JOURNAL D'YPRES 1T DE L'ARRONDISSEMENT.
No 2817
28me année
Le plus beau triomphe qu'un candidat
puisse remporter dans une élection, c'est
de rendre a ses adversaires politique la
lutte impossible. Ce triomphe a été rem
porté le 26 septembre par M. Malou, Gou
verneur d'Anvers. Les amis de cet habile
représentant n'ont pas cru qu'il fût néces
saire d'inviter tous les électeurs lui don
ner leurs suffrages, alors que personne ne
contestait l'élection. Tout le monde était
d'accord; tout le monde applaudissait d'a
vance au résultat qui était universellement
attendu et désiré.
On s'abonne i Vprcs, Grand'-
Place, 14, vis-à-vis de la Garde, et
chez les Percepteurs des Postes du
Royaume.
PRIX DE 1,'ABOXXEMEXT,
par trimestre,
Pour Ypresfr. 4
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tion doit être adressé l'Éditeur
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clames, >4 centimes la ligne.
VÉRITÉ ET JUSTICE.
7PP.SS, 2 Octobre.
REVUE POLITIQUE.
Une correspondance de Naples assure que le duc
de Serra de Faglio est parti pour l'Allemagne
avec ordre d'y ne'gocier un traité de commerce
entre le Zollverein et le gouvernement des Deux-
Siciles. Nous ignorons si cette nouvelle est exacte;
mais ce qui n'est pas douteux, c'est qu'il se mani
feste en Italie des tendances a un reprocbement
commercial eutre l'union dauanière allemande et
la Péninsule
Le Journal des Deux Siciles annonce d'une
manière officielle le mariage du duc d'Aumale et
de la princesse de Saleme. Le contrat de mariage
a déjà été signé.
Le roi Louis-Philippe a passé le 29 une grande
revue de la garnison de Paris. Beaucoup de déco
rations ont été distribuées, et les drapeaux prisa la
bataille de l'Isly. a Tanger, Mogador, etc., ont été
remis aux Invalides. Le public a ensuite été admis
inspecter la lente du fils de l'empereur du Maroc,
qu'on avait fait dresser dans le jardin de Tuileries.
Les journaux anglais se plaignent beaucoup des
progrès que l'influence française fait h la cour de
Lisbonne. S'il faillait ajouter foi b leurs assertions,
ce serait M. de Varennes, ambassadeur de France,
qui aurait empêché le cabinet de Londres de con
clure un traité de commerce avec le Portugal. Nous
croyons plutôt que c'est l'opposition de M. Cosla-
Cabral que l'échec essuyé par le cabinet anglais
doit être attribué.
Tandis que les feuilles de Madrid se félicitent
de l'ordre qui règne dans la Péninsule, les jour
naux français prétendent avoir été informés de
l'existence d'uu complot qui aurait été découvert
par le gouvernement espagnol. C'est h Mataro,
suivant le Constitutionnel, que ce complot devait
éclater. En exécution des dispositions prises de
concert par les autorités civiles et militaires de
Barcelone, on aurait conduit b la citadelle de cette
ville les administrateurs des postes et des douanes,
le juge de première instance, le maître des pilotes
et d'autres personnes de Mataro et de Barcelone
même qui s'étaient reudues dans cette ville. Les
personnes arrêtées appartiendraient toutes au parti
de l'ancienne junte centrale.
Si ces faits sont exacts, il est fort singulier que
les journaux de Barcelone n'en fassent pas même
mention.
Le synode de Saint-Pétersbourg a récemment
transmis aux missionnaires de la Géorgie l'ordre
de sortir de l'empire, b moins qu'ils ne se fassent
sujets russes, et qu'ils ne s'engagent b cesser toute
relation avec le S'-Siége. Celte injonction n'a pas
besoin de commentaire; elle est, du reste, parfai
tement d'accord avec le système qui domine b S'-
Pétersbourg, et qui, tout le monde le sait, est mar
qué au coin de l'intolérance et de la haine envers
tout ce qui tient au catholicisme.
C'est dans le courant d'octobre et de novembre
que vont être choisis dans les divers états de
l'Union américaine, les électeurs chargés de nom
mer un président en remplacement de M. Tyler.
Cette grande affaire y cause beaucoup d'agitation
les partis se lancent des accusations d'une violence
extrême. Les meetings se tiennent en plein air, et
ne se composent presque jamais de moins de quinze
mille personnes. Le président actuel se retire de la
lutte, qui s'engagera entre MM. Clay et Polk.
M. Polk a le plus de partisans dans les États du
Sud, il est proposé par le parti démocratique qui
écrit sur ses bannières Annexion du Texas
bas le tarif. Liberté du commerce. Dans les
États du Nord dont l'influence paraît prépondé
rante, on veut M. Clay et le tarif pour protéger
l'industrie. Ses amis demandeut aussi la distri
bution entre les États du produit de la vente des
terres publiques. Néanmoins on croit que la ques
tion du Texas ralliera un plus grand nombre de
suffrages b M. Clay. On redoute que la surexci
tation des esprits n'amène des graves désordres.
