JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N° 2938.
7FR3S, 29 Novembre.
29me année.
vérité et justice.
On nous écrit de Langemarck
Dans la nuit du 26 au 27 on a volé dans
la grange du sieur Bonduelle, cultivateur
Langemarck108 gerbes de froment.
La police fait des recherches actives on
dit même qu'elle est sur les traces des cou
pables, et que guidée par les indices qu'ils
auraient laissés de leur passage, elle serait
parvenue découvrir les gerbes volées
dans le grenier d'une maison non loin de
là. Le sieur Bonduelle est un des fermiers
les plus généreux de la commune, et qui
contribue le plus largement l'entretien
des pauvres. 11 est triste de voir que les
propriétés d'un homme si charitable ne
soient pas plus respectées: les voleurs,
nous n'en doutons presque pas, seront des
individus qui lui doivent probablement de
la reconnaissance
Il se commet encore parfois des vols de
volailles et de lapins, trop insignifiants
pour les signaler; mais qui n'en sont pas
moins de fort mauvaise augure.
Tout le pays tient les yeux fixés avec
anxiété sur la Chambre, qui est parvenue
voler l'adresse après huit mortels jours de
débats violents. Prendra-t-elle en consi
dération la situation critique et menaçante
de la classe ouvrière, et la cherté croissante
des denrées alimentaires? Et mellra-t-elle
plus d'union rechercher et effectuer les
moyens de pourvoir promptement ce
triste état de choses Nous l'espérons.
Puisse notre espoir ne pas être déçu
Remmery avait servi pendant quelque
temps dans un régiment des chasseurs
cheval, et le contact des militaires avait
nui, comme très souvent, la conduite du
jeune homme. De retour Wervicq, sa
patrie, tout en se donnant de l'importance,
en juger par sa toilette, il ne put s'abste
nir des fréquentations qui précèdent ou
3ui suivent toujours l'oubli de certains
evoirs. Cependant il fut employé dans
une maison honorable de négoce, celle de
MM. Dumon frères Wervicq, et y gagna
en peu de temps par ses manières polies
et insinuantes une grande confiance. MM.
Dumon ne s'aperçurent pas d'abord que
les sous qu'ils mettaient soit au bac. soit
dans l'armoire du magasin, diminuaient
toujours; ensuite ils se doutèrent de quel
que chose, se défendant toutefois d'un
soupçon comme d'une pensée mauvaise;
mais enfin l'un d'eux, s'étant mis en guet,
dut en croire ses yeux: il avait vu la main
blanchede Remmery s'avancer furtivement
vers le sac de hillon.
M.Dumon, tout altéré,car il aimait le
jeuDe homme, et l'avait traité presque
l'égal de son fils; mais d'un autre côté,
ilétaitindignéde son ingratitude,alla en
parler au commissaire de police. M. le
commissaire, en homme qui connaît son
état, dit Dumon: c'est difficile, tout
sera dénié, mais le succès rendra la ten
tation plus vive: mettez dans un sac un
nombre de sous bien compté, marquez les
tous la lime, placez le sac dans l'armoire,
négligemment comme d'ordinaire, et dès
qu'il arrive quelque chose, appelez-moi.
Le conseil fut suivi, et peu de jours
après, le sac et une partie d'autres sous
jetés côté avaient disparu. Dumon fit
sans bruit appeler le commissaire, et dans
l'intervalle, déjeûnant avec Remmery,
parla fort gaiement d'amusements et de
fleurette. On regrettait que la saison des
kermesses fût passée eu revanche on ex
altait le plaisir des estaminets; le jeune
homme se complut beaucoOp ces dis
cours: on tombait d'accord sur tous les
points. Quand M. le commissaire entra, la
scène changea de décors. M. le commis
saire, dit Dumon, j'ai quelques soupçons
sur Remmery; afin de les dissiper, ne
voudriez vous pas le visiter Très
volontiersRemmery apparemment ne
s'y refusera guères, il ne s'agit que d'une
simple formalité extrêmement précieuse
pour dissiper des doutes fâcheux. Rem
mery, l'ancien chasseur cheval, le lion
musqué de Wervicq, pâle et tremblant, se
laissa fouiller les poches. On en lira un'e
poignée de gros sous, et une bourse qui
en était remplie. Le commissaire
combien, M. Dumont, aviez vous mis dans
cette bourse? Douze francs. On
compta les sous, c'était exact.
