JOURNAL D YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
l\o 2833.
28me année.
7FR.3S, 27 Novembre.
FEUILLETON DU PROPAGATEUR.
ROBERT DE BÉTHtJNE.
1304-1322. (suite,)
Le vingt de ce mois, la petite ville d'Ou-
denburg présentait une physionomie ex
ceptionnelle. Les rues étaient pavoisées et
pleines de mouvement. Le canon se faisait
entendre, la musique jouait ses airs les
plus animés. On célébrait le centième an
niversaire d'Isabelle Fraeys. A une heure
elle a pris part un banquet où assistaient
soixante dix convives; le bourgmestre
et les échevins l'ont honorée de leur pré
sence. Après le dîner,-elle a été conduite
chez M. le curé Daghelet où plusieurs ec
clésiastiques l'attendaient. Ce digne prêtre,
accompagné de M. le curé Brugghe de
Snaeskerke, est allé sa rencontre et l'a
reçue avec une touchante bienveillance.
Remise de son émotion, elle a chanté une
vieille chanson en seize couplets; sa vue
est encore aussi bonne que sa mémoire
elle peut coudre sans lunettes.
Cet accueil ménagé par quelques minis
tres de la religion une vieillesse qu'il est
si rarementdonné d'atteindre, atteste qu'ils
ne négligent aucune occasion pour dé
ployer leurs sentiments évangéliques.
Deux des cabarets bâtis autour du nou
veau palais de justice ont des enseignes
françaises Aux Armes de France, la
grande Pomme d'Or. Ces dénominations
ne sont pas d'un choix heureux. Le cabaret
qui attirera le plus de monde, du moins
par son enseigne, dans ce quartier, sera
celui qui portera un nom flamand facile
retenir par les campagnard qui affluent au
tribunal. A la Chicane, Batavia,au Grand
Turc, au Klaphuis, S' Ivon, ne seraient
peut-être pas des dénominations dédai
gner, pourvu qu'on les emploie dans les
deux langues, pour celles qui en sont sus
ceptibles, ou qu'on se serve plutôt du fla
mand que du français sur l'enseigne.
Les garçons tailleurs ont fêté S,e-Cathé-
rine d'une manière assez bruyante, en
juger par les clameurs qu'on entendait
fort tard dans les rues lundi dernier. On
dirait que la civilisation beaucoup de
mal pénétrer jusques chez les apprentis
artisans: leurs divertissements aboutissent
encore toujours la joie grossière de la
boisson, et au vacarme sauvage de la nuit.
Le Juif-Errant est offert en vente dans
toutes les stations du chemins de fer. Il
pénètre dans les estaminets, dans les fa
milles; souvent une personne que jusques
là on croyait digne de quelque estime est
surprise le feuilleton ordurier la main.
Il faut convenir que l'honnête homme du
monde ne fut jamais d'une immoralité
aussi infâme que de nos jours.
On s'abonne Ypres, Grand'-
Place, 44, ris-à-vis de la Garde, et
chez les Percepteurs des Postes du
Royaume.
PRIX DE L'ARONMEMEXT,
par trimestre,
Pour Ypresfr. 4
Pour les autres localités 4SO
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Tout ce qui concerne la rédac
tion doit être adressé l'Éditeur
Ypres. Le Propagateur parait
le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine.
PRIX DES IMSERTIOXS.
IV centimes par ligue. Les ré
clames, tS centimes la ligne.
VÉRITÉ ET JUSTICE.
REVEE POLITIQVE.
M.O'Connell assistait mercredi a un banquet qui
loi a été offert par la ville de Limerick. Le discours
[trononcé en cette circonstance par le député ir—
andais peut être regardé comme le signal de la
reprise de l'agitation eu faveur du rappel. Mais ce
sera une agitation toute pacifique.
L'accueil que les habitants de Limerick ont fait
au libérateur rappelle les brillantes manifestations
des meetings de l'année dernière. Sa présence dans
cette cité inconquise y a fait éclater un enthou
siasme extraordinaire, Le discours qu'il a adressé
la foule avant de se rendre au banquet a été ac
cueilli par des applaudissements frénétiques cela
prouverait, si on ne le savait d'ailleurs, que ce
noble vieillard n'a rien perdu de l'influence qu'il
a de tout temps exercée sur le peuple irlandais.
Une correspondance de Bayonne assure d'un
autre côté, qu'une grande agitation règne dans le
Haut-Ârragon et k Sarragosse, et que deux petites
villes, qu'elle ne cite pas, ont arboré le drapeau de
la révolte et se sont prononcées contre le gouver
nement, après avoir désarmé deux compagnies du
régiment de Bourbon et une compagnie de Carabi-
neros. Cette même correspondance affirme que
l'on a quelques craintes pour la forteresse de Jaca.
