JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
f
No 3325.
Samedi, 11 Août 1849.
33me annee.
7FB.ES, H Août.
VÉRITÉ ET JUSTICE.
On s'abonne Ypres, rue de Lille, io, près la Grande
Place, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIX DE L'ABOMEMENTpar trimestre,
Ypres fr 3. Les autres localités fr 3-5o. Un n° a5.
le Propagateur parait le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine. (Insertions M 9 centimes la ligne.)
Depuis un temps immémorial, noire ville n'avait
été attristée ni alarmée par un incendie, quand
mercredi 8 c' un incendie s'est déclaré dans la rue
de Bailleul, dans la maison occupée par le sieur
Daman, tailleur, qui en quelques heures a été
complètement détruite, si ce n'est le mur de façade
qui est resté debout.
Voici comment les personnes qui habitaient
cette maison s'expliquent la cause probable de ce
sinistre.
La femme Daele qui occupait le 1" étage venait
de placer le plus jeune de ses enfants dans son lit,
en laissant avec de la lumière l'ainé qui allait s'y
rendre. La mère alla sur le seuil de la porte de la
maison et y causa pendant quelques instants, qnand
par imprudence celui-ci aurait placé la lumière
contre une armoire entourée de papier; ce papier
se serait enflammé et aurait communiqué aussitôt
le feu aux rideaux de la fenêtre.
Une clarté soudaine étant venu surprendre la
malheureuse mère ainsi que les personnes avec
lesquelles elle causait, elle s'est aussitôt lancée
vers sa chambre pour sauver ses enfants en s'era-
paraut de l'ainé qu'elle remit une personne qui
se tenait sur l'escalier, et retourna vers le lit du
plus jeune enfant qui venait de s'éveiller par les
cris de désespoir de celle qui venait pour le sauver.
A peinela mère et ses petits malheureux avaient-
ils quitté la chambre que tout y était eu feu; aussi
rien n'a pu être sauvé de ce qui lui appartenait.
Les cris au feu! au feu! se firent bientôt en
tendre dans le voisinage, et tout le monde vint
pour prêter secours, mais hélas i on n'eut que le
temps de sauverquelques literies de Daman, devant
laisser le reste comme la proie des flammes.
La cloche d'alarme s'était fait entendre seule
ment pendant quelques minutes, des troupes se
trouvaient déjà sur les lieux et quelques-uns même
UH ENTRETIEN.
PEItMOSNtGES. En grand Partis; un Barbu
Bllierou; an Mlrabean de l'Vperlée; et un Boule
Bogue surnommé Mylord Pouff.
Le grand pacha. Voilà donc encore un gredin
du cléricalisme qui vient de se faire installer dans
la chambre haute. La farce est belle et pour peu
que les affaires continuent de ce trainRogier
pourra se promener avec ses camarades.
Lord poujf. Ma foi, j'ai prévu le déplorable
résultat des opérations électorales de l'arrondisse
ment de Thielt. La veille encore du fatal jour,
illuminé par le sublime esprit du bienfaisant libé
ralisme, j'ai vu dans toute leur nudité les intrigues
ourdies en faveur de la candidature du cuistre
D'Anethan de milliers de Jésuites invisibles
étaient répandus dans la campagne; c'est peine
si on voudra y croire, j'ai aperçu distinctement des
électeurs qui en avaient sur le dos, sur le nez, sur
la tête, dans la poche, transformant avec une dex
térité sans pareille, le nom de M. Pecsteen-Devrière
en celui de M. D'Anethan.
avant, car ce ne fut qu'à 9 heures que celle-ci
fut mise en branle, tandis que l'incendie avait
commencé vers 8 heures et demi (négligence im
pardonnable, pour laquelle on dit que le veilleur
est déjà destitué.)
Dès lors en quelques minutr 1 la rue était en
combrée d'une foule de monde, arrivée de toutes
les parties de la ville, foule qui, dans un but des
plus louables, il est vrai, vint pour porter un
secours prompt, mais avec un excès de zèle, car
elle se mit se lancer sur les deux maisons atte
nantes (qu'elle se figurait déjà incendiées mais qui
ne l'étaient pas) d'une manière inconsidérée, sans
nécessité absolue, et alla jusqu'à violer les domi
ciles en jetant sans réflexion aucune, tout ce qui se
trouvait sous ses mains par les fenêtres qu'elle
avait brisés, elle arrachait tout ce qu'elle croyait
pouvoir donner aliment aux flammes il y en avait
même qui, avec une imprudence inouie, se mirent
découvrir les toits de ces maisons, ce qui indu
bitablement, s'il y avait eu un peu plus de vent,
aurait été cause que tout l'angle aurait pu ne pré
senter bientôt quedes décombres; car ceux quifirent
cet ouvrage ignoraient sans nul doute qu'en agis
sant ainsi, ils formaient des courants d'air et met
taient découvert des poutres de bois on ne peut
plus combustibles, tandis que les tuiles, les pannes
ne l'étaient pas s'il y avait eu on peu plus de vent
et que celui-ci serait venu du nord, quels malheurs
n'aurait-on pas eu déplorer! qnand on se figure
que la maison du coin, occupée par la V° Leroy,
contenait quelques tonneaux d'huile, et que le
grenier était rempli de bnche£ -
Pendant un quart d'heure l'anxiété et la crainte
du public était son comble: des cris de désespoir
se firent entendre de tous côtés, quand les flammes
vinrent petit petit augmenter d'intensité et
gagner la partie supérieure de la maison, et qu'au
bout de quelques instants des bruits sinistres se
firent entendre, occasionnés par les pétillements
accompagnés des éclats de bois en feu qui s'élan
cèrent dans les airs pour tomber dans le voisjnage.