Des scènes d'anarchie se succèdent b des intervalles
rapprochés.
Il parait positif que la République de Monte
video va se joindre au Brésil, et que des troupes
brésiliennes opéreront de concert avec les raonlé-
vidéens contre Rosas.
Dimanche, dès avant l'heure des vêpres, l'église
paroissiale de S1 Pierre était littéralement comble.
L'installation de la confrérie du S1 Cœur de Marie,
affiliée b l'arcbiconfrérie de N. D. des Victoires a
Paris, amenait cette foule immense et recueillie
qui remplissait les vastes nefs. Un P. Jésuite
était venu prêcher a cette occasion. L'attitude
respectueuse de cette multitude contrastait singu
lièrement sur les honteux scandales de l'émeute
de Verviers, b laquelle aurait pris part tout ce que
la ville renferme de plus distingué, s'il fallait en
croire les feuilles libérales. On reconnaît b ce
trait ce que la presse libérale tient pour distingué.
Jusqu'b présent la loi sur l'instruction primaire
ne reçoit aucune exécution b Ypres. On dirait
qu'on ne s'occupe pas plus de l'instruction pri
maire que de la garde civique. En fait d'instruc
tion, la régence n'a qu'une seule idée fixe, celle de
soutenir quand même son malencontreux collège
communal, auquel l'internat de S1 Vincent de
Paule va porter un nouveau coup. En vain tolère-
t-on (1) la natation, le bal, le théâtre, le cabaret,la
mascarade, laissant tout b la seule surveillance des
parents ceux-ci ne s'accommodent guère de ces
généreuses facilités. Ils ne veulent pas d'un rè
glement b si larges mailles. Ils envoient leurs
enfants a des établissemenrs où ils apprennent
peut-être moins b faire la toilette, mais plus
a connaître Dieu et la science. A défaut de lauréats
et même du plus pauvre accessit au concours
général, les Municipaux ont imaginé de réchauffer
quelque peu l'intérêt pour leur institution favorite
en décernant une ovation publique b un ancien
élève qui a mérité des distinctions b un examen de
médecine. Un pompeux cortège était organisé
pour le conduire triomphalement en ville. Comme
si un mauvais génie soufflait sur toutes ces af-
(1) A s'en tenir aux seules défenses contenues au règle
ment approuvé par l'administration communale, et moins
qu'il n'ait reçu des extensions ou modifications qui nous se
raient inconnues.
faires, ne voilb-t-il pas qu'une pluie battante est
venue mettre en fuite l'escorte improvisée, et s'est
opiniatrée b éteindre les lumières que les voisins
du héros de la fête s'efforçaient Je soir de tenir
allumées b leurs fenêtres? On se vengera, dit-on,
du tour drolatique que le temps a joué en cette
circoustance, par de copieuses libations de cabaret
Îue la police honorera de sa dispense d'heure,
lette résolution ingénieuse ne saurait manquer
d'enlever les suffrages de tous les buveurs du
quartier.
Nous ne pouvons pas suivre dans toutes ses
aberrations la presse libérale. On ne sait que trop
combien elle fait peu de cas de nos libertés les
plus précieuses. La liberté individuelle, la liberté
de conscience n'ont guère de valeur b ses yeux.
Aujourd'hui les journaux d'Anvers crient ana-
thème contre le nouveau gouverneur, et pour quel
motif? Parce qu'il n'a pas pris une loge au théâtre
de cette ville. Il semble que tout soit perduet
que l'administration aille être plongée dans l'anar
chie la plus déplorable, parce que le premier
fonctionnaire de la province trouve b propos de
ne pas aller b l'opéraet de consacrer son temps
tout entier b ses fonctions.
Ainsidit un de ces journauxsur un ton de
détresse vraiment faméliqueil n'y aura chez lui
ni raouts, ni bals, ni dîners. L'écrivain anversois,
dont les craintes gastronomiques d'ailleurs sont
évidemment exagérées, paraît avoir étudié le droit
public a l'école du profond publiciste qui déclare
que
Dans le siècle on nous sommes
C'est avec des dîners qu'on gouverne les hommes.
Ceci n'est que ridiculemais ce qui devient
odieux, ce sont les prétentions du Journal du
Commerce d'Anvers Que dirait-on d'un gou
verneur qu'on ne verrait jamais b la messe de-
mande-t-il. Et il conclut que par le même motif
que ce fonctionnaire doit se montrer b l'église il
doit aussi se montrer au théâtre afin de marcher
avec son siècle.
Il peut paraître de bon goût b une feuille libé
rale de mettre sur la même ligne l'église et le
théâtre; mais le public anversois, nous en sommes
sûrs, sera révolté d'une pareille profanation. Ce
n'est pas dans une ville éminemment religieuse
qu'il est nécessaire de prouver combien on blesse
les plus simples convenances en assimilant l'ac
complissement d'un devoir religieux au genre de