JOURNAL D'Y PRES,
D AFFICHES, ANNONCES, AVIS ET NOUVELLES DIVERSES,
2405.
MERCREDI, 21 Octobre, 1840.
24mc Année.
FEUILLETON.
Ce Journal paraît le MERCREDI et le SAMEDI. L'Abonnement est de 4 fr. par trimestre pour la Ville, et 4 fr. fit pour
toute la Belgique, franc de port par la poste. Les insertions se paient 17 centimes la ligne. affranchi r les lettres.).
TPRES.
Le 8me quitte la ville trois compagnies
se rendent Cour Irai, les trois autres du
même bataillon viennent les relever. Le
deuxième bataillon va remplacer Menin
le troisième, qui retourne dans nos murs.
Un puriste a eu le malheur de com
mettre une faute d'ortographe en signalant
la coquille que nous avons faite lorsque
nous avons écrit douleur au lieu de docteur.
Qu'il soit donc plus attentif l'avenir.
On écrit de Bixschote
Monsieur vander Moere digne curé de
celte commune, vient de faire fondre une
nouvelle cloche pour notre église, évaluée
1,100 francs et a fait l'acquisition d'un
terrain spacieux pour l'embellissement du
presbytère. Le tout est payé de ses propres
fonds.
Grâce monsieur vander Moere dont
le zèle dans l'accomplissement de ses
devoirs, ses sacrifices pécuniaires pour
l'ornement de la maison de Dieu et sa
philanthropie pour les pauvres, lui ac
quièrent l'estime générale de ses ouailles.
Il y a quelque temps, un incendie dévora
Poelcapelle le cabaret du Sr Vandamme
et ses meubles. L'expertise des dommages
souffrit quelques retards cause de la
VUE SOIRÉE A L'OPÉRA
difficulté qu'il y avait d'apprécier la valeur
de beaucoup d'objets totalement consumés
par les flammes, mais nous apprenons
avec satisfaction que du moment que cette
opération a été terminée, l'administration
de la société d'assurance Securitas d'Anvers
s'est empressée d'acquitter immédiatement
la somme due. Par cette exactitude
remplir ses obligations, la compagnie
Anversoise justifie la confiance toujours
naissante de ses nombreux assurés. Une
entreprise notoirement appuyée sur des
bases solides, et ayant son siège dans le
pays, nous paraîtra toujours pouvoir lutter
avec avantage contre les assurances étran
gères, quels que soient d'ailleurs de la part
de ces dernières aussi la bonne foi et le
respect de leurs engagements.
On écrit de Bruxelles, 19 octobre
La Gazette d'Augsbourg annonce que le
Roi Léopold a souscrit pour 10 actions
d'une société littéraire établie Stuttgard,
pour la publication de manuscrits intéres
sants et la réimpression d'anciens ouvrages
dont il ne reste plus que peu d'exemplaires.
Par arrêté ministériel du 10 octobre,
M. Jean-Joseph Lhonneux, entrepreneur
Liège, a été déclaré adjudicataire des
trois lots dont se composent les travaux
(le terrassement et ouvrages d'art de la
section du chemin de fer de Pépinster à-
la frontière de Prusse, moyennant la
somme de 3,595,000 fr. Les sieurs Maxi-
milien Desaive, propriétaire, et Jean Lhon
neux, entrepreneur, de Liège, sont acceptés
pour cautions de l'adjudicataire.
Un journal du soir annonce que dans
le même conseil où la mise en état de
toutes les places fortes a été décidée, on a
provisoirement arrêté la formation de
deux camps; l'un Béverloo, l'autre
Castiaufaisant ainsi face la Prusse et
la France. Les ressources du budget de la
guerre, pour l'année courante auraient
seules empêché de prendre un parti défi
nitif cet égard, raison du surcroît de
dépenses; mais l'ouverture de la session
législative, les crédits nécessaires seraient
demandés aux chambres.
On lit dans l'Observateur
M. Constantin Rodenbach, consul- gé
néral de Belgique en Suisse, se rendra
sa destination vers la fin de ce mois ou au
commencement du mois prochain. M. G.
Rodenbach est le quatrième agent de la
diplomatie belge, accrédité avec le titre
de consul-général auprès des gouverne
ments étrangers. Il paraît que sa résidence
LE PROPAGATEUR,
ou
FEMME VEILLE SUR TOI
L'expérience seule apprenti que chaque pas,
hors de l'ordre influe sur toute la vie.