Enfin les pompiers arrivèrent pour mettre fin
cette anxiété générale, ils se mirent de suite faire
manoeuvrer leurs pompes, mais pendant au moins
10 minutes par une fatalité inexpliquable ils se
trouvèrent dans l'impossibilité de les faire nianceu-
Mirabeau. Vous plaisantez, Mylord; le succès
remporté par le parti clérical de Thielt, ne saurait
être attribué exclusivement aux Jésu....
Mylord. Par Voltaire, Jean-Jacques, Helvétius,
et tous les vrais philosophes, je dis que la faute
en est aux disciples d'Inigo.
Mirabeau. Sans aucun doute; la gent jésuitique
a mis le principal poids dans la balance, cepen
dant
Mylord. Sans l'influence ignacienne notre cause
devait prévaloir. Le libéralisme comme la liberté,
est destiné faire le tour du monde. Maudite race
cléricale Si j'étais commissaire, je ferai un rapport
détaillé de ses faits et gestes.
Le barbu biberon. La grande affaire, c'est que
les hommes de la sacristie payent contributions et
impôts; dès lors il est constaut qu'à l'exemple de
l'Apôtre Paul, ils peuvent avec raison s'écrier civis
Romanus sum et concourir au choix de leurs man
dataires. La Constitution leur octroie cette faculté
comme tous les Belges.
Mylord. Les intriguants ils n'ont aucun droit,
si non que de se trouver l'église. Si j'étais gou-
vrer, faute d'eau pour remplir le vides des cylin
dres. Aussi de tous côtés on entendait crier de
l'eau! de l'eau! Enfin les jets fonctionnèrent pen
dant au moins 1 1/2 heure que dura le combat
entre les deux éléments, entre le feu et l'eau.
Quel courage, quel dévouement, quelle intrépidité
n'avons nous pas vu pendant ce temps? on aurait
dit qu'il y allait de l'intérêt personnel de tous
ceux qui s'y trouvaient présents. Honneur! louan
ges! car avec de pareils hômmes et un peu plus
d'ordre et d'entante l'on aurait pu, l'on doit en
convenir, maîtriser plus vite le feu; car en con
centrant plus l'incendie dans son foyer au moyen
de la hache, de la scie, de crochets et dé l'eau,
on aurait gagné au moins une demi heure. Pour
comble de fatalité des trous se sont déclarés dans
les tuyaux qui ont servi affaiblir la force des jets.
Tous, bourgeois gt militaires, ont bien mérité
de la reconnaissance générale.
Nous devons aussi un juste tribut d'éloges aux
Autorités civils et militaires qui tous se sont trou
vés sur les lieux du danger,et tout particulièrement
notre commandant d'armes et au capitaine des
pompiers, qui ont été vus des premiers quand la
cloche d'alarme avait sonnée.
Toutefois si tout le monde peut se revendiquer
une juste part dans le tribut d'éloges, nous devons
cependant signaler tout spécialement aux autorités,
les noms suivants
Vercamer, professeur au collège communal,
blessé; Dobbelaere, pompier et vétrier, blessé;
Wallaert, Henri, celui qui a sauvé les enfants de
l'incendie; Nauro, infirmier l'hôpital militaire;
Reinhout, couvreur, qui a fortement contribué
préserver une maison attenante; Staelens, Amand,
gendarme en résidence Fur nés; Vandevoorde,
Jean Baptiste, gendarme en résidence Courtrai;
Dehollauder, agent de police; Geloen, Liévin
Simoens-Desloover, de Courtrai; M. le docteur
Dalmole qui s'y est tout particulièrement distingué
aussi et a donné ses soins empressés aux blessés
bourgeois qu'il a pensé l'hôpital militaire, ainsi
qu'à la malheureuse femme qui venait de s'échap
per de l'incendie avec ses enfants.
MM. les officiers Ronflette, capitaine au io*
rég' de ligne; Bodaert, lieutenant l'école d'équi-
tation; Leemau, sous-lieutenant au 3° rég' d'ar-
verneur, je le leur prouverais en les faisant évacuer
ma province.
Le barbu. Que voulez-vous qu'on fasse sinon
ameuter le public contre eux, en disant qu'ils
souillent leur robe en déposant un bulletin dans
l'urne, et que si les candidats qu'ils patronnent
arrivent au pouvoir, une révolution est inévitable.
Mylord! Que voulez-vous qu'on fasse! belle
demande! Si j'étais ministre je vous le ferais voir;
je leur enlèverai tout subside et traitement; ainsi,
je les forcerai faire la propagande en Amérique.
Un peuple civilisé et sage comme le peuple Belge
n'a pas besoin de prêtres. Moi je puis m'en passer;
un autre peut en faire autant ce semble?
Mirabeau. Je conçois, Mylord, l'aversion que
vous portez contre les vipères jésuitiques; je la
partage avec vous; car bien que mes parents aient
eu l'idée malencontreuse de me placer chez les
petits Pères, pour y faire mon éducation, je ne
laisse pas de leur administrer quelques bonnes
tapes quand l'occasion se présente. Néanmoins
il faut tempérer celte colère la grande majorité du
public ne pense pas comme nous, en cette matière;