JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. 9 l No 3511. 34me année. 7PB.ES, 24 MAI. Le Receveur des contributions de la ville prévient les contribuables qui jusqu'à ce jour n'ont pas encore payé les termes échus, de vouloir bien le faire dans le cou rant de ce mois au plus tard, en les préve nant que passé ce délai ils y seront sommés officiellement par les voies ordinaires. Bien des fois nous avons mis nu les caractères du libéralisme tel qu'il domineen Belgique. Il nous a fallu comme bien d'au tres tout le courage du dévouement qu'in spire l'amour de la patrie pour combattre, dans la mesure de notre faiblesse les dan gereux sophismes qui sous un nom brillant entraînaient les masses comme vers une doctrine nouvelle, une politique nouvelle, des progrès sociaux, avant coureurs d'une prospérité jusqu'ici inconnue. La grande majorité du peuple belge est loin d'être guérie encore de cet engouement. 11 ne faut pas cependant que les hommes qui n'ont pas été dupes du libéralisme, ou qui sont déjà revenus de ses déceptions, déses pèrent de l'avenir. Le libéralisme est essentiellement étran ger et par conséquent transitoire en Bel gique, il est d'importation française. 11 n'est que le résultat de cette manie qu'a une petite nation de singer les allures d'un état plus grand placé coté d'elle. Voltaire est le créateur de l'esprit libéral moderne. Aidé par les athées et les matérialistes de la fin du XVlll" siècle, il le répandit en France où il produisit promptement ses II NE DÉESSE. effets, et de là dans les contrées voisines. La contagion a pénétré plus jjard en Es pagne et en Italie. Napoléon et Louis-Phi lippe ont eu le tort de le caresser. La Belgique peut pendant un certain temps, et ce temps court dans la vie d'une natioù, est de suite long dans la vie de l'individu, subir le joug du (despotisme moral qu'exerce successivement de plus en plus le libéralisme; mais ce joug son bon sens finira par le secouer. Sous Guil laume les intelligences asservies aux con ceptions voltairiennes étaient déjà assez nombreuses pour former un parti. Il n'a vait cependant pas la majorité, comme il parut par le rejet de la loi fondamentale, que le monarque hollandais (pt réduit imposer arbitrairement, contre le gré de la majorité. Il grossit adroitement le parti, qu'à son point de vue il exploitait dans l'intérêt futur du calvinisme, en mettant les fonctionnaires aux prises avec l'auto rité religieuse par une questionde serment. Chose étrange! lorsqu'un pouvoir anti religieux ne sait comment tourmenter les Catholiques, le serment est toujours une des premières armes dont il s'empare dans ce but. De sorte que lorsqu'on voit une lutte surgir au sujet du serment, on peut dire presque coup sûr que là dessous est le travail mystérieux de l'impiété, et qu'il y a se tenir sur ses gardtaàr^ L'abus des choses de religion est un des plus puissants moyens de faire leurs af faires pour ceux qui se moquent sous cape de la religion, et se soucient peu d'une conduite en opposition avec leurs phrases ronflantes d'à propos. Guillaume affectait beaucoup de respect pour la religion; mais en même temps il éloigna des emplois une foule de bons ca tholiques, il traqua les évêques, s'efforça de fonder un clergé schismatique, et ban- nit les prêtres de renseignement public. La parité' de situation entre cette e'poque et ce qui se passe actuellement, est fort remarquable. Dévergondage de la presse ministérielle contre l'épiscopat, éloigne- ment systématique du prêtre des chaires d'enseignement, tentatives de ressusciter quelques difficulté de serment, rien ne manque. Peines inutiles l'esprit véritablement belge se réveilla en 1830, et la toile d'a raignée qu'avait si artistement tissue le despotisme disparut. Une fraction des libéraux, qu'on appelait unionistes fut elle-même indignée des roueries du système hollandais. Mais au fond les sentiments voltairiens des libéraux restèrent les mêmes, et leur nombre s'était augmentéde tous ceux qu'avaient pervertis les menées corruptrices du gouvernement déchu. Le patriotisme qui prend facilement le dessus sur beaucoup d'autres considé rations dans les moments critiques triom pha tant que dura la tourmente politique; mais une fois cette ardeur calmée, et le danger passé, on se trouva en face du li béralisme plus fort et plus hostile au culte que jamais. Les effets s'en sont bientôt dé roulés, le congrès libéral été l'apogée de l'énergie libérale; depuis lors il semble se manifester quelque décroissance que les circonstances aciueHes peuvent rendre plus rapide. II s'ensuit que les Catholiques ont maintenant le plus grand intérêt de s'unir, de sentendre, d'être attentifs ef de se con certer. D'après les informations qui nous par viennent les racôleursdu Collège des 18,850 francs ne se bornent plus offrir aux bour geois l'admission gratuite de leurs fils dans l'établissement communal, mais leur zèle les a réduit déjà, présenter outre l'avan- VÉRITÉ ET ll'STICE. On s'abonne Ypres, rue de Lille" io, près la Grande Place, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume, PRIX DE L'AIIOVM.Ul \Tpar trimestre, Ypres fr 3. Les autres localités