Chronique de la ville.
La reprise du Congo.
A l'Ecole de musique.
Lue prise de voile.
La tourelle de l'Abbaye
de St Jean au Mont.
La fêle
des Infatigables
Les funérailles
de 11. Emile Speybrouck.
Chronique lliéàlrale.
On avait la quasi-certitude que le
gouvernement allait déposer, au plus
tard la réouverture de la cession par
lementaire, le projet de loi consacrant
la reprise du Congo par la Belgique.
Ce projet devait d'abord être soumis
la commission coloniale qui aurait pu
l'examiner avant la reprise officielle
des travaux parlementait es.
Puis, on ne sait'trop poutquoi, il a
été dit que le dépôt du rapport aurait
lieu la Chambre, le jour fixé par la
Constitution pour l'ouverture de la
session.
Ce jour passé, on a prétendu que le
dépôt du projet aurait lieu dans le cou
rant de la semaine.
Actuellement, un bruit étrange cir
cule. Le projet n'est pas près d'être
déposé et il y a un désaccord grave
entre les plénipotentiaires chargés de
rédiger l'acte préalable.
Le désaccord serait si grave qu'on ne
pense pas qu'il pourra être aplani cette
année. Par le fait même la. discussion
de reprise du Congo serait renvoyée
la session prochaine, c'est-à dire un
an.
On parle beaucoup en ville de faits
graves qui se seraient passés l'Eco
le de musique et qui auraient fait
l'objet d'une dénonciation l'autorité
compétente.
Les parents des enfants, justement
alarmés, se demandent ce que l'on
attend pour agir
Il est des questions qui demandent
de promptes solutions on ne com
prend pas qu'une administration puis
se hésiter.
Dans le dernier numéro du Journal
d'Y près, Rosette fait ses adieux au
monde et la Rédaction.
Elle prend, dit-on, le voile dans un
monastère nouvellement édifié.
A nos lecteurs qui ignorent Ro
sette, nous dirons que c'est une con
citoyenne passagère et naïve que nos
maîtres, avec le tact et la délicatesse
qui les distinguent, ont choisie pour
mener toute la campagne de presse
pendant la récente période électo
rale.
Cette aimable personne, durant
quatre semaines, a bavé tout le fiel
de son âme dévote sur certains cori-
citoyens des plus honorables, qu'il
lui seyait mieux de respecter.
La malpropre besogne a ridicu
lisé son auteur et a fait grandir en
considération ceux que la charitable
Rosette était chargée d'amoindrir.
Rosette prend le voile, elle médi
tera dans sa retraite aux profondes
inimitiés qu'elle est parvenue se
créer.
Puisse-t-elle, désillusionnée et re
pentante, éteindre les innombrables
cierges de reconnaissance qu'elle
a béatement allumés ses soi-disant
bienfaiteurs.
En suite d'une décision prise par notre
Collège Echevinal, des ouvriers sont occu
pés depuis peu de jours, démolir l'intéres
sante tourelle située entre l'école communa
le de garçons et l'école des filles, et cela,
sous prétexte qu'elle est trop délabrée pour
être restaurée dans son état actuel.
Cet acte de vandalisme officiel sera jugé
et critiqué sévèrement par tous les esthètes
et archéologues qui s'intéressent comme
nous la conservation de nos monuments
anciens.
La construction de ce morceau d'architec
ture date du commencement du 17e siècle.
C'est un des rares spécimens en style
- Renaissance qui existe encore dans nos
Flandres.
La tourèlle, construite dans des propor
tions modestes, sobre d'ornementation et
appropriée au goût et aux besoins de l'épo
que, était d'un aspect pittoresque. Aussi
était-elle admirée comme une curiosité par
tous les étrangers amis de l'art ancien qui
venaient visiter nos monuments.
La disparition de ce dernier vestige de
l'Abbaye de S1 Jean au Mont est profondé
ment déplorable tous les points de vue.
