JOURNAL D'APRES ET DE ARRONDISSEMENT. \o 3173. 31me année. FltyjQJLLlYM, On ('abonne Vprri. rue de I.ille, n* 10, pré» la Grand'place, et chez les Percepteurs de» Postes du Royaume. PRIX DE L'.tMISEMEKT, par trimeHlrc, Pour Ypresfr. 4 Pour les autres localités 45° Prix d'un numéro. Tout ce qui concerne la rédac tion doit être adressé l'Éditeur rue de Lille, IO, l'pres. -r Le Propa gateur paraît le SAMEDI et le MERCREDI de chaque semaine. Pltn DES USERTIOI*. 1 3 centimes par ligue. Les ré clames, *5 centimes la ligne. VÉRITÉ ET JUSTICE. T Z ZZI S20 Février. USAGE IJC CIILOROFORHE. Nous venons d'apprendre qu'une pre mière expérienceau moyendu chloroforme vient d'être tentée avec plein succès, Jeudi dernier, l'hôpital civil de notre ville, sur un jeune enfant de 11 ans, atteint d'une tumeur blanche au genou droit et pour laquelle l'amputation ile la cuisse était déve nue indispensable. Celte opération fut faite par M. le chirurgien Vanacker,en présence de MM. Coppielers et llammelralh, méde cins de cet établissement. Le sommeil anésthélique duré 15 14 minutes, et il n'a fallu que 10 minutes environ pour ter miner l'opération, la ligature des vaisseaux et le pansement de la plaie. Le petit malade s'éveilla spontanément et sans éprouver la moindre stupeur; il a répondu nettement toutes les questions: qu'il avait parfaite ment dormi, qu'il n'avait éprouvé aucune douleur, si ce n'est celle au genou dont il avait souflertdepuis longtemps; quant sa jambe, qu'il l'avait encore et qu'on n'y avait rien fait. On lui demanda alors s'il en était bien sûr; il se rappelait seulement qu'on lui avait fait aspirer quelque chose par le nez, et quand on lui disait qu'il n'avait plus sa jambe, il demandait avec l'expres sion de l'étonnement le plus marqué, ce qu'on en avait fait,aflirmantd'une manière encore très positive qu'il ne se souvenait plus de rien. Ce fut seulement un quart d'heure après que, placé dans son lit il se LE GASCON, EE SOEFFEET DE MAZARIV Léger de bagage et d'argent, mais richement ohargé de désirs de faire son chemin et d'espérances d'y parvenir, le chevalier de Versac se mit en route, vers l'an i65o, des bords de la Garonne, pour la cour de Louis xiv, en aussi maigre équipage qu'étaient partis pour celle du roi Henri îv, Luynes, Cadenet et Branes, ces trois frères qui, n'ayant pour eux tous qu'un manteau que chacun d'eux mettait son tour, effrayèrent, sous le règne suivant, par leur luxe, les raffinés les plus élé gants, par leurs dépenses, les seigneurs les plus prodigues; devinrent, le premiei, connétable de France, le second, duc de Chaulues, le troisième, duo de Luxembourg, et firent souche de maisous presque princières. Malgré son déuument, ou plutôt cause de son déuument, le chevalier de Versac comp tait sur un brillant et rapide avenir, car il engageait avec la fortune une partie dans laquelle il avait tout a gagner et rien perdre. Gai, insouciant, babillard, hâbleur, il était plein de ressources dans l'esprit. Venu pied jusqu'à Paris, notre chevalier monta dans le coche pour arriver décemment Sainl-Germain-en-I.aye, où étaient alors le jeune roi, la reine-mere et le cardinal Mazarin, premier ministre. Il prit gîte dans une hôtellerie de la ville et se donna un laquais qui se chargea de le nourrir, condition d\a recevoir secours et protection coutre les châtiments que plaignit d'une douleur dans la plaie, ce qu'on observe toujours la suite des gran des opérations chirurgicales. 11 nous est permis de garau tir l'exacli lude de ces détails qui attribuent chacun des trois praticiens, y dénommés, la part qui lui revient,demanière quecelle dudocteur llammelralh s'est bornée tenir un plu- masseau imbibé dechloroforme sous le nez du patient; et nous aimons constater cette circonstance parce qu'il reste encore certaines personnes qui non seulement sont engouées du docteur llammelralh, mais qui ne laissent échapper aucune oc casion pour le prôner aux dépens de ses confrères, et cela en dépit de la justice et même parfois en dépit des règles ordinaires de la délicatesse et des convenances. AKIIOYIO, février IM9. Monsieur l'Éditeur, J'ai le plaisir de pouvoir vous annoncer que l'épidémie, qui a si cruellement ravagé notre pauvre paroisseet qui dans son apogée a fait quelquefois une quinzaine de victimes par jour, commence perdre de son intensité. Les cas ne montent plus que de 3 a 6. Je ne me réjouis pas moins de ce que je suis peu près rétabli, ainsi que MM. mes Vicaires. MM. les Médecins et les Maîtres des pauvres commencent aussi reprendre leurs travaux. Un grand nombre de nos misérables se montrent déjà tels qu'ils sont, des sque lettes, des simulacres de ce qu'ils étaient aupara vant et se donnent la main en signe delà victoire remportée sur l'ennemi furieux, qui les avait at taqués d'une manière si cruelle ils vivent et voilà ses tours de valet pourraient lui faire encourir, de la part des bourgeois et marchands qu'il prenait pour victimes. Assuré du vivre et du couvert, pourvu d'un homme intelli gent pour le servir, Versac fut encore assez heureux, ou