désirer que de pareils exemples rencon
trent beaucoup d'imitateurs.
On écrit de Turnhout, le 18 mai.« Un
crime horrible a été commis avant-hier au
hameau de Leysend, près de cette ville.
Samedi matin le nommé H. Mathé, culti
vateur, était sorti avec son fils, âgé de deux
ans, après s'être muni d'un couteau de
table. Ce misérable s'était dirigé vers son
fumier, environ deux cents pas de sa
demeure. II revint seul peu après, mais
la demande de son domestique, le nommé
Joseph Aerts, où il avait laissé son fils,
Mathé se troubla. Aerts insista pour savoir
ce qu'il avait fait de l'enfant. Alors Mathé
se jeta genoux, en suppliant son domes
tique de ne pas le perdre. Celui-ci, soup
çonnant un crime, fit, accompagné de la
servante, des recherches actives dans les
environs et ils trouvèrent le cadavre du
malheureux enfant, la gorge coupée, dans
un fossé. A leur retour, Mathé avait pris
la fuite, mais la gendarmerie l'a arrêté le
même soir. II a été écroué dans la maison
de détention Turnhout.
L'éruption d'un volcan sur le mont
Saint-Vincent, la Martinique, dont on
avait vaguement donné la nouvelle, se
trouve pleinement confirmée par unelettre
de cette colonie. Le volcan lance conti
nuellement d'énormes colonnes de fumée,
et, de temps autre, des gerbes de flammes
qui éclairent d'une lueur sinistre toute la
campagne environnante; des bruits sourds
pareils des roulements de cavaleriesur un
pont; des commotions saccadées viennent
de plus en plus épouvanter les habitants,
déjà consternés de ce phénomène, et leur
font appréhender tout moment quelque
catastrophe.
Nos lecteurs se rappellent, sans doute,
la curieuse histoire des deux fameux ba
rons Bulow et Pélichy, que nous leur
racontions l'année dernière... Dans son
audience du 10, la cour royale de Madrid
s'est occupée de la cause du soi-disant ba
ron Pélichy. On n'a pas oublié que cet
effronté personnage était parvenu se
placer Madrid comme officier supérieur
d'état-major, fonctions dans lesquelles,par
ses intrigues et ses dénonciations, il a fait
beaucoup de mal des personnes qui ont
ont été en butte aux persécutions des au
torités. Le prétendu baron Pélichy avait
rendre compte la justice d'un grand
nombre de crimes, tels que faux, vols et
bigamie. Il résulte du procès que le véri
table nom du baron de Pélichy est celui
de Louis Yandewale, et qu'il est né en
Belgique. Affublé du titre de baron, il a
parcouru plusieurs pays, où il a escroqué
des sommes considérables l'aide de let
tres et d'autres papiers fabriqués par lui.
Entré en Espagne comme soldat de la
légion étrangère, il ne tarda pas déserter
pour retourner dans son pays, où il se fit
passer comme colonel au service de la
Reine Isabelle, décoré de la grand'eroix de
Charles III, de celle d'IsabelIe-la-Catholique
et de plusieurs ordres.
A son retour dans la Péninsule, il se
maria avec une femme de Castellon de la
Plana, et quelque temps après avec une
autre de Ronda, où il s'était présenté dans
un grand état d'opulence, menant la vie
d'un prince, et ayant pour son service
une vaisselle en vermeil et des bijoux de
beaucoup de prix, le tout volé par lui
Paris, ainsi qu'il résulte de l'instruction.
Enfin le fameux baron de Pélichy n'a été
toute sa vie autre chose qu'un aventurieur,
se faisant appeler tantôt d'un nom, tantôt
d'un autre, et vivant aux dépens des per
sonnes qu'il rendait victimes de ses escro
queries.
Le ministère public a requis contre lui
les travaux forcés perpétuité dans les
bagnes de l'Afrique. La cour royale n'a
pas encore prononcé.
