Journal de l'Alliance libérale d'Ypres et de l'Arrondissement.
Dimanche, 12 Avril 1908.
68e année. 15.
l'union fait la force. le iJùttmiciie. Vires acqiirit eundo.
Par an
Par an
4 fr 50
e fr. 60
L'Autoniobilisme
et la Législation.
Le Triomphe delà Fraude
M ise en demeure.
M. Seholl aerl.
PKIX DE L'ABONNEMENT:
pour la ville Par an 4 francs.
la province
létranger
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Réclames 25
Annonces judiciaires 1 fr. la ligne.
Le Sénat s'est beaucoup occupé de la
question de l'automobilisme en ces der
niers temps Et tout récemment deu«
propositions de loi furent déposées par
MM Hanrez, Keesen, Libioulle et
Lambiotte, Fléchet et Magnette.
Une Commission, présidée par M.
Iknile Dupont, ministre d'Etat, a exa
miné longuement et minutieusement
ces différents projets.
La Commission, après avoir rendu
hommage l'initiative des auteurs de
ces propositions, a jugé, d'accord avec
eux, qu'il convenait de ne pas se bor
ner l'examen des textes de loi qui lui
sont soumis Elle a doncélargi le cadre
de son travail et profité de l'occasion
qui lui était offerte pour embrasser
tonte unesérie de questions connexes,
et, d'une manière générale, l'ensemble
de la matière comprise l'étranger
sous le nom de droit de l'automobi
le i
Le développement du transport
automobile suscite partout un intérêt
puissant dans le public. Cet intérêt
s'attache non seulement aux progrès
économiques de l'industrie de la con
struction automobile, mais tout autant
aux progrès des applications pratiques
du moteur et aux prouesses sportives
des motoristes. Nul, certes, ne niera
que cet intérêt soit légitime.
Les auteurs des propositions soumi
ses ia Commission s'accordent pour
le reconnaître
L'honorable M Hanrez s'exprime
comme suit
L'application des moteurs mécani
ques aux véhicules qui circulent sur
nos routes et dans les rues de nos villes,
réalise incontestablement un progrès.
Le nombre des voitures automobiles
angmente chaque année et on peut
prévoir qu'avec les perfectionnements
et les simplifications qui résulteront de
leur emploi, leur place deviendra pré
pondérante.
L'honorable M. Magnette dit de son
côté
Assurément, il ne peut venir
l'esprit de personne de nier que ce
mode nouveau de locomotion constitue
un progrès, encore que j usqu'à présent
il ne semble pas que l'industrie eu
puisse grandement profiter, et qu'il
apparaisse, pour une longue période
encore comme un sport réservé la
fortune ou tout au moins la très large
aisance
D'autre part, la fabrication des
véhicules automobiles est devenue une
branche très importante de notre
industrie nationale, et il ne peut être
question, comme l'idée en a été émise,
de prendre l'égard de ce mode de
transport des mesures analogues cel
les qui ont été décrétées en certains
pays et qui équivalent, dans le fait,
une véritable prohibition
La Commission s'associe sans réser
ves l'hommage mérité ainsi rendu
l'automobilisme. Elle proclame que
cet hommage est dû même l'automo
bilisme purement sportif Elle voit
dans l'automobilisme un engin de
locomotion merveilleux, l'engin idéal
peut-être (abstraction faite de ce que
nous réserve la locomotion aérienne)
la fuis par son confort de carrosserie, sa
rapidité, sa souplesse, son individuali
sation d'emploi, son indépendance
presque absolue vis-à vis de la voie de
circulation. Elle estime que l'automo
bile a l'avenir pour elle.
La Commission s'est même attachée
des considérations plus élevées et qui
tiennent, s'il est permis de parler ainsi,
la philosophie du progrès mécanique
et sportif dans la société.
Il ne faut pas perdre de vue, selon
elle, que, d'une manière générale, la
société est intéressée au développement
de l'initiative des individus.; l'action
avec ses chances, ses risques et même
ses périIs, est la loi même de la vie.
L'automobilisme offre des dangers
Eh bien, soit. Mais il est salubre qu'il
y ait dans la société des êtres assez pas
sionnés d'action pour ne pas céder aux
conseils de prudence excessive ou de
simple oisiveté qui paralysent l'activité
de la généralité des hommes, surtout
des favorisés de la fortune. L'on peut
dire, en outre, qu'à notre vie trépidan
te et affairée, avare de temps, brûleuse
d'étapes et dévoratrice de distances, il
faut de ces engios de transport extra-
ordinairement rapides qui suppriment
les éloignements et multiplient la fa
culté d'agir de l'homme en lui conté
raut une sorte d'ubiquité. Enfin, si uu
engiu mécauique nouveau est inventé,
il est évidemment, de l'intérêt de tous
qu'il soit mis en usage et que le perfec
tionnement en soit ainsi ménagé. En ce
sens, il est permis do dire que l'auto
mobilisme, tout de même que la mar
che, doit être pratiqué.
