JOURNAL D YPRES ET DE L ARRONDISSEMENT.
K® 3127.
31 me année.
La politique nouvelle a pompeusement
promis
1. [.'indépendance du pouvoir civil;
2. Une administration bienveillante et
impartiale;
Et 3. Des remèdes prompts et énergiques
contre le paupérisme qui dévore les deux
Flandres.
Le Ministère Rogier est au pouvoir de
puis cinq semaines et que voyons nous?
Dès son début, la marche du Gouverne
ment est entravée par les volontés auda
cieuses et violentes des clubs aucune me
sure spontanée et décisive n'émane de ces
ministres si résolus et si préparés en ap
parence; on attend pour agir la mani
festation des vœux, plutôt des ordres,
qu'afliche leradicalisme; or,les vainqueurs
réclament avant tout d'être substitués aux
vaincus, et l'on se met congédier bruta
lement des fonctionnaires capables, expé
rimentés et pleins de dévouement leurs
supérieurs.
Ne pouvant conserver une ombre d'in
dépendance, quoiqu'il s'en fût flatté avec
une vaine ostentation, le ministère se
voit dès le principe lancé hors la voie de
convenance et de modération qu'il s'était
lui-même tracée. Sa politique est ingrate au
lieu d'être bienveillante, elle est inique au
lieu d'être impartiale, elle est réactionnaire
etinesquineau lieu d etregénéreuseetlarge.
Sous le ministère Detheux, au moment
où la crise alimentaire était on ne peut
plus effrayante, les libéraux outrés préten
daient connaître des moyens infaillibles
de combattre le fléau, mais ils se réser-
M. WARLOP DE WATQU AU SENEGAL.
vaient cruellement de les publier lorsque
leurs amis seraient arrivés au pouvoir. Et
maintenant leur impuissance est éviden
te comme leur inhumanité. Si quelques
vues utiles ont été exposées, si quelques
bons conseils ont été étuis devant la poli
tique du 12 Août, c'est aux journaux de
l'opposition qu'elle en est redevable. Par
lui-même le ministère Rogier n'a posé au
cun autre acte que l'arrêté d'ouverture de
cette exposition agricole qui excite les ri
res et la pitié de tous les hommes sérieux.
La position était bien plus favorable pour
tant qu'elle ne le fut antérieurement la
récolte en grains est très-abondante, et
sans les ravages de la maladie qui continue
atteindre les pommes de terre les mal
heureux flamands auraient peut-être pu
se dispenser de l'intervention de leur mi
nistère français-wallon. Ainsi rien n'est
fait, et l'on élève des prétentions aux sym
pathies des Flandres; on veut les rallier,
au moyen de fonctionnaires imposés par
les clubs, cette politique fanfaronne qui
passe tout sou temps satisfaire la rapacité
de ses adeptes et qui ne trouve pas une
heure pour procurer du travail et du pain
aux malheureux et aux indigents.
Donc le programme de M. Rogier se
distingue: 1° par la duplicité, 2° par la du
plicité et 3° par la duplicité.
Le ministère n'exécute pas les promesses
de son programme. 11 ne veut pas les exé
cuter, et le vroudrait-ilil ne le pourrait
pas, car les clubs lui retireraient leur con
cours et il tomberait du haut de sa gran
deur. Mais le ministère entreprend des
choses qu'il n'avait pas promises il se met
en tète de relever l'esprit national en prê-
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tant plus d'éclat aux fêtes commémoratives
de notre émancipation religieuse et poli
tique. C'était inutile eu vérité, tes souve
nirs de celte époque sont conservés vivaces
et purs dans le cœur de tout belge qui
mérite ce nom, et le ministère clubiste
est bien malheureux dans ses tentatives
acquérir de la popularité. 11 invoque la
révolution, et il destitue les champions
de l'indépendance pour jeter leurs places
la tête des fauteurs du servilisme, il
remplace les hommes de 1830 par ceux
de 1829, il cherche comprimer les élans
de tout un peuple par les traditions du
gouvernement des Pays-Ras. Qui donc
serait dupe de cette odieuse et maladroite
comédie.
