politiques et religieuses octroye'es par elle. Accep
ter quelques-unes de nos libertés, rejeter les
autres ou seulement en fausser le sens dans
l'application, ce n'est pas faire profession de
libéralisme, c'est se créer un système arbitraire
qui n'est fondé que sur l'intérêt privé, sur les
passions du moment, système variable, capricieux,
violent comme le fondement sur lequel il repose.
Ce régime politique n'est pas plus la liberté que les
ténèbres ne sont la lumière. Ce faux libéralisme le
clergé le repousse de toutes ses forces, tandis qu'il
accepte loyalement et sincèrement le régime libéral
tel qu'il a été inauguré par notre constitution.
Mais ce n'est pas le libéralisme constitutionnel
que le parti dominant veut faire trôner en Belgique;
il veut autre chose; ses sollicitudes se portent sur
un tout autre objet. Affaiblir partout et en tout
l'influence de la religion, jeter la déconsidération
sur l'action civilisatrice du clergé, faire envisager
avec un œil d'envie le bien que les prêtres ont fait
pendant les années calamiteuses que nous venons
de traverser; voila le but que se proposent les
faux libéraux; et pour l'atteindre que d'insignes
manoeuvres ne mettent-ils pas en jeu Des catho
liques siègent dans les chambres législatives, vite
il faut les éliminer. Mais ce sont des hommes
éminents, ils ont donné des preuves éclatantes de
talent et de patriotisme; peu importe, ce sont des
cléricaux; un clérical est-il bon quelque chose
Après s'être arrêté quelques temps sur le brevet
d'incapacité que les pseudo-libéraux octroyent
indistinctement tous les catholiques système dont
dous avons eu une preuve flagrante dans l'élimi
nation de M Jules Malou, le publiciste continue.:
Je sais qu'on accuse les catholiques et en
particulier les prêtres, de travailler sous le masque
de la religion au renversement du ministère, mais
c'est l'a une grossière calomnie qui ne s'appuie pas
même sur l'ombre d'une preuve. Tout ce que veut
le clergé c'est que la politique du ministère soit
impartiale, juste et rigoureusement constitution
nelle; c'est qu'il n'y ait plus un parti vainqueur
et un parti vaincu; c'est que le ministère tienne
haut et ferme non pas le drapeau d'un parti mais
celui de la constitution; c'est que les catholiques
ne soient frappés d'une espèce d'ostracisme poli
tique; c'est que la charité privée puisse se dévé-
lopper sans entraves; c'est que le ministère se
persuade qu'en affaiblissant l'influence religieuse
il abaisse l'unique barrière qui s'oppose l'invasion
du socialisme en Belgique.
Les prêtres, pas plus que lesautres catholiques
n'entendent accorder a qui que ce soit le privilège
de les exclure du droit commun. On veut que le
clergé s'éloigne des luttes électorales et qu'il
exerce son influence dans une atmosphère moins
agitée par les passions des partis ce conseil serait
excellent et le clergé serait prêt le suivre si, h
chaque élection qui se présente, le libéralisme des
clubs n'élevait pas un drapeau hostile aux libertés
religieuses, libertés dont le prêtre a besoin pour
remplir sa haute mission. Que les libéraux pren
nent l'engagement formel de ne présenter aux
élections que des hommes fermement attachés h
toutes nos libertés constitutionnelles des hommes
capables de les comprendre et assez indépendants
pour les pratiquer même au risque de déplaire au
pouvoir. Et le cletgé n'aura rien de plus pressé
que de quitter le terrain brûlant de la politique où
son devoir seul et une impérieuse nécessité l'ont
fait figurer jusqu'ici.
Je suis loin de rendre tous les libéraux
solidaires des excès dont je rends coupable le
libéralisme exclusif; il n'y a que le faux libéra
lisme qui soit craidre et c'est contre lui que les
catholiques doivent être en garde; ils ne peuvent
voir avec indifférence que sous prétexte de libé
raliser la Belgique on ébranle violemment les
colonnes qui supportent l'édifice social. Il est donc
naturel que les catholiques, que le prêtre surtout
cherchent par tous les moyens honnêtes qui sont
en leur pouvoir, renforcer le parti de l'ordre. Ce
parti doit avoir son point d'appui et son centre
d'action dans les chambres législatives. C'est de la
législature surtout que dépend notre avenir. Que
le clergé use de son influence, toujours bien en
tendu dans les limites de la modération il n'y a
absolument rien redire. On sait bien qu'il ne
s'agit pas ici de pressionde contrainte inorale et
autres billevesées de même espèce; toutes ces ac
cusations sont absurdes, personne n'y croit pas
même ceux qui se permettent de les répandre.