Voici un trait de barbarie dont on vou
drait pouvoir douter. Il est raconté par un
Anglais, qui a servi dans l'armée de llosas,
et vient d'arriver Portsmouth sur la gar-
bare l'Apolo:
Depuis que les hostilités avaient éclaté
entre l'Angleterre, et la république buenos-
ayraienne plusieurs Anglais, au service de
Rosas, résolurent de déserter, ne voulant
V.
pas servir contre leurs pays. Déjà tout était
prêt pour leur fuite, et ils n'attendaient
plus qu'une occasion favorable, quand cinq
d'entre eux, impatienté des obstacles, se
déterminèrent mettre leur plan immé
diatement exécution, quoi en pût arriver.
Ils s'échappèrent la nuit des batteries d'O-
bligado.
II se dirigèrent aussitôt vers la rivière,
etayantaperçu un canot amarré surlarive,
s'en era parèrent sans remarquer u n homme
qui se tenait caché l'arrière. Toutefois,
après avoir ramé pendant quelque temps,
ils finirent par l'appercevoir et se formè
rent en conseil pour décider ce qu'on de
vait faire. Cet homme leur demanda avec
instance d'avoir la vie sauve et de rester
dans l'embarcation, promettant de se sou
mettre ce qu'ils ordonneraient ils se
contentèrent de lui lier les mains derrière
le dos, en lui recommandant le silence le
plus absolu.
Au lever du jour, ils reconnurent avec
effroi qu'ils se trouvaient non loin de la
ville de San-Pedro, et comme les habitants
de la ville allaient et venaient sur le rivage,
ils jugèrent prudent de ne continuer leur
route qu a la nuit: en conséquence le canot
futcaché le long desbordsdu fleuve;quant
aux fugitifs, ils se retirèrent dans les hau
tes herbes, emmenant leur prisonnier avec
eux. Mais, comme ils avaient veillé et fati
gué toute la nuit, le sommeil ne larda pas
s'emparer d'eux; le perfide Espagnol,
profitant de ce repos, parvint se débar
rasser de ses liens et courut de toute la vi
tesse de ses jambes San-Pedro, où il donna
l'alarme.
Une troupede soldats fut immédiatement
envoyée la poursuite de ces malheureux,
qui surpris sans défense, tombèrent au
pouvoirs de leurs ennemis, quatre furent
passés sur l'heure par les armes. Pour le
dernier (arrivé par Y Apolo) on épargna sa
vie, condition qu'il dénoncerait tous ceux
qui avaient projeté de déserter; il fut donc
ramené Obligado, pour comparaître de
vant Mansillo. Mais peine le malheureux,
mis en présence de son chef, avait-il dé-
VI.
lations vont tiuir mais attendez encore quelques jours, car eu
ce moment je ue puis rien faire ni même vous dire autre chose
que ces mots
Espérez; nos maux touchent leur terme.
Chaque jour Anselme s'avançait plus avant dans la conGance
et l'amitié du marquis, qui l'avait fait recevoir membre de la
Société des Phoques, l'avait intéressé dans tous les paris qu'ils
gagnaient contiuuellenieut, en sorte qu'Auselme était devenu
nn personnage important; mais son but n'était pas atteint il
avait juré la ruine de celui qui portait le noble nom de Ker-
golan, et ily travailla avec ardeur. Quand sa position pécuniaire
lui permit d'agir seul, il provoqua le marquis toute espèce de
joûte, et gagna, comme nageur, des sommes considérables, en.
sotte que celui-ci, piqué des succès qu'obtenait constamment
sou protégé, joua en désespété, risqua tout ce qu'Anselme
voulut et perdit toujours. Cette lutte devait naturellement
entraiucr la ruine de INI. de Kergolan ou lui faire rentrer toutes
ses pertes. Anselme le comprit parfaitement, aussi s'empressa-
t-il d'y mettre tin.
L'époque où la société toute entière devait se réuni, dans un
banquet pour célébrer l'anniversaire des Phoques était arrivée,
et ce fut au milien de cette nombreuse réunion qu'Anselme
proposa de lutter dans l'eau jusqu'à ce que l'un d'eux quittât
le partie en vaincu le pari fui très-considérable, et accepté par
Kergolan aux acolamalions de tous les convives.
