journaux modérés des Flandres et surtout
le Nouvelliste de Bruges, élevaient sans cesse
pour attirer l'attention du public sur des
souffrances dont personne ne conteste au
jourd'hui la triste réalité. Les membres de
l'opposition votaient alors contre les sub
sides réclamés grands cris par les députés
catholiques des Flandres, et par tous les
hommes instruits de l'état des choses. Il
n'y a pas trois mois que M. Rogier est venu
constater enfin, que nos populations souf
fraient, tandis qu'il y a dix ans que le mal
les ronge...!
Appartient-il dès lors des personnes
qui n'ont aucune idée de l'économie poli
tique, de venir déclamer contre le système
économique du parti clérical, et de lancer
avec la dernière injustice, des accusations
odieuses contre des hommes, qui presque
seuls ont posé une digue au torrent du
paupérisme? Il y a ici plus que de l'igno
rance, il y a une iniquité véritable; il y a
violation de toutes les lois de l'honnêteté.
M. Goeminne, vicaire Thielt est nom
mé curé Westnieuwkerke.
M. Claerbout, vicaire Hooglede passe
en la même qualité Ste-VYalburge
Bruges, il a pour successeur Hooglede
M. Walle ci-devant co-adjuteur West
nieuwkerke.
La récolte de tabac Wervicq n'est que
médiocre sous le rapport de la quantité,
mais la qualité sera excellente.
INSTRUCTION PRIMAIRE.
On lit dans le Journal cCAnvers
Les Flandres périssent de misère par
la décadence de l'industrie linière. Ces
belles provinces présentent un tableau
dont l'horreur ne peut être exprimé, les
secours du gouvernement sont suffisants
en face de tant de misères. C'est le travail
qu'il faut et non des aumônes.
Il faut remarquer que les feuilles libé
rales des plus influentes sont celles qui
continuent débiter les plus d'absurdités
sur la matière et qui persistent faire de
l'indig ence des classes ouvrières une ques
tion de parti. C'est ce dont nous avons pu
nous convaincre aujourd'hui par la lecture
d'un article que l'Observateur a consacré
aux Flandres. Cet article peut se résumer
ainsi
La misère a atteint les Flandres, parce
que la plupart de ses députés appartiennent
la majorité; si ces provinces étaient re
présentées par des mandataires libéraux,
MM. Rogier et Verhaegen seraient Minis
tres; chaque Flamand aurait le dimanche
un poulet gras dans son pot; les alouettes
lui tomberaient toutes rôties dans la bou
che, et il nagerait dans l'opulence.
Nous en sommes fâchés, pour l'Obser
vateur, mais ces vieilleries ne trouvent
dus de débit nulle part, pas même dans la
loulique libérale; elles ont usées jusqu'à
a corde, et il y a peine cinq jours que
Impartial de Bruges, dont l'Observateur ne
peut suspecter le libéralisme, se moquait
ouvertement de ceux qui demandent le
salut de nos Flandres une représentation
libérale. Le journal bruxellois n'a aucune
foi dans ses radotages, car après avoir in
diqué comme une des causes principales
du paupérisme l'élection de députés con
servateurs, il dit que leur nombre est
diminué, mais que néanmoins les pauvres
ouvriers des Flandres n'ont pas de quoi
se nourrir, de quoi se reposer la nuit,
après de longues journées de travail.
Mettez-vous donc d'accord, brave Obser-
Les résultais de la loi du 23 Septembre i842,
en dépit des préventions qu'elle a rencontrées, sont
dignes de remarque: ils prouvent ce que peut
l'union des pouvoirs ecclésiastique et civil tra
vaillant de concert pour le progrès du bien. Cette
réflexion est le corollaire du discours prononcé
avant hier a la distribution des prix des Écoles
communales gratuites par M. Alphonse Vanden-
peereboom discours dans lequel l'honorable
échevin,tout en donnant^ l'appui de ses assertions
des preuves irréfragables de statistique, a payé un
juste tribut d'éloges h tous ceux qui concourent a
l'instruction et h la moralisation des classes labo
rieuses. Ce compte-rendu flatteur de la situation de
l'instruction primaire dans la ville d'Ypres, est un
témoignage d'autant plus précieux en faveur de la
loi de 1842, qu'il forme un contraste plus tranché
avec l'état précaire où la révolution de i83o avait
laissé cette branche importante de l'éducation
publique.
