peuple. Entre 4 et 5 heures on lisait sur une pro
clamation affichée Plus de Bourbons! vive la
république. Elle venait en effet d'être proclamée
a l'Hôtel de Ville.
Un gouvernement provisoire s'est installe. Il
est composé de MM. Arago, l'astronome, Ledru-
Rollin, Marie, avocats, le poète Lamartine, Mar-
rast, rédacteur du NationalCréntieux, israëlile,
Dupont (de l'Eure), député, Flocon, rédacteur du
journal la RéjurmeAlbert, ouvrier typographe,
et Blanc homme de lettres.
Pendant qu'on délibérait au Palais Bourbon, sur
la demande de la duchesse d'Orléans, et que la
Chambre des Pairs l'attendait en vaiu en perma
nence le peuple s'était porté aux Tuileries. Une
véritable boucherie a eu lieu entre les assaillants
et la garde municipale soutenue par une partie de
l'artillerie qui défendait l'entrée du château. Le
peuple est resté maître. Le palais a été saccagé, le
mobilier détruit, le trône descendu et brûlé. La
famille de Louis-Philippe s'était retirée a temps
par un passage souterrainet de là en fiacre. De
Triauon la famille est allée a Eu où elle s'est em
barquée pour l'Angleterre.
De la, les insurgés se sont portés sur le palais-
royal, propriété particulière du roi. Les apparte
ments royaux ont été totalement dévastées par les
flammes. L'hôtel Gutzot a été aussi incendié. M.
Guizot s'est encore montré'a la Chambre des Dépu
tés, mais sur le conseil de ses amis, cédant avec peine
il s'est retiré. Le peuple s'est rendu Vincennes où
l'on disait que le roi ou le duc de Monlpensier s'é
tait réfugié. Ils n'y étaient pas. Le château de Vin-
ceunes ne s'est reudu qu'après une vive résistance.
Tous les arbres des boulevards sont abattus. Ci
et là on voit des cadavres. De cent pas en cent pas,
eD beaucoup d'endroits, des barricades sont gardées
par le peuple. Les facteurs des postes, arrêtés par
le peuple ont été conduits aux mairies. Les dépê
ches adressées aux autorités ont élé brûlées.
On a relâché les prisonniers pour dettes, et
adopté le drapeau rouge. Chacun porte le ruban
rouge.
La statue de Spartacus en face des Tuileries a
été coiffée d'un bonnet rouge de l'étoffe du trône
détruit de Louis-Philippe. Ordre est donné aux
boulangers de laisser leurs boutiques ouvertes. Les
magasins sont fermés.
La république est proclamée Lille. Il y a en
quelques désordres ainsi qu'à Valenciennes.
Le corps diplomatique demeure Paris.
La volonté nationale sera consultée par des
élections deux degrés.
La duchesse d'Orléans s'est échappée du Palais-
Bourbon par le jardin. Elle s'est réfugiée dans une
maison particulière, mais a perdu dans le tumulte
sou plus jeune enfant le duc de Chartres. Il lui a
été rendu 11 heures du soir. Le duc de Nemours
est sortie par une fenêtre.
Par arrêté du Gouvernement provisoire, en date
du j4 Février tous les citoyens fout partie de la
garde nationale, la Chambre des Députés est dis
soute; il est interdit l'ex-Chambre des Pairs de
se réunir.
Mou.eigueur, vous avez eu la bonté de me remarquer
parmi les grands seigneurs empressés de vous faire leur cour,
et vous <»»ea daigué hier m'adresser la parole.
l.i la est vrai, Monsieur le chevalier, répondit Mazarin
en sou jaigou ordinaire, que celte fois nous traduirons en
frauçais pour que le lecteur le comprenne.
Cette haute faveur me porte croire que votre Éminence
m'accorde quelque bienveillance.
Comme tous les bons rerviteurs du roi,
A ce titre, persoune pins que inui n'a dioit vos bontés.
Dans tous les temps, mou illustre maisou.
laissons là, s'il vous plaît, votre illustre maison, et arii-
vous au fait 1 Que vouiez-vous de moi
Je viens vous prier, monseigneur, de me faire ma fortune,
Votre fuituue s'éciia Mazariu avec épouvante, eu regar
dant I accoutrement déjà passablement fatigué du solliciteur,
et pensant tout ce qu'il faudrait lui donner d'argent pour
l'enrichir.
