JOURNAL D YPRES ET DE L ARRONDISSEMENT.
3087.
30me année.
TPF.3S, 1" MAI.
Chaque fois que le Progrès n'a pas de
réponse du tout, pas même une mauvaise,
nous donner, il se rengorge et laisse
tomber de ses lèvres, avec un air dédai
gneux qui nous fait rire de pitié, ces mots
vous me mesurez voire aune. L'expédient
est usé mais il est commode lorsqu'on écrit
pour quelques badauds. Eh! sans doute
nous vous mesurons notre aune, et mal
heureusement nous trouvons jusqu'ici que
vous êtes beaucoup plus court qu'elle, car
vous ne voulez pas vous étendre, vous éle
ver jusqu'à la vérité et la justice.
La lutte entre deux candidats, est une
lutte en même temps entre les journaux
qui les soutiennent respectivement; ces
journaux sont solidaires avec le candidat
qu'ils adoptent des moyens employés pour
arriver au succès la manière d'agir du Pro-
grès dans les élections est donc évidemment
en cause, et c'est ce qui le gêne, car il a
eu la précaution excessive, et dès lors nui
sible, de vouloir d'avance écarter toute
discussion cet égard on voit qu'en ma
tière d'élection le Progrès n'a pas la con
science bien nette.
Rectifions les allégations du Progrès et
disons notre tour comment se font les
élections communales Ypres. Il ne s'agit
pas de cela maintenant, mais il faut bien
détruire les fanfaronnades d'un contradic-
teur sa ns si ncér i lé. 11 est fau x que le Progrès
attendeavant cf appuyer les candidats, qu'une
réunion préparatoire d'électeurs les ait dési
gnés. Le choix ne se fait pas même dans un
conciliabule plus ou moins secret. C'est le
m.
rédacteur en chef-du Progrès qui dresse
lui-même, en famille, la liste des candidats,
pris, on leconçoit, parmi les personnes qu'il
juge assez dociles pour voter au conseil
selon le mouvement de ses sourcils. Cette
liste est soumise quelques électeurs pri
vilégiés que le rédacteur en chef du Progrès
convoque chez lui par lettre close; et ceux-
ci sont trop flattés de l'honneur, ont assez
de bon ton pour ne pas contredire leur
hôte au milieu de ses Pénales. De là cette
liste est présentée gravement l'assemblée
préparatoire des électeurs libéraux, comme
étant le vœu le plus ardent du libéralisme
le plus pur, et les claqueurs font passer la
pièce. C'est ainsi que le corps électoral
communal se résume dans le rédacteur en
chef du Progrès, que l'on peut désigner
comme le grand électeur de la ville d'Ypres.
Quant aux élections générales, etc'est de
cela qu'il s'agit vivement aujourd'hui, le Pro
grès se garderait bien de prendre des façons
aussi lestes, aussi cavalières. Il ne proposé
pas de candidats aux sièges vacants, jus
qu'ici il n'a eu qu'une fois l'occasion de sou
tenir des candidatures libérales, et battu
platle couture il n'a plus osé depuis.
Pour pallier sa couardise, le Progrès
invoque la candidature de M. Dindal
Bruxelles, auquel le Gouvernement n'a
opposé aucun candidat; la comparaison
pêche par sa base, car le Gouvernement
n'est pas un journal, et puis le gouverne
ment peut-il descendre dans la lice élec
torale? Que dirait alors le Progrès! Le
confrère se borne donc prêter un coup
d'épaule ceux qui sont en place afin qu'ils
n'en dégringolent point, et tout son plai
doyer se traduit par cet adage connu heu
reux celui qui possède, beali possidcnles.
Comme si le mandat électoral était irré
vocable,comme si lessiégesparlementaires
s'inféodaient aux personnes, comme s'il
s'agissait d'une ferme ou d'une seigneurie:
la mobilité est l'âme du gouvernement con
stitutionnel.
Oui sans doute, pour le Progrès, les mots
n'ont plus leur acception ordinaire, les
vertus deviennent vices, la calomnie se trans
forme en vérité, au gré du rôle que l'on s'avise
de jouer. Que si nous nous permettons la
plus légère critique d'un candidat libéral,
le Progrès nous crie que nous traînons dans
la boue tous les honnêtes gens de la ville;
que si cependant nous mettons en avant
un homme sensé, capable, le Progrès, qui
ne fait qu'articuler des griefs, l'arrange com
me il a arrangé MM. Biebuyck et Deneckere.
