FRANCE. Paius, 29 février.
Déclare
logne, où elle s'est embarquée pour Douvres. De
là, elle est partie pour Londres, où elle est heu
reusement parvenue daus la journée de lundi.
On lit dans le Mémorial de Rouen du 28 fé
vrier
Il nous revient d'une source authentique, que
plusieurs des membres de la famille royale sont
arrivés Eu, dans leur fuite, dans un état pi
toyable.
La duchesse d'Orléans est arrivée avec ses
deux enfants, sans équipage, couverts de boue,
peine vêtus. Il a fallu que le gardien du château et
sa femme leur fournissent des vêtement et leur
donnassent des secours.
Le bruit de leur arrivée n'ayant pas tardé
se répandre dans la ville, la garde nationale s'est
levée en masse et s'est rendue au palais, dont elle
a gardé toutes les issues, protestant de sa résolution
de ne pas céder la place, quoi qu'il dût arriver,
jusqu'à ce que les princes fussent en lieu de sûreté.
On sait qu'en effet la rumeur avait circulé qu'ils
étaient poursuivis par une bande de furieux qui en
voulaient leurs jours.
Leur embarquement a eu lieu Tréport, au
milieu d'une escorte de la garde nationale d'Eu.
Le gouvernement provisoire a reçu le 28 février
la visite officielle des ministres de la République
Argeutine et de la République de l'Uruguay.
Le gouvernement provisoire, convaincu que
la grandeur d'âme est la suprême politique, et que
chaque révolution opérée par le peuple français
doit au monde la consécration d'une vérité philo
sophique de plus
Considérant qu'il n'y a pas de plus sublime prin
cipe que l'inviolabilité de la vie humaine;
Considérant que dans les mémorables journées
où nous sommes, le gouvernement provisoire a
constaté avec orgueil que pas un cris de vengeance
ou de mort n'est sorti de la bouche du peuple
Le gouvernement provisoire a une si ferme con
viction de la vérité qu'il proclame au nom du peuple
français, que si les hommes coupables qui viennent
de faire couler le sang de la France, étaient dans
les mains du peuple, il y aurait ses yeux un châ
timent plus exemplaire les dégrader qu'à les
frapper.
Ce n'est qu'après de certaines hésitations que
le gouvernement provisoire a proclamé le gouver
nement républicain. Il voulait laisser toutes choses
en étal jusqu'à la décision de l'Assemblée nationale,
dont la convocation est résolue. Mais on a fait ob
server que laisser en question la forme du gouver
nement, c'était exposer le gouvernement la guerre
civile; que le pouvoir devenu vacant retournait
nécessairement au peuple, et que le gouvernement
du peuple par lui-même, ne pouvait être que la
république. Ce sera la nation formuler les in
stitutions qu'elle prétend se donner.
Le calme estcomplèt le 29 Paris. Presque
partout les ouvriers ont repris leurs travaux. Les
maisons en construction présentent l'aspect le plus
animé. Les rues se repavent par des milliers d'ou
vriers et de soldats et la circulation est partout
rétablie.
Le 29 au matin, lord Normanby a reçu des
dépêches de son gouvernement. 11 s'est transporté
immédiatement au ministère auprès de M. de La
martine. Nous ne savons encore quelle a été le but
ni quelles sont les conséquences de cette entrevue.
Cependant, on présume que les cabinet anglais a
du autoriser son ambassadeur demeurer Paris.
Le iSalional, la Presse, le Commerce, le
Courrier, eu un mot, toute la presse est d'accord
sur la politique extérieure et sur l'attitude nouvelle
qui convient la France vis-à-vis de l'étranger.
Cet accord est du la discussion pacifique de la
presse depuis dix-huit ans. Les premiers nous avous
prêché la propagande de la force morale, de l'ex
emple et de la persuasion. Il n'est plus question de
conquêtes territoriales. Le National du 29 février
le déclare lui même. Nous sommes heureux de cette
fraternité des idées qui est l'avant-courrière de la
fraternité de tous les peuples. Démocratie pacif'.)
Liadières, ex-aide de camp du Roi, et l'un
des principaux membres de l'ancien parti conser
vateur pur, a également adressé une lettre d'adhé
sion au gouvernement provisoire.
On assure que M. Cabet s'est aussi raillie et a
abjuré, au moins pour la France, ses idées commu
nistes. Seulement, il aurait demandé une concession
en Algérie pour l'essai de son système.
