JOURNAL D'YFRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
9
No 3515
i
34me année.
7PB.ES, 7 JUIN.
Des plaintes nous arrivent de différents
côtés sur ce qu'un marchand d'estampes,
(peu décentes) sous prétexte de recom
mander de porte en porte sa marchandise,
se permet en l'absence du maître de la
maison des actes de la plus haute incon-
vénartee. Nous croyons de notre devoir de
signaler le fait l'attention des familles
chrétiennes et amies des bonnes mœurs.
Si le Progrès a réellement cœur de
défendre les intérêts du collège communal,
nous lui conseillons fort de ne plus rap
peler dans ce but le souvenir d'un jeune
interne, qui dans sa dernière maladie on
fit transporter ailleurs. Un silence absolu
de la part du confrère serait plus adroit,
puisqu'après tout, c'est l'unique moyen de
nous faire oublier, ainsi qu'à nos conci
toyens, cet incident déplorable.
mi Mao f i
S'il ne fallait s'en rapporter qu'aux men-
teries ridiculesdes meneursdu pseudo-libé
ralisme et des journaux qui leur servent
d'organes, les dix-sept années que passa
la Belgique sous le gouvernement impar
tial des unionistes seraient une époque
d'humiliation, d'esclavage, de ruine et de
déconsidération. Par contre, les gros bon
nets de la politique nouvelle, ces demi-dieux
descendus de l'Olympe pour renouveler
l'âge d'or sur la terre, auraient ouvert pour
nous une ère de prospérité, d'indépendance
et de gloire. Il n'est aucun de leurs actes
qui ne soit sage, juste, admirable, digne
d'éloges, digne de bénédictions; aussi, mal
heur au sceptique indiscret, au téméraire
VIVE DÉESSE.
clérical, qui se permettrait de contrôler
leurs faits et gestes; les apôtfes du parti
intelligent prétendent qu'on incline son
humble intelligence devant lasublimité de
leurs conceptions transcendantes. Comme
il advint aux Suisses du tempj de Gessler,
il ne restera sous peu au Belge façonné
de cette sorte, qu'à mettre çhapeau bas
devant le chaperon, fut-il orné de grelots,
de quelque despote libéral.
Entre-temps la politique nouvelle règne
et gouverne. En moins de quatre ans elle
a fait du chemin, elle a posé des actes im
portants. La politique unionisles'était mise
latètedu mouvement patriotiquede 1830;
elle en avait adopté l'esprit et les princi
pes; elle prétendait gouverner la nation
au nom de la nation toute entière, et non
pas au nom d'un parti, dans des vues de
parti; la politique unionisle-avait conso
lidé l'œuvre de 1830, en s'efforçant sans
relâche de concilier les esprits et les in
térêts divers; elle avait su gagner la con
fiance des Etats et des peuples européens
par son administration conservatrice et
modérée. M. Devaux, dont on ne récusera
pas ici le témoignage, déclarait cette
époque que le parti catholique avait fait
le salut de la Belgique de 1850 et du trône
constitutionnel.
Ce système ne pouvait convenir aux
orangistes, ennemis de nôtre indépen
dance, aux voltairiens, acharnés contre
rinfâme, aux radicaux que la folie des
bouleversements possède. Le souffle dé
chaîné des passions anti-religieuse, anti
constitutionnelles, anti-monarchiques sou
leva, tel qu'une trombe orageuse, le flot
mouvant, impressionnable des électeurs,
et les comices de 1847 amenèrent MM.
Rogier et Frère sur ce banc ministériel où
depuis tantôt qualreansilssecramponnent
en désespérés. Du 12 août 1847 date l'avè
nement des cabinets de parti; les journaux
libéralistes ne démentiront pas cette asser-
tion fondée sur leurs tendances avouées.
Depuis lors, l'antagonisme, les luttes de
parti se virent érigés en système, et l'art
de gouverner se réduisit au metier de
chef-de-file d'un parti le langage des
feuilles libéralistes, notamment dans la
dernière crise ministérielle, le démontre
l'évidence. Aussi conçoit-on tout d'abord
que la confiance acquise près des autres
États par dix-sept ans de modération et de
sagesse, dût singulièrement s'altérer, alors
qu'on vit les libéralistes maitres du pou
voir proclamer l'avènement d'une politique
nouvellequ'on vit le ministère bouleverser
lesdiverses branches d'administration, des
tituer une foule de fonctionnaires connus
par leurs talents et leur patriotisme; am
bassadeurs, gouverneurs, généraux, com
missaires d'arrondissement; alors qu'en
face des progrès du socialisme et de la
démagogie, ou vit la charité tracassée,
l'enseignement religieux (par conséquent
conservateur) en but au mauvais vouloir
du parti ministériel et tandis que les gou
vernements voisins faisaient un retour vers
les doctrines catholiques, nos ministres
pousser le char de l'État dans la voie con
traire. Aussi, nous le disons avec regret,
la Belgique devint-elle suspecte près des
cours les plus considérables de l'Europe;
elle acquit en revanche les sympathies
du gouvernement révolutionnaire de Pié
mont. Nos relations commerciales reçurent
de déplorables atteintes, et dans l'espace
de trois ans la situation financière du pays
s'empira de quarante millions Or, on sait
qu'au moment de la chute du système
unioniste, suivi depuis 1850, après neuf
ans de guerre, après avoir traversé des
crises nombreuses, tel qu'en 1840, en
1846, etc., le découvert du trésor ne mon
tait (C'est M. Veydt, ministre des finances
après M. Malou, qui le constate) qu'à peu
près vingt-huit millions. Entre-temps les
dépenses se succèdent et les travaux pro-
VÉRITÉ ET JUSTICE.
