dans d'atroces souffrances. Il laisse une veuve, et un enfant en bas âge. PERSÉCUTIONS DES RUSSES EN POLOGNE. En 1842, 7840 familles du diocèse de Podlachie avaient embrassé la religion grecque schismatique,les unes contraintes coups de knout, les autres cédant l'ap pât de l'or; car c'est ainsi que s'opèrent les conversions au culte russe. La voix de leurs anciens pasteurs, et le cri de leur conscience firent bientôt revenir la vraie foi ces victimes du fanatisme intolérant ui opprime la Pologne. La plupart cepen- ant échappèrent la vengeance qui les attendait, en fuyant en Autriche et en Prusse. Ne pouvant atteindre les trans fuges, la colère des agents de l'autocrate s'est appesantie sur les ecclésiastiques qui avaient inspiré si noblement l'horreur et le repentir de l'apostasie. Dans la nuit du 8 janvier 1843, tous furent enlevés de force de leurs presbytères, les fers aux mains et aux pieds, et conduits comme une troupe de bandits sous escorte, au riômbre de 240 prêtres, aux prisons de Minsk. Tous ayant résisté aux flatteries, aux menaces et aux barbaries qui furent employées tour tour pour leur faire ab jurer le catholicisme, l'ordre arriva de S'- Pétersbou rg de les déporter comme rebel les aux déserts glacés de la Sibérie. Nous n'avons pas besoin d'insister sur le sup plice du voyage. A peine arrivés Tobolsk, la mort en moissouoa un grand nombre. Ceux qui survécurent furent écroués la forteresse, pêle-mêle avec les forçais. Du reste, même régime, mêmes travaux pour les uns comme pour les autres. Du pain noir et de l'eau pour nourriture, scier du bois et couper des arbres pour occupation, le knout pour stimuler les membres en gourdis par la fatigue et le froid. Chaque malin jusqu'au soir, répétition de la veille. Dieu cependant voulait révéler au monde civilisé les cruautés exercées sur ses mi nistres. Le 8 mai 1845, un seigneur de Tobolsk, capitale de la Sibérie, heureux de voir que la providence lui avait accordé un fils pour perpétuer son nom et sa race, fit distribuer aux prisonniers de la citadelle une ration extraordinaire, consistant pour chacun en 7 livres de viande (les malheu reux n'en mangeaient jamais), 16 livres de pain, 2 de miel, et 4 litres d'eau-de-vie. Les pauvres prêtres acceptèrent le cadeau avec reconnaissance, mais refusèrent l'eau- de-vie. Ce refus les sauva. Car les officiers et soldats commis leur garde s'en em parèrent avec avidité, et en composèrent avec le miel une boisson fort connue dans ces contrées, qui les enivra. Pendant qu'ils étaient endormis, 97 ecclésiastiques firent de leurs couvertures une corde au moyen de laquelle ils descendirent par l'une des meurtrières de la forteresse, et gagnèrent la course un bois, munis de leurs pains. Après avoir traversé des steppes et des forêts immenseset franchi plusieurs rivières la nage, un navire prussien les acueillit sur les bords de la Mer blanche, et les transporta Kœnigsberg,aprèsavoir doublé le cap nord et traversé le Sund. Un de ces martyrs courageux est arrivé Bruxelles. Il se nomme Jean de Czars- kowski, et appartient une famille hono rable de Wilna. Couvert de cicatrices par suite des mauvais traitements,il est cepen dant encore d'une santé robuste, son es tomac seul est délabré la suite de longues privations. Connaissant plusieurs langues, il pourrait se vouer avec fruit l'œuvre des missions étrangères, et c'est dans ce but qu'il se propose d'aller se jeter aux pieds du Souverain-Pontife Rome. Il doit y trouver plusieurs de ses compagnons d'infortune. En quelque lieu, en quelque pays sauvage qu'il puisse être envoyé, il sera mieux traité que sous la tyrannie moscovite. Les yeux de l'exilé ne se sont mouillés qu'au souvenir de sa mère. Un publiciste,en terminant ce récit dou loureux se demande: le catholicisme est- il destiné périr en Pologne? Oh, que Dieu préserve ce peuple généreux du der nier des malheurs. Non, la férocité des bourreaux n'éteindra point la foi chez une nation courageuse, elle se ranimera au contraire sous le feu de la persécution, comme autrefois devant les tribunaux san guinaires des proconsuls romains, comme il y a un demi siècle en face des supplices en France, comme plus récemment encore sous les cangues et dans les cages de fer au Tong-King et en Cochinchine. Après la révolution de 1830, quelques membres de l'émigration polonaise se réfugièrent Ypres. Le temps les a insensiblement dis persés, au point que nous douions