JOURNAL D YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N° 2900. Samedi, 19 Juillet 1845. 29me année.
vérité et justice.
7FS.3S, 49 Juillet.
LES DERNIERS CRIMES
IL I M T fl©[P3,
Les libéraux de France et de Belgique
avaient en même temps un formidable
cauchemar: là c'était la Société de Jésus;
ici c'était M' Nothomb. Grâce la condes
cendance du chef de l'Église, les libéraux
français sont délivrés des jésuites; grâce
la prudence du Roi qui a accepté sa dé
mission, les libéraux belges sont délivrés
de Mr Nothomb. Mais en France comme en
Belgique, la disparition des hommes ne
fait point disparaître les questions. Celles-
ci restent avec toute leur actualité et tout
leur intérêt. En France, la lutte entre les
catholiques et les universitaires; en Bel
gique la lutte entre les hommes modérés
et les anarchistes. De ce qu'il n'y a plus de
jésuites en France, il ne résultera point
que les pères de famille bien intentionnés
11e réclameront plus la liberté de l'ensei
gnement, ni que les impies n'attaqueront
plus les saintes institutions de l'Eglise on
a enlevé un prétexte leurs déclamations,
ils en auront bientôt découvert cent au
tres; comme l'a dit Mr De Montalembert,
l'avant-garde a dû passer par le fer de
l'ennemi, mais le corps d'armée demeure
intact.... il aura de nouveaux et de plus
rudes chocs soutenir. Et de même en
Belgique, si M' Nothomb n'est plus la
tête des véritables patriotes, de ceux qui
ont fondé notre indépendance et nos li
bertés, ils n'en conservent pas moins la
majorité dans les chambres. Cela est in
contestable et Mr De Merode en prend texte
pour improuver la retraite du Ministre.
Qu'importent en effet les résultats électo-
On s'abonne Ypreu, Grand'-
Place, 34, vis-à-vis de la Garde, et
chez les Percepteurs des Postes du
Royaume.
PRIX DE L'XBOXXEXEXr,
par trimestre,
Pour Ypresfr. 41
Pour les autres localités 4
Prix d'un numéro.
Tout ce qui concerne la rédac
tion doit être adressé l'Éditeur
Ypres. Le Propagateur parait
le MXEDI et le MERCREDI
de chaque semaine.
PRIX DES IX8ERTIOV8.
1 centimes par ligne. Les ré
clames, 34 centimes la ligne.
REVEE POLITIQUE.
Les feuilles anglaises publient sur les événe
ments qui se sont passés la baie des Iles de
nouveaux détails, qui ne laissent plus aucun doute
sur le sort de cette partie de la Nouvelle-Zélande.
Cet établissementle plus ancien sinon le plus
important, formé par l'Angleterre sur ce pointa
été envabiet pillé par les indigènes, qui^nt dé
truit tout ce qui pouvait rappeler le passage de la
civilisation européenne sur cette terre. Les habi
tants, au nombre de 5oo, ont tous dû quitter leurs
établissements et se réfugier h Auckland après
avoir opposé aux sauvages une résistance qui leur
a coûté cher. Douze d'entre eux ont été tués, et
une vingtaine ont reçu de graves blessures. Le com
mandant du brick de guerre le Hasard est tombé
des premiers, frappé d'une grave blessure k la tète.
On se demande ce que va faire le gouvernement
anglais pour réparer ce désastre. Selon toute ap
parence, les mesures qu'il prendra dépendront en
grande partie du plus ou moins de disposition de
la part des Européens h tenter de nouveau la for
tune sur cette terre inhospitalière.
La province de Rio-Grande est de nouveau en
état d'insurrection. On se souvient qu'elle ne s'était
soumise que depuis très-peu de temps.
Les événements de la Catalogne étaient connus
k Madrid le 10 juillet ils y ont excité de vives
craintes. Néanmoins la capitale jouissait d'une
parfaite tranquillité.
La polémique des journaux roule toujours sur le
mariage de la Reine; YHeraldoqui est l'organe
du ministèrea rais en avant la candidature de
l'infant D. Henriqueduc de Séville. Cette nou
velle a produit une grande sensation.
Le Roi de Naples a conclu, le 25 juin avec la
DE
Si des écrivains cherchent de nos jours réhabiliter la Con
vention, des écrivains d'une autre sorte s'attachent mettre
en évidence les crimes qui souillèrent cette époque et dont
l'histoire ne nous offre point d'exemple. Voici quelques ex
traits du huitième volume de Y Histoire de France de M. de
I.aurentie, qui vient de paraître. Après avoir raconté les atro
cités qui suivirent les sièges de Lyon et de Toulon, l'écrivain
continue ainsi
La fureur ne se concentrait pas sur les deux célèbres cités
elle embrassait la France entière. Isabeau tenait Bordeaux
sous sa main comme une proie. Biroteau, du Calvados, s'était
quelque temps abrité dans cette ville; Guadet s'était caché
Libourne chez son père; on les traqua dans leurs asiles, et ils
furent mis mort sans jugement. Cent cinquante pères de
familles furent égorgés avec eux. Robespierre trouva toutefois
que Bordeaux méritait des supplices plus larges; il envoya un
jeune~homtne de dix-neuf ans, nommé Julien, fils du conven
tionnel, pour donner de l'activité aux barbaries.
Dans le Midi, ces féroces représentants mêlaient le scandale
des amours l'orgie des massacres. A Auch, d'Artigoyte don
nait des spectacles où les femmes et les filles étaient conviées.