Dans les affaires électorales la conduite du prêtre
doit être noble et digne de son caractère et la
question de personne doit toujours disparaître de
vant la question de principes.
M. LOUIS-NAPOLÉON.
Les journaux sont toujours assez disposés a mal
augurer des choses. C'est ce qui arrive encore au
sujet du message du Président de la République
française.
Il y a dans ce message quelques dures vérités
plus ou moins méritées par ceux a qui elles s'a
dressent, quelque exagération d'encens pour l'on
cle, chose excusable dans le neveu, et enfin cer
taines expressions qui rembruniraient la vérité
l'avenir, si d'autres ne venaient le rassénérer.
Pourquoi donc ne serait-il pas permis au chef
de l'état de dire ce qui est évident pour chacun,
que la politique française a manqué d'une direc
tion unique, ferme, nettement formulée et qu'elle
n'a été remarquable que pour son irrésolution?
Jetez les yeux sur l'Italie. La France ne savait
que faire. Irait-elle? N'irait-elle pas? A l'assem
blée, ordres dit jour pour, ordres du jour contre.
Au ministère, l'armée, a Toulon, ordres, contr'-
ordres. Enfin les circonstances entraînent la France
en Italie. Qu'y fera-t-elle? Va-t-elle protéger ou
combattre la plus infâme des anarchies qui ait pro
fané le nom de la liberté, après 7q3 anarchie fon
dée sur l'assassinat, l'ingratitude, le vol, l'apostasie
et le sacrilège? La noble France rougit de voir son
nom humilié par l'indécision. Peu s'en faut que ses
troupes ne soient ignoblement battueset c'est
cet échec qui relevant son courage, a du la pousser
détruire une République dont l'accointance l'eût
déshonorée. Mais quel usage l'armée française a-l-
elle fait de sa victoire? En premier lieu, tous les
peuples lui en doivent des remercîments, elle a
rétabli l'autorité pontificale en principe, elle a mis
la commission des cardinaux h même de commencer
la réorganisation. Mais ensuite le rétablissement a-
t-il été généreux, complet, énergique, comme il
convient d'agir aune nation catholique et puissante?
Non, on a parlé de conditions, de négociations,
on a inspiré une légitime méfiance, et le Pape
encore Portici est un triste reproche toujours
subsistant contre la mollesse et l'hésitation Ua-
cassière, vide d'énergie, du cabinet de Paris.
Autant il fallait regretter la lettre Edgar Ney
autant il faut reconnaître que M. Louis-Napoléon
est dans le vrai lorsqu'il reconnaît que les essais de
fusion des opinions n'ont abouti qu'à une neutra
lisation de forces. Des velléités d'accommodement
avec les carbonari, avec les triumvirs, avec les
révoltés de Rome, n'ont pas seulement été prises
pour de la faiblesse, mais l'étaient en réalité, h
considérer les choses de la manière la plus honnête.
Le Président a choisi pour ministres des hom
mes secondaires. Mais les talents de premier ordre,
plus exposés l'envie, avec leurs idées person
nelles, hautaines, exagérées, ne sont pas toujours
capables d'exécuter le plus de bien.
M.Guizot a laissé disperser injustement les Jésuites
l'occasion du vol d'Affenaer; il a laissé opprimer
le Sonderbund qu'il avait encouragé; il a brisé
étourdiment le trône de son maître contre les
tables d'une orgie. Voila l'homme dont on ad
mirait la fermeté, parce qu'il avait dit h la tribune
que les injures de ses adversaires ne s'éleveraient
jamais la hauteur de ses dédains.
M. de Falloux a usé vainement ses forces sans
pouvoir faire passer une bonne loi sur l'instruction
publique. Une grande admiration est due la
franchise de ses convictions, mais il est a craindre
qu'il restera peu de vestiges de ses services.
Chacun applaudissait au beau travail de M.
