JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
No 3355.
33me année.
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VÉRITÉ ET JUSTICE.
On s'abonne Ypres, rue de Lille, 10, près la Grande
Place et chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIT DE L'ABOVIEMEXT, par trimestre,
Ypres fr 3. Les autres localités fr 3-5o. Un n° a5.
Le Propagateur parait le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine, (insertions 13 centimes la ligne.)
7P3.3S, 24 Novembre.
L'apparition du discours du trône a été
saluée avec des transports de contentement
par le pseudo-libéralisme dont une feuille
de cette ville se montre le fidèle sectaire.
Tout était au mieux dans cette pièce gou
vernementale; chaqne phrase, chaque mot,
chaque lettre attestait l'incomparable ha
bilité, le merveilleux génie de la politique
nouvelle, et les bienfaits passés présents et
futurs, du cabinet frère-Kogier, lui don
naient de justes titres l'admiration et
la reconnaissance générale. Tel est le lan
gage que tiennent le Progrès et quelques
autres journaux libéràtres au sujet du
discours d'ouverture de la présente session
législative. Celte élévation de pensées du
Progrès l'endroit du système d'adminis
tration suivi jusqu'à ce jour par le cabinet
du 12 août 1847, n'est point commune
tous les libéraux indistinctement. Un dé
puté de Namur entre autres, qui n'est
point suspect de cléricalisme, loin de jeter
la tète du ministère de slupides coups
d'encensoir, tout en exprimant l'étonne-
ment que lui cause son mutisme l'en
droit des finances, lui reproche d'être resté
en dessous de sa mission sublime. La
chambre, a dit M. Lelièvre, dans la séance
du 19 Novembre, est issue d'élections qui
se sont faites au cri d'économies; aussi long
temps qu'on'n'entre pas dans celte voie,
plus avant qu'on n'y est entré jusqu'à ce
jour, on n'aura pas répondu complètement
la confiance du pays.
Au risque d'encourir, de par le journal
cartonné, le reproche de faire partie de la
monstrueuse coalition occulte, nous ai
mons déclarer que sur ce point, nous
nous trouvons parfaitement d'accord avec
M. Lelièvre. Nous félicitons même le re
présentant de Namur, d'avoir en cette
occurence servi si bien les intérêts de la
nation entière. Quoiqu'on en dise. Le peu
ple veut de l'économie, afin de ne plus se
trouver dans la nécessité de concourir
de nouvelles charges. C'est dans cette vue
qu'il a voulu essayer de la politique actu
elle; c'est dans cette intention surtout qu'il
s'est prêté si généreusement et avec tant
de spontanéité l'organisation de la garde
civique, dont la pratique est notoirement
contraire nos mœurs et notre caractère.
Eh bien, nous le demandons aux élec
teurs quidans le but d'alléger le fardeau
des dépenses publiques, ont accordé leurs
suffrages des candidats d'un parti qui se
targue de vouloir toute force, introduire
plus d'économie dans la répartition des
deniers de l'Etat; nous en appelons au
témoignage de cette foule de citoyens qu'un
ardent désir de réduire les dépenses de
l'armée a fait endosser jovialement l'uni
forme militaire, ont-ils bien se louer des
procédés économiques du nouveau minis
tère, et le régime libéral, comme aux jours
passés, captive-t-il encore leurs goûts et
leurs sympathies Dans quelques mois, le
pays sera appelé se prononcer, sur cette
question importante; le temps et les leçons
qu'il donne, fera apprécier toute la gravité
du devoir qui incombe chaque citoyen.
La vérité bien de personnes déjà se laisse
entrevoir, et le voile des préjugés com
mence disparaître quoiqu'on en fasse le
Progrès et ses acolytes.
Une des qualités qui distinguent les par
tisans du soi-disant libéralisme, c'est un
gout exquis de la langue française. M.
Carton quand il arriva aux affaires de
notre district, débuta par de curieux pata
quès. M. Boyaval alors son "collègue au
commissariat de Bruges, amusa pareille
ment le public de ses cacographies. La
presse belge s'est occupée du modèle d'ex
ercises que donna M. De Jaegher dans
son récent discours. La réponse l'adresse
formulée par M. Lehon a valu la cham
bre toute une séance pour la rendre gram
maticale et intelligible. En présence de
ces exemples cités entre mille autres; il
est bien rationnel que la libéralerie s'en
vante: c'est évidemment dans ses rangs
que figurent les spécialités les plus re
marquables.