Dans son vertige le Progrès va jusqu'à
oublier les intérêts de son parti. 11 jette sa
protection sur M. Malou-Yergauwen, qui
n'est rien moins que libéral dans le sens
du Progrès.
L'esprit de parti aveugle donc le con
frère et le met hors d'état d'éclairer les
électeurs.
Au défi qu'il nous lance de trouver
mordre sur la conduite privée ou publique
deM.Malou, nous nous bornons déclarer
que la vie privée doit rester l'abri des
atteintes de la presse, que nous ne suivrons
pas l'exemple de Verhaegen et de sa se-
quelle; que la vie publique de M. Malou-
Vergauwen est trop décolorée, trop pâle,
On s'abonne Ypres, rue de
Lille, n°«o, près la Grand'place, et
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Tout ce qui concerne la rédac
tion doit être adressé l'Éditeur
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VÉRITÉ ET JUSTICE.
LE SIRE DE LANDERBERG.
(Multe et On.)
La fille de Mainfrid se met genoux près du
baron et cherche a arrêler le sang qui coule de ses
blessures. Pendant ce temps, l'écuyer court au
château chercher des secours. Quand il revient,
grâce aux soins de Clotilde, le baron a repris
connaissance, et le chapelain déclare qu'il peut
être sans danger transporté au château du comte
Mainfrid.
Le baron de Landerberg, en revenant tout fait
lui, commença par demander du vin. Clotilde
s'approcha et lui offrit un cordial préparé par elle,
d'après les prescriptions du chapelain le baron fit
une horrible grimace, mais il but jusqu'à la der
nière goutte ce qu'on lui donnait, pour faire plaisir
la jeune fille qui tenait son regard suppliant fixé
sur lui.
Chaque jour l'état du baron s'améliorait, mais
il était toujours forcé de rester dans une parfaite
Annuit et totum nutu tremefecit Olympum.
immobilité, et cette contrainte le faisait entrer
dans des accès de colère terribles.
Clotilde arrivait alors, s'assayait près de lui et
cherchait par de douces paroles le calmer. Le
baron résistait longtemps ses efforts, mais il
cédait enfin, et Clotilde profitait de ce moment
pour lui parler de Dieu, de la religion. Elle lui
montrait combien sa conduite passée était indigne
d'un gentilhomme et d'un chrétien.
Bientôt il se fit un étrange changement dans les
manières du baron. Au lieu d'être brutal et emporté
comme d'habitudeil devint doux et compatissant.
Parfois on le surprenait plongé dans une rêverie
profonde de grosses larmes coulaient de ses yeux,
il se frappait le front en disant
Mon Dieu, pardonnez au pécheur qui vous
a si souvent offensé. Mon Dieu, ayez pitié de moi.
Dès qu'il fut en état de sortir de sa chambre, le
baron envoya chercher tous ceux qui avaient se
plaindre de lui, et, craignant d'en oublier, tant
le nombre était grandil fit publier son de
trompe que tous les braves gens qui avaient le
moindre reproche a adresser au baron de Lan-
derberg étaient invités venir le trouver son
château.
Comme le bruit de la conversion du terrible sire
s'était répandu dans le pays, les plus timides ne
craignirent pas de se rendre son appel.
Au jour indiqué, la cour d'honneur du château
de Landerberg se trouva remplie.
Une sorte d'inquiétude se peignait sur tontes les
physionomies, et, comme le baron tardait venir,
les plus poltrons se prirent de belle frayeur et
cherchèrent traverser la foule pour sortir du
château. L'agitation causée par les efforts qu'ils
faisaient produisit d'abord une légère rumeur qui,
grandissant de pins en plus, finit par inquiéter les
plus braves. Un cri de sauve qui peut se fit en
tendre et mit le comble la confusion et au
désordre.
A ce moment, le baron de Landerberg parut sur
le perron du grand escalier. Sa figure pâle et
maigre avait une expression d'humilité qui con
trastait singulièrement avec ses habitudes passées.
Ce comte de Mainfrid et Clotilde étaieut ses
côtés.