Toutefois ce n'est que par figure de rhétorique
que M. l'écbevin a pu dire que naguères l'enfant
du pauvre était traité ici «comme un paria vouéau
vagabondage. Ce qu'il y a d'exact dans cette pro-
Oh! s'écria le jeune mendiant en se levant vivement,
c'est bien osé ce que vous dites là Ou ne sait pas comment
tout cela tiuira et vous avez tort de vouloir me nuire.
Mon enfant,dit M. de Lamoignon, vous êtes bien réservé
pour votre âge; cela n'est pas naturel, et semble annoncer que
vous obéissez une fâcheuse influence, de mauvais conseils!
L'enfant se frotta les yeux comme pour essuyer ses larmes,
puis il dit d'une voix douce en regardant Pierre tristemeut:
- Si vous vouliez me reconnaître, moi je ne vous renierais pas.
Et partir de ce moment, M. de Lamoignon, quelques
instances qu'il fit, lie put obtenir un mot de ce singulier
enf.mt.
Nous ne suivrons pas dans toutes ses phases cette immense
procédure qu'il nous suffise de dire qu'après une instruction-
qui n'avait pas duré moins de quatre ans, la cause, en vertu
d'un arrêt du conseil, fut enfin portée l'audience du Parle*
meut,sous la présidence de M. de Lamoignon, qui, dans l'in
tervalle, avait été élevé la dignité de premier président. Cette
affaire qui avait excité l'intérêt public au plus haut degré,
était encore importante cause du choix des avocats. C'étaient
pour Jeanne Vacherot, veuve Lemoine, M® Pousset, sieur de
Mautauban, qui non-seulement tenait le premier rang au bar
reau, mais était eucore l'uudes plus beaux esprits de ce temps,
et qui avait donné au théâtre plusieurs pièces accueillies avec
la plus grande faveur, entre autres Zènobietragédie d'un
mérite incontestable; pour Monrousseau, accusé du vol de
l'enfant, M. de Fourcroy,non moins célèbre que le précédent;
fiosition, c'est que depuis longtemps aucune amé-
ioratiou n'avait été introduite dans l'instruction
primaire. On semblait n'y avoir pas songé, et rien
ne serait encore probablement changé sans la loi
de i842, qui a seule donné l'impulsion mais il ne
faut pas avancer pour cela que l'éducation de
l'enfant pauvre n'était l'objet d'aucun soiu. Ne
serions-oous pas ingrats en parlant de la sorte
envers nos ancêtres, qui nous ont légué plusieurs
belles institutions? Ne pourraient-ils pas, en énu-
mérant leurs œuvres, nous demander les nôtres?
Nos aïeux ont fondé l'écoledesorphelins; ilsont
fourni un local spacieux et des revenus pour l'en
tretien de soixante élèves, quels biens y avons uous
ajourés pour en recevoir un plus grand nombre
Il ne faut point dédaigner cette immense école
qu'érigea en 1752 sous l'invocation de Imma
culée Conception de Marie la Dlle Claire Fran
çoise Van Zuutpeene La Motte, avec l'assistauce
du vénérable M. Fan Roo, archiprêtre du diocèse
d'Ypres. Déjà en 1797, malgré les difficultés de
l'époque, l'institution La Motte réunissait trois
cents élèves; et maintenant il est incalculable quels
ne seraient pas les progrès de la corruption, si cet
asile protecteur ii'était pas ouvert pour régler l'in-
structiou, le travail et les mœurs des jeunes den
tellières. Cependant nous ne croyons pas que
cette entreprise si grande, conçue et perpétuée par
le zèle étonnant de la piété, jouisse de quelque
encouragement public.
Que dire des prix d'instruction chrétienne fon
dés par M. l'abbé Duhayon, auxquels participent
tous les enfants pauvres de la paroisse de S'-Nicolas?
L'académie de dessin a de même toujours reçu en
très grande majorité l'artisan et le pauvre.
Nod, nos dévanciers étaient trop attachés la foi
et ses sublimes enseignements de charité, pour
oublier l'enfant du prolétaire,et pour l'abandonner
comme un paria au vagabondage.
Vers 1775, M. le chanoine Vandermeerscb fut
touché de la situation critique de l'enseignement
primaire chez les classes inférieures. Il fonda l'école
dominicale de la Looye, et y affecta des biftus im
portants, provenus de ses sacrifices personnels et
de son crédit auprès des personnes libérales. Une
commission de quatre membres fut chargée de
l'administration des revenus, de la nomination
des maitres et de toute la direction de l'établisse
ment. La commission devait perpétuité être
composée, si nous ne nous trompons, du réverend
curé de S* Martin, d'un autre prêtre attaché la
cathédrale, d'un membre de l'administration com
munale et d'un membre d'une institution de charité.
