
reux que ne l'avaieut été leurs frères de la
ville en 1302, ils furent massacrés jusqu'au
dernier.
A suivre.