plutôt assez adroit, pour endoctriner, force de lui parler de sou illustre maison, du magnifique castel de son père, de ses immenses prairies sur les bords de la Garonne, un tailleur hasardeux qui l'habilla, l'équipa convenablement de pied en cap, et fournit une livrée complète sou laquais. Cela fait, il se glissa furtivement la cour, prit place dans l'antichambre du premier ministre et se mit eu observation en attendant les événements. L'apparition d'un nouveau venu, qui ne pouvait être qu'un solliciteur, mit eu émoi tous ceux qui composaient la suite et la maison du ministre. Le premier jour ou tuurua autour de lui sans rien dire; le second, on l'aborda et on lui adressa la parole. A peine son accent gascon eut-il révélé son origine que les brocards, les quolibets, les épigrammes lui arrivèrent, Comme un feu roulant, et l'assaillirent de toutes parts sans relâche et sans pitié. Il soutint l'attaque avec tant de gaité, riposta avec tant d'à-propos, de malice et d'esprit, qu'il désarçonna les mauvais plaisants, mit les rieurs de squ côté, et devint, dès cette première bataille, une puissance que chacun craignit et respecta. C'était un pas de fait, mais il ne menait pas encore bien loin. Pour en faire un second, il se plaçait souvent sur le passage du ministre et le saluait d'un air riant et presque familier, lorsqu'il se rendait chez le jeune roi, ou chez la reine-mère. A force de répéter cette manœuvre, il parvint se faire remarquer par Mazarin, qui suurit lui-même eu le sujet de leur réjouissance la maladie commence donc faire grâce, mais elle a frappé des coups qui se feront sentir encore bien des années peu de maisons sont sans pertes; chez les uns c'est le père qui a succombé chez les autres c'est la mère qui n'existe plus; ici c'est le fils: là c'est la fille qui a perdu la vie; ailleurs c'est une veuve qui a aban donné ses petits enfaDts la merci de leur sort! Plusieurs de ces innocentes créatures ont eu le malheur de voir porter la tombe père et mère pendant deux fois 24 heures etc. Le Dombre des décès depuis le nouvel an est grand, il monte 163 sur 12 naissances; et il eut été sans doute bien plus grand sans l'assistance de tous nos bienfaiteurs. OuiGrand Dieu! ce sont ces âmes charitables, qui en votre Nom trois fois Saint, ont ressuscité et conservé nos moribonds le soufïle de vie que vous leur aviez inspiré comme Créateur! Vous en serez le Rémunérateur au cen tuple Nos pauvres, an jour suprême, tiendront encore en mains devant le Seigneur les aumônes, reçues dans leur détresse, compte autrefois les veuves de Joppé montraient devant le prince des Apôtres les bienfaits de la pieuse Thabita! Mais le grand embarras, la plaie peu près in curable, c'est l'affaire de nos orphelinset ceux-ci sont très-nombreux deux personnes charitables mues par nos grandes calamités, nous promettent de prendre trois orphelines; la Commune, le Bureau de Bienfaisance et moi, pour autant que nos moyens le permettent, nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir; mais le besoin surpasse nos forces; pa tience Je mets un terme ma tragédie et je souscris ma lettre avec la plus grande reconnaissance de tous les bienfaitsque nous recevons de .votre part, voyant Pair d'hilarité répandu sur le visage du Gascon, pen sant qu'uu homme qui paraissait si satisfait n'avait rien lui demander. Versac fut enchanté de cette bonne fortune. Oubliant qu'il devait ses habillements son tailleur, et qu'il lie dînerait ce jour-là comme il le faisait tous les jours, que de ce que son valet aurait pu obtenir du boulanger, du rôtis seur et du cabaretier, il rentra chez lui, la téte haute et en se disant intérieurement: Chevalier de Varsac, mon ami, te voilà en belle posture la cour. Le premier ministre t'a souri, cela doit avoir des suites. Le lendemain, Mazarin le remarqua, lui sourit encore, et le troisième le chercha des yeux comme quelqu'un qu'il aimait rencontrer. Cela dura une semaine, après laquelle Versac s'absliut de paraître la copr et s'enferma daus sa chambre. Le ministre le chercha inutilement un matin, selon l'habitude qu'il en avait prise, le chercha inutilement encore plusieurs fois de suite, et, étonné de ne plus le revoir, demanda uu jour, en revenant du conseil, qui il était et pourquoi il ne voyait plus au nombre de ses courtisans, un gentilhomme eu qui il avait remarqué la figure la plus heureuse et la plus réjouie. Ou lui répondit que c'était uu échappé des bords de la Garonne, la langue bien pendue, faisant éclater de lire tout le monde, par la vivacité de ses réparties, et qui avait quitté le noble maijoir de monsieur sçn père, pour venir cher cher fortune la cour. Que, quant son absence, ou ne pou vait l'attribuer qu'à la nécessité où il s'était probablement trouvé de garder le lit, peudant que son tailleur faisait quelques réparations indispensables son pourpoint ou son haut-dé^» chausses. Le ministre sourit et rentra dans sou cabinet. (La suite au prochain n°.)

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Le Propagateur (1818-1871) | 1848 | | pagina 1