JOURNAL D YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
No 2973.
29"»' année.
7PR.3S, 28 MARS.
RÉVÉLATIONS SDR LA RUSSIE.
On nous écrit de Wareghem, 27 mars
Le jury d'examen de la Flandre occi
dentale vient d'accorder le diplôme de
géomètre-arpenteur M. J. Delva de Wer-
vicq, élève au pensionnat de Waereghem.
Nous mentionnons ce succès avec d'autant
plus de plaisir que dans cet établissement,
dirigé par M. Van Robays, on apporte un
soin égal toutes les parties de l'éducation.
Le nommé Wcultiyateur Bix-
schote, a été trouvé pendu dans une étable
de sa ferme le jeudi 26 mars. Cet homme
paraissait livré depuis quelque temps
une sombre mélancolie et nous croyons
devoir attribuer cet acte de désespoir
un commencement d'aliénation mentale.
On s'abonne A Ypres, Grand'-
Place, 34, ïli-à-ni de la Garde, et
chez les Percepteurs des Postes du
Royaume.
PRIX DR L'ABOXNEMENT,
par trimestre,
Pour Ypresfr.
Pour les autres localités 4âO
Prix d'un numéro
Tout ce qui concerne la rédac
tion doit être adressé l'Éditeur
Ypres. Le Propagateur parait
le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine.
PRIX DES ISSERTIOXS
11 centimes par ligue. Les ré
clames, 33 centimes la ligne.
vérité et justice.
Un Messinois a barbe et h moustaches, chevelure
l'artiste, pantalon a grands carrés couvrant un
pied coquet sous d'élégants sous-pieds, se dan-
didait avec fierté a l'avant dernière audience cor
rectionnelle. Il n'était pas prévenu, mais plaignant,
et depuis longtemps l'air triste et humble a passé
de mode chez les plaignants en jnstice, pour faire
place a uoe arrogance menaçante. Peu s'en fallût
pourtant que le lion messinois ne changeât de rôle.
Il s'en aperçut, il en devint tout blêmeet on le
vit chanceler sur ses jambes de peur. Qu'y eut-il
donc? Revenant de Wytschate, d'un de ces sou
pers de bons vivants où il n'y a pas de joie sans
ivresse, il courut dans une haie, et sa casquette
y resta suspendue Tandis que dans l'obscurité il
cherchait sa coiffure qu'il croyait tombée dans la
boue, la garde de nuit survint. Qui est la?
votre nom? Demandes ridicules! un lion messinois
en goguette s'abaissera-t-il jusqu'à se nommer
des veilleurs de nuit? Cependant la garde ne
se paya point des grossièretés qui lui furent ré
pondues, et force fut au dandy de la suivre en
trébuchant, en régimbant, et en bataillant jus
qu'au corps-de-garde. On fit chercher le garde
champêtre, qui s'écria aussitôt Oh c'est Lu
de Messines, le sabotier! La profession jurait
avec la mise du fréluquet. Mais il pensa porter un
fameux coup de sabot la garde, en la dénonçant
comme ayant attenté de nuit h la liberté indivi
duelle d'un citoyen paisible sur la voie publique.
L'acquittement des prévenus a été instantané; loin
[Suite et fin.)
11 est étrange qu'au milieu de ces doutes; ce fût
seulement plusieurs semaines après cet accident
qu'une pensée lui traversa l'esprit, pensée qu'il
écoutait comme une illusion, et qui finit par se
faire jour en lui comme un rayon de lumière,
c'est qu'il n'avait jamais quitté les environs de
Saint-Pétersbourg, et était revenu reposer chaque
nuit au même endroit. C'est effectivement ce qui
était arrivé; toutes les nuits, pendant des mois, il
avait parcouru la même route pour revenir a la
même cellule. On doit se rappeler que ce n'était
pas une punition, mais seulement un avertissement
amical du pouvoir, qui voulait empêcher un homme
auquel il portait intérêt d'encourir une punition
réelle.
Les forces de la haute police, petites en appa
rence, sont en réalité formidables. Chaque ville
principale dans chaque gouvernement (on sait que
l'empire russe se divise en gouvernements, au lieu
de comtés, départements ou provinces) renferme
une subdivision de l'institution avec l'accompagne-
de requérir contre eux, le ministère public les a
engagés ramasser encore les soulards qu'ils ren
contreraient de nuit, mais a ne plus supporter
leurs insultes sans verbaliser.
