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JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
3589.
Samedi, 21 Février 1852.
35me année.
LIBREECHANGE
PROTECTION DOUANIÈRE.
Lors de l'avènement au pouvoir du parti
qui se dit libéral, le nouveau ministère
proclama hautement qu'il en fallait finir
au plus vile avec le système rétrograde
de la protection douanière. Les feuilles
ministérielles applaudirent avec fracas,
et l'inauguration du free-trade ou libre-
échange parut toute faite.
Le libre-échange, on le sait, prétend que
l'industrie abandonnée ses propres for
ces, exposée la concurrence de l'industrie
étrangère, doit nécessairement puiser dans
la lutte un stimulant actif, un puissant
aiguillon, qui le contraigne sous peine de
périr, de déployer toutes ses ressources.
Les partisans de ce système ajoutent que
la libre importation des produits exotiques,
en faisant baisser le prix des fabricats et
des denrées alimentaires, a pour consé
quence de les mettre la disposition des
classes les moins fortunées. Produire beau
coup et bon marchételle est la devise de
celle école.
Les protectionnistes, au contraire, sou
tiennent que le free-trade est un -système
de dupes; en ce sens, que si deux nations
viennent l'établir entre elles, la plus in
dustrieuse doi l y gagner considérablement,
puisque de nouveaux débouchés s'ouvrent
dès lors ses produits manufacturés ou
agricoles; par contre, celle dont l'industrie
n'a pas acquis les mêmes développements,
court grand risque de voir d'une part ses
fabricants succomber sous l'effort d'une
concurrence insoutenable, réduits qu'ils
seraient au chômage et la banqueroute;
de l'autre, ses agriculteurs ne retirer de
leurs travaux et de l'élève du bétail qu'une
rémunération trop insuffisante pour ac
quitter leur fermage et pour se procurer
les objets les plus essentiels leur bien-
être ou leur profession. Ainsi, disent-
ils, le libre-échange appliqué l'agriculture
a tué notre prospérité agricole; en permet
tant la libre importation du blé russe, il
a complètement avili la valeur de notre
propre froment; en accordant la même
faveur au bétail hollandais, il a radicale
ment târi une source féconde de richesses
pour le pays, l'élève du bétail. Le libre-
échange appliqué l'industrie manufactu
rière aurait des résultats également dé
plorables; engagés dans une lutte inégale
contre les produits simillaires de l'Angle
terre, nos industriels devraient pour la
plupart succomber, et bientôt les marchés
belges regorgeraient de fabricats exoti
ques. Mais, ajoutent les partisans de la
protection douanière, la ruine partielle ou
totale des producteurs ne s'arrêterait pas,
on le conçoit, eux seuls; si les manufac
turiers chôment, des milliers de familles
pauvres n'ont plus de pain; s'ils font fail
lite, un grand nombre de créanciers en
pâlissent: si le fermier se trouve réduit
un étal de gêne ou de misère, la classe
ouvrière des campagnes n'a plus rien
attendre de lui, ni travail, ni gages; tandis
que la profession agricole en devenant
moins lucrative enlève la propriété fon
cière une grande partie de sa valeur et
fait baisser avec les baux le revenu du
propriétaire. Ainsi, ruine tous les dégrés
de l'échelle sociale; ruine pour l'ouvrier;
ruine pour le producteur; ruine pour le
capitaliste? Qu'adviendra-t-il cependant
de l'industrie étrangère, maîtresse de tous
nos marchés? Apr èsavoiréchangéquelques
temps ses produits contre nos capitaux,
stériles désormais puisqu'ils ne produiront
plus rien; elle restreindra successivement
ses importations, de moins en moins re
cherchées mesure que le pays deviendra
plus pauvre. Enfin, elle cessera totalement
ses transactions commerciales avec nous,
quand nous n'aurons plus d'or lui offrir
en échange. Délivrés alors de celte con
currence ruineuse, nos manufactures pour
ront se rouvrir, nos fermiers pourront se
remettre ensemencer leurs champs et
élever des bestiaux. Mais où trouver des
capitaux dans un pays dont toutes les res
sources sont taries; où trouver des capi
taux pour fertiliser le sol, pour construire
des manufactures, pour exploiter les ri
chesses minérales du pays? L'Irlande
est là qui peut nous apprendre ce qu'il
sera alors advenu de notre riche Belgique!