Comme le commissaire ramassait les
autres sous, Remmery, un peu remis de
sa surprise, prétendit que ceux là étaient
les siens. Mais la marque de la lime lui
fit immédiatement revenir la rougeur au
front.
Remmery fut arrêté. De nouvelles in
vestigations du surnois commissaire firent
découvrir qu'il avait volé encore trois
aunes de drap pour en faire confectionner
une redingotte, mais que, s'étant ravisé,
de peur sans doute que les plumes ne
trahissent l'oiseauil avait revendu le
coupon moitié prix, mais pas moitié
perte, puisque tout était gain. On fut sur
le point de l'accuser encore du vol d'une
cueiller d'argent mais soit que 'a renom
mée eut brodé suivant ses habitudes, soit
pitié policière, la pointe stratégique parut
poussée assez loin.
Dix-huit mois de prison sont venus
mettre un frein ce jeune ambitieux qui
non content de quelques poignées de gros
sous, volait des bourses entières, et par
économie voulait encore s'habiller en
freluquet sans y toucher.
On s'abonne Vpresj Grand'-
Place, 34, vis-à-vis de 1a Garde, et
chez les Percepteurs des Postes du
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tion doit être adressé l'Éditeur
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Nous avons déjà rendu compte du funeste évé
nement qui a mis fin aux jours du verdurier De-
mettere et ce d'après les bruits qui en étaient
venus notre connaissance, le lendemain des pre
mières investigations faites par le parquet. Depuis,
les bruits les plus contradictoires n'ont cessé de
circuler Courtrai tantôt Édouard Demettere
était complètement innocentl'infortuné père
Demettere s'était suicidé; tantôt il y avait plus
d'uu coupable, et la rumeur publique donnait a
cette affaire toutes les horribles allures du drame
sanglant de la maison Bancal a Albi^où fut assas
siné le malheureux Fualdès. Nous n'avons tenu
nos lecteurs au courant de ces bruits, parce qu'au
cun ne nous paraissait fondé. Nous n'avons pas
même parlé de la singulière sollicitude dont le
ministère public entoure le prévenu, a l'innocence
duquel il est, très porté croire. Toutefois, le juge
d'instruction déploie dans cette circonstance une
rare activité, et si un coupable échappe la juste
vengeance des lois, ce ne sera pas faute d'avoir
porté dans l'accomplissement de ses pénibles
devoirs tout le zèle possible. Samedi soir, une nou
velle descente sur les lieux du crime a été faite. Le
prévenu Édouard Demettere a été extrait de la
prison et conduit sur le lieu même où il est accusé
d'avoir frappé son malheureux père. Toutes les
pièces dites de conviction ou qui peuvent contri
buer a établir le corps de délit, ont été de nouveau
mis sous les yeux, ainsi que la fatale arme feu
qui a donné la mort h son père, ainsi qu'une pelle a
l'aide de laquelle le prévenu paricide cherche a
excuser son crime. La chambre où le meurtre a eu
lieu a été minutieusement mesurée, et il en a été
fait un dessin très exact, probablement aussi avec
la désignation de la place occupée par chacun des
auteurs de ce drame, avant, pendant comme après
le meurtre. A la suite de l'interrogatoire et de la
confrontation du prévenu, il s'est passé une scène
qui a vivement impressionné les assistants. Le
père Demettere avait un fils, engagé volontaire,
et servant dans le régiment du 2me lanciers
Namur. A la nouvelle de la mort de son père,
Jean Demettere avait obtenu la permission de se
rendre aux obsèques de l'auteur de ses jours, et il
était venu lui rendre les derniers devoirs. Depuis,
il obtint de M. le ministre de la guerre un congé
de six mois, pour aider et consoler sa mère. Il se
trouvait donc la maison paternelle, lorsqu'on y
amena son frère Édouard, et a sa vue il éclata en
sanglots. Il ne l'avait plus revu depuis le jour de
son arrestation. Quand la justice eût fait son devoir,
Jean demanda a M. le juge d'instruction la per
mission d'embrasser son frère. Hct is loch
eenen ongelukkigen broedery dit-il (c'est un
frère malheureux). Le juge y consentit, et fes deux
frères se jetèrent dans les bras l'un de l'autre en