Ou s'abouue Yprès, rue de Lille, 10, près la Graude
Place, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume,
PRIT DE L'.tlIOlIRMEIT, par trlmestrr,
Ypres fr 3. Les autres localités fr 3-5o. TJn n® aS.
I.e Propagateur parait le SAMEDI et le MERCREDI
de abaque semaine. InnertlonM 1* centime* la ligne).
(Suite.)
Dépêchez-vous de profiter de l'occasion, monsieur Marcel,
dit la comtesse haute voix, et puisque vous aimez Étiennette,
demandez-la en mariage sa mère je vous sers de témoin et
je vous sers de caution.
Marcelinterdit par cette apostrophe, ne trouva pas un mot
répoudre; il rougit, tourna, retourna son chapeau entre ses
mains, et regarda M°" de Pavy d'un air suppliant comme
pour lui dire
Comment voulez-vous qu'à moi seulje me tire de là?
Mère Guiraud, reprit la comtesse, M. Marcel est venu
vous faire ses adieux; il nous quitte pour peu de temps, je
l'espère; mais, en voyageur prudent, il veut mettre ordre ses
affaires dans le pays... Or, oe garçon-là aime votre fille depuis
un temps iufiuiet il vous demande la permission de le dire
Étiennette, devant vous, devant moi...
Dam! interrompit la bonne femme, je ne vois pas qu'il
y ait du mal ça... Cependant, Étiennette n'a pas dix-sept ans,
et si elle consent se marier, je trouve, moi, que o'est se ma
rier bien jeune.
Je pars demain matin, se hâta de dire Marcel, et ce
mariage ne pourra se faire qu'à mon retour, ce n'est donc
qu'un consentement, une parole, ou, même moins, un espoir
que je désire emporter.
Madame Guiraud n'y tenait pluselle ouvrit la porte de la
chambre d'Étienuetteet vit sa fille agenouillée au pied de
son lit.
Étiennette avait entendu tout ce qui s'était dit et, dans sa
joyeuse ivresse, elle s'était tournée vers le Seigneur pour le
remercier. Lorsqu'elle vit sa mère, elle s'élança dans ses bras,
lui ferma la bouche de sa main potelée, et lui glissa tout bas,
bien bas, l'oreille
Chère maman, que je suis heureuse! moi aussi, je l'aime,
je l'aime depuis si longtemps!
Et tu me l'as pu cacher! murmura madame Guiraud en
baisant les doits posés sur ses lèvres.
Je ne le savais pas moi-même je ne le sais que d'au
jourd'hui.
Viens donc alorson t'attend.
Oh jamais je n'oserai jamais.
Tu feras de la peine madame la comtesse.
Elle si bonne qu'elle me pardonnera.
Ouimais oe pauvre Marcelle laissera-tu partir
Tu lui dira que ce n'est ni un consentementni une
parole, ni un espoir que je lui donne emporter, mais le ser
ment de l'aimer toujours.
Eh bien! eh bien! fit la comtesse en entrant dans la
chambre, aurons-nous des secrets jusqu'à demain? Viens
donc toucher la main de M. Marcel, Etiennette, tu sais bien
qu'il nous quitte.
Et, sans céder la faible résistance de sa protégée, madame
de Pavy l'entraîna.
Mademoiselle, dit le voyageur avec assez d'assurance je
suis venu vous saluer, je suis venu confier madame votre
mère un secret que je tenais caché au plus profond de mon
coeur, ce secret vous sera dévoilé en mon absence, afin que
vous puissiez prouoncer en toute liberté sur mon avenir;
qu'aucun scrupule nu vous arrête, ne faites pas de concessions
votre bonté, l'intérêt que je pourrais vous inspirer si cette
bonté vous suppliait eu ma faveur. Ce que vous dira votre
mère de mes sentimens pour vous, je le confirme d'avance
par serment, et vous savez que je ne sais ni mentir ni tromper.
Adieu, mademoiselle, soyez, tant que je ne vous verrai pas,
ce que vous avez été sous mes yeux cfiarmés, toujours modeste
comme les fleurs de nos prairies, toujours pieuse comme les
anges du ciel, et chacun vous aimera non pas plus que moi,
mais autant que vous le méritez.
Étiennette tendit la main Marcelet lui dit d'une voix
émue
Merci de vos conseilsmonsieur Marcelje les suivrai
j'enteudrai toujours la voix qui me les aura donnés, et votre
nom sera répété dans toates mes prières... ne m oubliez pas...
le plus plaindre de nous deux n'est pas celui qui voyage.
C'est donc bien entendu et convenu, mes euf.ius, dit la
comtesse, vous êtes fiancés dès ce jour l'un l'autre. I.tien-
nette est riche; vous, Marcel, n'ayez aucun souci, je me charge
de votre fortune... Allons, touchez-vous la main encore uue