JOURNAL D'YFRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Samedi, 3 Février 1849.
32me année.
Dans son discours prononcé d'ans lia'
séance de la chambre du 18 janvier, l'ho
norable M. Boedt avait évidemment pour
but de faire enlever M. Malou sa pension
ministérielle. Du moins,audiredel'oraleur,
l'ex-ministre des finances aurait dû renon
cer lui-même celte rétribution que la loi
accordait indistinctement tout fonction
naire ayant siège pendant deux ans sur les
bancs du ministère; et cela pour le motif
que M. Jules Malou avait combattu éner-
giquement le projet lors de sa discussion
en 1844. Nous croyons que la chambre a
bien fait d'abroger cette loi si débonnaire
envers les ex-ministres, et que nos législa
teurs eussent dû être plus sobre accorder
des pensions des anciens fonctionnaires
gros traitements. Cependant, pour le
emps où la loi de 1844 existait, et jusqu'à
ce qu'on nous prouve que celle loi était ini
que, nous ne saurions nous ranger de l'avis
de M. Boedt. Eh quoi! par la seule raison
u'une loi soit adoptée contrairement
opinion qu'on a soutenue l'égard de son
rojet, il faudrait qu'on renonce au béné
fice qu'elle accorde? Parce que je n'ap
prouve pas une loi de transitune loi
d'exemptionce serait une indignité pour
moi de profiter de ses dispositions? Pour
mieux voir l'absurdité d'un pareil système,
admettons pour un instant le contraire de
ce qui vient de se passer. Supposons par
exemple que le représentant d'Ypres, dans
ses vues économiques, ait proposé d'opérer
pue retenue sur le traitement des mem
bres de l'assemblée législative, et que
nonobstant ses observations sages et élo-
quemmeut développées, sa proposition fût
rejetée; le préopinant pour conserver sa
loyauté, serait-il tenu de céder l'État le
montant de la réduction projetée? Malgré
les beaux sentiments que M. Boedt se plaît'
a étaler, nous sommes persuadés qu'il ne
se prêterait guère volontiers ce sacrifice
pécuniaire.
La dignité du pouvoir, assure-t-il néan-
îoins, est dans le désintéressement. Les
imis de M. Boedt pensent-ils de même? Si
leurs raisonnements sont conformes sa
tanière de voir, leur conduite n'est-elle
pas un démenti formel leur langage? En
effet, n'en connaissons-nous pas qui ne
restent en fonction que jusqu'au temps
strictement requis, pourréclamer une pen
sion de retraite? D'un autre côté, tout le
monde se rappelle les instances réitérées
que fît naguère un personnage haut placé,
pour accumuler deux receltes dans cette
ville, dont chacune, dit-on, donne un re
venu d'environ deux mille francs. Certai
nement le besoin ne pouvait motiver cette
démarche. Les deux mille francs que rap
porte la recette dont il était assuré, joints
sa fortune personnelle, ne laissent aucun
doute sur ses moyens d'existence. Cepen
dant, nous le demandons, ce fonctionnaire,
aux yeux de ses amis, semble-l-il avoir
vendu son honneur, sa dignité, voire même
son dévouement? Communiqué
NTo 3271.
VÉRITÉ ET JUSTICE.
On s'abonne Ypres, rue de Lille, io, près la Grande
Place, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIX DE L'ABONNEMENT, par trimestre,
Ypres fr 3. Les autres localités fr 3 5o. Un n° i5.
Le Propagateur paraît le SAMEDI et le MERCREDI
ne chaque semaine. (Insertions 13 centimes la ligne.)
TP3.S3S, 3 Février.
L'abondaDce de matière nous oblige de remettre
line lettre au N" prochain.
t
L'ordre public gravement menace en France,
s'est inopinément rétabli sans collison. La démo
ralisation des masses, le respect perdu de toute
espèce d'autoritéle relâchement des principes
religieux chez un grand nombre, les tiraillements,
les espérances les dépits des partis déchus, et les
prétentions exagérées des tractions diverses du
parti vainqueur, toutes ces cbra«t& semblent con
damner ce pays une agitation chronique qui
n'aura d'issue que dans une restauration monar
chique après guerre civile, on dans une anarchie
sanguinaire, ou dans un retour de la nation la
pratique de la religion et de la vertu par l'épuration
du malheur. C'est en ramenant le peuple dans les
voies de la religion, de la raison et de la tranquil
lité, eo fesant systématiquement le contre pied de
l'ancienne république, en frappant d'une répro
bation fréquente et manifeste tons ses souvenirs,
que le ciment de la stabilité peut affermir sur leurs
bases les pièces rapportées des nouvelles institu
tions. Les ressorts de la politique, de la police et
du courage sont loin de suffiie cet effet. 11 est
difficile sans doute d'atteindre ce but, mais sans y
travailler constammentcomment veut-on que le
commerce, que la confiance, prennent de l'essor?
