FRANCE. Paris, 11 novembre.
PRUSSE.
AUTRICHE.
LOMBARDIE.
ÉTAT ROMAIN.
RUSSIE.
Décidément, M. de Lamartine maintient sa can
didature 'a la présidence. Il en est de même de M.
Ledru-Rollin, dont les chances diminuent cepen
dant tous les jours.
Deux évèqnes, Mgr. Fayet, d'Orléans, et
Mgr. De Graverand,deQuimper, avec un troisième
ecclésiastique-représentant, M. l'abbéSibour, frère
de l'archevêque de Paris, se prononcent, avec l'Ere
Nouvelle, pour la candidature de Cavaignac. Mgr.
de Parisis, évêqtie de Langres, se réserve encore,
comme VUnivers, mais la constitution des diocèses
d'Algérie semble devoir rallier b la candidature du
général Cavaignac une grande majorité des catho
liques.
Le club communiste-uni de la rue de la Breton-
nerie n'a pas encore arrêté son choix pour la pré
sidence de la République entre Raspail et Barbès.
Un nouveau journal mensuel, ou plutôt le
spécimen, vient de paraître le Frai Catholique,
veut rompre la communion de l'Église de France
avec Rome et détourner la République française
de son régime actuel, récemment encore hospitalier
pour les évêques proscrits de Turin et de Lausanne.
C'est tout bonuement le réchauffé du misérable
abbé Châlel.
Les nouvelles de France se bornent de plus
en plus, presqu'exclusivement, aux péripéties de la
lutte pour la présidence. Mentionnons seulement
l'appui de plus en plus déclaré que donnent 'a la
candidature de M. Louis Bonaparte la plupart des
hommes marquants de l'ancienne Chambre. II faut
joindre, dit-on, le nom de M. de Cormenin ceux
de MM. Berryer, Bugeaud, Thiers, Odilon-Barrot,
Molé, etc. Pour tous, nous l'avons déjà dit, c'est un
instrument de démolition. Mais après?
M. Delescluze, ce fougueux commissaire de
M. Ledru-Rollin, que l'opinion publique a fini par
expulser du département du Nord, M. Delescluze
qui a eu nu journal ultra-républicain tué sous lui
a Valenciennes, reparait de nouveau sur la scène
politique a un double titre d'abord, comme se
crétaire-général de la Solidarité républicaine,
association pour le développement des droits et des
intérêts de la démocratie ensuite, comme rédacteur
en chef de la Révolution démocratique et sociale,
journal quotidien a cinq centimes, dont le premier
numéro vient de paraître.
Voici un petit aperçu des idées de M. Delescluze
il suffira pour démontrer que ses échecs proconsu
laires ne l'ont pas découragé:
Ne maudissons pas les épreuves qui nous at-
tendent,car bientôt les misères du présent feront
place aux splendeurs de l'avenir, et plus heureux
que nos pères, les glorieux martyrs de 94, nous
receuillierons les effets de leurs gigantesques
efforts et le prix du courage que nous aurons mis
les imiter.
Les splendeurs de l'avenir font oublier 'a M. De
lescluze les nombreuses victimes que les martyrs
glorieux de 91 avaient pris soin d'abattre avant
leur chute, an nom tout puissant de la fraternité.
Le prince Alexandre de Russie, fils de
l'Empereur Nicolas, a traversé Besançon daus la
journée du 3 novembre, venant de lAllemague et
se rendant a Naples.
A Berlin, le ministère Brandebourg s'est peu
près constitué, si tant est que l'on puisse appeler
couslitué un ministère où six portefeuilles sur neuf
sont confiés a titre provisoire.
La cour paraît résolue a maintenir le général la
tète du cabinet, dût-on en venir un transfert de
l'Assemblée b Brandebourg, ou même a une disso
lution. La situation, comme on le voit, ne s'est pas
améliorée. Pourtant Berlin était toujours tranquille.