Un jour au théâtre on lui jeta une brique la tète; il se ven
gea par un redoublement de meurtres. Dix royalistes allèrent
Reiue d'Angleterre un traité qui a pour but d'é
tendre et de faciliter les relations commerciales
entre les deux pays. Le Sud de Marseille croit
savoir qu'un traité analoguequi se négocie en ce
moment entre le royaume des Deux-Siciles et la
Franceconcédera k cette dernière des avantages
peut-être plus grands encore que ceux qui ont été
accordés k l'Angleterre.
Le mouvement rétrograde de l'émir vers le
Deïra est confirmé par toutes les correspondances
de l'Ouest.
M. le comte de Montalembert ne s'était pas
trompé en prédisant que les journaux de Londres
ne manqueraient pas de flétrir en termes énergi
ques l'horrible châtiment infligé par le colonel
Pélissier aux Arabes du Dabra. Le Times prétend
que ces atrocités ne sont pas les seules qui signa
lent la guerre d'Afrique. Il est probablement beau
coup de faits du même genre, dit la feuille lorie,
qui disparaissent sous la pompe des bulletins de
victoire. Le Morning-Advertiserlui, craint que
les sujets de la Reine Pomaré ne subissent le sort
des malheureux Arabes qui ont péri dans les ca
vernes du Dahra, et il conseille au gouvernement
de s'interposer, maintenant qu'il en est temps
encore, pour empêcher que ces atrocités ne se re
nouvellent dans l'Occéan Pacifique. Le Morning-
Post rappelle que les crimes commis par les sol
dats de Cortez et de Pézarre dans le nouveau
monde, ont entraîné la ruine de la puissance es
pagnole, et il conseille gravement k la France de
profiter de cette leçon infligée par la Providence
k un peuble oublieux de ses devoirs. Le Globe
compare le colonel Pélissier k un célèbre chef
zélandais, dont les journaux racontent plusieurs
actes d'uDe barbarie sans exemple, et il trouve
que celui-ci est, auprès de l'officier français, un
modèle d'humanité.
ensemble la mort en criant: Vive Louis XVIILe comte de
Barboton avait été absous par le tribunal révolutionnaire; un
décret de Paris le rendit la guillotine.
Dans les Landes et dans les Pyrénées, Cavagnac faisait cou
ler la sang. Une femme le suivait dans ses excursions, portée
par quatre hommes sur un palanquin.
Dans la Haute-Loire, Faure et Regnaud lançaient les sol
dats sur les femmes et les filles qui. le dimanche, prenaient
quelques atours, eu souvenir du jour du Seigneur.
A Rennes, Dubois-Crancéle féroce vainqueur de Lyon,
employa les jeunes enfants fusiller des pères de famille accu
sés de fédéralisme.
A Brest, le jour ou l'on célébrait une victoire d'un général
de la république, le tribunal révolutionnaire égorgeait son
père. Ce fut un incident barbare entre tous les autres.
En plusieurs lieux, les représentants ne paraissaient en
public qu'ayant leurs côtés le bourreau. Ils l'appelaient le
vengeur. Ils le faisaient dîner avec eux:
A Orange, les tueries passèrent toute idée. Une commission
populaire avait été établie pour juger les ennemis de la révo
lution. Les ennemis de la révolution, disait l'arrêté du comité
de salut public, ce sont leus ceux qui ont contrarié la marche
de la révolution; la peine due ce crime est la mort. Sur
uue telle loi, nul ne pouvait échapper. En peu de temps, la
commission fit exécuter trois cent dix-huit personnes. Plus
tard le député Goupilleau étala ses barbaries J'ai fait com
bler, s'écria-t-il (le i5 floréal an III), uue fosse pleine de cinq
cents cadavres; j'en ai fait aussi combler six autres destinées
recevoii douze milles victimes. Déjà l'on avait fait venir
quatre milliers de chaux pour les consumer. Auparavant
Avignon avait eu ses massacres; le souvenir de sa Glacière
pèse encore aujourd'hui sur ces contrées comme une image
de terreur.
La petite ville provençale de Bédouin périt tout entière.
L ''arbre de la liberté avait été coupé dans une nuit obscure, et
le coupable était inconnu. Le représentant du peuple, Maiguet
fit arrêter et enchaîner les prêtres, les nobles, les parents d'é
migrés, tous les suspects; puis il lança sur la ville trois cents
hommes du bataillon de l'Ardèche, commandés par Suchet,
armés de torches ce qui échappa aux flammes périt par le fer.
Des barils de poudre tirent sauter l'église. Puis la convention
approuva (le 18 floréal) cette justice infernale?
A Rochefort s'étalèrent des supplices d'une autre sorte. Là,
étaient entassés sur des navires de malheureux prêtres destinés
être déportés Cayenue. Cayenne c'était la mort mais les
pauvres vieillards infirmes, jetés au fond des navires l'un sur
l'autre, 11'ayant de force que pour priât Dieu, n'eurent pas
même besoin de toucher la terre fatale presque tous mou
raient dans le tombeau où on les tenait renfermés. Sept ou
huit cents périrent de la sorte.
A Arras Cambrai, Joseph Lebon épouvanta le monde par
des forfaits qui fout frémir. Être chélif, hideux, décharné, sa
férocité était ignoble, sa scélératesse abjecte. Il s'attaquait aux
femmes, de préférence; il les entassait dans les prisons, et les
livrait des furieux, pour les tuer deux fois. La débauche
était une partie de sa cruauté. On le voyait ivre dans les rues,
faire des actes de sauvage. Il se plaisait prolonger le supplice
des victimes sur l'échafaud. Lebon semblait un être infernal,