s'il en reste trois ou quatre. Ils sentiront grandir leurs sentiments de reconnaissance pour la cité qui les a accueillis non comme des étrangers inconnus, mais comme des en fants de la grande famille chrétienne, quand ils apprendront avec quelle inten sité la haine du catholicisme continue peser sur leurs compatriotes. sur la na lté de jonc, leurs carabines placées entre leurs jambes, s'occupaient confectionner des cigarettes eu attendant la fin de l'interrogatoire. Eh bien! mon garçon, dit enfin lejuez en s'adressant Joachim, nous allons donc te juger Avec votre permission, senor, dit Joacbim qui, se levant de son fauteuil, sans répondre au juge, se dirigea vers la table où était placé le brazero, et y aliuma une cigarette qu'il tenait entre les doigts. Ne te gène pas, mon garçon... fumer est une des grandes occupations de la vie, je le sais... seulement, depuis que le gou vernement a affermé la régie, le tabac est devenu détestable. Mais il y a encore de braves garçons qui savent faire le coup de fusil avec les douauiers répondit Joachim, et si votre seigneurie veut s'en convaincre, elle n'a qu'à accepter ce paquet de cigarettes. Voloutiers, dit le juge qui, s'emparant du paquet, en retira une cigarette qu'il alluma aussitôt. Caramba reprit- il après avoir humé avec délice quelques bouffées tu as raison, c'est délicieux -T il n'y a plus vraiment que les brigands de grande roule qui fumentd'excellentscigares. Mon cher garçon, ajouta-t-il d'une voix pleine de douceur et de bienveillance, je compte sur ton amitié pour faire parler de moi l'estimable contrebandier qui t'a fourni ces cigarettes... Ce sera une fort bonne affaire pour ce garçon, car, outre la marchandise que cela lui fera vendre, peut être un jour ma proteciton lui sera- t-elle aussi de quelque utilité. Mais poursuivons cet interroga toire. Pourquoi donc, diable, as-tu tué ce pauvre don Antonio V. Je ne me suis jamais bien rendu compte de cette action, répondit l'assassin avec sang-froid. Je devais avoir probable ment ce jour-là les nerfs agacés. Ceci est une excuse, j'en conviens, mais elle n'est que secondaire, et je ne puis l'admettre. A propos, combien vend- il une rueda de cigarettes, ton ami le contrebandier? Douze réaux, et chaque rueda se compose de trente-deux paquets. Ce que le gouvernement nous fait payer deux piastres ou seize réaux! s'écria lejuez de letras avec indignation, ce qui est un vol, uu vol manifeste et honteux- Mais, bah ne me parlez pas des gouvernements j ils sonl tous plus voleurs les uns que les autres. J'en conviens volontiers, dit Joachim d'une voix pate line seulement on ne les fusille pas. A propos, tu m'y fais penser, mon garçon la cause est entendue, et j'ai ma sentence rendre. Le juez de letras, en disant ces paroles, voulut prendre la plume qui, attachée au fond de l'encrier par l'encre depuis longtemps séchée, résista ses efforts. Caramba dit-il, j'ai oublié de me procurer du papier timbré: comment faire? Puis, comme inspiré par une idée subite, il se tourna vers les deux dragons Mes enfants, leur dit-il, défaut de pa pier pour écrire mon jugement, je vous prends témoin que je condamne Joachim Pacheco, l'assassin de don Antonio V.., être fusillé dans les quarante-huit heures, l'endroit même On lit dans le Journal de Bruxelles Les libéraux sous la restauration en France ont exploité avec un acharnement incroyable contre la religion catholique l'af faire d'un prêtre français, M. l'abbé Contrafatto, accusé de crime infâmequi fut condamné aux travaux forcés perpé tuité. Eh bien! l'innocence de ce malheureux prêtre est aujour d'hui démontréeet c'est peine si ce fait a été mentionné dans les journauxqui ont pendant des années voué son nom l'infamieet dont le langage passionné a contribué sans doute dans le temps faire de M. l'àbbé Contrafatto la victime d'une erreur judiciaire. Voici le document remarquable que nous trouvons ce sujet dans le Journal de Rennes a Nos lecteurs se rappellent peut-être qu'un abbé Contrafatto fut, il y a une vingtaine d'années, condamné pour crime infâ me aux travaux forcés. Me Charles Ledru avait été chargé de la poursuite, en qualité d'avooat de la partie civile. Longtemps après cette condamnation, des témoins avouèrent M® Ledru le faux témoignage dont ils s'étaient rendus coupables. Cet honorable avocat s'empressa de faire des démarches pour ob tenir la grâce de l'homme condamné sur sa plaidoirieet il a