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JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N« 3491.
34»"' année.
7P3.3S, 15 MARS.
Munificence de la Politique Nouvelle.
Comme il ne dépenderait pas de la
presse ministérielle de nous transformer,
paisibles habitants de la ville d'Ypres, en
favoris du cabinet Rogier-Frère, il est plus
que jamais opportun d'énumérer ici quel
ques-uns des bienfaits matériels que nous
lui devons.
D'abordforce promesses où nos hom
mes du pouvoir s'engageaient d'honneur
sauver les Flandres! Survinrént deux
emprunts des mieux conditionnés, dont
l'un ne comportait que douze millions et
quelque chose, et l'autre n'allait guère au-
delà de vingt-six millions.
On s'exécuta de bonne grâce et nos sau
veurs, sans doute pour faire face aux char»!
ges énormes dont le trésor se trouvait de
plus en plus obéré, se mirent abaisser
de un million et demi les receltes du rail-
way de l'État. El cette entreprise colossale,
laquelle tout le monde est jugé apte
subvenir, mais dont quelques villes privi
légiées prélèvent les profits et les avan
tages, entraine chaque année une perte
sèche de sept neuf millions.
Différentes mesures encore, n'ayant rien
de connexes avec les intérêts des masses
(telle que la suppression du timbre des
journaux, et ainsi de suite) entraînèrent
un découvert également de un million et
demi.
Enfin l'abolition des droits d'entrée sur
les céréales étrangères ont tari une des
premières ressources du trésor; tandis que
LE DUEL DU CURÉ.
les déplorables entraves portées la liberté
de la bienfaisance compromettent profon
dement le bien-être de la population pau
vre et ouvrière. Depuis l'installation de
la politique nouvelle, la situation s'est em-
pirée de quarante millions.
Il nous restait, du moins nous Yprois,
la ressource d'une assez forte garnison.
Mais la désorganisation de l'armée n'est
déjà plus un simple projet dans le camp
libéraliste. Bientôt (tout au moins le fait
pressentir,) malgré les efforts patriotiques
des représentants conservateurs, le cabinet
renforcé de ses fidèles enlèvera notre
ville cette dernière et unique ressource.
Ce n'est pas tout, et les infatigables Au-
tomédons du char ministériel n'auront
garde de s'arrêter en aussi beau chemin.
Voici ce que, passés quelques jours, pu
bliait l'Émancipation, feuille libérale mo
dérée
Nous avons dit qu'il était sérieusement
question de l'exécution de plusieurs grands
travaux d'utilité publique, avec le concours
du gouvernement.
Voici entr'autres ceux dont on parle
1° Le chemin de fer de Namur Arlon;
2° La ligne directe de Bruxelles Namur
avec embranchement sur Louvain et sur
Charleroy
3° La bifurcation d'Arlon sur la France
et sur l'Allemagne
4° La dérivation de la Meuse;
5° Un chemin de fer direct de Bruxelles
Gand;
6" Le chemin de fer de la vallée de la
Dendre.
Un emprunt serait conclu, sous la ga
rantie de l'Etat. Les différentes compagnies
demanderesses en concession participe
raient l'emprunt.
La compagnie du Luxembourg ferait
pour son compte le canal de l'Ourthe qui
est sa propriété.
Voilà donc ce que nous réserve la po
litique nouvelle! Honnêtes Flamands, que
peut-être ont un instant fascinés les belles
protestations du cabinet du 12 août, déliez
de bonne grâce les cordons de vos bourses
épuisées. Vos frères Wallons comptent sur
vous et sur elles!
- VÉRITÉ ET JUSTICE.
Ou s'abouue Ypres, me de Lille, 10, près Grande
Place, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRII DE LMBOSVEMEITpar trlnicHtre,.
Ypres fr 3. Les autres localités fr 3 5o. Un u° a5.
Ee Propagateur parait le SAMEDI et lé MERCREDI
de chaque semaine. (Insertions 19 centimes la ligne).
(I i'.
(Suite.)
Cette scène ne pouvait se prolonger longtemps
sans tourner au grotesque, au détriment de celui
qui en avait été la cause première. Valentin le
comprenait et pourtant il ne savait par quel côté
prendre l'initiative.
Le curé eut pitié de son embarras et lui vint
en aide.
