JOURNAL D YPRES IT DE L'ARRONDISSEMENT.
No 2883.
28me année.
7P3.3S, 21 MAI.
L'HYPOCRISIE DU LIBÉRALISME
Les élections approchent, on s'en aper*
çoit toujours aux pasquinades du parti
libéral, mises en avant pour jeter l'inqui
étude parmi les populations, et exploiter
s'il est possible la crédulité publique aux
dépens de l'intérêt général. Le pays de
mande que chacun examine avec calme
quels choix peuvent le mieux concourir
consolider ses institutions et sa tranquil
lité. La raison dicte de conserver moins
de motifs graves les membres sortants de
la législature, d'autant plus qu'un chan
gement ne s'opère pas sans secousse, sans
ferments d'irritation, sans augmentation
des divisions et des antipathies. De hautes
convenances doivent éloigner d'ailleurs
les électeurs du district d'Ypres de mettre
le moins en doute la réélection de ses
mandataires, d'un côté cause de la gra
titude incontestablement due, de l'autre
parce qu'il en est un parmi les députés,
qui a eu peine jusqu'ici l'occasion de
voter ou de paraître seulement dans la
représentation nationale. Le devoir de
chacun est donc bien nettement marqué
pour cette fois, àquelqueopinion politique
que l'on appartienne il ne s'agit que de
maintenir ce qui est. C'est en même temps
la ligne de conduite la plus facile et la plus
loyale", elle est tracée d'avance, il ne s'en
offre aucune autre suivre, et tous les
gens paisibles ne pourront que s'en féli
citer.
Un pareil état de choses ne saurait
pourtant faire le compte des brouillons
sans popularité que l'opinion publique
repousse. Us ne peuvent souffrir de voir
se raffermir de plus en plus une situation
politique qui s'est formée malgré eux
pleins d'ambition, et ne pouvant la satis
faire, ils se brisent en vains efforts pour
amener au moins la collision de quelques
intérêts de partis; et incapables d'affaiblir
en quoi que ce soit une constitution qu'ils
haïssent, ils crient au danger dans l'espoir
de le faire naître, comme un voleur crie
au feu, pour dévaliser ses victimes dans
la bagarre.
C'est ainsi que le Progrès qui passé quel
ques semaines, s'attachait déprécier les
institutions nées de la révolution, en
avançant ouvertement qu'elle s'était faite
contre le genre de libéralisme qu'il pro
fesse, manifeste aujourd'hui des craintes
pour la stabilité de la constitutiondont
on exécute encore d'après lui la lettre,
mais non plus l'esprit. Apparemment il
vaudrait mieux de ne pas s'en tenir la
lettre, qui est positive et qui gène, parce
que beaucoup de libertés y sont écrites en
toutes lettres; et de s'abandonner aux in
spirations des journalistes de loge qui
prétendent avoir seuls le monopole de
toute espèce d'esprit. Déjà les événements
nous ont appris connaître les hommes
qui veulent de l'esprit de la constitution,
et pas de la lettre. A Verviers, ils nous
montrèrent comment ils entendaient la
liberté d'association, Tilf, comment ils
comprenaient la liberté des cultes Visé,
comment ils interprétaient la liberté indi
viduelle; Ath et Tournay, ce que signi
fiait leurs yeux la liberté des suffrages.
Proclamer des libertés par masses tue
tête employer l'émeute, le scandale, les
gendarmes, les violences contre ceux qui
prétendraient en user, voilà l'esprit de la
constitution au sens du libéralisme ré
trograde que l'Observateur et le Progrès
représentent sous les ordres de la franc-
maçonneric.
Personne ne sera donc dupe des lamen
tations de la presse libérale au sujet des
dangers que la constitution court. Au cas
de péril, les bras qui ont su fonder une
Belgique indépendante malgré le libéra
lisme jaune, sauront la maintenir sans son
appui. Le Progrès en sera pour ses jéré
miades, comme il en fut naguères pour
ses frais d'éloquence hyperbolique, quand
il s'avisa de recommander une souscrip
tion pour Eugène Sue, lui qui n'avait pas
recommandé celle au profit des incendiés
de Dickebusch!
Tout le monde sera fort étonné en en
tendant parler des prétendus dangers aux
quels sont exposées la constitution et les
libertés publiques. Où sont les conspira
teurs, qui sont-ils? Rêvons nous en plein
jour? Oh non, nous répond-onle mal est
réel, imminent, il est inutile d'en citer les
preuves, elles abondent. Sous le prétexte
de l'abondance des citations faire, on ne
cite rien. Cette manière de prouver est en
effet passée en habitude certain endrpit,
cause de sa commodité.
Le danger que le Progrès veut surtout
faire comprendre, est (qui l'eut deviné?) le
lien de soumission hiérarchique qui existe
entre le Pape et les prêtres. Les prêtres
obéissent un étranger, par conséquent
ils nous trahissent. Que sera ce, si pas
seulement le clergé, mais la totalité des
Belges reconnaît l'autorité du S'Père com
me chef suprême de la religion que nous
professons tous? Nous sommes donc tous
des traîtres? Nous n'aurions que celte
seule alternative de trahir notre culle, ou
de trahir la patrie?
Au milieu de ses absurdités, le Progrès
laisse échapper un aveu qui lui coûtera
cher peut-être. Jusqu'à présent, il avait
protesté de son attachement la religion
catholique. Si quelqu'un pouvait encore
se laisser bercer de ces assurances hypo
crites, il sera maintenant détrompé. Pour
le Progrès comme pour Ronge, le Pape
n'est plus qu'un étranger, le chef spirituel
de ses adversaires, donc pas de ses adhé-
rens. Ainsi, qu'on le remarque bien, sa
rédaction renonce formellement l'obé
issance au Siège de Rome, elle s'en sépare,
elle s'en déclare l'ennemi. Quelque péni
ble qu'il soit de voir de pareilles infamies
se faire jour dans la ville d'Ypres, elles
sont néanmoins beancoup moins dange
reuses que les traits insidieux d'une impi
été voilée et circonspecte. En connaissant
l'individuon saura quel prix on doit atta
cher ses assertions, ses insinuations,
ses sympathies, ses attaques, ses
appréciations des affaires publiques.
A l'approche du jour auquel notre vé
nérable évêque viendra visiter la ville
d'Ypres, et y administrer la confirmation,
le Progrès témoigne de son respect pour
l'épiscopat par une calomnie qu'au moins
il pourra s'attribuer le mérite d'avoir seul
inventée. Des personnes bien informées le
forcent croireque chaque évêque de
Belgique entrelient dans toute ville, dans
toute commune un peu considérable, un
llodin, ce qui signifie dans son argot ju
daïque un gueux, un filou, pour arranger
les mariages des enfants de famille, moyen
nant un pot-de-vin pour l'université ca
tholique, et la promesse de faire élever
On s'abonne Ypres, Grand'-
Place, S4, vis-à-vis de la Garde, et
ches les Percepteurs des Postes du
Royaume.
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