écrit Contrafatto lui-même la lettre suivante, que nous de vons la communication d'un de nos abonnés qui l'a prise sur la minute déposée dans l'étude d'un notaire de Paris. Nous croyons devoir mettre ce document sous les yeux de nos lec teurs Monsieur, c'est toujours un devoir de réparer le mal qu'on a fait aussi, depuis le jour où plusieurs des principaux témoins de votre malheureuse affaire vinrent me confier qu'ils avaient altéré la vérité pour vous perdre, je me con- sidérai comme engagé d'honneur m'adresser immédiate- ment M. le garde des sceaux, pour le supplier d'abréger le terme de vos souffrances et je lui racontai toutes les circonstances qui motivaient ma démarche. J'eus lui dire que les témoins avaient supposé, en raison i) de mes opinions auxquelles ils faisaient cette grossière in- jure, qu'en plaidant contre vous, j'avais été moins l'adver- saire de l'homme en qui je voyais un criminel que du prêtre catholique. C'est en effetdans cette persuasion honteuse qu'ils étaient venus près de moi, pour se glorifier de leur parjure devant la justice. Grâce au Ciel, Monsieur, je n'ai été si énergique dans les poursuites dirigées contre vous que parce que ma con- viclion de votre culpabilité était profonde; et, si j'ai dé- plorer mon erreur, du moins je n'ai point me reprocher une mauvaise action. n Tel a été mou laugagelorsque les malheureux qui croyaient flatter mes sentiments personnels les calomnièrent m si indignementen osant m'avouer leur infamie. Tel a été aussi mon langage devant celte noble et sainte femme, qui, sans vous connaître, et sous la seule inspiration de sa Vertu, était devenue votre Providence. Je lui donnai, eu outre, par écrit, une déclaration complète et détaillée des faits et c'est ainsi quejoignant les efforts de sa charité la priere que j'avais adressée M. le garde des sceaux, elle a obtenu une grâce qui m'a déchargé moi-même d'ua poids pénible; du moins, elle l'a beaucoup allégé; car, Mousieur, n s'il est bien cruel de subir un châtiment imméritéo'est une grande douleur de savoir qu'on en a été la cause même i) involontaire. n Jeu'ai accusé qu'une fois dans ma vïe un grand criminel n les regrets que me laisse ce souvenir seront éternels. Faites, Monsieur, de cette déclaration, tel usage que vous aviserez bon; et, croyez-moi, Monsieur, votre très- i) humble et obéissant serviteur. 4 juillet i845. (Signé) Ch. Ledru avocat la cour royale. c Ensuite est écrit Enrégistré Paris, le 1 août 1845 (folio) 171. R. C. 9. Reçu a fr, 20 c., décime compris. (Signé) La Verdieb. Il est ainsi en l'original de la lettre ci-dessus transcrite, déposée pour minute Me Henry Mertiau notaire a Paris, a soussigné, aux termes d'un procès-verbal dressé par ledit i> Me Mertiau et son collègue, le août i845» contenant reconnaissance d'écriture par M. Charles Ledru. où il a commis sou crime. Reconduisez-le en prison. .Au moment où le condamné allait frauchir le seuil de la porte, le juez de letras, s'élançaot vers lui, l'arrêta parle bras: Mon pauvre Joachim, lui dit-il, j'espère que tu ne me gardes pas rancune de la petite formalité que j'ai été obligé de remplir ton égard, et que cela ne t'empêchera pas de me recommander, ainsi que tu me l'as promis, ton ami le contre bandier qui vend de si bon tabac. Les quarante-huit heures d'existence qui restaient encore Joachim Pacheco étant écoulées, on le fit sortir de la chapelle ardente, cette terrible antichambre de l'échafaud, pour le conduire au supplice. Alors seulement le commandant de place se souvint qu'il avait disposé la veille, pour faire escorter un convoi d'argent, de toute la garnison de Cosala, c'est-à-dire de six dragons, et que pour le moment, lui et son épée étaient lesseuls représentants de la force militaire. Or, comme Joachim Pacheco devait être fusillé, le cas ne laissait pas que d'être embarrassant. Les autorités, afin de sortir de ce mauvais pas, décidèrent que l'on louerait immédiatement trois hommes pour remplacer les dragons absents. Cette résolution était plus facile prendre qu'à exécuter, car il fallut plus de deux heures pour parvenir trouver trois gaillards, uou pas pleins de bonne volonté, mais ayant eux des carabines tous ceux qui étaient assez favorisés par le sort pour posséder des armes feu s'en seruaieut alors sur les grand'routes. La suite au prochain n°.)

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Le Propagateur (1818-1871) | 1846 | | pagina 2