La nomination de notre nouveau com
missaire d'arrondissement n'a donné lieu
jusqu'ici aucun commentaire de la part
du Progrès. Ce journal qui chante victoire,
même lorsqu'il est battu, se renferme
maintenant dans une réserve qui serait
inexplicable, si certains bruits publics ne
fournissaient la clef de l'énigme. Il paraît
que les libéraux apprécient la nomination
de M. Carton peu près comme nous. Tout
le monde s'étonne de voir arriver un
poste important dans l'administration, un
jeune homme sans antécédanls et sans
titres. Le parti libéral compte, même en
ville, des fonctionnaires habiles, qui ont
occupé pendant plusieurs années des pos
tes inférieurs; pourquoi préférer ces
hommes d'expérience, un jeune avocat qui
n'a d'autre mérite que celui d'être né an
milieu de nous, et d'avoir servi le club de
Bruxelles?
On s'abonne Ypres, rue de
I-ille, n« 10, près la Graud'place, et
chez les Percepteurs des Postes du
Royaume.
PRI\ DE
par trimestre,
Pour Ypresfr. 4
Pour les autres localités 4 50
Prix d'un numéro. O 2
Tout ce qui concerne la k-édbe-
tion doit être adressé l'Éditeur
Ypres. Le Propagateur paraît
le «AME»! et le IIEItCREDl
de chaque semaine.
PKII DEM n»ERTlD\§.
f 7 centimes par ligne. Les ré
clames, 2 5 centimes la ligne»
vérité et justice.
T??.2S, 18 Septembre.
[Suite et fin.)
Un seul ne fut point étonné de cela. C'était
Salem qu'on rencontrait le Doir; il était de l'in
térieur et n'avait jamais vu des blancs. Il croyait
que nous étions partout où nous voulions, et que
nous ne maDgions pas; mais quand M. Arragon
lui eut dit que nous aimions bien le couscous, il
ne put eu revenir, et eu nous fixant par des re
gards étonnés, cachant de temps en temps son
visage avec ses mains, il s'écriait o que vous êtes
beaux Mais n'oublions pas de raconter la géné
rosité de notre bon homme dans la plaine. Dès
qu'il nous apperçut, il fit cuire trois œufs et un
peu de poisson. 11 nous mena par la main sans
nous lâcher dans sa caseoù six personnes se
mirent de suite en devoir de nous servir, et l'ex
pression de son visage et le mouvement de tout
sou corps faisaient voir clairement la joie de son
cœur. Quand nous avions mangé deux œufs, son
poisson et son demi biscuit, il était gêné de n'avoir
plus rieu nous offrir, il cherchait de tout coté,
et aurait voulu trouver beaucoup; mais je com
pris que le brave homme avait donné tout ce qu'il
avait. Je fus peiné de ce que j'avais accepté son
offre et je disais en moi-même plaise a Dieu que
je devienne aussi empressé pour le bien de leurs
âmes que l'est ce brave homme pour le bien de
mon corps! Il nous accompagnaen disant qu'il
était heureux que nous avions passé sur ses terres,
que le bon Dieu bénirait maintenant ses travaux;
et il nous mit sur la route que nous avions
suivre pour passer la rivière de Saumon; où,
grâce la bonté divine, nous trouvâmes, arrivés au
village, des hommes de Maklar, qui travallaieut
la chaux et nous indiquèrent la case d'une sei-
gnarcleàe Gorée; nous nous présentâmes chez elle
et aussitôt elle nous donna deux pagnes pour
nous changer. Un noir de l'endroit nous offrit sa
case,.y fit du feu pour sécher nos habits, et nous
apporta du couscous. En attendant le souper de
cette bonne seignarde, nous voila changés, échauf
fés et restaurés; nous passâmes assez bien la nuit;
dès notre lever on nous apporta du cafe* au iait,
nous fîmes notre prière, et les souliers en ntains,
nous nous dirigeâmes, en faisant 'notre oraison,
vers un bourg moitié chemin de Saumon Salent.
J'avais besoin de prendre un peu d'eau monsieur
Arragon vint avec moi dans un hameau que je
voyais un peu côté dès que le chef nous aperçut.
Venez, dit il, venez chez moi; il nous donna des œufs
et aussitôt un grand nombre de femmes sautaient
de tout côté nous en apporter également, nous
n'en prenions que chacun trois; on s'informa sur
leur religion; ils n'en avaient point, ils avaient
cependant quelques idées confuses de Dieu. Ou
leur demanda s'il ne priaient jamais le bon Maître,
ils nous direut que non, mais qu'ils agitaient le
taintam; ils ne connaissaient Dieu que pour l'of
fenser. Et en effet tout est pour le dérnonrien
n'est trop bon pour lui; et le seul culte qu'ils
rendent h Dieu consiste déployer leur vengeance
contre lui en tirant des coups de fusil quand il
tonne fort; j'ai remarqué le même genre partout
aillenrs. Salem ne tardera pas être notre station