JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
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7P3.ES, 12 MAI.
La Commune a pris le pas sur le Progrès
dans la présentation d'un candidat au con
seil provincial,el cela par suile des lenteurs
inusitées de Y Association libéraledont il
est obligé d'attendre les injonctions. Cela
fait naturellement endêver le Progrès. Con
damné qu'il est croquer le marmot, il
lâche de se distraire quelque peu en grom
melant contre les industriels et les négo
ciants en général et contre leur candidat
en particulier. Son article se résume en
deux points il taxe les commerçants
d'égoïsme et d'exclusivisme; il les accuse
d'inconséquence parce qu'ils choisissent
un avocat pour les représenter. Le Progrès,
qui se croit éclairé de toutes les lumières
possibles, doit être excessivement décon
certé dans les circonstances actuelles, pour
ne point s'apercevoir que le deuxième
reproche détruit le premier: si, comme les
membres de la coterie libérâtre, les indus
triels tendaient accaparer toutes les
fonctions éligibles, s'ils repoussaient sys
tématiquement tout ce qui est en dehors
d'eux, s'ils avaient la sotte prétention de
posséder eux seuls toutes les aptitudes
et toutes les connaissances, alors évidem
ment ils ne seraient point sortis de leur
cercle pour chercher un candidat et ils ne
seraient pas allés fixer leur choix sur un
avocat propriétaire. Ils ne sont dès lors ni
égoïstes, ni exclusifs, car ils élisent loya
lement el généreusement celui qui leur
parait le plus digne et le plus capable; ils
ne sont pas plus inconséquents, car il ne
faut pas nécessairement être industriel ou
commerçant pour connaître les droits, les
intérêts, les besoins du commerce, il suffit
d'être dans une position telle que l'on ait
dû les étudier et les apprécier; au surplus,
il ne s'agit pas seulement d'industrie et de
commerce, il s'agit de représenter les vœux,
les sentiments, les opinions de toute la
bourgeoisie, de ces classes moyennes,
intelligentes et actives, qui sont enfin dé
cidées secouer le joug de la coterie clèro-
phobe; et le Progrès n'aura pas oublié le
nombre de voix que ces classes ont don
nées M. Joseph Beke, avocat, aux der
nières élections communales. Les hommes
qui patronaient ce candidat la même
époque sont donc doublement conséquents
en lui prêtant de nouveau leur influence.
Nous pouvons ajouter, en passant, que le
Progrès en impose ses lecteurs lorsqu'il
dit que les rédacteurs de la Commune seuls
ont inventé la candidature de M. Joseph
Beke. Sans doute celui-ci ne s'est point
avancé, les hommes modérés ne l'ont point
sollicité, cela se comprend toutes ces
comédies ne se jouent que parmi les am
bitieux et les dominateurs de la clique,
où l'on exige des engagements et des
professions de foi. Parmi les hommes in
dépendants on laisse le candidat dans
toute sa liberté, on ne s'assure pas même
s'il accepte ou refuse, car on est convaincu
qu'un bon citoyen ne recule pas, sans
motifs graves, devant l'accomplissement
d'un grand devoir. Maintenant, M. Joseph
Beke possède-t-il les connaissances com
merciales el administratives que le Progrès
se plaità lui dénier, de même qu'il refuse
toute espèce de capacités quiconque
n'appartient point la coterie? Le moindre
doute ne saurait être élevé cet égard. Ce
n'est pas seulement parce qu'il est fils de
négociant, et qu'il a suivi les opérations
commerciales de son père, c'est encore
parce qu'en sa qualité d'avocat il a eu l'oc
casion d'approfondir et de traiter les ques
tions qui s'y rattachent. El puis, pour
siéger dignement au conseil provincial,
quiconque est de bonne foi sent qu'il
importe d'avoir d'autres qualités que des
connaissances purement industrielles, il
faut avant tout cette habitude des affaires
en général qui permet de s'occuper avec
fruit de tout ce qui touche aux intérêts
nombreux et multiples d'une province.