On cite un mot du Roi, bien malheureux
sans doute au point de vue politique, mais auquel
on ne peut refuser d'être spirituel: Ou Bran
debourg ira a la chambreaurait dit S. M., ou la
chambre ira a Brandebourg.
Je dois vous dire, pour vous bien faire com
prendre la portée de ce mot, que suivant ces
mêmes bruits, que je vous rapporte fidèlement,
parce qu'ils sont répandus dans des cercles bien
informés d'ordinaire, l'éventualité de la résistance
de la Chambre aurait été longuement agitée b la
cour, et qu'on ne reculerait pas au besoin devant
la résolution de transférer l'Assemblée a Bran
debourg. Dans le cas où la majorité oserait se
déclarer en permananceon irait jusqu'à la dis
soudre.
Post-scriplumhuit heures du soir. Le
Moniteur vient de paraître; il annonce la fin de la
crise ministérielle et la formation du cabinet.
M. le général comte de Brandebourg est nommé
président du conseilet chargé par intérim du
portefeuille des affaires étrangères,
M de Ladenberg est nommé ministre des cultes
et de l'instruction publique;
M. de Manteuffel, ministre de l'intérieur, est
provisoirement de l'agriculture
M. le général de Strutha, ministre de guerre;
M. Kisker gardera provisoirement le portefeuille
de la justice;
Les portefeuilles des finances, du commerce et
des travaux publics seront confiés provisoirement,
le premier au directeur eu chef du cadastre, M.
Kuhne, et les derniers au conseiller en chef des
fiuances, M. de Pommer-Esche.
Quel accueil la Chambre va-t-elle faire a ce
ministère? Il est assez facile de prévoir que cet
accueil sera fort peu bieuveillant.
Les nouvelles de Berlin du 9 sont de la plus
haute gravité.
Comme on le pressentait, le nouveau président
du conseil a porté b l'Assemblée constituante un
message royal, par lequel le siège des délibérations
de cette Assemblée est transféré b Brandebourg et
ses séances suspendues jusqu'au 27 novembre.
Une partie des membres de la droite se sont
retirés; mais le plus grand nombre est resté, et
l'Assemblée a décidé, par 2Ô2 voix contre 3o,
qu'elle n'obtempérerait pas a l'injonction de se
séparer, qui lui était adressée par le président du
conseil.
Un peu plus tard, l'Assemblée a adopté la dé
claration suivaute
L'Assemblée déclare
10 Qu'elle n'a pas de motif de changer le local
de ses délibérations et qu'elle continuera de siéger
b Berlin
2° Qu'elle ne reconnaît pas a la Couronne le
droit d'ajourner, de transférer ou de dissoudre
l'Assemblée
Qu'en ce qui concerne les fonctionnaires res
ponsables qui ont conseillé a la Couronne la pro
mulgation du message dont il vient d'être donné
lecture, l'Assemblée ne le juge pas compétents
pour représenter le gouvernement; qu'elle croit,
au contraire, qu'ils ont manqué a leurs devoirs
envers la Couronne, le pays et l'Assemblée.
Le général Strutha n'ayant pas accepté le porte
feuille de la guerre, ce portefeuille a été remis au
comte de Brandebourg.
Le ministère paraissait résolu b recourir au be
soin b la force pour faire exécuter la décision royale
et suspendre les délibérations de l'Assemblée.
La lutte continue b Berlin sur le même pied que
les jours précédents. Seulement le Roi a fait, en
dissolvant la garde bourgeoise, un pas de plus
dans la voie périlleuse où il s'est engagé. Mais il
s'agit d'opérer le désarmement, et c'est l'a que
commenceront les difficultés.
La Diète a tenu le 11 une double séance dans
des locaux particuliers. Entr'autres résolutious im
portantes qu'elle a prises figurent la mise en ac
cusation du ministère et la formation d'un comité
pour l'examen de la question du refus éventuel de
l'impôt.
De son côté, le Roi a adressé un manifeste au
peuple prussien.
