On écrit de Bruxelles, 22 décembre
Enfin, après environ trois années de
provisoire, la régence de Bruxelles vase
trouver définitivement reconstituée. Les
pouvoirs de trois membres élus dernière
ment au conseil communal ont été vérifiés
et reconnus valides par la députalion pro
vinciale.
Aujourd'hui, nous apprenons que l'arrêté
pour la nomination du collège de bourg
mestre et échevins est soumis en ce moment
la signature du Boiet que cet arrêté
paraîtra au Moniteur au plus tard lundi
prochain.
Yoici la liste qu'on donne comme cer
taine pour cette nomination Van Volxem,
bourgmestre Verhulst-Van Hoegarden
1er échevin; Wyns, 2me échevin; Orts père,
avocat, 5rae échevin et Everard Gollin, 4m0
échevin. Em
Une dame de Bruges, qui vient de
mourir Bruxelles, fait Mgr révoque
de Bruges, au profit de son séminaire, un
legs d'environ 500,000 fr., dont 40,000 fr.
en espèces et le reste en immeubles.
M. le ministre de la guerre a présenté
deux projets de loi, l'un pour fixer le con
tingent de l'armée pour l'exercice de 1841,
et l'autre pour demander un crédit provi
soire de 5 millions de francs. Ces deux
projets ont été renvoyés la section cen
trale du budget de la guerre.
M. le ministre de l'intérieur a présenté
un projet de loi sur les céréales, destiné
remplacer la loi générale du 51 juillet
1854. La chambre a renvoyé ce projet
l'examen des sections. La chambre a con
tinué ensuite la discussion du budget de
la justice.
Nous apprenons que la section cen
trale a voté le rejet de l'augmentation du
droit sur la bière, et qu'elle serait d'avis
de rétablir le serment dans les déclarations
des successions. Il paraît que les réductions
les plus importantes porteront sur le budget
des travaux publics que la section centrale
examine très-minutieusement tous les
précier la valeur? C'est impossible. Us doivent
suivre un sentier qui passe par la ferme qu'occupe
le sieur Despagne. Au lieu de franchir les
clôtures h l'endroit où elles sont franchissables,
ils trouvent plus commode de passer par les bar
rières. Le mal serait petit, mais voici ce qui
se pratiquait depuis quelques temps. Les susdits
prévenus devançaient leurs compagnons; sor
taient la barrière de ses gonds et la laissaient
tomber. Le lendemain les vaches se promenaient
dispersées dans les communes environnantes.
Le fermier a non seulement du réparer et même
renouveler ses barrières, mais il a éprouvé du
dommage par la divagation de ses bestiaux. Il
a finalement porté plainte. La défense développe
deux moyens le premier consiste h soutenir
que les prévenus n'ont fait qu'ouvrir les bar
rières; qu'elles se sont échappées de leurs mains
et qu'ils ont cru être l'objet d'une mystification
le second moyen est puisé dans les termes de
l'art. 456 portant quiconque aura détruit
des clôtures les barrières eussent-elles été
renversées, n'ont pas été brisées, détruites.
Mr De Patin, procureur du Roi, fait ressortir
avec lucidité les arguments de l'accusation et
requiert que les prévenus soient condamnés k
un mois d'emprisonnement et 16 fr. d'amende.
Le tribunal condamne Gekiere a huit jours,
Deraedt a quinze jours d'emprisonnement, l'un
et l'autre solidairement h 16 francs d'amende.
nécessaire de la nature des hommes et des choses.
Et encore les lâches calculs de la méchanceté
rendent-ils quelquefois impossible ou inefficace
l'action des tribunaux.
L'homme respecte instinctivement chez son
semblable ce qu'il possède lui-même; mais il
voit d'un mauvais œil en autrui ce dont il est
privé ou par sa propre faute ou par la pro
vidence. Ainsi le propriétaire ne dégrade pas de
propos délibéré le bien de son voisin celui dont
la réputation est pure ne diffame, ne calomnie
point. Au contraire, l'être dégradé a ses propres
yeux et aux yeux de ceux qui l'entourent, ne
pouvant plus conquérir aucune dignité person
nelle, semble se complaire a répandre l'injure
et l'outrage vains efforts pour abaisser les autres
jusqu'à lui, vu qu'il ne peut plus s'élè ver jusqu'aux
autres!
Et ne sont ce pas en général les personnes
répudiées par la fortune ou réduites a la misère
par la paresse ou la dissipation qui s'attaquent
aux propriétés soit pour en tirer avantage, soit
uniquement pour obéir h leurs penchants de
destruction.
