Trois heures de l'après-midi. Vendredi,
dans la matinée, on a vu des gendarmes
rôder Ixelles dans les environs des pro
priétés de M. le général Vandersmissen.
Son frère, M. Joseph Vandersmissen a été
arrêté vendredi, quant au général on n'est
point parvenu le trouver le même jour.
M. le général Vandersmissen a été arrêté
le 30 dans la matinée.
On a également arrêté M. le général
Vandermeer qui se trouvait depuis assez
longtemps en non-activité.
On assure que des mandats d'amener
ont été expédiés dans les provinces.
Six heures du soir. Les deux pièces de
campagne de calibre de 6, saisies par la
police, sont déposées l'Hôtel-de-Ville.
Les deux petites pièces du calibre de 2 ou
de 3 qu'on a saisies Tivoli, sont déposées
dans les bureaux du parquet, au Palais-
de-Justice, ainsi qu'un petit obusier por
tatif ou mortier la Coëhorn. Quant a
cette dernière bouche feu, on pense
qu'elle servait lancer des bombes d'arti
fice dans les fêtes publiques.
Tous les individus arrêtées sont au
secret le plus rigoureux. Les personnes
qui ont demandé l'autorisation de les voir,
ont essuyé un refus.
Ce matin des dispositions ont été prises
en toute hâte la prison des Petits Car
mes afin d'y disposer des cellules pour un
assez grand nombre de détenus.
Comme on peut le supposer, les bruits
les plus étranges circulent en ville sur les
projets des conjurés. Les faiseurs de nou
velles ont beau jeu. On dit, entre autres
choses, que les révoltés auraient débuté
par mettre le feu aux cassernes et qu'un
gouvernement provisoire aurait immédia
tement été constitué.
On dit que l'absence du Roi avait sem
blé propice nos conspirateurs pour
exécuter leur projet.
On dit aussi ce qui avait un peu relevé
les espérances des débris du parti oran-
giste, ce sont les paroles qu'on prête,
tort ou raisonau souverain d'un pays
voisin et qui sembleraient dénoter des
arrières-pensées ou tout au moins des
regrets difficiles apaiser.
L'un des mots auxquels nous faisons
allusiona été rapporté récemment dans
une brochure publiée Bruxelles. Dans
une tournée que ce prince fit dans une
province limitrophe de la Belgique, un
bourgmestre lui aurait dit Zonder
ttelgie, sire, zyn ivy toch verneuckt. (Sans
la Belgique, sire, nous sommes perdus).
Oui, mon ami, aurait répondu le mo-
uarque, mais ce petit héritage n'est pas
perdu pour longtemps.
Des paroles bien plus significatives en
core auraient été prononcées, prétend-on,
par le même prince, dans une audience
donnée un général français chargé de
le complimenter de la part de Louis-
Philippe.
Il nous répugne d'ajouter foi de pa
reils bruits et nous ne pouvons que plain
dre les pauvres dupes dont l'espoir se
fonde sur de prétendues confidences qui
si elles étaient réelles, feraient peu d'hon
neur la loyauté de celui qui on les
attribue.
Nous le répétons, nous sommes bien
loin de croire l'authenticité des impru
dentes paroles qu'on prête au chef d'un
état voisin; nous les rapportons pour
fournir aux intéressés l'occasion d'un dé
menti.
Vendredi, dans l'après-dînée, la police
avait fait une descente au domicile de
l'ex-général Vandersmissen, au boulevard
de Waterloo, non loin de l'hospice de Pa-
chéco, M. Vandersmissen était sorti. Son
épouse seule se trouvait au logis. Pendant
les perquisitions qui ont eu lieula porte
de la maison était gardée par deux gen
darmes, et deux vigilantes stationnaient
peu de distance de la sur le boulevard.
Lorsque M. de Crehen s'est évadé ven
dredi, il courait tellement vite que ces
traces furent perdues un moment par les
personnes qui le poursuivaient. Il s'était
jeté avec une telle précipitation dans une
maison de la rue des Paroissiens que les
gendarmes ne savaient où il était entré.
Un passant leur indiqua la maison qui lui
servait de refuge.
En sortant de cette maisonM. de Cre
hen dit ses gardiens Soyez tranquilles,
je ne me sauverai plus. Un sous-officier
des guides en petite tenue, qui passait dans
la rue, fut requis de se joindre l'escorte.
Huit heures du soir. Nous apprenons
l'instant que le mortier saisi par la po
lice, était arrivé le 30 Bruxelles par la
voiture de Paris, l'adresse d'une des
personnes arrêtées et qui se trouvait déjà
en prison au moment où l'on a saisi le
mortier.
M. Van Volxem, ministre de la justice,
s'est rendu plusieurs fois dans la journée
au cabinet du juge d'instruction.
La police a fait une descente dans une
maison du faubourg de Schaerbeek, actuel
lement inoccupée qui appartient l'une des
personnes arrêtées. Tous les appartemens
y ont été trouvés dégarnis de meubles,
l'exception d'une salle où était dressée une
table entourée de plusieurs chaises dispo
sées de manière indiquer qu'une réunion
s'y était tenue ou allait s'y tenir. On avait
préparé du feu et de la lumière dans cette
chambre.
M. le président du tribunal de première
instance a réclamé une garde militaire
pour le local du tribunal où se trouve
déposée une assez grande quantité de
poudre saisie.
Il ne paraît pas qu'on ait saisie des
papiers importants. L'instruction conti
nue avec la plus grande activité.
On lit dans le Fanal
On a découvert la fonderie qui fabri
quait les boulets et le ferblantier qui con
fectionnait les gargousses.
Les quatre pièces de canon saisies sont
l'Hôtel-de-Ville.
Des tentatives ont été faites pour sé
duire des sous-officiers de la garnison qui
les ont dénoncées.
Le jour où devait éclater le complot
était fixé le 31 octobre; avait des ramifi
cations Gand, Anvers et Liège parmi
les mécontents.
Trois heures du soir. Le nommée Ma
laise, ex-sous-officier, décoré de l'ordre de
Léopold, ferblantier hors de la porte de
Namur, était chargé de la confection des
gargousses.
Trois locomotives extraordinaires ont
été dirigées le 30 sur Gand, Liège et
Anvers.
Le général Lecharlier est parti le 29
3 heures pour Gand.
Sept heures du soir. On dit que les
ouvriers de plusieurs fabriques de Gand
devaient être renvoyés pour le jour de la
conspiration.
Un musicien des guides, congédié et
mécontent, était allé se plaindre au géné
ral Vandersmissen, qui garda ses papiers
en lui disant Mon ami, dans quelques
jours j'aurai une bonne place pour toi.
Le plan des conjurés était, dit-on, d'in
cendier le magasin fourrage militaire
pour attirer l'attention de la police. Pen
dant ce temps la réunion des conspirateurs
aurait eu lieu hors la porte de Namur; ils
devaient faire main basse en même temps
sur le colonel de la gendarmerie, sur le
commandant de place et sur le ministre
de la guerre, ce qui paralysait la garnison
dont on aurait gagné les sous-officiers en
les proclamant tous officiers au nom du
nouveau ministre de la guerre comte
Vandermeer, du général en chef Vander
smissen et du colonel d'artillerie De Cre
hen, qui s'étaient distribués ces divers
grades entre la poire et le fromage.
On a saisi deux barriques de poudre de
30 kilogr. chacune, dans une maison in
habitée appartenant au général Vander
smissen.