Mme de Plahault, Eugénie et Mathilde.
iii.
Le spectacle était commencé. Mademoiselle Taglioni dé
ployait sur la scène ses grâces nobles et sans rivales. Palmina
que le monde n'avait pas gâtée, Palmina qui avait passé
de la solitude sur le sein d'un époux, éprouvait une foule
de sensations indéfinissables.
Deux hommes, le général deet le brillant comte
Erodore de Stainville, vinrent saluer la comtesse. Les cheveux
blancs du général, sa figure sillonnée de cicatrices et de rides;
sou corps chancelant, amaigri et courbé, la rude simplicité
de ses manières, faisaient ressortir avec un singulier avantage
la jeunesse, la beauté, l'élégance des formes et la politesse
noble du comte. Sa conversation n'offrait pas moins d'intérêt.
11 y avait tant de mouvement, de poésie, de variété, de
naturel! Palmina l'ccoutait avec une surprise, un plaisir
qu'elle ne peusuit pas dissimuler ou combattreet si
elle rougissait, si elle ressentait du trouble, c'était lorsque
les yeux noirs et pensifs d'Érodore se fixaient sur sa figure.
Elle ne pouvait souteuir l'étrange expression de ce regard
long, pénétrant, arrêté. Jamais Édouard ne l'avait regardée
ainsi. Comte, dit madame d'Elvas, est-il vrai que
vous partiez pour l'Orient? Un frisson général parcourut
le corps de Palmina. J'en avais l'intention, madame,
mais maintenant je reste. Et ce même regard semblait
dire Palmina a C'est pour vous. Elle rougit, chercha
son éventail qu'elle tenait la main, commença des phrases
qu'elle n'acheva pas, fit mille gaucheries délicieuses pour
l'homme qui savait les interpréter. Premières sensations de
l'amour, que vous êtes belles et pures! qu'il y a de grâce,
de pudeur et de naïveté dans cette passion qui s'ignore et
se révèle son insu! Vous êtes bien inspiré de ne pas
aller en Orient, observa madame d'Elvas; vous auriez
affligé tant de femmes par votre abandon.
Madame, jusqu'à ce jour, je n'avais pas aimé. Phrase
rebattue, mon cher comte. Mille femmes ont eu la sottise
d'y croire, et mille autres y croiront encore. La vanité fait
des dupes bien faciles. Me confondriez-vousmadame,
avec ces lâches quiNon, vous êtes sincère et très-
disposé prendre un caprice pour la passion. On n'aime
qu'une fois, monsieur, mais alors on aime pour toujours...
On ne fait pas d'infidélités.Changeons de texte les
hommes ne gagnent pas assez être face face ayee eux.
Parlons de Zante, votre berceau idolâtre. Vous êtes
Grec... Et Palmina s'arrêta confuse. Oui, c'est un
Grec, mais seulement par sa mère, répondit madame
d'Elvas, c'est un Erodore, don d^amour. Voyez cette
pureté, cette correction de traits qui s'allie avec la frivolité
française. Grec; oui, mais un de ces Grecs du dix-neuvième
siècle, peine échappés aux fers de la servitude. Eh!
madame, laissez-lui son erreur. Quand je combattais au
milieu des Grecs, je voyais en eux les compatriotes de
Miltiade.
La blessure était faite.
L'Opéra est d'ailleurs si prestigieux. C'est Baya et ses
dangereuses et enivrantes voluptés. La corruption est dans
l'air, elle est dans tout ce qui vous entoure; elle vous pé
nètre, elle vous arrive par tous les sens. La peinture, la
musique, la danse avec ses mystérieuses révélations, les
combinaisons gracieuses et piquantes de la toiletteces
diamans qui scintillent en aigrettes ou se déroulent en
flots étincelans, ces fleurs aux vives nuances, ces plumes
aux molles ondulations, la beauté des femmes; la coquet
terie des unes, la pudeur naïve des autres; leurs regards,
la magie de leur pose, de leurs sourires, de leurs accens;
des seins palpitans et demi-voilés; l'haleine brûlante et
parfumée de ces jolies bouches. Que de séductions
Non, le cœur ne reste pas innoncent l'Opéra. La jeune
fille y était entrée calme pure elle en sortira rêveuse et
agitée d'une foule de désirs.