Sans qu il en coûte un écu Sa Majesté ni votre Émi
nence, s'empressa de continuer Versac.
Ah! reprit Mazarin, soulagé d'un grand fardeau. Et com
ment cela
Eu ayant l'excessive bonlé de me duuncr un soufflet.
lin soufflet.
Oui, monseigneur.
Au milieu des combats, les hommes du peuple
allaient demander les armes des gardes nationaux
restés chez eux. Ils écrivaient donné armes sur les
portes où ils eu recevaient. L'armée de ligne cir
culait la crosse en haut. Odilon Barrot cheval
parcourait les groupes et recevait un accueil tantôt
enthousiaste tantôt très froid. Le bruit de la no
mination du maréchal Bugeaud comme général en
chef de la garde nationale fit soupçonner une tra
hison dans le public. Les aigles deux têtes d'Au
triche et de Russie ont été brisées. Plusieurs bar
rières de la ville ont été démolies. Environ 5.000
hommes, gardes nationaux et autres sont arrivés
d'Amiens, Rouen et Orléans.
24 bataillons de garde nationale mobile de 1200
hommes s'organisent un fr. i-5o par jour. Les
forts des environs de Paris ont fait leur soumission.
La bourse est formée. Il se fait des distributions de
pain et de viande ptès des barricades.
La justice sera dorénavant au nom du peuple
frauçais.
Toute la famille royale est en ce moment en
Angleterre. Elle a débarqué l'île de Whigt.
Le pont Louis-Philippe est détruit. Le calme
renait dans la capitale.
Le gouvernement a alloué aux ouvriers le mil
lion qui allait échoir de la liste civile.
Le général Duvivier organise la garde nationale
mobile.
Le drapeau tricolore remplace le drapeau rouge
par arrêté du gouveruemeul. Ou crie: bas le
rouge.
Une collision terrible a eu lieu Lyon entre la
troupe et le peuple.
Le 26 février, les ouvriers ont brisé quelques
presses mécaniques.
Le 2Ô, la duchesse d'Orléans a quitté les Inva
lides.
Le 26, le gouvernement a proclamé par l'organe
de M. Lamartiue, l'abolition de la peine de mort
en matière politique. La foule applaudi.
Les affaires reprennent leur coûts.
Mgr. l'archevêque a ordonné un service solennel
pour les morts, et une quête pour les blessés. 11
autorise: l'établissement d'ambulance dans les
églises, même au préjudice des offices domiuaux.
Ou chantera: Domine salvum f'ac J'rancornim
g ente m.
La justice n'a élé interrompue qu'un seul jour.
M. Lamartine rédige un manifeste.
Les dépôts de moius de 10 fr. aux monts de
piété sont rendus.
Les théâtres sont rouverts.
La cour d'appel a évoqué l'accusation contre les
miutstres.
Des pillards dévasleul les propriétés aux envi
rons Ue la capitale.
Le P. Laeordaire a commencé ses prédications.
Toutes les églises sont ouvertes.
Paris offrait le 24 dans la soirée un spectacle
d'une ville prise d'assaut. Les rues sont jonchées
C'est bleu uu aoulilct que vous dites?
C'est bleu un souillet queje dis.
Voilà qui est singulier. ht ce soufflet, faut-il qu'il soit
bien appliqué
JNou, monseigneur, au coulraire.
Le cardinal leva la inaiu, Versac l'arrêta.
Pas ici, monseigneur, mais là, s'il vous plaît, dans votre
autichaùibre, en préseuce de tous les grands qui 1 encombrent.
bien! bien; dit le miuistre, qui comprit où voulait en
venir ce suppliant d'une nouvelle espèce.
A sou ordre, la porte du cabiuet s'ouvrit Versac parut le
premier, se couloudaut eu remerciments et eu assurauces
d'éternelle gratitude. Mazarin, qui le suivait, lui douua d'uu
air gracieux, quand ils fureut l'un et l'autre bieu eu vue de
tout le monde, deux petits coups caiessauts du bout des doigts
sur la joue, eu lui disant
Assez, assez, monsieur le chevalier! vous savez bien
qu'on ue peut rieu vous refuser. Au lieu d'un seul que vous
m'avez demandé, je vous eu doune deux j serez-vous au moins
couteut
ersac, sans rien répondre, se courba, avec l'air de la plus
vive recouuaissance, et se tint presque prosterné jusqu'à ce que
le cardinal fut rentré chez lui.