Monsieur, lui dit-il gravement, j'ai promis
de venir me mettre vos ordres aussitôt après mon
dîner; je viens remplir ma promesse.
Le jeune homme hésita encore; il paraissait en
proie une vive agitation intérieure. Tout coup,
il prit bravement son parti, regarda son adversaire
en face, et, d'une voix bien accentuée, il lui parla
en ces termes
Monsieur le curé, j'ai eu l'occasion de prouver
que je suis brave, et que je ne crains pas la mort
mais cela ne me suffit pas, et je vous avoue qu'a
l'heure qu'il est je donnerais deux doigts de ma
main pour que vous en fussiez convaincu.
Ce n'est pas nécessaire, reprit tranquillement
l'abbé; j'en ai la certitude.
Comment cela?
Vous êtes jeune, vons êtes français, fils de
militaire, et j'ai l'habitude de reconnaître un brave
la mine.
Ne me flattez-vous point? demanda le jeune
homme, vivement impressionné.
Je n'ai pas de raison pour cela, dit en sou
riant l'homme d'église.
Puisqu'il en est ainsi, je ne veux pas tarder
davantage reconnaître que je vous ai gravement
offensé ce malin je vous en fais mes excuses, et je
suis prêt les renouveler en présence des personnes
qu'il vous plaira de faire venir ici.
C'est inutile, monsieur, répliqua le curé;
vous oubliez que notre affaire doit s'arranger sans
témoins.
Puis, après avoir regardé fixement celui qui ve
nait de s'exprimer ainsi
Par arrêté royal du 8 mars, le sieur E. Dindorff,
surnuméraire de l'enregistrement et des domaines
dans la Flandre occidentale, est nommé receveur
de l'enregistrement et des domaines a Ninove.
M. Pecsteen-De Vrière a obtenu Furnes sur
5io votants 3o4 voix.
COUR D ASSISES DE LA FLANDRE OCCIDENTALE.
Audience du il mars. Auguste Lannoye,
âgé de 20 ans, né k Vladsloo, accusé du chef
d'incendie, a été condamné a mort.
Audience du 12 mars. Marie Roose, âgée
de 19 ans, de Hoogstade, prévenue d'avoir porté
un coup de couteau son frère Charles Roose, âgé
de 16 ans, la suite duquel il est mort.
Voici quelques détails sur cette affaire
L'accusée est une petite bossue d'une constitu
tion faible et cbélive qui, k cause de sa difformité,
était fréquemment exposée aux railleries et aux
mauvais traitements de ses frères .et sœurs Charles
surtout lui portait peu d'affection.
Le 5o juin, l'accusée de la victime étaient seuls
la maison, les parents et les autres enfants étaient
allés au festival d'Alverçnghem.
Vers 6 heures de l'après-midi Charles vint près
de sa sœur et lui ordonna de préparer le café. Marie
s'y refusa donnant pour motif que sa mère le lui
avait défendu. Charles insista, et sur un nouveau
refus il se mit en colère, s'arma d'une chaise et se
lança vers sa sœur. C'est en ce moment qu'il reçut
la blessure laquelle il succomba le 2 juillet suivant.
Marie Roose avait-elle porté volontairement le
coup, l'avait-elle porté en état de légitime défense,
C'est bien, jeune homme lui dit-il avec effu
sion; c'est bien, ce que vous venez de dire lk. Votre
démarche me réconcilie entièrement avec vous, et
de plus vous assure mon estime. Touchez là, j'ai
tout oublié.
Et, en signe de paix, il lui tendit une main que
Dubreuil se hâta de saisir et de presser fortement.
C'est ainsi qu'un galant homme répare ses
torts, reprit le curé. Mais parlons d'autre chose.
Votre père, m'avez-vous dit, a été sous-officier de
dragons; savez-vous dans quel régiment?
Dans le 2e.
C'était précisément le mien. J'ai beaucpup
connu votre père.
En mêmetempsl'abbéseleva,ouvrit un tiroir,tira
une lettre d'un carton et la tendit au jeune homme:
Voici ce qu'il m'écrivait quand j'étais en
Algérie en qualité de capitaine d'état-major.
J'avais k cette époque, quitté les dragons pour
suivre un général, ami de ma famille, qui désira
m'avoir près de lui. Vous étiez bien jeune, alors.
Tenez, lisez vous-même.