La tranquillité s'est maintenue dans la capitale
pendant la journée du 11. Cependant l'ordonnance
qui dissout la garde bourgeoise a provoqué une
très-vive agitation.
Pour peu que cet état de choses se prolonge, il
faut malheureusement s'attendre b des événements
de la plus hante gravité.
La Prusse entière menace de prendre parti pour
la Diète. Des adresses de félicitations sont déjà
parvenues b celle-ci de différents points du
royaume.
Un voyageur qui a quitté Vienne le 6 au soir,
rapporte que le docteur Scbutte est sous la pro
tection de l'envoyé de l'Amérique septentrionale,
qui lui a confié un emploi simulé. Les deux
principaux agiteurs du comité des étudiants ont
réclamé l'appui de l'envoyé français qui leur a
donné des places de courrier. M. Messenhauser
n'est pas encore arrêté. Le général Bem est parvenu
b gagner le camp hongrois. Le prince WindischaMz
n'aurait donc encore pu jusqu'ici faire arrêter une
seule des personnes qu'il avait demandées.
Les ravages causés par le bombardement sont
immenses. Le faubourg de Jargerelle le plus beau
de Vienne, est b ne plus reconnaître. Plus de vingt
maisons sont devenues totalement la proie des
flammes; plusieurs auares sont détruites en partie:
un grand nombre ont été pillées. Il en a été de
même dans d'autres faubourgs, notamment dans
ceux de LichtenthalLandslrasse et Hundstburm.
La ville intérieure a peu souffert. Deux incendies
seulement ont été allumés par de fusées lancées
des glacis le 5i. La magnifique salle de l'Odéon
qui servait ordinairement de lien de réunion aux
démocrates et aux Allemands catholiques, a été
après coup livrée aux flammes. Elle ne présente
plus qu'un monceau de ruines.
Les députés ont pour la plupart quitté la
la ville et se sont rendus dans leurs districts. Ils
se rassembleront de nouveau a Vienne, le t5,
pour se rendre de l'a 'a kremsier, en Moravie, où
ils siégeront quelques semaines. Il paraît certain
maintenant qu'ils s'y trouveront en nombre, et
que bieu peu refuseront de s'y rendre.
Par un ordre du jour, en date du quartier-
général de Milan le 5 novembre, le général Ra-
detzky annonce la soumission de Vienne et if
ajoute Soldats! la guerre civile est un grand
malheur; mais de tous les maux, le plus épouvan
table est l'anarchie. Lorsque les lois n'ont plus de
force, que le sang souille les autels de Dieu, lorsque
les liens de la famille sont supprimés, quand le vice
et l'immoralité relèvent la tête et le front haut se
promènent dans les rues des villes, il est temps
alors de retentir par la force des armes l'humanité
au bord de l'abîme. C'est ce qui est arrivé b Vienne.
Le mouvement est réprimé; les institutions libé
rales que l'Empereur, avec une bonté sans exemple
octroyait 'a ses peuples, pourront désormais fleurir
et porter des fruits bienfaisants. Si notre jeunesse
a soif de faits d'armeselle accourra l'a où les en
nemis étrangers menacent les frontières de la pa
trie. C'est là que leur sang répandu plus glorieu
sement que dans les rangs des insurgés.
La commission extraordinaire des quatre Léga
tions, établie, comme on sait, b la suite des dé
sordres de Bologne, est dissoute, le but pour lequel
elle avait été formée étant rempli. Le cardinal
Amat, qui était président de cette commission,
d meure légat de la province de Bologne. Sa
Sainteté a daigné lui témoigner, ainsi qu'aux antres
membres de la commissionsa satisfaction pour la
manière dont ils ont rempli la mission difficile qui
leur était confiée.
S'il faut s'en rapporter b la Gazette de Cra-
covie, la Russie aurait récemment conclu un traité
de paix avec Schamylchef des peuplades circas-
sieunes. Libre de ce côté, la Russie pourrait donc
désormais peser de tout son poids sur 1 Europe.