JOURNAL D YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. l\o 3070. Mercredi, 3 Mars 1847. 30me année. 7??.2S, 3 MARS. LES CONSEILS DE PRUD'HOMMES. Un arrêté royal, en date du 21 février, porte A dater de l'année 1847, il est insti tué, en la ville d'Ypres, un concours entre les propriétaires de bestiaux. Ce concours a lieu le lundi qui précède le premier dimanche du mois d'août de chaque année. M. l'abbé Clemeut, principal du collège de Courlrai, vient d'envoyer M. VerbekeV curé de Meuleheke, la somme de 250 fr., On s'abonne a l*pre«9 rue de I.îlleu* 10près la Gr-ud'place, et chet les Percepteurs des Postes du Royaume PRIX DE MMDIEIEXT, par trlmeslre, Pour Ypresfr. 4O® Pour les autres localités 4 50 Prix d'un numéro. 2® Tout ce qui concerne la rédac tion doit être adressé l'Éditeur lpre* Le Propagateur paraît le SAMEDI et le MERCREDI de chaque semaine. P1K1X DES INSERTIONS 11 centimes par ligue. Les ré clames, *5 centimes la ligne. VÉRITÉ ET JUSTICE. Nous l'avons vu, c'est en 1806 et pour la ville de Lyon que fut organise'e la juridiction qui nous occupe. La ville de Lyon possède de riches manufactures en tout genre, et surtout d'étoffes de soie et d'or; cuirs, teintures de soie, fabriques de chapeaux, bon neterie, rubans, bas de soie, gazes, passetnenierie, galons, draps de soie, mercerie, fleurs artificielles, agréments, enjolivures, crêpes, dentelles d'or et d'argent, toiles imprimées, papiers peints, orfè vrerie, bijouterie, ganterie, imprimerie, librairie, fonderie de caractères, forges et grands ateliers de fonderie de fer. Elles occupent au moins la moitié d'une popu lation qui s'élève cent cinquante mille âmes. La fabrique y existe dans sa signification la plus éteudtic, elle y est arrivée au plus grand dévelop pement; elle a ses divisions et ses subdivisions. Vous y voyez les apprentis, les simples ouvriers, les ouvriers patentés, les contre-maîtres, les ehefs- d'alelier, constituant, pour ainsi dire, une petite république, gouvernée par le marchand-fabricant, a la tête de ses commis et employés de bureau. 11 est deux conditions essentielles de l'existence et de la conservation de la fabrique une parfaite subordination et l'intégrité de tous les intérêts. D'un contact journalier, devaient naître souvent, soit des manquements par les inférieurs envers les supérieurs, soit des froissements de droits récipro ques. On a donc naturellement songé réprimer les uns, garautir les autres. Evidemment on pou vait conférer ces deux espèces d'attributions aux justices de paix, mais dans les grandes villes, au milieu de populations nombreuses, le cercle où se meuvent ces juridictions est de'j'a suffisamment rem pli, et dès lors il devenait indispensable de recourir la création de juges particuliers qui auraient d'ailleurs l'avantage d'être plus portée de leurs justiciables et plus aptes aplanir ou trancher leurs différents. Or ce qui se justifie par la nécessité dans les villes commerciales de premier ordre devient par cela seul une superfélation dans les villes d'un ordre inférieur ici les justices de paix, peuvent suffire a U besogne, et partant il faut les préférer, parce que leur juridiction est régulière et normale. Il importe, notre sens, de repousser les juridic tions exceptionnelles, lors même qu'elles seraient utiles, lorsque cette utilité peut se retrouver dans la juridiction ordinaire, car tel est le vœu de noire pacte fondamental. Si la concurrence est plus forte dans les grandes villes que dans les petites, il y a dans ces dernières une rivalité, une jalousie beaucoup plus intenses qu'elles ne sauraient jamais être dans les premières; ici les personnalités ressortent vivement, la au con traire elles disparaissent dans la foule. Et ce sont précisément ces rivalités et ces jalousies qui en gendrent le vice fondamental de l'institution des Prud'hommes dans les petites villes. Esl-il possible que des marchands-fabricants, dominés par l'esprit du lucre, tourmentés par la soif de l'or, aspirant sans cesse devenir plus riches les uns que les autres, se disputant les ache teurs, s'arrachant les ouvriers, pressurant tout ce qui les entoure pour amener le plus de bénéfices, est-il possible, disons-nous, que ces hommes soient justes, qu'ils soient équitables, les uns