Si, comme on le prétend la tourelle n'é
tait plus restaurable, ce que beaucoup de
personnes compétentes en matière de con
struction contestent, la faute en est l'in
souciance et la négligence de notre édilité
qui n'a pris aucune mesure pour la restau
rer et la consolider pendant qu'il en était
encore temps.
De l'avis de plus d'un homme du métier
cela pouvait se faire facilement et peu de
frais.
Aujourd'hui on consacrera peut être plus
d'argent pour démolir cette construction
qu'il n'en aurait coûté pour la mettre en bon
état.
Pendant les dix-sept dernières années on
n'y a rien fait pour conjurer cette perte pour
l'art. On s'est borné réparer tant soit peu
la toiture de la tourelle et enlever la tige
avec la croix qui la couronnait et qu'on a
jeté dans la ferraille.
Qui ne se rappelle la polémique acerbe
qui eut lieu en 1897, entre un esthète
Yprois qui se dit conservateur et le prédé
cesseur de M. Colaert., propos de l'état
de délabrement dans lequel on laissait nos
monuments
A Ypres, sous notre administration cléri
cale, on ne démolit que trop souvent la
légère d'après l'un ou l'autre rapport d'un
architecte des édifices anciens pour avoir le
plaisir de les reconstruire grands frais, et
pour lesquels on.sollicite alors l'intervention
du Gouvernement et de la Province.
Partout ailleurs, sous une édilité intelli
gente on est heureux de les restaurer et de
les conserver dans leur état primitif avec un
soin jaloux.
Avec la démolition de la tourelle de l'Ab
baye au Mont et qui, très probablement, ne
sera jamais reconstruite, disparait un souve
nir historique.
D'après nos chroniques, cette Abbaye
avait été fondée, dès le VIF' siècle, S1 Jean
le Mont, près Thérouanne. Après la des
truction de cette ville par ordre de Charles
Quint en 1553, les moines se réfugièrent
Bailleul où ils desservirent pendant nombre
d'années la chapelle de S' Antoine, près
Bailleul. Ils se dispersèrent de nouveau
l'approche des iconoclastes.
Le 27 Octobre 1600, d'après les ordres
des archiducs Albert et Isabelle, l'Evêque
d'Ypres, Mgr Simons permit ces religieux
de se fixer en cette ville et de prendre pos
session du chœur de l'église paroissiale de
S1 Nicolas. Ils élevèrent derrière cette église
leur couvent qui occupait un terrain très
étendu.
Dans la façade du bâtiment, au-dessus de
la porte du réfectoire àls avaient encastré en
deux groupes six boulets de canon cou
ronnés de flammes taillées en pierre et sur
lesquels était peint le chronogramme sui
vant DeLetI MorInI (l 553) -- reparant
hoc teMpore SeDes 1600), ces dates rap
pellent la destruction de Thérouanne et
l'installation de l'Abbaye Ypres.
Lors de l'invasion des Français en Belgi
que, l'Abbaye de S' Jean au Mont fut sup
primé comme tous les autres couvents. Mal
gré une protestation contre leur expulsion
datée de 1796, par les treize religieux exis
tant cette époque les bâtiments furent en
grande partie dévastés. Il ne restait debout
que le réfectoire et la haute tourelle. Cette
partie servait d'église paroissiale, partir
de la fin du Régime de la Terreur jusqu'en
1846. L'ancienne église de S' Nicolas avait
été vendue et démolie.
En vertu d'un arrêté royal du 28 Avril
1846, la ville fut autorisée faire l'acquisi
tion des bâtiments encore existant moyen
nant la somme de 14,000 fr. et les fit appro
prier l'usage d'école primaire communale.
Dimanche dernier, la Société de
gymnastique «Les Infatigables»nous
a régalé d'une charmante fête pour
l'ouverture de la saison d'hiver. Le
programme, très attrayant dans son
ensemble, fut rendu avec ponctualité
et a obtenu le plus grand succès.