Et il y a sans doute un devoir géné
ral de prudence qui s'impose toute
activité humaine, mais aussi uu devoir
général de sauvegarde tout individu
L'automobilisme doit rester en état
d'éviter le piéton ou l'obstacle mais
le piéton doit ee garer et les obstacles
doivent en principe être écartés de la
circulation.
Ainsi s'exprime la commission par
l'organe de son rapporteur.
Tenant compte de ces considérations,
elle a rédigé une proposition de loi dont
voici les grandes lignes
Des arrêtés royaux pourront subor
donner le droit de conduire un véhicu
le automobile l'octroi d'un permis
délivrer par le gouvernement.
Toute personne qui conduira une
voiture automobile sans avoir obtenu
le permis visé l'article précédent,
sera punie d'une peine d'un jour un
mois d'emprisonnement etd'une amen
de de 5 francs 500 francs elle sera,
en outre, interdite du droit d'obtenir
un permis pendant trois mois. Ces pei
nés seront doublées en cas de récidive
dans le délai d'un an.
Il y aura application de la condam
nation conditionnelle.
Tout propriétaire d'automobile devra
s'assurer que le conducteur qu'il em
ploie a obtenu un permis de conduire
il lui sera délivré cet effet un dupli
cata du dit permis.
Tout propriétaire d'automobile qui
aura employé sciemment un conduc
teur privé.ûu droit de conduire sera
puni des peiD6s édictées plus haut.
Quiconque, en faisant circuler sur la
voie publique un véhicule automobile
capable de marcher en palier une
vitesse supérieure 30 kilomètres
l'heure, cause un accident des per
sonnes ou des choses, est tenu de ré
parer le préjudice qui en résulte.
Toutefois, le propriétaire et le con
ducteur sont exonérés de toute respon
sabilité s' 11 s prouvent que l'accident
est arrivé par force majeure. N'est pas
considéré comme force majeure, le bris
d'une pièce du véhicule m tout autre
cas fortuit inhérent l'emploi du véhi
cule moteur mécanique.
Telle est la proposition de loi sur la
quelle nous a déclaré un membre de la
Haute Assemblée, le Sénat aura sta
tuer prochainement.
L'interpellation sur l'élection com
munale de Tournai inspire notre con
frère la Province de Mons, d'excellen
tes considérations, qui peuvent s'appli
quer également l'élection de Diest au
sujet de laquelle le député, M. R.
Olaes, a interpellé le gouvernement
Mardi dernier.
En validant les élections commu
nales de Tournai, que la Réputation
permanente avait annulées, le gouver
nement consacre nouveau ia jurispru
dence propre au régime clérical, qui
fait de la fraude un moyen légal de
conquérir le pouvoir.
b La .fraude, dans le cas présent, est
indéniable et le gouvernement ne l'ose
pas nier. Il se borne la déclarer sans
effet.
Les fraudes fussent-elles prouvées,
dit l'arrêté, n'auraient pu avoir une
influence décisive sur le résultat du
scrutin qu'en effet, les électeurs
signalés comme ayant reçu des offres
ou ues promesses d'argentou d'autres
avantages, ne disposent ensemble que
de vingt suffrages, que le déplace-
b ment de ces votes au profit de la liste
n° 1 (liste libérale), n'aurait aucune
influence sur la répartition des siè-
k $«s.
Ainsi, les fraudes, tussent-elles
prouvées, il u'y a rien dire.
Remarquez la prudence de cette
expression. Sous la plume d'un minis
tre clérical, jugeant leR actes de ses
amis politiques, c'est la reconnaissance
déguisée do la fraude. Vous comprenez
que s'il y avait en le moindre moyen
de chicaner là dessus, l'arrêté n'y eût
pas manqué. Mais le terrain est si
mauvais, si glissant, que le gouverne
ment n'ose pas s'y aventurer Les révé
lations de l'enquête sont trop bieu
établies, et les déductions qu'en a tirées
la Réputation trop justes. On préfère
ignorer les unes et les autres, et feindre
de croire que le contraire est possible.
