FRANCE. Paris, 28 juin. ÉTAT CIVIL D'Y PRES, part l'épidemie ne l'a arrêté pas pins que des bar ricades. Ni les mausolées, ni les annales, ni les dis cours d'orateurs célèbres n'attendent l'héroïsme du prêtre belge, et néanmoins partout il a bravé les douleurs cruelles et la mort lente du typhus. Au lieu de panégyriques, le feu croisé d'une presse injuste répondait seul son sacrifice. Mais ces exemples n'échappent point la rectitude de ju gement du Belge campagnard; ils fortifient le sen- siment de la foi, et la confiance dans l'avenir qu'elle indique. De l'a l'abstension de tout excès même au milieu des privatious les plus terribles. Enfants d'une même patrie, resterons-nous en arrière de contribuer soulager nos frères de Clercken en prenant efficacement part l'exposition ouverte leur bénéfice Le génie de la charité, la voix de l'humanité, l'instinct national, l'horreur d'épou- ventables attentatscomraisailleurs, le triple dignité d'homme, de belge et de chrétien, qui nous fait porter haut le cœur, nous y couvient ensemble. Le ministère vient de décider que les Univer sités de Gand et de Liège seraient conservées. 11 parait que ces deux villes l'ont menacé de créer leurs frais des Université, si l'État leur enlevait ce qu'elles considèrent comme leur bien. De ce côté donc pas d'économies espérer. Si les menaces suffisent, il n'y a rien faire n'importe en quoi. M. Brissot-Thivars, fils du chef de la salubrité publique la préfecture de police et chef d'un bataillon de la garde mobile, a délivré trente de ses malheureux frères d'armes qu'un potier de terre de la rue de la Roquette avait enfermés dans un de ses immenses fours qni servent cuire la poterie. M. Brissot-Thivars a été assez heureux pour arriver un quart d'heure seulement après que le feu avait été allumé, et il a pu retirer peu près sains et saufs, les trente mobiles qui étaient destinés une mort si affreuse. On a déplorer la mort du général de bri gade Bréa et de son aide de camp, le capitaine d'état-major, M. de Margins. Ce général, qui se trouvait en disponibilité, était venu le 23 juin offrir ses services l'Assemble et au général Ca- vaignac. En attendant un commandement, il s'est rendu le 26 volontairement dans le faubourg Saint- Marceau, sur le théâtre du combat. Il a assisté la prise de deux barricades, du côté de la rue barrière Fontainebleau, et s'est avancé seul avec son aide de catnp vers la troisième barricade, en cherchant engager les insurgés cesser leur lutte fratricide. Faits prisonniers tous deux par les insurgés, ils ont été massacrés de la manière la plus horrible. On a coupé d'abord au général les bras et les jambes, et on lui a ensuite tranché la tête. C'est dans cet état qu'il a été retrouvé. Il a été déposé dans le Pan théon, ainsi que son aide de camp. On évalue les pertes faites dans les terribles journées des 20, 24, 25 et 26 dix ou douze mille hommes. Plusieurs femmes se sont fait remarquer au milieu de l'insurrection par leur cruauté. L'une d'elles portait au bout d'un sabre, la tête d'un officier. Celte misérable a été tuée par un garde mobile. Une autre, qui avait coupé la tête d'un capitaine, a été conduite l'Abbaye. Un teinturier du quartier Saint-Michel se montrait avec affection la garde mobile sous son uniforme de garde national. Puis de temps en temps il montait dans sa maison et tirait de sa fe- netre sur la troupe, laquelle il tua plusieurs hom mes. 11 fut découvert et fut immédiatement fusillé. On assure que le plan stratégique de l'insur rection est dû tout entier M. Kersausie, le can didat au grade de colonel de la 1 2' légion. On a la certitude que 7 8,000 insurgés se sont réfugiés dans le bois de Vincennes où ils sont poursuivis avec une ardeur et une énergie remar quable. Tous les prisonniers qui ont été reconnus comme repris de justice ont été fusillés. On eu a fusillé ainsi r5o pendant la nuit du 26 au 27. On cite des traits atroces de cruauté commis dans les deux camps. A La Chapelle