Les dernières nouvelles reçues par le gouverne
ment espagnol sur l'affaire de Zurbano étaient da
tée de Burgos, le 16 au soir. Le capitaine-général
Bayona avait passé la nuit précédente a la Pinada
de Soria et il se portait ce même jour sur Barbadillo
de Herreros, d'après les avis qu'il avait reçqs.
Zurbano, toujours fugitif, n'avait pu grossir sa
troupe. La tranquillité était parfaite dans la pro
vince de Burgos et dans celle de Sautander.
Une lettre de M. le contre-Amiral Dupetit-
Thouars auuonce que la nouvelle de son desaveu
lui est parvenue et qu'ayant le choix entre reve
nir en France directement ou n'y revenir que dans
deux années environ après avoir accompli un
Le comte Robert s'occupadurant les loisirs de
la paixa mettre de l'ordre dans l'administration
dont la guerre et les troubles avaient en bien des
endroits brisé les ressorts. Il rétablit les lois an
ciennes, dont on cherchait a ne plus suivre certaines
dispositions, et reconstitua plusieurs offices, régla
quelques différends et conflits de juridiction puis
son attention se porta sur le commerce et l'indus
trie. C'était la en effet que résidait toute la vie,
toute la force du pays. Déjà nous avons indiqué
comme source de la prospérité flamande cette ad-r
mirable fertilité du solces ports nombreux et fa
ciles, cet âmour combiné du travail et du bien-être
Matériel, cet instinct de négoce enfin que les bou-
grand voyage, ce dernier parti est celui auquel il
s'est arrêté.
Une vaste correspondance du général Nogueras,
que l'on a saisie, a révélé les projets des révolu
tionnaires sur l'Andalousie ils voulaient y déter
miner un mouvement ayacucho. Le signal devait
être donné simultanément h San-Roque, Cadix et
Malaga, en même temps qu'un autre mouvement
s'opérerait dans la Serrania de Rouda. Beaucoup
de réfugiés étaient prêts, a ce qu'il paraît, a débar
quer sur les côtes et ils étaient même d'accord avec
des militaires qui ont été destituées sur-le-champ.
Plusieurs arrestations ont été opérées h Algésias.
Le général Aracz a été retenu a Cadixet l'on a
exilé de Malaga plusieurs bannis.
La plus grande surveillance a été recommandée
aux autorités de la frontière de France.
leverseraeuts politiques n'affaiblirent jamais. Au
commencement du quatorzième siècle, les relations
commerciales de la Flandre avaient pris un déve
loppement prodigieux. Depuis les croisades, on
connaissait les côtes d'Espagne, d'Italie, d'Afrique
et d'Orient; et de ces contrées lointaines arri
vaient déj'a une infinité de produits livrés en
échange des graines, des bestiaux et surtout des
riches étoffes que l'on fabriquait k Bruges, a Gand,
a Ypres et a Lille. Les marchands de Venise, de
Gênes, de Florence, de Pise, connus sous le nom de
lombardsfavorisaient ces transactions en fré
quentant les foires établies dans nos principales
cités. Les foires célèbres de Champagne et de Brie
formaient aussi un centre actif d'opérations et de
trafic. Au nordles Flamands négociaient avec
toute l'Allemagne. Les marchands de la Basse-
Saxe et de la Prusse appelés osterlins, dont les
rapports s'étendaient jusqu'en Russie, en Suède
et en Norvège, trouvaient en Flandre une merveil
leuse facilité d'échangedes capitaux abondants
et des débouchés assurés vers les contrées méridio
nales précieux avantage une époque où la na
vigation encore imparfaite rendait les voyages de
longs cours si difficiles et si dangereux. Les navi
gateurs septentrionaux et méridionaux profitaient
du port de Dam pour échanger leurs cargaisons; et
Bruges située près de Dam devenait comme le
marché commun et l'entrepôt général de l'Europe.
La Flandre possédait encore des comptoirs sur
divers points des Iles-Britanniques: Londres, a
Winchester,a Saint-Yves en Cornouailles, 'a Ber-
wick en Ecosse; et, tandis que l'Angleterre lui
fournissait des laines en abondance, elle renvoyait
des draps, des tapis et autres produits fabriqués
dont elle tirait un lucre important. Nous avons vu
qu'k diverses reprises les empereurs d'Allemagne,
les rois de France et d'Angleterre avaient accordé
des franchises et des immunités au commerce fla
mand. Son action était en outre régularisée par
des lois et des tarifs établissant une juste récipro
cité de garanties, et surtout par uue association