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JOURNAL D'TFRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
No 3603.
Samedi, 10 Avril 1S52.
35me année.
7PB.3S, 10 Avril.
LES THÉORIES ET L'EXPÉRIENCE
DANS LE GOUVERNEMENT.
Depuis que les politiques de l'école de
Rousseau ont réussi soumettre les peù-
ples l'épreuve de leurs théories frivoles
ou coupables, on a vu s'élever de toute
part des institutions politiques telles qu'il
n'en avait jamais existé jusqu'alors. Nos bà-
cieurs de constitutions, imbus qu'ils étaient
d'idées matérialistes, avaientprissottement
les peuples pour des machines, et croyaient
que toute la science gouvernementale se
résumait dans la pondération mathémati
quement calculée des divers pouvoirs (Te
l'Etat. Aussi, ni le génie propre de chaque
peuple en particulier, ni ses besoins mo
raux ou matériels, ni ses instincts, ni son
caractère, ni les traditions de son passé
n'entraient pour rien dans le moule uni
forme d'où le libéralisme doctrinaire pré
tendait faire éclore des nations toutes
d'une pièce. Tenir compte de ces vétilles
lui eut paru par trop rétrograde!
Cependant l'histoire de ces derniers
temps a prouvé l'évidence l'inanité de
ces conceptions. Personne n'ignore, en ef
fet, comment elles ont péri misérablement
en Autriche, en Prusse, Rome, Naples,
en Toscane, en France même; et quel
prix d'autres pays, tels que la Sardaigne
et la Suisse continuent momentanément
d'en jouir. Ce qui leur manque, ce qui les
condamne périr, c'est l'abjuration, érigée
en principe fondamental, de toutecroyance
positive; puisque leur point de départ n'est
autre que le libre examen principe direct
du scepticisme. Interrogez l'histoire, cet
ïmplacable témoin de l'incorruptible vé
rité. Explorez, en remontant le cours des
siècles, les bases antiques où les nations
de tous les âges ont bâti leur puissance.
Et partout, partout vous trouverez des
croyances, sinon irréprochables tout
égard, au moins vivaces et agissantes.
Et d'abord, si l'on examine les insti
tutions politiques des trois grandes mo
narchies prépondérantes dans la haute
antiquité, les Égyptiens, les Chaldéens
d'Assyrie et les Médo-Persans, on y^ren-
contre au sommet de l'école sociale la
caste des prêtres; preuve non-équivoque
de la haute considération dont la religion
jouissait au sein de ces grands corps de
nations. Ajoutons que les tendances de ces
peuples confondre avec les dogmes de
la religion les découvertes de la science et
les spéculations de la philosophie déno
tent des instincts religieux profondément
enracinés quoique sans doute peu sages.
Ce fut sous l'empire de ces institutions
que s'élevèrent ces formidables Etals de
l'antique Orient. Mais les prêtres, que leur
religion imparfaite ne mettait pas au-des
sus des passions humaines, visant con
solider leurs prérogatives par des voies
machiavéliques, abrutirent systématique
ment ou tout au moins laissèrent s'abrutir
les masses en ne leur enseignant qu'un
culte matérialiste où le symbole se substi
tuait au dogme. De là la dégradation mo
rale de ces peuples, avant-coureur de leur
dégradation politique.
Dans des temps plus rapprochés, on re
marque également cette dernière coïnci
dence chez les deux peuples fameux de la
Grèce et de Rome. Il faut toutefois ob
server que le caractère distinclif de celui-
ci, c'était l'amour de la patrie; de celui-là,
l'amour de son indépendance. Ce double
instinct, source de leur grandeur, résista
quelque temps aux ravages de l'immora
lité, mais lorsqu'enfin la corruption des
mœurs eut rapetissé la religion elle-même
la déification des passions, ici le joug
des Poliorcète et des Nabis s'appesantit
ignominieusement sur les fils dégénérés
d'Athènes et de Sparte; là durant un laps
de temps de trois siècles presque continus,
les aigles romaines traînèrent dans la fange
la suite de Néron, des Commode, des Hé-
liogabale, des Callien, et le nom romain
s'entacha sous les yeux de l'étranger d'une
honte indélébile.