L'ouverture pour symphonie ainsi
que tous les autres morceaux exécu
tés sous l'habile direction de M Tas-
seel ont fait beaucoup de plaisir aux
auditeurs et ont largement contribué
la bonne réussite de la fête.
Nous ne donnerons pas un compte-
rendu détaillé de cette belle fête,
l'espace nous fait défaut, bornons-
nous dire que les Mouvements d'en
semble par les pupilles et les adultes
ont été rendus la perfection que
le Ballet des Pêcheurs exécuté par
des garçons et des filles expressé
ment venus de Lille pour prêter leur
concours aux Infatigables a été le
clou de la fête. Ces jeunes artistes ont
été vivement ovationnés. Après la
remise d'une médaille en vermeil au
Président, tous les membres de cette
société française ont quitté la salle,
aux sons de la Marseillaise et de la
Brabançonne, l'heure de leur départ
étant arrivée. Nous leur disons au
revoir.
La première partie du programme
s'est terminée par un monologue dé
clamé par M. A. Gilon, notre conci
toyen habitant Ostende. M. Gilon
s'est surpassé et a été applaudi par la
salle entière.
Le second ballet la Fête au Vil
lage a été exécuté par des danseurs
d'élite toutes nos félicitations ces
disciples de Terpsichore. Les Poses
plastiques ont fait l'admiration du pu
blic et témoignent de l'étude appro
fondie, du courage et delà persévé
rance des exécutants.
La fête s'est terminée par une re
doute qui a été très animée.
M. Didier, Président des Infati
gables mérite les plus grands éloges
pour la façon dont il dirige cette
société il est vaillamment secondé
dans sa tâche par le vice-président,
M. Florent Maillard et par M. Jules
Brusselmans, moniteur des Infati
gables». C'est grâce leur initiative
que cette belle fête a pleinement
réussi et, nous les en félicitons cha
leureusement.
Les funérailles de notre ami Emile
Speybrouck ont eu lieu Lundi der
nier au milieu d'une grande affluen-
ce de monde.
En tête du cortège, qui a quitté la
Potyze 9 heures, marchait notre
Harmonie des Anciens Pompiers, ac
compagnée des membres de la Com
mission. Derrière venait la déléga
tion de l'Association libérale canto
nale d'Ypres précédée de son drapeau
revêtu d'un grand crêpe en signe de
deuil. Le corps, porté par des amis
du défunt, était précédé des porteurs
de couronnes, dont l'une en fleurs
naturelles était offerte par l'Associa
tion libérale, l'autre par la société
des Vrais Amis de la Potyze dont le
défunt était président. Cette société
était également représentée par une
forte délégation accompagnée de son
drapeau.
Les coins du poêle étaient tenus
par M. Emile Iweins, président de
l'Association libérale cantonale, M.
Théophile Maleveys, membre du
Comité de la dite Association, puis
par deux sociétaires des Vrais Amis
de la Potyze.
En dehors des membres des socié
tés, dont le défunt faisait partie, une
foule compacte d'amis assistait aux
funérailles.
Le deuil était conduit par le frère
et le fils du défunt.
Le service religieux l'église S'
Jacques a eu lieu au milieu d'une
assistance particulièrement nom
breuse. Il était 11 heures lorsque le
cortège se dirigea vers le cimetière.
Nombreux sont les amis qui ont
tenu accompagner Emile Spey
brouck jusqu'à sa dernière demeure.
Lorsque le corps a défilé devant
notre Harmonie libérale et devant
les délégations des sociétés, qui fai
saient la haie l'entrée du cimetière,
grande a été l'émotion ressentie par
tous les assistants.
La séparation a été cruelle pour
les parents du défunt dont la douleur
faisait peine voir elle ne l'a pas
été moins pour ses nombreux amis,
qui perdent en lui un excellent cama
rade, trop prématurément enlevé
leur affection.