L'irlaude si fertile et pourtant si inculte;
l'Irlande vouée au paupérisme et qui fut
si opulenle Tels sont quelques-uns des
arguments dont se servent les protection
nistes; ils ont pour maxime, que le pot de
terre doit éviter le contact du pot de fer.
Nous nous proposons d'examiner pro
chainement la politique commerciale du
cabinet, que les lignes précédentes sont
destinées éclaircir.
VÉRITÉ ET JUSTICE.
On s'abonne Yprès, rue de Lille, io, près la G^nde
Place, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRI1 UE L'.IROIIIIMIRNT, par trimestre,
Ypres fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. tJu n° a5 c.
I,e Propagateur paraît le I9AMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine. (Insertions II centimes la ligne.)
7?^3S, 21 Février.
ET
Un journal rninislériel annonce que de nouvelles
relations diplomatiques vont être nouées entre la
Belgique et la Russie; il va jusqu'à nommer la di
plomate russe qui nous serait envoyé; ce serait
M. Alexandre Slrogonoff. Nous savons que des
bruits de ce genre sont très-répandus depuis quel
ques jours dans notre capitale. Les deux cours
semblent plus rapprochées que jamais, et déjà l'on
parle du prochain envoi d'un de nos compatriotes
émirients Saint-Pétersbourg. Les puissances du
Nord sont très-décidées maintenir la nationalité
belge sur les bases qu'elles ont garanties en 185 r et
1839. Journal de Bruxelles.)
TTj-o-a-o. --
L'anecdote suivante, qui circule dans les salons
de Bruxelles, nous est garantie parnn témoin occu-
laire. Au dernier bal de la cour, le Roi avait pris
part M. Bacharacht, consul général de Russie, et
s'entretenait avec lui. L'entretien se prolongeant,
M. Rogier sentit sa curiosité piquée et s'approcha
familièrement du Roi et de M. Bacharacht, pour se
mêler la conversation. Comme il ne convenait pas
S. M. de se déplacer pour aller causer ailleurs avec
l'interlocuteur qu'elle s'était choisi, elle continua
l'entretien en langue allemande qne M. le Ministre
n'entend pas. Au bout de quelques minutes celui-ci
comprit combien sa position était fausse pour ne
pas dire plus, et regagna sa place aussi savant qu'il
l'avait quittée. Cette leçon, si pleine de délicatesse
et de bon goût, profitera-t-elle qui elle a été
donnée? Espérons-le. Du reste, comme le Roi
parle huit ou neuf langues, il trouvera toujours
moyen de dérouter des indiscrets plus instruits que
M. le Ministre de l'intérieur. Idem
La section centrale du budget de la justice s'est
réunie avant-hier, de midi 2 heures, sons la pré
sidence de M. Delebave. Elle a adopté tous les
chiffres du budget sons la réserve des explications
fournir par M. le Ministre. Sur la proposition
d'un de ses membres, elle a émis l'unanimité le
vœu qu'une loi abrégeant les formalité du déguer-
pisseraent soit présentée sans retard et que la loi
relative au domicile de secours soit révisée. Elle a
demandé également que le personnel et les trai
tements.des fonctionnaires publics soient fixés d'a
près les arrêtés organiques. Ces arrêtés ne sont
aucunement observés, pas plus dans le département
de la justice que dans les autres. La section
centrale était composée de MM. Coomans, Deliége,
Thibaut, LelièvreMoreau et Orts. Ce dernier a
nommé rapporteur.
On lit dans l'Indépendance
Nous apprenons par notre correspondance
particulière de Berlin que le t8 février, deux
heures, a été signée, entre le président do conseil,
Ministre des affaires étrangères de Prusse, baron de
Manlenffel et M. Nothomb, envoyé extraordinaire
et ministre plénipotentiaire de Belgique, la con
ventionnelle, qui, sous certaines conditions, main
tient jusqu'au 1er janvier i854, le traité du 1"
septembre 1844 eutre la Belgique et le Zollvereim
EXAMEN DES ÉLÈVES UNIVERSITAIRES.
Les trois époques de l'histoire universelle dé
signées par le sort pour l'examen d'élève nniver-