(Je détour pris, le gouvernement
croit se tirer d'affaire en s'accrochant
aux chiffres il n'y a, dit il, que vingt
suffrages qui ont été détournés par la
fraude, cela ne suffisait pas pour modi
fier le résultat
b Quel cynisme
b Ne dirait-on pas que le gouverne
ment iguore ce que c'est qu'une élec
tion
En matière électorale, la fraude
n'est jamais individuelle. Elle est col
lective. Elle est faite par uu parti au
profit de ce parti. On ne fait point des
promesses ou des dons d'argent, par
pure largesse. Ou n'agit ainsi qu'après
concert préalable, et surtout au moyen
des ressources communes. 0e n'est pas
l'argent qui a pratiqué la corruption
qu'il faut considérer, - il n'est qu'un
instrument, mais le rapport qui a dû,
nécessairement, s'établir entre les inté
ressés, les dirigeants et lui.
b Or, si Ton parvient, malgré toutes
les difficultés que pareille preuve pré
sente puisque l'électeur doit faire l'aveu
de sa propre complaisance où s'exposer
l'inimitié et aux représailles d'un
parti puisant, si Ton parvient àdécou-
vnr la trace de plusieurs cas de fraude
nj inifeste, que faut-il en conclure?
C'est que l'élection tout entière est
entachée de fraude et de violence. Le
seul moyen pfficace de réprimer de
pareils abus, c'est l'annulation.
b Décider le contraire, c'est encoura
ger la fraude...
d Les fraudeurs auront toujours l'es
poir que le plus grand nombre de leurs
actes échapperont la preuve et que le
profit de la victoire leur restera.
t Ils ne s'exposent aucun ennui et
ils ont tous les avantages.
Il serait surprenant, après pareille
décision, que la fraude ne se générali
sât pas davantage.
Bien entendu, c'estauprofitdesclé-
ricaux seuls que l'impunité est assurée.
Contre les autres, le gouvernement
ferait violence ses principes, sans
hésitation.
b II a validé parce qu'il est le maître
et qu'il lui plaît ainsi, b
Un organe de la démocratie chrétien
ne de Liège adresse M. Renkin,
ex-démocrate enragé, devenu un très
doux et très obéissant conservateur,
grâce la vertu mirifique du portefeuil
le de la justice, la brève mais cinglante
lettre ouverte que voici
Monsieur le Ministre,
b J'ai pris la liberté grande, il y a
deux mois environ, de vous poser une
petite question 4 A quand la réforme
électorale b
b Je vous en pose une autre aujour
d'hui cela ne m'expose pas grand'-
cbose et ne vous engage rien...
b A quand la suppression du rempla
cement La diminution du temps de
service 11 y a quelques années
peine, vous avez dit la Chambre
i Tant que la loi de milice vivra, je
voterai contre le contingent b
b Quelle belle phrase Quel \>el
engagement Hélas nous en sommes
bien loin, car vous l'avez voté, le con
tingent, et cependant la loi de milice
vit encore.
b Peut être vous préparez-vous
l'exécuter? C'est ce que nous verrons
et c'est ce qu'en tous cas nous espérons.
b Votre très humble concitoyen,
MARTINET.
Ou a paru étonné snr les bancs de la
gauche que M. Schollaert, 4 l'impartial
président de la Chambre b, fut devenu
au banc ministériel un sectaire fanati
que capable de coups de parti dans le
genre de celui de la validation de l'é
lection de Tournai.
Ceux qui se sont étonnés sont des
hommes courte mémoire qui ont ou
blié l'histoire de Belgique d'il y a seu
lement dix ans.
Il n'est pas dans le parti clérical, en
dehors de MM. "Woeste et Vandenpee-
reboom, de personnage qui se soit ren
du plus odieux que M. Schollaert.
Comparé lui, M. De Trooz était
juste, impartial et modéré
On sait d'ailleurs que, si M. De Trooz
lui a succédé comme ministre de l'in
térieur, en 1889, c'est parce que M.
Schollaert s'était fait chasser par l'é
meute de la rue et par l'émeute parle
mentaire qu'avait soulevées le projet
de réforme électorale, dont il était
l'auteur responsable. Oe projet, appli
quant la R P. truquée dans les grands
arrondissements seulement, devait
avoir pour résultat d'assurer le pou
voir perpétuité aux cléricaux, et
d'enlever jamais l'opposition le
moyen légal de revenir au pouvoir.
Il était tel que, plutôt que de le con
tresigner avec lui, MM. De Smet de
Saeyer et Nyssens donnèrent leur dé
mission.