M. Bouseinan agent de la société générale, est
retenu chez lui depuis quelque temps par une
affection douloureuse aux yeux qui lui a en grande
partie ôté l'usage de la vue Le mal pouvait avoir
du reste perdu de son intensité.
--iTn n Tt
Nous sommes heureux de pouvoir assurer que la
petite vérole a cessé complètement ses ravages.
-riï~I u-<»<o -
Quelques compagnies d'infanterie de la garde
civique se réuniront demain pour la première fois
en teune.
sow -
La douceur de la température permet de com
mencer déjà des ouvrages de construction. On
démolit en ce moment une maison rebâtir, marché
au bétail. Quelques autres travaux sent aussi en
train d'exécution.
Un nommé Bruynooghe de Boesinghe a été con
damné un an de prison pour abus de confiance
envers M. Vandenbulcke, marchand de grain. Il
s'était fait remettre du lin de ce négociant k son
insu, et en avait dissipé le prix.
Le commerce de bois paraît être particulièrement
en souffrance. Diverses ventes d'arbres ont été
suspendues faute d'acheteurs. Le prix des bièos
fonds se maintient.
lotom»
Chez un boutiquier de cette ville, il y a qûelque
temps, uhe saisie judiciaire s'est terminée par un
mariage. Tout a été vendu, et la fille du marchand
s'est mariée avec le fils du gardien. Dame Thémis
et Hymenée ne sont pas d'ordinaire si bous amis.
I
explosion d'une cave A poudre.
t
Lundi matin, quelques minutes après 7 heures
et demie, une explosion terrible mais sourde, s'est
fait entendre a Gaod, et une commotion violente'
se faisait particulièrement sentir dans le quartier
S'-Pierre.
C'était une cave k poudre du basrfnn n* 5 de la
citadelle qui venait de sauter, et qui avait entraîné
la déinoiiion d'une grande partie du bastion, ren
versé des ponts, endommagé une partie des bâti
ments.
L'explosion a malheureusement fait des victimes:
on a retrouvé d'abord une jambe chaussée d'une'
botte et d'une chaussette portait! les lettres J. B.
N" 8 c'était la jambe du sous-lieulenaDt garde
d'artillerie Bernard on a aussi retrouvé une de ses
mains et quelques parties de son cadavre, le tout
noirci par la poudre et n'ayant presque plus aucune
forme humaine. De son pied gauche l'os nu seul
subsistait encore.
Deux cuisiniers sont grièvement blessés, et ne
passeront sans doute pas la journée. Deux snus-
officiers d'artillerie ont également reçu des bles
sures graves.
On compte en tout neuf blessés et un mort.
Une femme de la campagne, qui était allée
porter des provisions dans la citadelle, a été lancée
par les fenêtres d'une chambre dans la cour, sans
avoir d'autre mal que quelques légères contnsions.
Des soldats ont été jetés au bas de leurs lits et
roulaient les uns sur les autres.
Les bruits de complot, etc., qui courent sont
dénués de tout fondement. L'enquête établira clai
rement qu'il y a là ou bien un malheur déplorer,
on bien un crime isolé, dont l'auteur se serait fuit
justice lui-même. Cette dernière version est la plus
accréditée, et hier midi, elle prenait une grande
consistance.
Le sous-lieutenant Bernard s'est dirigé, 6 heu
res et demie, vers la citadelle 7 heures et quart,
il est entré dans la cave poudre; quelques minutes
après, l'explosion avait lieu.
P. S Nous apprenons l'instant que le mal
heur qui vient d'arriver doit être attribué un
suicide. Le lieutenant garde-magasin Bernaert
accusé de malversation, et dont les comptes de
vaient être appurés aujourd'hui même dix heures,
est entré vers les sept heures dans le magasin aux
cartouches; quelques moments après eut lieu l'ex
plosion, qui occasionne l'État une perte évaluée
environ un demi-million.