des artilleurs, qui conduisaient un insurgé au poste, se sont rués sur ce combattant qui ne voulait pas les suivre, et se sont tellemeut acharné sur son cadavre qu'ils l'ont littéralement déebiquetté. Trois légions, surtout le 9e (faubourg Saint- Antoine) et la 12e (faubourg Saint-Jacques et fau bourg Saint Marceau),sont désarmées entièrement. La loi de déportation que l'Assemblée natio nale vote eu ce moment sera exécutée dans toute sa rigueur. On ne laissera Paris que les ouvriers nécessaires l'industrie. A voir hier les quartiers du centre, on ne se serait jamais douté que pendant quatre jours Paris avait été le théâtre d'une lutte acharnée et d'une véritable guerre d'extermination. La circulation était rétablie les sentinelles veillaient encore aux coins des rues, mais elles laissaient passer tout le monde; cependant le sang a eucore coulé dans la nuit. Ilest question de dissoudre les 5*, 8* et 12° légions de la garde nationale. Dans la 12* légion 5o gardes nationaux seulement ont repondu l'appel. Il est toujours question d'arrêter MM. Caus- sidière, Louis Blanc et Lagrange. M. Emile de Girardin est tenu au secret. Des insurgés prisonniers s'arrachaient les cheveux de désespoir l'idée qu'on pourrait im puter leur parti l'assassinat de l'archevêque de Paris. Les grand-vicaires ont charitablement dé claré que ce malheur pouvait être le résultat d'une imprudence. Mais le prélat a été blessé par devant. La version la plus probable et que le crime a été commis encore par une femme. Avant de mourir, le digne pasteur a convoqué Paris la plus grande partie du clergé diocésain pour assister celui de Paris, épuisé de fatigue, dans la consolation des mourants et la visite des hôpitaux. Seuls ils peu vent circuler après la retraite de g heures, après laquelle aucun habitant ne peut rester sur le seuil de sa porte. Les honneurs militaires sont rendus aux prêtres par tous les postes. Le nombre exact des morts ne sera peut-être jamais connu. Les insurgés ont jeté les leurs dans le canal S'-Martin. Laroque et Thuiller, l'un et l'autre collaborateurs du Père Duchéne, n'ont pas été tués dans le combat, mais par les armes après la prise de leurs barricades. Le rédacteur prin cipal Korfalu est fugitif. L'efTusion du sang est incalculable. Ce n'est pas un combat, c'est un massacre réciproque, une guerre d'extermination. Tons les officiers d'un dé tachement de garde mobile, surpris au Panthéon par une colonne d'insurgés, ont eu la tête tranchée. On assure que deux dragons, pris par les insurgés, out eu les poignets coupés; puis on les aurait replacés sur leurs chevaux, en leur disant d'aller ainsi retrouver leur corps. On a tiré jusqu'à quatre-vints coups de canon mitraille, dans le faubourg Sint-Jacques, sur un gros d'insurgés. 4— Le 25 un représentant qui venait de visiter l'archevêque de Paris mourant se rend l'Hôtel- Dieu. Il y voit plusieurs insurgés blessés, et dont on cicatrise les plaies, côté de leurs victimes. Il veut employer, lui aussi, le langage de la fra ternité chrétienne envers ces hommes qui s'en prétendent les héros. Ils lui répondent en arra chant l'appareil de leurs blessures Nous ne voulons rien devoir, s'écrient-ils, nos mortels ennemis nous ne voulons qu'une chose, ajoutent les forcenés manger de la chair de cochon. Le digne représentant leur demande ce qu'ils veu lent dire, et ils répliquent que de la chair de cochon, c'est celle de la garde nationale et de la mobile. Propos de cannibales! Le Panthéon avait été converti par les in surgés en citadelle. Force a été d'employer le canon. Plus de cinquante coups ont été tirés contre ce monument, qui se trouve horriblement mutilé. Les portes ont été enfoncées par les boulets. Les deux grandes statues allégoriques de la nef prin cipale ont été décapitées par un boulet, qui, après avoir coupé l'arbre de la liberté planté sur la place, est ressorti par le fond du monument. Les insurgés se sont défendus pendant longtemps, même après