LE GOUVERNEMENT ROGIER-FRÈRE,
DEMASQUE.
Nous trouvons dans l'Univers une lettre
de Rome qui donne des renseignements
du plus haut intérêt sur les démarches
faites près du gouvernement pontifical par
nos ministres. On lit dans ce journal:
LES GASCONS DE 31. ROGIER.
pelle M. de Vrière) a respecté Diest le verdict des
électeurs, les droits de la presse et la liberté indi
viduelle
Plainte a été portée devant la justice. Nous es
pérons qu'elle saura faire son devoir et qu'elle
résistera aux efforts qu'on fait en ce moment auprès
d'elle pour étouffer cette scandaleuse affaire.
Le système d'intimidation suivi Diest, et dont
M. Havermans est la principale victime, est con
traire tous les principes constitutionnels comme
aux droits les plus sacrés garantis aux citoyens
belges. Là comme ailleurs nous le signalerons
l'indignation publique, car c'en est fait chez nous
de la liberté si de pareils excès peuvent se produire
impunément.
Depuis quelque temps le ministère, sous pré
texte de réglementer le temporel du culte, a
envoyé ici des dépêches et des pièces dont le but
est de préparer le terrain des conventions fu
tures conclure avec Rome, et dont le résultat,
comme vous l'allez voir, serait d'altérer fonda
mentalement cette belle constitution belge, où la
liberté de l'Égli se avait trouvé jusqu'ici un sur
asile. w\
Les objets que ces conventions devraient com
prendre, d'après les vues du cabinet de Bruxelles,
sont les suivants
i° Intervention du gouvernement dans la cir
conscription des diocèses;
2° Abolition de l'évêché de Bruges, érigé irré
gulièrement, selon le cabinet belge;
3° Prétention du gouvernement d'exercer une
influence nouvelle et plus étendue sur la forma
tion du chapitre des cathédrales, et sur l'admi
nistration du temporel des séminaires
4° Inamovibilité des desservants;
5" On est allé, m'assure-t-on, jusqu'à s'occuper
d'une intervention' indirecte du gouvernement
dans la nomination des évèques, malgré les pres
criptions contraires et si formelles de la Constitu
tion Belge; mais je ne puis pas donner sur ce
dernier point une assurance aussi positive que
sur lès autres, quoique la source où j'ai puisé ce
renseignement soit très respectable aussi.
Je dois ajouter que cette politique du ministère
Rogier-Frère n'a pas trouvé dans M. Henri de
Brouckere, ministre belge ici, un organe sympa
thique et un soutieu servile. Tout en remplissant
son devoir avec loyauté, il n'a pas, dit-on, laissé
ignorer au cabinet belge ce que cette politique lui
préparait de mécomptes.
Lorsque le souverain pontife prononça son allo
cution, il connaissait tous ces faits; il avait la con
viction que la loi sur l'enseignement moyen n'était
pas un acte isolé; il savait que cet acte se rattachait
au système inauguré déjà contre la charité catho
lique et au plan projeté qui menace le ministère
ecclésiastique dans tous ses moyeus d'influence et
dans tous ses modes d'organisation.
Des propositions formelles n'ont pas été faites
la cour de Rome sur les points indiqués plus haut,
mais M. d'Hoffschmidt a fait sonder les intentions
du Vatican.
Il était donc temps que Pie IX parlât.
roaag-T-
On lit dans le Courrier de Louvain
Entre dix et onze heures du soir, un drapeau
rouge, consistant en un grand mouchoir rouge,
attaché une perche a été porté suivi de la lie du
peuple dans la rue de Diest. La bande, dans la
quelle se trouvait cet étendard, d'affreuse mé
moire, s'est arrêtée pendant assez longtemps devant
la maison de M. Schollaerl. De là, le drapeau dont
il s'agit fut promené rue de Namur, et agité pen
dant quelque temps devant notre bureau. Nous ne
savons ce qu'il est devenu plus lard, mais on a dit
que vers minuit la police s'en était emparée.
Les gens ivres, qui accompagnaient le drapeau
criaient bas les prêtres, bas la soutane,
bas les professeurs, vive la République, vive
Sc.hollaert, etc., dans la rue de Diest, sur la Grand'
Place, rue de Namur, Montagne du Collège, Vieux-
Marché, etc.