A l'audience correctionnelle de jeudi, on voyait
avec peine une grande affluence de monde attirée
au tribunal par la curiosité peu honnête d'assister
aux débatsd'une scène de désordres et de violences
commis le jour du Mercredi des cendres dans une
maison infâme. Ce qui fait frémir surtout d'indi
gnation, c'est qu'un père avait accompagné son
propre fils dans ce repaire du crime. En quel genre
de dépravation la ville d'Ypres, avec sa morgue
libéralele cède-t-elleaux villes les plus mal
famées sous le rapport des mœurs? De quelles
dissolutions ne peut-on nous pas opposer l'exem
ple? Celui qui prétendrait que l'autorité n'a au
cun moyen d'atténuer le mal, ne comprendrait
pas la mission des pouvoirs civils dans la société.
ment ordinaire d'officiers avoués, indépendamment
d'un corps de gendarmerie qu'on peut considérer
comme l'exécuteur spécial de ses ordres, quoi-
qu'au besoin elle pût mettre en mouvement toutes
les troupes de l'empire. Quelques milliers d'offi
ciers, d'agents et de brigades de gendarmerie com
posent, ainsi le service ostensible que dirige le
grand-maître; mais on estime que ses agents se
crets, ses correspondants et ses espions directs et
indirects égalent plusieurs fois le nombre de ceux
qui portent sa liviée.
On avoue que la dépense de l'établissement est
énorme; mais il y a toute raison de croire que ce
qu'on eu dissimule dépasse de beaucoup la dépense
avouée; et, qui plus est, cela s'accroît tous les ans.
Pour remplir sa mission, la haute police est obligée
d'entretenir des espions, non-seulement dans tou
tes les classes de la société a l'intérieur, mais au
dehors; non-seulement n'il existe pas dans l'em
pire un seul homme au-dessus du serf sur la con
duite et les antécédeuis duquel elle ne soit tenue
de fournir d'amples détails au premier avis de
l'autorité supérieure, ce qui exige naturellement
des armées d'espions et des multitudes de commis
pour examiner et compiler leurs rapports, mais
il y a aussi les agents entretenus au-delà des fron-
tolérance protestante, intolérance libérale.
L'Angleterre protestante vient de donner au
monde libéral un exemple de tolérance et de bon-
sens, qui contraste singulièrement avec l'esprit
intolérant et persécuteur du libéralisme moderne
en France, en Suisse, eu Espagne, en Portugal, en
Toscane et en Belgique.
Le code pénal anglais renfermait encore des
pénalités rigoureuses contre les catholiques, les
déclarait encore frappés de diverses incapacités.
Ces lois, la vérité étaient tombées en désuétude,
mais elles n'en subsistaient pas moins.
Deux bills ont été présentés la législature
dans le but de faire abroger ces lois de colère.
L'un de ces bills a été soumis la chambre des
lords par le gouvernement, l'autre la chambre
des communes par M. Watson. Dans sa séance du
11 mars, la chambre des communes a autorisé la
seconde lecture du bill dont elle est saisie.
L'adoption de ce projet de loi sera pour les
ordres religieux une autorisation d'exister et d'agir
selon le droit commun.
Les débats qui ont précédé le vote de la seconde
lecture ont été mémorables quoique peu longs.
Quelques fervents anglicans dont la dévotion
s'est nourrie des articles du Constitutionnel fran
çais, des romans d'Eugène Sue et des dissertations
calomnieuses de Micheletel de Quinet, ont réclamé
tières, dont les demandes exorbitantes, quoique
relativement peu nombreuses, grossissent outre
mesure son budget de dépenses.
Le bureau des passeports est compris dans les
attributions de la haute police; c'est là qu'on tient
registre de tout ce qui n'est pas simple paysan. Au
double du registre sont transcrits des extraits de
tous les rapports des espions qui se sont trouvés
sur votre route pendant la vieavec leurs obser
vations, notes et dénonciations originales, le tout
arrangé dans un tel ordre qu'en quelques heures
S'-Pétersbourg et Moscou, le surintendant de
la police peut avoir connaissance de vos actions les
plus secrètes, ainsi que des opinions qu'on vous
suppose, nu du moins des sentiments que vous
aurez manifestés. Quantités d'individuss'imaginent
échapper l'attention du gouvernement, aux noms
desquels sont accolés, dans ses noirs légistres, des
volumes manuscrits d'informations secrètes. D'in
times connaissances, de vieux ainis, des domesti
ques, des esclaves et trop souvent des parents, en
ont grossi la masse, avec ou sans connaissance de
cause.
Il est remarquer que les rapports des espions,
lorsqu'ils diffèrent trop entr'euxsont soumis
une sorte de scrutindans lequel naturellement