Quiconque assiste quelquefois aux scènes qui
se déroulent en police correctionnellesentira
aisément la vérité de ces réflexions. C'est-lk
qu'elles sont nées en nous et qu'elles se sont
réveillées a l'occasion de la cause suivante.
Charles Gekiere et Henri Deraedt, ouvriers
Messines sont assis sur le banc des prévenus.
Ce sont des gens qui n'ont rien, ou plutôt qui
n'ont que le salaire de leur travail, c'est-a-dire,
tout juste assez pour ne pas mourir de faim
et pour s'enivrer le dimanche. Croyez-vous que,
en sortant bien tard du cabaret avec leurs
camarades, ils puissent aller cbez eux sans toucher
a des propriétés qu'ils ne savent pas s'habituer
respecter, parce que, n'ayant aucune des jouis
sances qui en jaillent, ils ne peuvent en ap-
étendu sur la couche douloureuse, la sœur de
charité est un ange de consolation et d'espérance;
c'est un rayon divin au milieu d'une nuit triste et
sombre; c'est une douceur ineffable au milieu des
amertumes d'un long mal. Que de souffrances ont
paru moins cruelles en présence de ces pauvres
filles de la religion Combien de mourans ont
trouvé leur dernière heure moins affreuse en en
tendant les douces paroles que la sœur sublime
murmurait h leur oreille! Que de secrets, que de
touchans mystères ont été emportés avec le der
nier souffle d'un mourant!...
Filles chrétiennesla langue de l'homme est
impuissante a parler dignement de votre dévoue
ment sacré; c'est h peine si nous pouvons vous
comprendre car il y a aussi loin de vous k nous
qu'il y a loin du ciel a la terre. Pourtant vous
vivez sous le même soleil que nous; vous respirez
le même air; vous foulez la même terre; comme
nous, vous naissez de mères mortelles; comme
nous, vous avez un berceau et un sépulcre. Mais
tel est l'empire de la religion, telle est la puissance
de la prière, que vous vous êtes- fait une nature
supérieure k la nôtre; vous passez au milieu de
nous, et nos souillures ne vous atteignent point;
nos courtes joies n'excitent point votre envie;
vous fuyez les heureux, et vous n'êtes connues
que de ceux qui souffrent.
Cette sœur de charité qui s'en va ainsi avec sa
robe noire et son crucifix sur la poitrine, est une
femme cependant. Elle s'est donc condamnée k
une éternelle solitude! Elle ne dira et n'entendra
jamais des paroles d'amour Après avoir admiré
ces saintes hénoïnes, je ne sais quel triste regret
entre tout-a-coup dans mon cœur. Quel jeune
homme peut voir d'un œil joyeux une jeune fille
partir ainsi pour le ciel sans vouloir rien dire k la
terre Quel jeune homme n'enviera point au
crucifix ces tendres baisers éclos d'une bouche de
vingt ans! Assez d'épines croissent dans le monde;
pourquoi nous enlever ainsi les seules fleurs qui
nous aient été laissées! Pourquoi la charité vient-
elle ainsi ravir ce qui avait été promis k l'amour
Moi qui vous parle, j'ai rencontré une de ces
femmes, un jour que je m'en allais rêvant k de
vagues espérances d'amour; c'était une jeune fille
fraîche et jolie, doucement craintive, timidement
embarrassée, colorée par une aimable pudeur, et
tenant ses regards baissés vers la terre; sa marche
ressemblait presque k une fuite; on eût dit que le
bruit des hommes l'épouvantait, et qu'elle avait
hâte de sortir du milieu d'une foule profane. Elle
a passé devant moi comme une de ces visions qui
parfois traversent les songes d'un jeune homme
laissant après elles de mélancoliques regrets; elle
a passé comme un de ces anges qui avaient cou
tume de visiter les hommes des premiers temps
la jeune sœur a maintenant disparu pour moi, et
je ne me la rappelle que comme on se rappelle
une apparition de la nuif.
Qui que tu sois, jeune fille, que j'ai vue sous
le capuchon blanc et vêtue de la robe grossière,
quand, chaque matin, le miroir te dit combien tu
es jolie, que réponds-tu k ce discret témoin de tes
charmes et de tes secrètes douleurs? Ton amour
pour ton Dieu te suffit-il, et ton âme tendre et
pure n'appelle-t-elle pas, a ton insu, une âme qui
aime la tienne? Oh! si ton crucifix te tient lieu
d'ami; si la solitude n'attriste point ta vie, reste,
reste k jamais dans ton sanctuaire; garde ton pai
sible bonheur; car, après tout, ce monde tu t'es
séparée vaut a peine un soupir.