En ce moment où le bétail se vend un
prix si basque nos cultivateurs se plaignent
de ce chef, on est étonné que le débit de
la viande ne subit aucune baisse. Dans
l'intérêt des classesjaborieuses ne serait-il
point possible, que l'autorité remédiât
cet état des choses
Le tableau que nous avons publie' h la suite d'un
article de Poperingbe touchant les résultats du
concours de l'instruction primaire était complète
ment exact. Le concours comprenait dans UDe
même circonscription les villes et le plat pays:
si donc l'école communale d'Ypres n'y figure pas,
c'est que ses élèves n'ont remporté aucun succès
dans la lutte. Dès lors on reconnaîtra facilement
qu'il valait mieux après tout que la distribution
des prix fut solennisée Poperinghe qu'ici. Eu
bons citoyens, nous n'assisterions toujours qu'à
regret une humiliation de la cité. Le Progrès
qui jouit des avantages que lui assure le patronage
de l'Hôtel-de-Ville pourra probablement satisfaire
avec plus de détails la curiosité du correspondant
de Kruyp in d'Aerde. Maison ne saurait donner
assez d'éloges des instituteurs de village comme
ceux de Dickebusch et d'Elverdinghe, qui savent
par les progrès de leurs lauréats prendre le pas sur
l'enseignement primaire des villes. Nous sommes
persuadé que la religion et la vertu régnent dans ces
écoles au niveau des connaissances de la vie civile
la perfection d'un travail accompli obtenue dans
le nombre des points pour la doctrine chrétienne
et la moralité sans reproche des maîtres nous eu
garantissent l'assurance.
UN GRAIN DE COQUETTERIE.
Un jeune aspirant l'enseignement primaire
s'était procuré crédit une élégante redingote
chez le tailleur de son village, dans l'espoir d'une
nomination prochaine et sous promesse d'acquitter
ensuite des compte mensuels de cinq francs. La
nomination ne tarda pas d'arriver. Le jeune homme
ne put dès les premiers mois satisfaire son enga
gement, cependant il demanda des délais et en
voya d'abord sept francs, puis trois francs. Il res
tait dû Une trentaine de francs. Un jour le précep
teur eut l'idée bien naturelle d'aller voir ses amis
l'endroit natal. Quelques lieues de distance, plu-
mois d'absence, et puis reparaître en homme de
qualité et en fashionable, c'était bien attrayant
la fleur du bel âge. Un bruit se répand dans la
commune, l'instituteur R. est arrivé. Pendant qu'il
faisait gravement ses visites officielles M. le Curé,
au Bourgmestre, au Vicaire, son collègue dans
l'enseignement. Le même bruit de sa visite avait
également pénétré chez le tailleur. Comment! il
arrive va partout et ne vient pas icison devoir
était de venir d'abord chez son créancier. Ainsi
devisaient le tailleur et sa femme les mots Je
mauvais payeur et d'ingrat roulaient sur les lèvres.
Ne pouvant contenir leur impatience^ ils envoyent
quelqu'un le mander. Chez le Curé, il était parti.
Il n'était plus chez le Bourgmestre. Le médecin ne
l'avait pas encore vu. Chez l'Échevin, il venait de
sortir. Partout on arrivait trop tard ou trop tôt.
Cependant le jeune homme rayonnant de bonheur,
après avoir embrassé ses vieux parents, traversait
gaîment le village, bras dessus bras dessous avec
un ami, fumant le cigare, l'une main gantée, l'au
tre nue pour brandir la cravache. On passe sans
s'en apercevoir devant la maison du tailleur au
guet au coin de sa fenêtre, et attendant le retour
trop lent de son émissaire. Tenez, dit la femme,
voilà le fréluquet qui passe sans faire semblant de
nous voir. C'est comme s'il ne nous devait pas un
sou. A savoir si nous ne sommes pas ses débiteurs
pour avoir fait parader notre ouvrage au dos d'un
si beau Monsieur. Le tailleur frappe la fenêtre,
la femme ouvre brusquement la porte et crie M.
R., un mot s'il vous plait. R. se détache du bras
de son ami et*entre non sans quelque inquiétude.
I! n'eut pas le temps de faire des excuses. La porte
se referme. Où est mon argent? Mais j'ai