l'assaut. Beaucoup d'entre eux se sont fait tuer pour ne pas se rendre; les autres ont été faits prisonniers. MM. les vicnires-géuéraux de Paris viennent de publier un mandement par lequel ils demandent des prières pour Mgr. l'archevêque et pour tous les blessés. Rue Rambuteau, des gardes nationaux ayant eu la faiblesse de laisser traverser des femmes, elles se sont placées devant les insurgés et tout près d'eux, de façon leur permettre de tirer sur la garde nationale qui hésitait pour ne pas tuer des femmes. Après la décharge, femmes et insurgés se sont enfuis. Aux fenêtres de plusieurs maisons, les insurgés plaçaient de force cette fois des femmes devant eux, et tiraient l'abri de ces plastrons vivants qui les protégeaient des balles. Dans d'autres endroits, ils feignaient de vouloir parlementer, et quand les parlementaires appro chaient, ils faisaient feu sur eux. Il n'y a que trois généraux, parmi ceux qui ont pris part l'actionqui ne soient pas blessés. Ce sont les généraux Cavaignac, Lainoricière et Lebreton. Pas un journal n'ose ou ne veut dire la vérité sur les événements. Ce n'est pas seulement l'état de siège qui impose cette réserve; c'est la nécessité de calmer les esprits, encore profondément excités par l'émotion des derniers jours. Ainsi la fusillade de l'avant dernière nuit, sur le Carrousel et le quai des Tuileries, eût été une épouvantable catastrophe pour un autre temps; on l'a donné comme une simple alerte. Voici les faits en réalité. Des gardes nationaux de la banlieue conduisaient 160 prison niers l'Orangerie des Tuileries. Ces prisonniers marchaient libres entre une double haie de gardes nationaux; il faisait nuit; un hourra fut poussé au moment où la tête de la colonne s'engageait sous les voûtes du Carrousel, chacun des prisonniers voulut faire sa trouée dans la haie vivante qui le pressait. On leur opposa d'abord la bayonnette, puis des coups de feu; 47 furent tués ou hachés sur place, un nombre peu près égal fut repris, le reste s'échappa. Mais quelques gardes nationaux, en petit nombre, il est vrai, avaient été désarmés, et avec leurs fusils on tira sur les postes du Châ teauceux-là répondirent, et cette mêlée fut surtout cruelle. Un certain nombre de gardes na tionaux furent tuées, on dit onze; mais un bien plus grand nombre furent blessés, 62 sont entrés l'ambulance des Tuileries. A La Chapelle, où il y a deux chefs de bataillon, l'un avait fait l'autre prisonnier et le tenait dans son arrière-boutique sons la garde de trois fac tionnaires. En ce moment les dénonciations com mencent de ce côté, et la moitié de la commune accuse l'autre d'une participation hélas trop vraie, aux derniers actes d'insurrection. Une tête, dans la bouche de laquelle on avait coulé de la poix et mis une mèche, a été plantée sur une pique. Cet horrible fanal a été al lumé et les misérables qui avaient commis cette effrayable barbarie chantaient autour de ce hideux trophée des lampions des lampions Sur huit morts ramassés la barricade du faubourg Poissonnière, cinq ont été reconnus pour des forçats. Un d'entre eux s'est écrié en mourant: Quel malheur de se faire tuer pour dix francs! L'Assemblée a renoncé a former elle-même un ministère. Elle a chargé de ce soin le général Cavaignac. Ou ÎS Juin au Juillet inclus. NAISSANCES. 4 Du sexe masculin. 5 Du sexe féminin, 0 a 9- MARIAGES. 1. Devarver, Louis-Jean, âgé de 34 ans, écrivain, el Vcr- schaeve, Sophie-Marie, âgée de 39 ans, particulière. DÉCÈS. 1. Huyghe, Rose-Thérèse, âgée de 56 ans, journalière, épouse de Pierre Hoeck, rue de Menin. 3. SuouckJeanne-Scholastique, âgée de 61 ans, caharetière, épouse de Jean Jolyt, rue du Mont de Piélé. 3. Yanhnllebeke, Marie-Françoise, âgée de 53 ans, dentel lière, épouse de Pierre-Joseph Kieke, rue de Meuiu. 4. Degryze, Cathériue âgée de 33 ans, journalière, épouse de Pierre Casier, Marché-aux-Bétes.

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Le Propagateur (1818-1871) | 1848 | | pagina 2