Un membre de la Chambre des Députés, M.
Jollivet, qui avait adhéré au banquet du 22, n'a
plus reparu depuis ce jour-là même. Ou ignore ce
qu'il est devenu, et c'est envain que jusqu'ici l'on
a cherché son corps parmi les victimes des trois
journées.
On annonce que M.Cortnenin va être appelé
l'ambassade de Rome.
Les inspecteurs du domaine font en ce mo
ment l'inventaire des biens de la liste civile et en
prennent possession au nom du peuple.
On dit que les deux blessures que M. le gé
néral Lamoricière a reçues le février, ont quel
que gravité et l'empêcheront de reprendre du service
pendant quelque temps.
Des ordres viennent d'être envoyés l'Hôtel
des Monnaies, pour préparer au plus vite des mo
dèles l'effigie de la République, destinés frapper
de nouvelles monnaies qui pourront commencer
être livrées la circulation avant une quinzaine de
jours.
Des ordres d'ouvriers de toutes les corpora
tions d'état se sont promenés dans Paris avec des
drapeaux tricoloresen criant: Éive la République!
Dix heures de travail par jour, pas de Mar
chandage
De nombreux ouvriers peintres en lettres se
sont mis l'œuvre pour tracer sur les temples, les
églises et tous les monuments publics, la dévise
républicaine Liberté, Égalité, Fraternité.
Un malfaiteur, pris en flagrant délit de vol,
par un élève de l'Ecole polytechnique, auquel il a
porté un coup de couteau, a été fusillé au pied
d'une borne.
Tous les chefs de division du ministère des
affaires étrangères out donné leur démission, mais
ils continuent de fonctionner jusqu'à ce qu'ils
soieut remplacés. C'est M. Moussette qui sera, dit-
on, chef du cabiuet, où il est déjà installé.
-— M. De Lamennais vient de faire paraître un
nouveau journal sous le titre de le Peuple Con
stituant. Ce journal se distingue par ses opinions
religieuses.
On lit dans VAmi de la Religion Nous
apprenons que la proclamation de la République
Lyon a été le signal de graves excès contre plu
sieurs établissements religieux. Le pensionnat des
Frères des Ecoles chrétiennes et quelques couvents
de femmes auraient été saccagés et incendiés.
La République a été, comme nous l'avons
dit, proclamée a Toulouse. Mais cet acte a été
accompagné de déplorables excès. Le 25, 11
heures du matin la foule s'est portée l'établis
sement des Frères, où elle a brisé les vitres et
tout saccagé. Elle a aussi forcé l'entrée du pension
nat, mais en est sortie en se bornant proférer
des menaces.
Au plus fort du combat, le 2*, M. l'abbé
Desgenettes, curé de la paroisse' des Petits-Pères,
parcourait en soutane les rangs des combattants,
pour administrer des soins aux blessés.
Voici un exemple que nous aimons citer,
et qui prouve avec quelles sympathies la Répu
blique est accueillie, non-seulement par les opi
nions politiques, mais encore par la religion.
Le gouvernement a enfin abordé la grande
question de la loi qui doit fixer la législation pré
paratoire sur les élections. Malheureusement ce
travail hérissé de difficultés a déjà rencontré de
tels obstacles dans la discussion, que, suivant toute
apparence, les élections ne se feront pas avant le
mois d'avril ou le commencement de mai.
(République.)
M. de Lamartine, en repoudant certaines
exigences d'une foule agitée, a prononcé ces pa
roles: Comment Dieu vient de faire pour vous
uu miracle; vous avez fait eu 5 jours le chemin de
trois siècles, et vous n'êtes pas contents vous êtes
des ingrats
M. Garnier-Pagès a pris pour secrétaire
particulier, et nommé chef de son cabinet M. Cor-
bon, ouvrier.
Le marquis de Polignac, second fils du Mi
nistre de Charles X,s'est enrôlé ce matin dans le
bataillons mobile de la 10° légion. Il a été élu ca
pitaine l'unanimité.
Ou lit dans le Progressif cauchois, du 26
Nous venons de recevoir de Rouen, par voie
indirecte, une bien triste nouvelle. Des ouvriers
se seraient emparés de deux pièces de canon et
auraient été faire une décharge sous le tunnel de
Sl°-Catherine, qui se serait affaissé, écrasant un
convoi de marchandises.