Comme les Phoques savaient nos deux adversaires d'égale
force, ils conclurent qu'il n'y avait rien débattre. Il ne restait
dono qu faire choix de l'emplacement l'un proposait la
Tamise, l'autre le détroit de Gibraltar.
Eh! Messieurs, s'écria un Anglais dont la voix couvrit
l'instaut toutes les autres, je connais un endroit charmant,
pittoresque, que j'ai admiré plus d'uue fois daus nos excursions
en France ce lieu est admirable pour de pareils hauts-faits;
ce sont les récifs qui avoisinent le Hâvre. Nous vous jugerons
du haut de ces rocher^. Approuvé! hurla rassemblée; le mar
quis devint livide, et la figure d'Anselme s'épanouit de conten
tement. Partons demain matindirent une vingtaine de ces
messieurs.
Les Phoques débarquèrent au Hâvre, et se dirigèrent immé
diatement vers le lieu indiqué et c'est du haut du grand récif
déjà connu de nos lecteurs qu'ils furent spectateurs du drame
que nous allons essayer de retracer.
Chacun de nos champions ne portait qu'un caleçon. Dans
cette lutte, chacun de ces hommes déploya toute l'adresse et la
force dont il était pourvu. C'était comme un combat mort*
Le marquis était agité, troublé, avant même qu'il ne mît les
pieds sur le rochers, Dans l'eauil perdit peu peu son assu
rance et sa vigueur accoutumées, tandis qu'Anselme se faisait
une joie de celte joûte, de ces attaques multipliées.
Assez, dit le marquis, je n'eu peux plus... allons nous
reposer; nous recommencerons lorsque la brume sera passée.
Continuons, répondit le jeune homme m'as-tu laissé
prendre du reposmaître Pigasquandil y a quatre ans. tu
essayas de m'assassiner lâchement dans ces parages? C'est ma
revanche que je prends maintenant.
Pitié pitié 1 lui cria d'une voix étranglée le pêcheur dont
l'épouvante et l'effroi décomposaient la face.
De la pitié! est-ce que lu oonnais ce mot? As-tu eu pitié
de moi?
Le calfat jeta un cri et disparut sous la vague-
Quelques rayons de soleil percèrent la brume le rocher se
découvrit un peu, et les spectateurs, qui avaient perdu un
instant cette scène, en descendaient lorsqu'ils virent Anselme
reveuir seul, et plus loin, une forme humaine paraissant et
disparaissant alternativement sous les flots...
Les marins qui avaient amené les parieurs et leur suite reçu
rent dans leurs barques un cadavreque l'autorité locale fit
déposer la morgue, car personne ne le réclama.
De retour Londres, Anselme, ou plutôt Louis de Kergolan,
car on a dèviné que c'était lui, reprit possession du dernier
million qui restait de la fortune lui volée par Pigas. Ajoutons
que la cassette renfermait encore les titres de noblesse de la
famille.
Maintenant réuni pour toujours son excellente épouse,
ea belle-mèreLouis leur donna l'explication de sa conduite.
On se rappelle que lors du naufrage de Louis de KergolaD,
pris du Hâvre, le vieux calfat s'était enfui en Angleterre avec
la cassette de l'émigré, croyant que les eaux avaient englouti
sa victime. Mais la mer jeta sur la grève le corps déjà glacé.
Des pécheurs le recueilli!ent et le rappelèrent la vie. Louis
de Kergolan se rembarqua pour Londres où il épousa la 611e
d'uue veuve éraigrée comme lui, comme lui plongée dans l'in
fortune. On modeste emploi qu'il obtint, suffisait peine pour
le faire vivre avec sa famille. 11 avait laissé ignorer sa femme
la cause de l'aisance qui succéda son état de gêne. Ayant
retrouvé Londres celui qui avait cherché l'assassiner et qui
lui avait volé sa cassette contenant toute sa fortune, il usa de
malice pour ressaisir son bien qu'il ne pouvait se faire restituer
légalement. De Kergolan crut qu'il allait jouir du bonheur;
mais le souvenir de la mort du calfat ne sortit jamais de sou
esprit et sa vie fut une longue expiation. L. V.