JOURNAL D'ÏPRES ET DE L ARRONDISSEMENT.
N° 2954. Mercredi, 21 Janvier 1846. 29me année.
Une interpellation concernant finstruction
publique.
Monsieur Jean-Baptiste Malou, père du
Ministre des Finances, vient de perdre son
épouse, Madame Marie-Thérèse-Françoise-
Xavier Vandenpeereboom; elle est décédée
Ypres le 17 janvier 1846 l'âge de 62
ans. Le service funèbre a été célébré avec
pompeà l'Église de S'-Jacques sa paroisse.
La noticecommémorati ve reproduit avec
justesse les textes suivants Elle a ouvert
sa main l'indigent, elle a étendu son bras
vers le pauvre. Prov. xxxi, 20.
Elle se sauvera par les enfants qu'elle
aura mis au monde, en les faisant persé
vérer dans la foi, dans la charité, et dans
la Sainteté. I Tim. 13.
Tout ce qui concerne la rédac
tion doit être adressé l'Éditeur
ïpres. Le Propagateur parait
ie SAMEDI et le MERCHEDI
de chaque semaine.
PRIX DES IiXSERTlOXS.
1» centimes par ligue. Les ré
clames, BS centimes la ligne.
On s'abonne Vpres, Grand'-
Place, SA, vis-à-vis de la Garde, et
chez les Percepteurs des Postes du
Royaume.
PRIX DE E'AROXMEMEIVT,
par trimestre,
Pour Ypresfr. A
Pour les autres localités AâO
Prix d'un numéro.
vérité et justice.
21 Janvier.
Une convention a été dernièrement conclue
entre l'administration communale de Tournai et
Mgr. l'évêque de ce diocèse, pour améliorer la
situation de l'athénée, qui sous le rapport de la
morale paraissait ne pas garantir aux parents des
motifs suffisants d'entière sécurité. Cette mesure a
été vivement applaudie par tout ce que la ville de
Tournai renferme de plus respectable, et a donné
un nouvel essor aux études, dont l'impulsion reli
gieuse doit toujours activer les progrès. Cependant
la convention arrêtée a dans quelques unes de ses
dispositions éveillé les susceptibilités publiques
jde certains membres de la Chambre des représen
tants et de M. le ministre de l'intérieur, bien mal
b propos selon nous.
Quoi qu'il en soit, cet incident a amené des ex
plications qui, s'ils les entendent, doivent sonner
"Jurement aux oreilles des membres de la régence
J'Ypres, et de tous ceux qui s'opiniâtrent a sous
traire le collège communal de notre ville a toute
influence religieuse, a peu près comme si elle était
pestilentielle.
MM. Devaux, Rogier, Verhaegben, etc. ayant
manifesté l'opinion que par la convention avec
l'évêque la régence de Tournai avait aliéné une
partie de ses droits en ce qui concerne la nomina
tion des professeurs, M. le comte de Theux a ré
pondu que la commune peut en tout cas résilier
l'accord, et passer outre la nomination d'un pro
fesseur que l'ordinaire aurait récusé pour cause
;rave; mais qu'alors Cévêque retirerait
f ecclésiastique qu'il a attaché l'athénée pour
liriger Censeignement moral et religieuxet
lue c'est là son droit et son devoir. Car l'évêque
je peut sanctionner par la présence d'un ecclé
siastique un enseignement qui serait contraire
la religion et la morale. L'honorable
membre, s'élevant avec force contre toute tenta
tive d'entraver l'entente des autorités communales
et ecclésiastiques pour la direction de l'enseigne
ment moral et religieux fait remarquer qu'au
contraire les pères de famille désirent précisé
ment Caccord de ces deux autorités, et ce qui
le prouve, c'est la prospérité extraordinaire de
tous les établissements l'égard desquels cet
accord existe.
M. de Mérode a ajouté son tour que l'immense
majorité des pères de famille veut un enseigne
ment moral et religieux, qui ne peut exister
sans l'accord entre l'autorité civile et Vauto
rité religieuse. 11 déclare qu'il serait souveraine
ment injuste de prendre les fonds des contri
buables pour élever leurs enfants dans les
principes contraires ceux qu'ils professent.