Doué d'une intelligence lucide, d'un juge
ment sûr, d'un caractère ferme et indé
pendant; jurisconsulte expérimenté, fami
liarisé avec toutes les connaissances que
réclame l'administration provinciale, tra
vailleur facile et soigneux, M. Joseph Beke,
avocat Ypres, nous semble réunir au
plus haut point toutes les conditions dési
rables chez un conseiller provincial il ne
se bornerait point succéder M. Donny,
il saurait le remplacer.
Le plus grand plaisir dont le journal
des cartons se sente épris actuellement,
c'est d'avoir atteint sa neuvième année
d'existence. Vivre huit ans pour une feuille
de l'acabit du Progrès, c'est réellement un
cas de longévité folliculaire qui mérite
l'attention générale. Que Mathusalem ait
vécu 969 ans, cici se conçoit par contre,
que le Progrès ait fêté huit St-Silvestre
voilà certes le plus grand des prodiges
modernes. Quel sujet digne de frapper
l'imagination des écrivains qui rédigent
ce journal! Aussi leur plume lrahi-t-elle
les sentiments d'admiration dont ils sont
affectés, quand elle traça sur le papier ces
ligues: Le Progrès vient d'entrer dans
sa neuvième année. Pour une feuille qui
a commencé sa carrière sous l'omnipo-
tence cléricale et qui n'a fait que gagner
des forces pendant la lutte qu'elle a
soutenue contre ce parti, c'est quelque
chose que de vivre pendant neuf an-
t nées? (i)
Ce n'est pas que le journal Progressif
soit dans l'erreur faire comprendre que
le long terme de sa carrière ne soit digne
d'être remarqué mûrement. Pour nous qui
avons observé sa conduite, du moment
qu'il sortît du berceau, nous n'hésitons
guère en faire l'aveu, nous fûmes loin de
présager que les habitants d'Ypres eussent
soutenu, par des abonnements, une presse
aussi dégouttante que méprisable.
Le sort de ce journal se trouve moins,
il est vrai, entre les mains de la bourgeoisie
Yproise, que dans celles des omnipotents
qui oppriment si indignement la ville.
Sans les écus de la race oranjo-cartonnée
qni stipendie follement son organe, dans
le but bien connu de se tenir sur le pié
destal que l'aveuglement public a érigé
son ambitionet de remplir ses coffres des
deniers que le contribuable apporte au
trésor, au prix de ses sueurs, qu'on nous
dise quelles seraient les ressources du
Progrèsde quel œil pourrait il regarder
l'avenir? Il n'existe qu'une manière de voir
ce sujet, et le Progrès lui même fait
assez distinctement comprendre que son
existence se lie étroitement aux sacrifices
persévérants de ses fondateurs-actionnai
res, quand il éveille si pressément l'atten
tion des sinns, de peur que le parti clérical
ne parvienne resaisir son ancienne
influence.
Que le Progrès s'empresse défendre
les postes que ses partisans occupent pré
sentement, nous ne blâmons guère sa
manière d'agir. Toutefois nous osons dès
ce moment l'affirmer: quelque soit sa vigi
lance et son ardeur, l'influence dont son
parti dispose ne tardera pointa s'affaiblir.
Une réaction manifeste surgit dans la cité.
L'excès du mal a fait songer au besoin des
remèdes. Déjà tout ce que la cité compte
de commerçants et industriels distingués
ont levé la tète en voyant leurs intérêts
foulés aux pieds, et se sont donné le mot
d'ordre pour combattre au premier appel,
d'une manière décisive et v.ictorieuse, ces
accapareurs de places, dont toute la con-
VÉRITÉ ET JUSTICE.
On s'abonne Ypres, rue de Lille, 10, près la Grande
Place, el chez, les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIT DE L'ABONNERENT, par trimestre,
Ypres fr 3. Les autres localités fi 3 5o. Un n°
Le Propagateur parait le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine Insertions 19 centimes la ligne.)
(i) C'est là une chose progressive reculons avoir vécu
•pendant neuj anset cependant n'entrer que daus sa neuvième
année