C A lt M E
La foule considérable que l'annonce
de Carmen avait attirée, Mardi
dernier, a assisté un de ces régals
auxquels notre petite scène ne nous a
pas habitués
Qui ne connaît «Carmen», la fa
meuse Carmen laquelle Bizet doit sa
célébrité
Un jeune brigadier du régiment
d'A'manza, don José Navarro, conduit
une garde montante au poste situé
proximité d'un établissement où de
jeunes et bruyantes ouvrières s'occu
pent de la manufacture de cigares
Au nombre des cigarièrea se trouve
une guitana bien connue Sévi 1 le la
Carmenou. pour mieux dire, la Car-
mencita. Eprise de don José, la bohé
mienne, la conquête facile et aux
mœurs légères, met bientôt tout en
jeu pour séduire le vertueux basque
auquel la charmante et douce Micaëla,
orpheline adoptée par la mère de José,
vient d'appoiter le baiser maternel
Les grands yeux noirs et l'air ca
naille de l'effrontée Carmen ébranlent
la volonté du jeune brigadier qui lutte
désespérément contre le penchant in
surmontable qui l'épouvante. La né
cessité inévitable, que lui impose son
service, d'un tête à-tête avec la ciga-
rière durant lequel celle ci met profit
ses dons de séduction, finit par vaincre
la dernière résistance de Navarro qui,
éperdument amoureux, subjugué et
sans force, tombe au pouvoir de la sor
cière.
De ce moment, la dégringolade de
don José se poursuit sans trêve. Pour
satisfaire un caprice de la jolie fille, le
brigadier trahit sa con-igne, se fait
jeter eu prison et perd ses galons. A
peine remis en liberté, il accouit chez
Carmen, et sous les baisers voluptueux
de sa maîtresse, oublie ses devoirs,
laisse passer la retraite, et tire l'arme
contre l'officier qui lui intime l'ordre
de rentrer la caserne. Marchant, de
faute en faute, le malheureux n'a plus
le courage de reculer et danssa passion
effréuée se sent prêt tous les crimes
pour garder les faveurs de Carmen,
dont la légèreté excite sa jalousie. Aus
si, c'est la désertion, la fuite avec une
troupe de contrebandiers dont la gita-
na fait partie, et, dans la vie bohémien
ne des deux amants, ce sont des scènes
continuelles de discorde provoquées
par la jalousie de José et l'infidélité de
Carmen qui lui préfère, le toréador
Escamillo, dont elle veut faire sa nou
velle proie. Après un duel avec son
rival, aprèsdessupplications déchiran
tes mais vaines la gitane qui l'aban
donne pour suivre Escamillo, don José,
fou de rage et de désespoir, plonge son
poignard dans la cœur de l'infidèle au
seuil de l'arène où le toréador vain
queur attend sa maîtresse.
Nous nous passerons de faire l'éloge
d'une œuvre qui est une des plusbelles
qu'on ait jamais conçues, dont la créa
tion eut un retentissement énorme, et
dont la vogue intarissable ne fut ja
mais surpassée.
Quanta l'interprétation qu'en a fai
te. Mardi dernier, la troupe de Tour
nai, elle a vraiment dépassé l'attente
du public. M. Carrinofa\t un don José
naturellement passionné et très senti
mental. C'est d'uuefraiche et jolie voix
de ténor qu'il chante sesdiverses chan
sons, et se montre acteur accompli
daos la rencontre avec Carmpn au pre
mier acte, son duo avec Micaëla, le
tableau de la séduction et la scène fina
le du meurtre.
M Mortfort a fait valoir toute l'am
pleur de sa belle voix de baryton dans
la chanson du toréador, et toutes ses
qualités d'acteur consommé dans l'épi
sode de son duel avec don José.
Mme Sibens a fort bien interprêté le
rôle de Carmen. D'une allure quelque