Arrivés devant la demeure du rédacteur du
Courrier ces mêmes hommes ont crié: bas le
rédacteur du Courrier, le rédacteur du Cour
rier la lanterne, etc.
M. le vicaire V.. de T.., appartenant une
famille honorable de notre ville, se rendant au
chemin de fer, accompagné de plusieurs de ses
amis, vers sept heures du soir, fut hué diverses
reprises, lorsqu'il tiaversait la Grand'Place. D'au
tres ecclésiastiques ont également été insultés au
même endroit et vers la même heure, sans que la
police ait reprimé ces indignes manifestations.
Dans le courant de la même journée on enleva
son chapeau et ou injuria AI. l'abbé C. dans la rue
de Bruxelles.
M. l'abbé V.. fut attaqué au marché au Beurre
et il dut se défendre contre ses agresseurs.
On insulta aussi M. le curé A., de C., apparte
nant également une des familles les plus hono
rables de Louvaiu dans le courant de la même
journée.
Si ces faits ne sont pas suffisants, nous en ferons
connaître encore plusieurs autres.
On envahit l'injure et la menace la bouche
plusieurs maisons, notamment la société dite Het
Kerssouwben, rue de Bruxelles, ainsi qu'un esta
minet rue dite Kraeke slrael, dans lequel on s'est
porté des voies de fait contre les personnes pai
sibles qui s'y trouvaient. A., préparateur l'Uni
versité, généralement estimé par sa modération et
la douceur de son caractère, a été l'objet d'actes
de violence, uniquement cause des fouctions dont
il est chargé.
M. le bourgmestre dut lui-même interposer son
autorité dans la nuit du i1 pour faire cesser enfin
ces scènes dégoûtantes.
Lorsque Henri III, redoutant le pouvoir d'un
sujet dont l'ambition menaçait le trône, voulut
son tour s'entourer d'un cercle d'épées fidèles pour
les opposer aux rapières des gentilshommes de M.
de Guise, il écrivit d'Eperuon de lui envoyer de
son gouvernement une pacotille de Gascons pour
défendre sa prérogative royale et maintenir la race -
chancelante des Valois. D'Èpernon, enchanté de se
débarrasser de quelques douzaines de ces gentils
hommes qui avaient les dents aussi longues que
leurs estocs, obéit avec plaisir, et quelques jours
après les suisses de Henri III, fourbus et surmenés,
pouvaient se reposer de leurs fatigues et remet
taient aux beaux-fils de Garonne la garde du
Louvre et celle de sou illustre locataire.
M. Rogier, de plus en plus malmené par une
opposition essentiellement belge, voyant chaque
jour saper un de ses appuis mettre nu les ficelles
de son génie gouvernemental et dévoiler le dessous
de ses cartes, a senti le besoin de renouveler son
personnel de porte-queues et de laquais de plume.
Ses suisses ordinaires, composés d'israélites prêtant
de la gloire la petite semaine, de publicistes fran
çais, éclopés, fourbus et quasi-abrutis de chanter
depuis trois ans un hosanna peu varié, ses Suisses,
disons-nous, étaient sur les dents. Il avait bien
aussi quelques Gageons, chefs d'attaque dans les
chœurs ministériels; mais ces coryphées éreintés
rappelaient singulièrement ces jouvenceaux sur
annés et édentés qui chantent le vin, le jeu et les
belles dans nos théâtres. Et puis, Indépendance
ne pouvait suffire tout, ni parer toutes les esto
cades et les bottes fourrées qui atteignaient chaque
jour son généreux patron. Force était doue d'aug
menter le personnel des gladiateurs ministériels et
d'ajouter quelques nouvelles sérinettesà celles qui
fonctionnent depuis le 12 août, au profit de la po
litique nouvelle.