Thiers sur les affaires de Rome. Le défenseur de
la propriété attachait par ce morceau d'éloquence
et de profonde raison un nouveau lustre sa re
nommée. Il mettait la religion sa place, et s'éle
vait au niveau de la civilisation moderne que les
législateurs des divers pays viennent mesurer sur
la constitution belge, en voulant le règne de la
religion sans contrainte, le règne de l'ordre, de la
liberté et du progrès social. On était dans l'extase
l'assemblée, dans les départements, au-del'a des
frontières. Le lendemain M. Thiers, comme pour
donner un soufflet au catholicisme, la civilisation,
l'ordre, h la liberté et la propriété, s'en va en
vrai moutard de Paris, se battre eo duel pour une
injure. Il va ainsi donner le démenti ses paroles
de la veille, commettant un acte d'anarchie révol
tant, mettant le moindre écart de parole sous la
menace de la mort, trafiquant d'une manière
barbare sur la propriété la plus sacrée, donnant
un scandale public d'immoralité et d'impiété, et
s'aliénant ainsi les sympathies que auraient pu lui
être acquîtes. Peut-il avoir de la dignité dans
l'administration avec de tels hommes?
Les ruiues de la révolution fumaient encore, les
hommes doivent savoir porterie poids de leur man
dat une pareille époque, ou se contenter d'une
existence modeste hors de la portée des orages, et
M. Bûchez, le président de la Constituante, supplie
en grâce un perturbateur, en pleine séance, au
moment solennel d'une invasion, de le faire mettre
la porte pour se soustraire tout enbarras et
tout danger. Il vient le déposer h Versailles, la
sincérité'lui en fesait un devoir; mais il a soin d'a
jouter qu'en pareil cas il ferait encore de même,
sans prendre leçon ni du stoïcisme républicain de
Boissy d'Anglas, ni du sublime dévouemeut de
l'archevêque.
Si des individualités nous passons 'a l'assemblée
délibérante, quelles scènes n'a-t-elle pas offertes
qui compromettaient sa dignité? Nous ne parlons
pas des coups de pied et des coups de poings, en
public et au dehors, du vacarme sauvage et des
insultes qui ont souvent entravé les discussions;
mais quelle condescendance n'a-t-on pas souvent
montré pour entendre les rêveries creuses de Con
sidérant, les folies imbécilles de Pierre Leroux et
jusqu'aux extravagances sordides de Proudhon
Tant d'écarts ne sont pas trop expiés par le verbe
allier et caustique du Président de la république.
La législature doit s'imputer que le premier ma-
gistrat du pays ne se contente pasde son appui, qu'il
ne voit pas en elle l'expression complète de la
Dation, et qu'il invoque parallèlement l'appui du
peuple.
L'autorité a certainement besoin d'être relevée,
et si les traditions de l'empire ue doivent pas être
exclusivement son programme, la déférence ex
clusive pour l'assemblée ne lui rendrait pas non
plus son prestige.
L'empire est l'idéal d'uD double programme.
C'est d'un coté les autels rétablis, l'ordre ramené,
le commerce ravivé, la France respectée, la paix
assise sur les trophées de la gloire et c'est là
croyons nous ce que Louis-Napoléon aperçoit dans
son oncle en tendant la main toutes les forces
vivaces de la République Affermissons le prin
cipe religieux sans rien abandonner des conquêtes
de la révolution. D'un autre coté, l'empire, c'est
l'oppression du Souverain pontife et de la religion
catholique par une fatale inconséquence, c'est la
félonie envers l'Espagne, le sang du duc d'Enghien
injustement répandu, le mépris des nationalités
étrangères par des guerres désastreuses, et des fa
milles indigènes par des conscriptions inexorables;
ce sont enfin tous les excès que Waterloo et Sainte
Hélèue ont expié incomplètement et réparé plus
incomplètement encore. Rien n'indique que le
Président entende accepter une solidarité quel
conque d'approbation en des événements dont
l'histoire gémit, mais sur lesquelles en politique il
est permis surtout un neveu de laisser un voile.
En résumé, apprécier les choses de près, celui
qui promet hardiment de dompter les mauvaises
passions, ne fait rien présager de sinistre, alors qu'an
même temps, il rappelle ses serments la consti
tution, et que devant la magistrature réunie, il
prononce ces paroles qui le lient spontanément:
Ce qui a survécu et ce qui nous sauve, c'est la
Religion, c'est l'organisation de la justice, de
l'armée et de l'administration.