envers les autres, qu'ils soient équitables et justes enveis les ouvriers? N'hésitons pas'a répondre négativement. Eh bien, cela est inévitable dans les petites villes, où les affaires ne sont pas assez complexes pour que toute l'activité s'y concentre, où les mar chands-fabricants ne sont pas assez nombreux pour ne pas se porter mutuellement des regards envieu- seinent attentifs; cela est inévitable dans notre ville. Maintenant, c'est la fabrique, arrivée l'état d'une organisation complète, qui a servi de type au législateur; la loi ne s'applique donc logique- quement qu'aux villes où se reproduisent des ma nufactures analogues. Et quoique le décret du 18 mars 1806, portant institution d'un conseil de Prud'hommes Lyon, statue qu'il pourra être établi par un règlement d'administration publique, délibéré en conseil d'Etat, un conseil de Prud'hom mes daus les villes de fabrique où le gouvernement le jugera convenable, et que sa composition pourra être différente selon les lieux, nous n'en sommes pas moin$ d'avis, et cela ne saurait être contesté, qu'il n'appartient pas au gouvernement de donner un coDseil de Prud'hommes une composition qui ne répondrait pas l'esprit des dispositions géné rales sur la matière, notamment des décrets orga niques des 11 juin 1809, 3 août et 5 septembre 1810, auxquels se réfère la loi du 9 avril i84a. La composition en effet des conseils de Prud' hommes est un point délicat et grave, c'est de cette composition que dépeud toute la valeur de l'In stitution. La loi du 18 mars 1806 disait dans son article premier Il sera établi Lyon un conseil de Prud'hommes, composé de Deuf membres, dont cinq négociants-fabricants, et quatre chefs-d'ate lier. Et le règlement du 3 juillet 1806, sur le mode de nomination, portait, que les cinq premiers seraient élus par une assemblée générale des négo ciants-fabricants, et les quatre derniers par une assemblée générale des chefs-d'atelier. Dans ce système, les négociants-fabricants et les chefs-d'atelier étaient jugés par leurs pairs.ee qui, soit dit en passant, n'est certes pas un avan tage quand ces pairs ont des intérêts rivaux, mais les ouvriers non seulement n'avaient pas cette triste consolation, ils étaient en outre jugés par des su périeurs, l'élection desquels ils n'avaient pas même le droit de concourir. C'était une injustice que vint réparer en partie le décret du 11 juin 1809, par son article premier Les conseils de Prud'hommes ne seront composés que de marchands-fabricants, de chefs-d'alelier, de contre-maîtres, de teinturiers ou d'ouvriers patentés. Le nombre de ceux qui en feront partie pourra être plus ou moins considérable; mais, en aucun cas, les chefs-d'atelier, les contre-maîtres, les teinturiers ou les ouvriers ne seront égaux en nombre aux marchands-fabricants; ceux-ci auront toujours dans le conseil, un membre de plus que les chefs-d'atelier, les contre-maîtres, les lientu- riers ou les ouvriers. Sauf celte dernière restric tion, il y a la un progrès en ce que les contre maîtres, les teinturiers et les ouvriers patentés sont admis au nombre des électeurs et des éligibles, et prennent part ia distribution de la justice. Quelque imparfait que tout cela demeure, il est clair que, par impossibilité d'application, cela de vient encore plus imparfait, cela devient vicieux et dangereux dans les petites villes, dans celles notamment où, comme ici, la fabrique, la manu facture n'existent point, où il n'y a pas de mar chands-fabricants, mais simplement des négociants, où il n'y a point de chefs-d'atelier, ni de contre maîtres, mais simplement des ouvriers, parmi les quels, sauf erreur, il ne s'en trouve pas de patentés, où enfin n'existent point ces rapports journaliers et nécessaires, ces liens hiérarchiques signalés plus haut dans les fabriques de Lyon et autres grandes cités manufacturières. De tout quoi découle nettement la conclusion que l'esprit et la lettre des lois relatives aux con seils de Prud'hommes répugnent leur mise en action dans les iiles secondaires. D'autres argu ments se dresseront contre cette justice impériale dès que nous nous placerons au point de vue de l'industrie dentellière. 1*

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Le Propagateur (1818-1871) | 1847 | | pagina 1