Ces paroles graves n'ont été contredites par
personne, seulement le député de Bruxelles, qui
porte au front l'ignominie d'avoir offert ses hom
mages'a Sue, a réclamé contre la clôture des débats,
espérant probablement d'amortir son dépit et
d'effacer chez ses collègues l'impression de ce
qu'ils venaient d'entendre par quelque digression
sur les dîmes, ou sur les fraudes électorales ou sur
les envahissements du clergé, ou sur quelque autre
lieu commun qui reste toujours pour pis aller. Ses
efforts, même secondés par M. Rogier, n'ont pas
réussi.
Il est donc admis devant le corps législatif
comme en logique
Que l'évêque ne peut sanctionner par la pré
sence d'un ecclésiastique un enseignement con
traire b la religion et a la morale;
Que l'autorité communale, qui met l'évêque"
dans la pénible nécessité de refuser un ecclésiasti
que 'a un établissement d'instruction, et qui se
dispense par orgueil ou par obstination de s'enten
dre avec le pouvoir spirituel, ou qui n'emploie pas
de moyens ou cesse d'en employer afin de mettre
un terme a ce pernicieux état de choses, prévari-
que k son devoir le plus sacré, fausse le vœu et
méprise la volonté de l'immense majorité des
pères de famille;
Qu'enfin il y a dans cette conduite un abus de
l'argent des contribuables que rien n'est capable
d'excuser, que la force et l'intrigue peuvent faire
durer, mais qui n'en reste pas moins inique.
Pour nousnous avons toujours le ferme espoir
que nos magistrats finiront par ouvrir les yeux
sur la terrible responsibilité qu'ils assument en
laissant le Collège communal, sous le rapport de
l'enseignement religieux et moraldans l'abandon
complet où il croupit depuis si longtemps. Sera-ce
une indiscrétion que de dire, pour l'honneur de
nos conseillers communaux, que plusieurs d'entr'-
eux, et peut-être tous, ont diverses reprises
témoigné que la situation anormale du collège
leur déplait, qu'ils préféraient un arrangement,
que l'homme ne peut vivre sans religion, que la
jeunesse ne peut avoir de principes sûrs de morale
sans la foi, et qu'aux ministres du culte appartient
irrécusablement le droit de l'enseigner? Ce que
tous pensent en particulier, pourquoi ne le pen
seraient-ils pas en commun? pourquoi ne se met
traient-ils pas au dessus de cette basse clique qui
les entoure.
En théorie politique, soyons républicains, libé
raux, constitutionnelsexaltés, modérés, monar
chistes, démocrates; en philosophie, soyons éclec
tiques, cartésiens, sceptiques, etc.; partisans de
1 analyse ou de la synthèse mais en religion nous
sommes après tout catholiqueset nous subor
donnons tous nos systèmes, toutes nos opinions,
tous nos sentiments k la vérité immuable du dogme
de la foi. Personne n'a la folie parmi nous d'op
poser l'étincelle qu'il croit faire jaillir de son
cerveau k ce phare éternel du genre humain.
Catholiques jusqu'au dernier sur les deux rives
de l'Iperlée, comme sur celles du Tibre; nous
sommes régis par des magistrats catholiques. Après
cela, doit-il leur être si difficile de s'entendre
avec le vénérable vieillard qui de Bruges étend
sur nous sa vigilance pastorale, et sa main pour
nous bénir Honnis ceux qui lui tourneraient le
dos Vous qui tenez le pouvoir en mainprocurez
a sa vieillesse la consolation d'avoir réglé les af
faires du collège d'Y près. Rien ne va plus au cœur
du sageblanchi sous les ansque les destinées de
la jeunesse. Prétendre qu'il y est indifférent, ou
que c'est volontairement qu'il prive une partie de
nos concitoyens de cet enseignement sublime, qui
seul peut rendre heureux k l'homme son présent et
son avenir, ce serait un mensonge que trop de cir
constances et de faits notoires démentent, et qui
ferait rougir et reculer jusqu'k la suffisance la plus
effrontée. C'est aux nouveaux conseillers surtout
de saisir l'occasion de prendre une attitude résolue,
et de marquer leurs premiers pas dans la carrière
administrative par une démarche qui resterait gra
vée dans la mémoire de tous les Yprois dignes
de ce nom, avec les caractères d'une ineffaçable
reconnaissance. Peu importe s'ils sympathisent
avec nous d'idées politiques, c'est d'une question
toute autre qu'il s'agit, c'est de savoir d'une ma
nière nette et claire s'il y a parti pris k Ypres de
poursuivre en matière d'instruction le système dé-
catholisant de Guillaume, le système de défaveur
affectée pour la religion et ses ministres, qui pro
page en France, sous le patronage universitaire,
les vices et l'incrédulité.