Eh bieu! dit-il au bourgeois, son futur beau-père,
quand il l'eut rejoint, que vous semble de ceci?
de débris de tonte espèce, de barricades demi dé
truites, de meubles, de voitures brisés, de cadavres.
Ou ne voit qu'à de très-rares intervalles des
hommes appartenant la classe moyenne ou la
classe élevée. Ils ont l'air consterné. Le crime,
l'horrible sacrilège qu'ils viennent de laisser com
mettre pèse déjà de tout son poids snr leur con
science.
La bourgeoisie n'est plus rien, c'est le règne de
la démagogie, niais de la démagogie avec toutes ses
passions violentes, aveugles, qui commence.
Les magasins sont fermés. Les gardes nationaux
rentrent chez eux il n'en reste qu'un petit nombre
mêlé aux révolutionnaires. Le pins grand nombre
semble déjà chercher h se soustraire la responsa
bilité qui accable dès présent cette garde tout
entière.
La prison pour dettes a été ouverte, tous les
prisonniers sont relâchés.
A la prise des Tuileries, le peuple trouva
dans la chapelle un magnifique Christ sculpté. Le
peuple s'arrêta et salua. Mes amis, dit uu élève
de l'Ecole, voilà notre maître tous.
Le peuple prit le Christ et le porta solennelle
ment l'église Saint-Roch. Citoyens, chapeau
bas saluez le Christ disait le peuple et tout le
monde s'inclinait dans uu sentiment religieux.
{Presse.)
Il y a, dans la rue Richelieu, une ambulance
ouverte pour les blessés. A la porte de cette ambu
lance sont placés deux cadavres. Sur leur poitrine
est écrite en gros caractère le mot voleur. Ces
deux hommes ont été fusillés par le peuple, dans la
lutte, pour avoir voulu attenter la propriété.
Samedi minuit. Nous apprenons de source
certaine que le Roi Louis-Philippe a débarqué
dans la journée d'hier en Angleterre, Brighton.
[Indépendance.)
Dimanche dix heures du matin. Par le
convoi de Quiévrain qui vient d'arriver Brux
elles, amenant des voyageurs de Valenciennes,
nous apprenons que le gouvernement provisoire a
envoyé dans le département du Nord MM. Anthony
Thouret, D. Pillette et Anthony Thouret fils, en
qualité de commissaires chargés d'y organiser l'in
surrection et de recevoir lç* adhésions des localités.
Ces commissaires ont passé par Amiens, Douai,
Arras, etc., et dans chacune de ces villes ils ont été
accueillis par de grandes démonstrations; ils ont
harangué les populations et annoncé que le Roi
Louis-Philippe était passé en Angleterre. Ils étaient
hier Valenciennes, d'où ils se sont rendus Lille.
Partout, sur leur passage, ces commissaires ont
fait remplacer le drapeau tricolore par le drapeau
rouge, qui paraît être celui adopté par le gouver
nement provisoire.
Midi. Des voyageurs partis de Paris hier,
vers midi, annoncent qu'au moment de leur départ
une manifestation commençait éclater contre le
gouvernement provisoire. La garde nationale au
rait pris l'initiative de ce mouvement dont 011
ignore encore l'importance et le résultat.
J'en suis pleinement satisfait, monsieur le chevalier.
Croyez-vous qu'un gentilhomme que le premier ministre
reconduit lui-même jusque dans son antichambre, qui il fait
ce que vous avez vu, qui il dit ce que vous avez euteudu,
soit en haute faveur auprès de lui
Je le crois.
Vous faut-il, de ce que je vous ai affirmé, d'autres preuves
que celle que vous venez d'avoir?
Il ne m'en faut poiut d'autres.
Vous reste-t-il des doutes, des scrupules?
Il ne m'en reste point.
En ce cas, terminons promplemeiit l'affaire de mon ma
riage avec votre fille, sinon, je vais sur-le-champ et devaut
vous, demander l'héritière du premier duc et pair que je ren
contre.
Nous terminerons quand vous voudrez.
Quinze jours après Versac épousa, palpa et encaissa les cent
mille écus formant la dot. Quelles furent lessuites du mariage!
C'est ce que nous iguorous. Le fait est qu il eut lieu, que
Versac trouva la fortuue qu'il était venu, avec pleine confiance,
chercher la cour, et qu'ici finissent notre histoire et noire
feuilleton.
CU. LAl'MIER.