La débâcle qui suivit l'invasion et la conquête des
Français, fit passer par mesure de transition l'admi
nistration des biens aux mains des Hospices, où
grâce une sorte de confusion avec les fondations
de bienfaisance proprement dite, ils échappèrent
la bâche révolutionnaire qui promenait ses pros
criptions et ses confiscations sur tout ce qui portait
un caractère religieux plus ou moins prononcé. Le
roi Guillaume que des idées de prosélytisme protes
tant rendirent souvent injuste, mais qui n'avait
pour le lieutenant-général de Vernon, pris partie par la
veuve Lemoiue, M' Billain,et pour l'enfant, Me Robert. Cette
lutte des avocats les plus renommés eût suffi pour attirer un
nombreux auditoire aussi une foule immense se pressait-elle
au Palais, dès le matin du jeudi de la semaine de la Passion
de l'au l(i5o, jour où les débats devaieut s'engager.
Le Plaidoyer de M* Pousset fut tout fait la hauteur de
la grande réputation de cet avocat. 11 s'élève d'abord contre
la légèreté et l'entêtement qu'ont apportés dans cette affaire
le lieutenant-général et le procureur du roi de Vernon, il les
montre comme refusant une faible femme contre les violences
d'uue populace furieuse
Comment pourrait-on les excuser, s'écrie-t-il, quand ils
ont osé parler plus haut que des arrêts de la Cour, quand ils
ont subordonné l'autorité du Parlemeut la leur; quand ils
ont pour parler le langage de l'Ecriture, mis le seuil de leur
Tribunal au-dessus de la Cour?
Entrant ensuite dans les faits de la cause, il démontre l'im
posture de l'enfant Louis Monrousseau, puis il termine ainsi:
a Messieurs, punissez ces juges qui ont mis leurs passions
la place de leurs devoirs rendez un fils son père, et laissez
une mère pleurer sou eufaut mort, car rien n'en peut tenir
la place que sa douleur, qui le lui représente.
Eu ce moment, le jeuue mendiant, vivement ému par ces
chaleureuses paroles, se lève vivement. Cette fois, il ne feint
pas de pleurer; ce sont de véritables larmes, des larmes brû
lantes qui roulent sur son visage. Il s'élance vers Monrousseau,
pourtant aucune sympathie pour l'inique van
dalisme français, ordonna par divers arrêtés la
restitution de leurs biens aux anciennes institutions
d'enseignement, et le rétablissement de leurs
commissions spéciales, enfin leur organisation
exactement conforme aux volomés exprimées par
les fondateurs. Les archives de nos Flandres
attestent combien il a été fait depuis des temps
forts reculés dans nos libres communes en faveur
de la jeunesse pauvre; mais les guerres, les
troubles, la domination étrangère, les divisions
intestines et d'autres malheurs des temps, ont
entravé ou détruit beaucoup de ces entreprises
utilitaires.
que quatre ans de captivité ont amaigri et rendu presque
méconnaisable
Rère! père! s'écrie-t-il, nonvous ne m'avez pas volé,
vous êtes véritablement mou père, et je suis votre enfant!
mais vous étiez pauvre, et j'ai voulu vous rendre riche; que
le bon Dieu me le pardonne!
Le vieillard lui tendit les braset cette soène si imprévue
fit couler des larmes dans toutes les parties de l'auditoire. Dès
lors la cause était jugée et aprèsqueiques instants, la cour,con
formément aux couoiusions de l'avocat-général Bignou, rendit
un arrêt qui mis hors de cause le lieutenant-général et le pro
cureur du roi de Vernou ordonnant que Jean Monrousseau
fût mis hors de prisonsou écrou rayé et biffé qu'il fut en
joint Louis Mourousseau de le reconnaître pour sou père et
de lui obéir, etc. Mais le procès avait duré quatre ans, pen
dant ce temps, ia malheureuse veuve Lemoine, dont les facul
tés intellectuelles étaient déjà fort affaiblies, n'avait pu pren
dre soin de sa fortune. 11 lui avait fallu vendre plusieurs de ses
propriétés pour pouvoir continuer les poursuites. Ses fermiers
avaient profité de ce trouble pour lui susciter des ohicanes de
toute espèce, et les procureurs avaient achevé cette oeuvre de
ruine. La famille de l'honnête notaire, en gagnant son procès,
fut réduite l'indigence.
Tel fut le déplorable résultat de l'erreur ou du mauvais
vouloir des premiers juges.
8. PAUL HUBERT.