fr 3 5o. Un n° a5. Le Propagateur parait le SAMEDI et le MERCREDI de chaque semaine. (Insertions I* centimes la ligne). Il arrive souvent que les voyageurs de Grenoble Lyon s'interrogent, s'ils ne sont pas Dauphinois, pour savoir le nom d'une ruine remarquable qu'on aperçoit de la hauteur de Saint-Pierre. Dans ce riche et pittoresque pays, les yeux sont émerveillés par tant de magnificences, la nature s'y montre la fois si capricieuse et si grandiose, tantôt coquette et tantôt impo sante, selon l'éclat du jour ou les rigueurs de la saison, qu'il faut vraiment se connaître en paysage pour donner, en fuyant, un regard cette ruine, regard toujours aocompegué d'un mélancolique sourire, sourire toujours suivi d'une pensée chagrine. L'Isèrecette rivière limpide dont les rives sont de fleurs ou de granit, coule en circuits bigarres au fond de la molle vallée que dominent de nombreuses éminences, premiers gradins de ces monts altiers dont la cime perce des nuages immobiles. Sur l'une de ces collines que couvrent la vigne et le mûrier, qu'ombragent des maronniers centenaires, on voyait autrefois, ou voyaitil y a soixante ans peine, un vaste châ teau, le château de Pavydont les vieux souvenirs, chéris du chroniqueur et du poète, remontaient la féodalité. Les guerres de nationalité, les guerres de religion avaient, tour tour, appelé sar les murs de ce castel l'homme d'armes intrépide, l'arbalétier prudent et l'habile arquebusier; l'inquiet et fa rouche baron des Adrets, le preux et loyal Bayard, le grand Lesdiguières et des capitaines moins illustres, avaient ou assiégé ou défendu les six tourelles de ce manoir l'écusson sans tache, aux fossés larges et profonds. Le château de Pavy avait longtemps appartenu uue grande famille aussi noble par ses vertus que par sa vaillance, une famille qui avait gravé son nom dans l'histoire de la province par des hauts-faits, et dans le cceur de tous par des bontés. Aujourd'huiet depuis plus d'un demi-sièclenous l'avons dit, te château-fort n'est plus qu'une ruine! U ne reste plus vestige de son corps de logis priueipal des six tours orgueil leuses qui formaient sa ceintureou ne voit plus qu'un pan de muraille fendu en fourchepenché sur sa base et menaçant les chèvres, les brebis que de petits pâtres insoucieuximprq- dens, laissent rôder dans l'herbe vigoureuse que nourrit sa poussière. De la chapelle, des portails, des fossés, desebeminsde ronde, des salles d'armes, rien n'a survéou, rien n'est debout, rien n'est étalé; tout a disparu Ou dirait qu'une avalanche de ces formidables rochers dont la montagne est hérissée a passé sur ce fier monument du moyen-âgel'a écrasé, l'a emporté, ne laissant d'autre gage de sa colère qu'un débris, un seul! et le néant, et le silence, et l'image de la mort. Ce n'est pas un tressaillement de la montagne qui a commis cette iniquité, ce n'est pas la foudre qui a frappé la maison des justes, c'est l'homme lui-même, l'homme dont les mains la borieuses l'avaient édifiée jadis! C'est l'homme qui, saisi de vertige un jour, a secoué la torche inoendiaire sur les lambris de oe château, l'a miné, l'a fait sauter, l'a dépouillé pierre par pierre, et a dansé, sur le théâtre de ses dévastations, de hideuses farandoles, comme ces damnés qui, selon l'i mage du poète payen, dansent aux enfers pour s'étourdir sur l'éternité de leur châtiment et l'énormité de leurs crimes. Vers la fin de 1788, le château était habité par le marquis de Pavy, vieillard plus que septuagénaire et aveugle, et par la comtesse de Pavy jeune femme d'une grande beauté, d'une douceur angéliquemariée depuis peu de temps au petit-fils du marquis. Pendant que le comte commande son régiment dans l'une des places frontières du Nord, sa femme partage ses soins entre Dieu qu'elle sert avec piétéson vieux père qu'elle aime aveo respect et tendresse, le souvenir de son mari qu'elle bénit avec amour, et les pauvres qu'elle protège pour plaire ces trois idoles de son cœur, pour obéir sa propre charité. Mme de Pavy, bonne pour tout le monde, a cependant pris en alfeotion particulière, privilégiée la famille de l'un de ses fermiers nommé Étienne Guiraud. Lorsqu'elle profite d'un moment de loisir, soit pour faire une promenade pied, travers champs, donnant le bras son père ou suivie d'un domestique, il est rare qu'elle ne prenne pas pour but de oette promenade la ferme du père Guiraud; elle y est si bien, si cordialement accueillie, qu'elle y revient sans cesse. Le père Guiraud est un homme tout rond, comme on dit, une sorte de bourru bienfaisant pour sa femme, sa fille et ses valets de labour; mais, pour la belle châtelaine, il se met avec étude en grands frais d'urbanité, en grande dépense de cérémouie; et sa courtoisie passablement bouffonne divertit la comtesse et lui donne rire, sans malice toutefois. Le fermier a quarante-cinq ans environ il est assez lourd, assez gauche, maistiuet madré comme un paysan du Dauphiné, mais robuste comme oes hercules qui courent les foires des petites villes, jouant aux osselets avec des poids de dix kilos.

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Le Propagateur (1818-1871) | 1851 | | pagina 1