Mais passons rapidement l'histoire
moderne. Personne n'ignore que le fana
tisme religieux fut l'unique source de la
puissance mahométane; et que celle-ci a
commencé décheoir mesure que celle-
là a décliné. Tout le monde conviendra
également que les nations de l'Europe
chrétienne ont puisé dans le christianisme
toutes leurs forces vitales, et que partout
l'envahissement du scepticisme religieux
a donné le signal du relâchement des liens
politiques et sociaux. Développer ici celte
double proposition, après que les témoins
les moins suspects l'ont établie, serait
chose au moins fastidieuse.
Concluons donc en empruntant un
écrivain aussi profond que courageux des
paroles qui confirment notre manière de
voir et auraient pu nous servird'épigraphe.
Elles sont extraites de l'admirable Essai
sur les partis en Belgique qu'a publié ré
cemment M. le baron deCerlache, pre
mier président de la Cour de cassation et
ancien président du Congrès national.
S'il est un axiome trivial en politique,
et de notre temps bien oublié, c'est qu'un
Etat qui a perdu ses mœurs.est incapable
d'une vraie liberté, et que la chute des
croyances entraîne toujours la chûte des
mœurs. C'est un fait aussi ancien que la
société, une loi du monde moral aussi né
cessaire que les lois du monde physique.
L'bistoire n'offre pas une seule exception
cette règle. Et pourtant, que nous en
seigne-t-on aujourd'hui? Que l'Etat doit
s'occuper uniquement de satisfaire aux be
soins matériels des peuples, d'augmenter
autant que possible la somme de leurs
jouissances et de leurs richesses; que le
reste le regarde peu. Si l'on cherche
propager l'instruction sous toutes les for
mes, c'est que la science est un puissant
moyen d'influence pour le gouvernement,
et de bien-être pour les particuliers. Quant
la fin morale de l'homme, on ne s'en in
quiète guère. On se fie cet égard la
raison de chacun. Nous vivons sous le ré
gime du libre examenMais le régime du
libre examen, eu religion, c'est l'hérésie,
c'est l'anéantissement de toute croyance;
en politique, c'est la division, c'est l'anar
chie, c'est la mort des peuples.
Monsieur Peene, noire concitoyen, ex-élève
du Collège Sl-Vincent de Paul, vient dêtre
proclamé candidat en droit, par le Jury com
biné Gand-Louvain.
On écrit d'Heestert, près de Courtrai
Dans la nuit du 2 au 5 courant, un acte de
brigandage des plus audacieux a été com
mis dans cette localité la ferme occupée
par Pierre Castelein. Des voleurs, après
avoir pratiqué, l'aide d'un contre-fer de
charrue, deux ouvertures dans un mur de
la chambre coucher de la mère Castelein,
s'y sont introduits. Le fils de la maison,
éveillé par le bruit qu'il entendait pendant
qu'on était occupé forcer un coffre, sau
te de son lit, mais peine à-t-il franchi le
seuil de la porte de la chambre coucher
de sa mère, que l'un des malfaiteurs le
saisit lagorge. Au même instant, un autre
de ces brigands, lui assène sur la tête,
l'aide d'un instrument contondant et tran
chant, un coup si terrible qu'il le jette
la renverse. Le fils Castelein conserve en
core toute sa présence d'esprit, et il en
traîne avec lui celui qui cherchait l'étran
gler. Aux cris poussés par le voleur, son
complice ne cesse de frapper le courageux
Castelein, qui ne lâche prise qu'épuisé de
forces. Les assaillants le laissent pour mort,
gisant dans son sang. Pendant que ceci
se passe, la femme et les enfants accourent
au secours, et les malfaiteurs gagnent la
clé des champs par la porte d'entrée, qu'ils
avaient eu soin d'ouvrir, après avoir passé
par le trou pratiqué dans la muraille.
On s'empressa d'eveiller les voisins, qui
ne tardèrent d'arriversur leslieux du crime.
Mais toutes les recherches furent vaines:
on ne put atteindre les brigands. Il paraît
qu'ils ont enlevé environ 600 francs en es
pèce. L'état du blessé est très-alarmani.
La justice fait les plus actives recherches,
et tout fait espérer qu'un pareil forfait ne
restera pas impuni.
Si nous sommes bien informés, les
conférences commerciales qui se tiennent
Paris, pour arriver au renouvellement
VÉRITÉ ET JUSTICE.
On s'ahoune Yprès, rue de Lille, 10, près la Graude
Place, et chez.les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIX DE L'ABONNEMENTpar trimestre,
res fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. Uti n° 25 c.
Le Propagateur païaît le SAVIRDI et le IIRRCREDI
de chaque semaine. Innertlona 19 centimes la ligne.)
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