Ces nécessités d'une situation qui devient cha
que jour plus périlleuse et plus tendue, ont fait
prendre au ministère la détermination d'augmenter
le personnel de ses scribes gascons. Or, comme
Paris possède parmi ses spécialités celle du publi-
ciste nomade, de l'écrivain pour tout faire on a
naturellement songé cette ville si féconde et
Triptolèmes gages. Ou attend donc chaque jour
une nouvelle pacotille de Gascons, lesquels, réunis
ceux que M. Rogier possède déjà, compléteront
ce chœur ministériel dans lequel, pour l'honneur
du pays, on ne comptera pas un seul Belge!
Alexandre Dumas a fait, dans ses Quarante-
Cinq, un charmant chapitre sur le plaisant équi
page des Gascons recrutés pour le service de Henri
III leur entrée Paris efflanqués comme des
lévriers, affamés comme des Suisses, et râpés comme
des faiseurs d'acrostiches, il ne faut que deux mois
ces braves aventuriers pour être bien en point,
vêtus de neuf, roses et joufflus comme des cha
noines. Ainsi en sera-t-il des publicistes nomades
recrutés par M. Rogier; vous les reconnaîtrez de
main leurs bottes soupapes, leurs collets hui
leux,leurs alluresdoucereuseset caressantes; dans
deux mois d'ici, remplumés et repus, ils auront le
verbe haut, la phrase insolente, et en parlant de la
Belgique, ils diront notre chère patrie, ni plus ni
moins que les Gascons de l'Indépendance.
Nous en sommes bien fâché pour M. Rogier,
mais ces auxiliaires dont il bourre en ce moment la
presse de province ne feront que hâter le moment
de sa chute. Ses Quarante-cinq valets de plume
ne lui ramèneront pas l'estime du pays qu'il a per
due par sa morgue et ses prospectus de banquiste;
et puis, lorsqu'un pouvoir n'a plus pour le dé
fendre que des dévouements mercenaires, des Suis
ses ou des Gascons, il est sur la route qui conduit
Cherbourg s'il est roi, sur celle qui mène aux
dîners 32 sous, surtout si la fortune s'est amusée
un jour faire un ministre d'un débitant de gé
rondifs et de participes. Sancho
«atourc»
L'aplomb des Gascons de Y Indépendance, par
lant de leur patriotisme, de leur amour pour la
Belgique, disant chaque instant notre nationalité,
notre liberté, nos institutions, nous rappelle l'his
toire de la servante d'un brave curé des Ardeones.
Le jour où la servante entra au service du curé,
elle se montrait respectueuse, soumise, prévenante,
et chaque fois qu'elle avait s'occuper de la basse-
cour du curé, elle disait
Monsieur le curé, je vais aller donner
manger vos poulets.
Un mois se passe, Catherine se dépouille peu
peu de ses formes polies «t.obséquieuse; elle se fait
appeler trois fois avant de répondre, et lorsqu'elle
arrive, elle dit d'un ton de mauvaise humeur
Pardieu monsieur le curé? ce n'est pas ma
faute si je ne vous ai pas entendu j'étais occupée
donner manger nos poules.
Deux mois s'écoulent encore, Catherine a le
verbe haut et insolent. Elle fait manger au curé les
choses qu'elle préfère, sous le prétexte que cela
fera du bien monsieur elle chasse les pauvres
du presbytère où ils trouvaient toujours un bon
accueil et une aumône. Elle ne cire plus les sou-
liers du curé que le dimanche; elle impose la
fabrique ses Deveux pour en faire des enfants de
chœur, elle fait de son frère le serpent de la pa
roisse, et lorsque le curé habitué dîner une
heure, se plaint du retard qu'elle apporte ses
repas, elle lui répond d'un air insolent
Ma foi, je ne peux pas être partout la fois,
la cuisine et la basse-cour, car eufin il faut bien
que je donne manger mes poules.
Ainsi ont fait les Triptolèmes gascons venus de
France pour nous faire de l'esprit public prix fixe
et se charger de la direction de nos affaires.
Dans la première année,ils disaient humblement:
Vos libertés, votre nationalité, votre indé
pendance.
Un peu plus tard, ils disaient, le poing sur la
hanche nos libertés, notre nationalité, notre in
dépendance.
D'où nous concluons qu'ils ne resteront plus
longtemps sans dire ma liberté, ma nationalité,
mon indépendance!
Pendant quelques années ,1e bon curé subit les