Les propriétés foncières de la famille de Louis-
Philippe vont être mises en vente comme biens na
tionaux. Leur valeur était évaluée plus de 5oo
millions.
Informé que, dans une ville considérable de
l'Est, quelques exaltés se préparaient donner un
charivari l'évèché et quelques établissements
religieux, le Ministre provisoire des cultes s'est
entendu avec son collègue de l'intérieur, pour que
de semblables démonstrations fussent hautement
désavouées et réprimées par ordre exprès du gou
vernement provisoire.
Par décision du gouvernement provisoire,
tous les biens du domaine privé et les biens par
ticuliers des princes et des princesses de l'ancienne
famille royale, sont provisoirement mis sous le
séquestre.
Les blessures que le général Lamoricière a
reçues la main et au côté sont presque cicatrisées.
Il pourra partir incessamment pour la frontière du
Nord où il est chargé d'organiser une armée
d'observaliou. (Correspondance.)
l'AItlS, le 29 février.
L'Univjers publie la lettre suivaute qui vient de
lui être adressée par M. l'abbé Pouguet
Ma conscience ne me permet pas de laisser le fait suivant
sans publicité
Je quittais jeudidix heures du malin, en costume
ecclésiastique le quartier de la Madeleine, où j'avais été ap
pelé par devoir. J'espérais reveuir mon domicile, rue du
Pot-de-Fer, par la place de la Concorde; mais les troupes,
les Ilots de peuple qui occupaient cette place, et surtout les
déchargés répétées qui se faisaient alors, m'ont obligé de re
mouler la rue de Rivoli. J'ai suivi la rue de Robau la place
du Palais-Royal, la rue de Valois, et j'ai parcouru vingt
autres rues, jusqu'au quartier Saint-Martin, forcé d'aller
droite, gauche, et souvent de retourner sur mes pas. J'ai
dû franchir cinquante barricades.
A l'entrée de la rue du Reposoir, place des Victoires, je
111e suis adressé avec confiance aux hommes du peuple, qui
gardaient la barricade. L'un d'eux m'a répondu ÎN'ayez pas
peur, Monsieur l'abbé vous êtes en sûreté au milieu de uous.
Puis, nie conduisant la barricade, il dit ses camarades
d'uue voix élevée: Honneur la religion! respect aux piètres!
laissez passer ce bou citoyen et protégez-le. Je fus accompagné
jusqu'à la barricade suivaute avec des témoiguages de respect,
et des paroles d'encouragement. Ces braves ouvriers me pre
naient la main ou me donnaient le bras pour me conduire, en
répétaut Respect la religion laissez passer ce brave homme
Souvent arrêté par des masses compactes entouré de ces
ouvriers armésje les remerciais de leur sympathie et de leur
protection. Je vois que vous êtes les vrais amis de la religion
j'ai toute coufiauce dans vos généreux sentiments; vous savez
que les prêtresséparés de la politique, sont aussi les vrais, les
meilleurs amis du peuple.
Monsieur l'abbé, me disaient-ils avec effusion, nous
voulons soutenir la religion; nous voulons respecter les prê
tres nous en avons besoin pour nous et pour nos enfauts. A
une seule barricade, un seul individu, se tournant vers moi,
a crié A bas les prêtres Aussitôt sa voix a été étouffée par
ses camarades, qui out tous crié Tais-toi! Vive la religion!
vivent les prêtres! nous eu avons besoin. Pendant plus de deux
heures, au milieu de tant de fusils chargés et de sabres nus,
aucuu fusilaucun sabre ne se sont dirigés contre le prêtre.
Ëuûn, je suis arrivé la dernière barricade, où j'ai été reçu
avec la même sympathie. Lorsque'j'ai été au sommet de cette
barricade, une voix s'est fait entendre au milieu du groupe
criaut Vive M. l'abbé! Beaucoup de voix ont répété Vive
M. l'abbé! J'ai remercié ces braves gens, ces ouvriers chré
tiens et je les remercie de nouveau. Je ne saurais mieux leur
exprimer ma reconuaissauce et ma conliance qu'eu faisaut
connaître les seulimeuts généreux dont ils sout animés. Dans
l'ère nouvelle qui se prépare, les piètres ne leur feront pas
défaut. Ils comprendront que la religiou et les prêtrts sout
les vrais les meilleurs amis du peuple.
I/abbé l'ilGUET, prêtre.
Rue du Pot-de-Fcr-Sainl-Sulpice.